WELCOME HOME

JOUR 1

J'étais de nouveau seul. Célibataire. Devant ma sœur cadette, j'avais vœux de célibat. Ma vie sentimentale était une véritable hécatombe. Wade était parti, préférant une vie de famille à celle que je pouvais lui offrir. Il avait choisi sa fille au lieu de moi et je ne pouvais pas lui en vouloir. Il m'avait quitté pour retourner aux États-Unis et je me retrouvais une nouvelle fois seul, le cœur souffrant à nouveau d'un amour fort mais impossible. Pour la troisième fois consécutive, je m'étais fais rejeté et je ne m'imaginais pas tout recommencé une fois de plus. J'en avais marre. Marre des rencontres et des hommes ne sachant pas se décider. J'avais donc fait vœux de célibat. Me libérant ainsi de toutes ces obligations et de ces contraintes. C'était une nouvelle forme de liberté que je venais d'acquérir et j'étais plutôt heureux de la tournure de ma vie sentimentale. Plus besoin de se prendre la tête, plus besoin d'être à l'affut de chaque geste. Je pouvais enfin respirer et me laisser aller dans des occupations en solitaire. La course à pied, le jogging. C'était parfait. Pas besoin d'un partenaire pour se vider la tête et courir. J'étais seul et je le vivais bien. Il n'y aurait plus que moi et mon chat, Pepsy. Ainsi que Justin.

Justin Fabre, un jeune homme que j'avais trouvé dans la rue vêtu de ses vêtements de luxe. L'incompréhension s'était d'abord lu sur mon visage mais, finalement, après quelques discussions et ma soudaine situation, une idée m'était venu en tête. Je lui offrais un toit avec plaisir et mon canapé pour la nuit s'il le désirait. Nous avions longuement parlé avant que le jeune Fabre se décide enfin à accepter ma proposition. Je ne demandais rien en échange. Ma solitude amoureuse serait comblé par un colocataire. « Bienvenue chez toi ! » Lui dis-je alors que je venais à peine d'ouvrir la porte de mon appartement pour le faire entrer. Ce n'était pas le plus beau de tous mais il avait toute son utilité : Un salon/salle à manger donnant sur une cuisine américaine, ma chambre s'ouvrant sur une salle de bain toute équipé, un bureau/dressing, des toilettes et le meilleur un balcon terrasse sur lequel je prenais le plus souvent mes repas l'été. C'était mon appartement. Assez grand pour deux personnes vivant sous le même toit, sachant que je ne serais présent qu'une demi-journée à cause de mon travail à l'hôpital. « Vas-y, entre. Fais comme chez toi. » J'attrapais ses affaires, les posais dans l'entrée avant d'attraper Justin par les épaules pour le diriger vers le salon. « Voilà, le salon et ta chambre. » L'informais-je avec un grand sourire tandis que Pepsy, mon chat, montrait enfin le bout de son nez et miaulait en se glissant entre nos jambes. « Et ça c'est Pepsy, le dernier habitant de l'appartement. Et j'crois qu'il t'aime bien car il ne se frotte pas à tout le monde comme ça. » Je riais légèrement, attrapant cette boule de poils pour le présenter officiellement à notre nouveau locataire. Puis je le laissais à nouveau vaquer à ces occupations. Celui-là faisait sa vie et lorsque l'envie lui prenait, il venait contre moi. « Heu, qu'est-ce que je pourrais encore te dire... » Je réfléchissais en passant une main dans mes cheveux. « Ah oui, les toilettes sont sur ta gauche et la salle de bain est dans ma chambre donc si t'as besoin d'y aller, n'hésites pas à entrer. T'es chez toi maintenant ! »

WELCOME HOME

JOUR 1

C'était gênant. Je venais enfin de trouver le mot correct. Gênant, mêlant un sentiment de honte déplacée. Le problème venait en réalité de moi, j'étais un Fabre après tout. Et qui dit Fabre, dit fierté et égo assez grand. Alors forcément, lorsqu'on fait la manche, on essaie de ne pas se faire reconnaître sur les trottoirs de Paris. Enfin, je demeurais pour sûr le premier mendiant de la famille. Mendiant, SDF (aka Sans Domicile Fixe) et j'en passe. J'étais à la rue. Depuis maintenant près d'un an. J'avais arrêté de compter les jours, préférant justement prendre la vie comme elle venait. Parfois, je squattais chez des gens et quand je le pouvais, j'essayais de voler. Que ce soit de la nourriture ou encore une pièce trouvée par terre. Dire non, refuser une offre demeurait à présent interdit. Et pourtant, il y avait toujours cet entêtement qui rôdait. Cet entêtement à dire non. Non, je ne veux pas de ton aide. Non, je ne veux pas de ton toit. Non, non et encore non.

Cependant, il y avait Cassandre. Cassandre Lefèvre. Et dans la matière, il faisait un parfait rival. Il faisait partie des rares passants qui avaient un cœur à Paris. Et au lieu de m'éviter, ou d'essayer de ne pas croiser mon regard, il s'était simplement arrêté, étonné de mon accoutrement. Aha. C'est vrai. Un mendiant normal aurait porté des vêtements sales, déchirés et même indescriptibles d'ailleurs. Moi, j'avais gardé un ensemble venant de chez Papa et Maman que je portais maintenant depuis plus de deux semaines. Des vêtements de luxe pour un pauvre. Pas crédible. Mais je mets tout de même un point pour l'originalité. Je regarde Cassandre et on commence à discuter. Plusieurs fois. Jusqu'à ce qu'il m'offre une place dans son appartement et qu'inconsciemment, je dise oui.

« Bienvenue chez toi ! » Je souriais nerveusement face à cette annonce. Je savais pertinemment que je n'avais pas de chez moi. Et que je paraissais comme un vulgaire profiteur à mes yeux. Je profitais de l’hospitalité de quelqu'un pour m'installer chez lui, sur le canapé. « Vas-y, entre. Fais comme chez toi. » Non, je ne pouvais décidément pas faire comme chez moi. D'ailleurs, je n'avais jamais eu de chez moi. J'avais juste habité les dix-huit premières années de ma vie chez mes parents qui m'avaient offert une demeure luxueuse, dans un confort en or. Accompagné par des règles strictes, étouffantes. « Voilà, le salon et ta chambre. Et ça c'est Pepsy, le dernier habitant de l'appartement. Et j'crois qu'il t'aime bien car il ne se frotte pas à tout le monde comme ça. » Oh ! Un chat. C'était bien la première fois qu'un animal de compagnie s'approche aussi près de moi, hormis les chiens surexcités qui griffaient les jambes. Et ce chat, Pepsy, semblait plutôt affectif, aimant certaines tendresses. Timidement, j'adressai un « Bonjour, toi. » tout en m'abaissant afin de lui faire une simple caresse. « Heu, qu'est-ce que je pourrais encore te dire... Ah oui, les toilettes sont sur ta gauche et la salle de bain est dans ma chambre donc si t'as besoin d'y aller, n'hésites pas à entrer. T'es chez toi maintenant ! » Je m'avançais quelque peu pour tourner la tête et contempler l'environnement et la décoration. Et je me rendais compte que cette vue détruisait mon cliché de l'appartement sale, sordide et petit. Quand on vit dans une immense demeure, on a pas la même vision des choses, on est habitué à des choses plus ... habituelles pour nous. Et comme un malfrat, je manquai de politesse. « Merci ... merci ... b-b-beaucoup ... » Je béguai face à autant d'hospitalité. C'était complètement fou. « J'te promets que je me ferai petit. Que ... fin, comme si .. comme si je ne serai pas là ... » Attendez, le mec a un sublime appartement pour lui tout seul, il a obtenu son petit confort personnel et avoir une personne en plus pouvait s'avérer être dérangeant.« Par contre ... j'ai rien ... j'vais e-e-essayer de trouver ... un job. Eumh ... » Depuis des semaines et des semaines, que j'étais à la rue, je m'étais jamais rendu compte de la puanteur qui émanait de mes vêtements. Quelle horreur ! Maintenant que j'avais évolué et que j'avais un toit, tout me frappait en plein visage. « Ca t'dérange si j'prends une douche ? Ou ... si tu veux en prendre une, vas-y hein. » Cependant, il restait néanmoins un soucis que je me devais de résoudre, dans la limite du possible. « J'abuse de toi ... mais ... t'aurais ... des ... des .. fringues ? »

Inviter Justin n'était anodin. Ce n'était pas non plus de la pitié que je ressentais à son égard. J'avais juste eu envie de l'aider à sortir de la rue et j'avais accepté de l'inviter chez moi car rester seul (même si j'avais fais vœux de célibat) était une décision difficile. Avoir un colocataire, une personne qui avait besoin d'un toit était une solution pour nous deux. Il aurait un toit et je ne serais pas seul. L'équité était respectée et chacun trouvait son compte. Qui plus est, nous nous entendions bien et la conversation n'avait jamais manqué jusque là. Cette colocation légèrement improvisée était sans nulle doute la meilleure décision que j'avais prise depuis que j'étais de nouveau célibataire. Cela devait certainement se lire sur mon visage car j'étais heureux de pouvoir accueillir le jeune Fabre chez moi même je savais bel et bien qu'il me cachait beaucoup de chose à son sujet. Je ne l'avais jamais questionné sur son passé, ni sur comment il était devenu SDF. Je lui faisais confiance. Je n'avais pas besoin d'en savoir plus pour le moment. « Merci... merci... b-b-beaucoup... J'te promets que je me ferai petit. Que... fin, comme si... comme si je ne serai pas là... » Je souriais. Ses paroles m'amusaient plus qu'autre chose alors que lui devait se demander pourquoi j'agissais ainsi avec lui. « Tu sais, tu peux te faire grand. Sinon, je n'aurais pas pris la peine de te proposer de venir ici. T'es chez toi, alors fais comme si t'étais chez toi. Et il y a bien assez de place pour nous deux alors ne te gêne pas. »

Je ne cesserais surement pas de lui répéter mais je voulais qu'il soit comme chez lui et le fait qu'il veuille se faire tout petit me prouver encore une fois que je pouvais lui faire confiance. Justin était différent. Je ne savais pas pourquoi, ni comment mais je le sentais. L'instinct, pourrait-on dire... « Par contre... j'ai rien... j'vais e-e-essayer de trouver... un job. Eumh... » Je soupirais. Je ne lui avais rien demander en retour et il cherchait pourtant à se justifier d'être ici en trouvant une solution comme paiement. C'était ce que je supposais. Mais je n'étais pas comme ça. Si je lui avais proposé mon aide, ce n'était pas pour qu'il se bouge car j'étais sûr qu'il cherchait déjà et si je pouvais lui être d'une utilité, je le ferais. « Tu sais, je t'ai rien demandé. Alors pas besoin de te presser. Profites déjà de tout ça et on verra plus tard. Je ne suis pas un tyran. Tout ce que je souhaite c'est que tu foutes pas le bordel. C'est tout. Le reste, ça me dérange pas. » Je lui souris, lui donnant une tape sur l'épaule alors que je m'avançais vers la grande baie vitrée pour regarder Paris d'ici. « Ca t'dérange si j'prends une douche ? Ou... si tu veux en prendre une, vas-y hein. » Je me retournais pour l'observer. C'est vrai qu'il en aurait bien besoin d'une. Je m'avançais donc vers lui. « Suis-moi. » Je marchais en direction de ma chambre. J'ouvris la porte et je laissais entrer Justin. « J'abuse de toi... mais... t'aurais... des... des... fringues ? » Je n'y avais pas non plus pensé. Les fringues. « Si j'en ai, t'inquiètes pas pour ça. Ça sera peut-être un peu grand pour toi mais ça ira pour la soirée. » Je m'avançais vers une commode d'où je sortis un caleçon, des chaussettes, un survêtement et un tee-shirt. Je les portais jusqu'à la salle de bain qui n'était qu'à quelques pas de là. « Donc voici la salle de bain. T'as douche ou baignoire à toi de voir ce que tu préfères. J'te pose les vêtement là et je te laisse te laver. » Je commençais à repartir lorsque une idée (qui aurait dû me venir plus tôt à l'esprit) me traversa. Je m'appuyais donc contre l'encadrure de la porte. « Si tu veux, je peux mettre tes vêtements dans la machine à laver. Quant tu te seras déshabillé, tu n'auras qu'à les passer par la porte et je les prendrais pour les mettre. Sur ce, je te laisse. Bonne douche ! » Un dernier sourire et je sortis, fermant la porte derrière moi. Je m'installais sur mon canapé, allumant la télévision pour regarder un programme quelconque en attendant mon nouveau colocataire.

S i j'en ai, t'inquiètes pas pour ça. Ça sera peut-être un peu grand pour toi mais ça ira pour la soirée. » Cassandre était un type bien. Maintenant, j'en étais persuadé. Il voulait simplement faire du bien ; il semblait seul et avait besoin de compagnie. J'avais besoin d'un toit (et aussi, accessoirement de compagnie, parce que vivre seul, ce n'était pas vraiment confortable) et donc, c'était une sorte d'échange de bons procédés. J'étais là pour lui ; il était là pour moi. Peut-être c'est ce qu'il voulait ? Mais je m'entêtais. Et pourtant, il le répétait bien assez. Il souhaitait une personne bien vivante, pas un fantôme. Alors, je ferai ainsi. Du moins, j'essaierai, tentant de pousser aussi ma fierté de côté. S'il souhaitait un colocataire, alors je pourrai l'être. Un fabuleux colocataire. Du moins, un colocataire dans les normes du terme. « Donc voici la salle de bain. T'as douche ou baignoire à toi de voir ce que tu préfères. J'te pose les vêtement là et je te laisse te laver. » Dans la demeure de mes parents, j'avais eu le droit à une immense baignoire où je m'offrait à l'époque des bains moussants. J'y plongeais pendant une bonne heure. Un des meilleurs temps de la journée était celui du bain. Cependant, avec Cassandre, je ferais un effort. Une exception. Ce serait la douche. Histoire de se laver vite, de ne pas perdre de temps. Pas de gaspillage et même si j'étais « chez moi », je m'obligeais à ne pas faire d’excès. De toutes manières, je pense que les bains de longue durée faisaient maintenant partie du passé. J'entre dans la pièce avant de fermer la porte. J'ôtais alors mon haut lorsque j'entendis mon sauveur ajouter quelque chose : « Si tu veux, je peux mettre tes vêtements dans la machine à laver. Quant tu te seras déshabillé, tu n'auras qu'à les passer par la porte et je les prendrais pour les mettre. Sur ce, je te laisse. Bonne douche ! »

Pas faux. Je me dépêchai alors à enlever les quelques vêtements à l'odeur nauséabondes qui se trouvaient encore sur moi. M'extirpant enfin de mon sous-vêtement, j'ouvris assez peu la porte afin d'y glisser les vêtements dans l’entrebâillement. Au moins, j'aurai des vêtements propres pour dans quelques jours. Mais jusqu'à ça, je devrai me contenter du prêt qui n'était pas si mal que ça après tout. Pénétrant dans la douche, je tournais enfin la poignée pour avoir mon temps de détente. L'eau commençait alors à se fracasser sur les parcelles de mon corps, recouvrant le tout pour hydrater ma peau. Je m'emparai alors du gel douche avec lequel je me frottai de partout. Je ne devais rien oublier. J'avais assez vécu longtemps dans la crasse pour qu'elle s'incruste de partout. Maintenant, elle devait disparaitre. Et après vingt bonnes minutes, j'arrêtai le jet d'eau avant d'attraper une serviette que j'enroulai autour de mon torse. J'enfilai ensuite les vêtements que m'avait prêté Cassandre. Et d'un œil assuré, je fixai la commode. Mauvaises manières d'un bourge. Je grinçai des temps. Ça se fait pas. Cependant, je suis "chez moi" après tout ? Ne pouvant résister, je m'emparai du flacon de parfum pour m'en asperger dans le cou. Sortant de la salle de bain, je me dirigeai donc dans le salon et m'adressa alors à Cassandre dans un soupir de soulagement : « Aaaaaah. Ça fait du bien ! »

Le soleil venait à peine de se lever sur la capital. Il était 7 heures peut-être même un peu plus tôt en ce matin d'été. Je devais prendre ma garde à l'hôpital à 8 heures. Derrière la porte de ma chambre, je n'entendais aucun bruit. Justin devait encore dormir. Je me levais donc, nu, comme à mon habitude et je me dirigeais vers la salle de bain et plus précisément le miroir au-dessus du lavabo. Je me contemplais un instant, repensant à cette dernière semaine qui venait de s'écouler. Cela faisait maintenant huit jours que le jeune Fabre habitait chez moi et tout se passait merveilleusement bien. Nous avions bien pris le rythme et il était un hôte, un colocataire exemplaire. Je n'avais rien à lui redire si ce n'est que Pepsy le préférait à moi désormais. Notre colocation se passait bien et je lui avais même donné d'anciens vêtements que je ne mettais plus. Ainsi il pouvait dire adieu aux linges sales et avoir une nouvelle tenue lorsque cela lui chantait.

J'attrapais ma tondeuse d'une main et l'allumait. Je me rasais légèrement la barbe car j'appréciais en garder. J'aimais l'effet barbe de trois jours. Je recommençais mes gardes de jours. Je devais donc être présentable. Ce n'était pas comme de nuit où les seuls patients que l'on rencontrait aux urgences étaient saoules et condamné à m'oublier le jour suivant. La journée était bien plus fatigante et exténuante. Il fallait que je me remette dans le rythme. Je filais alors sous la douche, profitant du jet d'eau chaude sur ma peau pour me réveiller complètement et détendre mes muscles pour que ma garde se déroule dans les meilleurs conditions. J'attrapais le gel douche, laissant couler le liquide dans le creux de ma main. J'allais alors reposer l’étui sur le rebord lorsque Justin pénétra dans la salle de bain et me surprit. « Putain, Justin ! » Je laissais tomber le gel douche. « Qu'est-ce que tu fous là ?! » Je cachais mon entre-jambe avec mes mains pour finalement me retourner. Je me calmais, reprenant mes esprits et me disant que ce n'était pas non plus la fin du monde qu'il soit entré alors que j'étais dans la douche. « Tu voulais quelque chose, peut-être ? » Lui demandais-je finalement alors que je lui offrais une vue sur mes fesses sans le vouloir. Je n'étais pas forcément pudique. Mais j'avais tout de même quelques principes. La nudité n'était que pour les personnes avec qui je pouvais être intimes.

Les rayons de soleils transpercèrent la fenêtre pour venir se blottir sur mes joues et mon nez. Chatouilleux et sensibles, ils avaient réussi à éveiller mes paupières. Cela faisait une semaine. Une semaine que j'étais logé chez Cassandre. Mon sauveur. Je m'étais trompé au début et j'avais bien fait finalement d'accepter. L'appartement de Cassandre demeurait un vrai petit coin de paradis. Certes, pittoresque mais qui contenant absolument tout le nécessaire à mes besoins. Cependant, j'avais toujours cette impression d'exploiter. De profiter. Et de ne rien faire en retour. De ne pas me démener pour sortir de toute cette merde. Réellement, je savais que ce n'était pas le cas. Je ne m'acquittais pas des tâches ménagères, au contraire. J'étais au bon fonctionnement de l'appartement dès que je le pouvais. Mais mes journées restaient singulièrement sauvages.Si Pepsy ne réclamait pas mes genoux ou caresses, alors je prenais le double des clefs de l'appartement pour aller faire un petit tour dans Paris. Je visitai quelques endroits, allai voir des gens. Mon moral s'était à peu près rétabli maintenant que je n'avais plus honte de m'afficher en public dans des vêtements propres et une tenue tout à fait présentable.

Aujourd'hui, ce serait ballade dans l'un des nombreux arrondissements encre inconnus à mes yeux. Je ne sais pas encore lequel. Peut-être le deux, ou alors le onzième arrondissement. Tellement d’endroits et de lieux à visiter. Ou je prendrais mon ton sérieux à rester la journée accoudé à la table pour chercher un travail des plus démotivants. Je m'étirai les bras avant d'émettre un bâillement digne d'un ogre et de m'extirper de la couverture. Le soucis, quand on est assez jeunes, c'est que le matin, il arrivait parfois que l’entrejambe était la partie la plus réveillée du corps. Tant pis, cela ne me dérangeait pas plus que ça, le temps que Cassandre ne me voyait pas dans cet état. D'ailleurs, il devait sûrement dormir. Traversant le salon en caleçon, j'arrivai alors à la porte de la salle de bain que je poussai violemment pour faire face à un spectacle assez surprenant. Mes yeux s'écarquillèrent lorsque pendant une seconde, je scrutai l'entrejambe de mon hôte qui semblait visiblement entrain de se doucher.
« Putain, Justin ! Qu'est-ce que tu fous là ?! » Merde ! Poussant une multitude de juron intérieurement, je ne pouvais lâcher qu'un
« Merde. »
« Tu voulais quelque chose, peut-être ? » J'étais beaucoup trop obnubilé par la vue de ses fesses bien fermes et bien musclées, pour me concentrer sur ce qu'il disait. Cassandre était bien un Dieu. Dans tous les sens du terme. Sans faire exprès, je prononçai un mince :
« Fuck. » avant de cligner plusieurs fois des yeux pour savoir ce que j'allais dire. Inventer probablement une excuse bidon. Comme je savais si bien le faire.
« Je .. beh ... j'voulais prendre une douche. Mais ... j'vais ... attendre. » Immobile, j'étais comme paralysé, ne pouvant nullement faire quelque chose. J'étais là, penaud, hypnotisé par cette vue prenante. Et finalement, au bout de quelques instants, je réussis à m'extirper de cette transe.
« J-j-j'ai ... rendez-vous avez ... mon ancienne petite-amie ... elle ... elle va ... me présenter ... son amie ... qui risque d'être fortement ... ma future ... future ... Elle est canon. »

Prendre une douche devenait maintenant difficile. Justin avait pénétré dans l'enceinte même de la salle de bain alors que j'étais nu, sous le jet de la douche. Surpris, je ne pus retenir le gel douche de mes mains qui tomba sur mon pied. Je retenus un léger cri de douleur tandis que je cachais mon intimité avec mes deux mains avant de me retourner. La seule personne actuelle qui avait la chance de me voir dans cette tenue était mon chat. Aujourd'hui, je devrais faire plus attention avec la présence du jeune Fabre. Dos à lui, je ne pouvais savoir ce qu'il faisait ni ce qu'il regardait. « Fuck. » Je ramassais le gel douche, en versant à nouveau dans la paume de ma main pour me laver. Il fallait bien que je me lave sinon je serais en retard au boulot. « Je...beh...j'voulais prendre une douche. Mais...j'vais...attendre. » J'osais un regard vers Justin qui semblait aussi déconcerté et gêné que moi alors qu'il m'avait découvert dans mon plus simple appareil. Sans le vouloir mon regard dévia vers son caleçon. Je me retournais presque instantanément en constatant la bosse que j'avais perçu à ce niveau. Je ne devais rien m'imaginer. Il était tôt, c'était la matin. Et tout le monde savait ce qu'il se produisait chez les hommes le matin. C'était naturel et pourtant, cette vue me gêna plus qu'autre chose.

Je me badigeonnais alors le corps avec ce gel douche, laissant le liquide moussé sur chaque parcelle de ma peau. Je frottais et frottais encore pour oublier la présence de mon colocataire à seulement quelques mètres de là. Puis je me nettoyais. L'eau coulait sur ma peau, emportant avec elle toute cette mousse que je faisais également glisser avec mes mains. « J-j-j'ai...rendez-vous avez...mon ancienne petite-amie... Elle...elle va...me présenter...son amie...qui risque d'être fortement...ma future...future ... Elle est canon. » J'arrêtais le jet d'eau, regardant ensuite Justin qui était toujours présent. « Bah écoutes, tant mieux pour toi. Tu vois, t'as bien fait de venir vivre ici. Toi qui ne voulait pas au début... » Terminais-je sur une pointe d'humour. J'ouvris alors la cabine de douche, cachant toujours mon entre-jambe. Je tentais d'attraper ma serviette que j'avais déposé à côté et que je n'arrivais pourtant pas à prendre en main dans cette position. Je soupirais. Tant pis. Les deux mains sur mon intimité, je sortis de la douche. Sourire gêné sur le visage, joues légèrement rouges. Je m'avançais vers la serviette que j'enroulais ensuite rapidement autour de ma taille. J'étais d'un seul coup beaucoup plus décontracte. Je respirais à nouveau même. « La douche est entièrement à ta disposition. Tu vas pouvoir te faire beau pour ta future dulcinée. Vu qu'elle est si canon et que tu n'es pas trop mal non plus. Ça devrait bien se passer. » J'avais un humour assez spécial le matin mais la situation précédente m'avait quelque peu déboussolé. Je tentais de combler les blancs pour éviter que tout ne soit encore plus gênant. Le silence était parfois pesant alors j'essayais qu'il n'y en ait pas entre nous. C'était le mieux. « Et elle s'appelle comment ? » Je me dirigeais vers le lavabo, laissant la place à Justin. Je passais à ses côtés, effleurant son bras involontairement.

Mentir, c'est mal. LE mal par définition pour moi. Je prônais l'honnêteté et la sincérité. Et pourtant, depuis que j'étais à la rue, j'avais oublié quelque peu mes valeurs pour user davantage de cet outil que je détestais. Mais devant la nudité et la parfaite beauté de Cassandre, j'en étais contraint à utiliser cette justification bidon et complètement fausse. Je n'avais en réalité rencontre mon ex-fiancée que deux fois et le contact n'était guère passé, la fille n'étant qu'une jeune femme maladroite et simplette. Malgré moi, je restai là, immobile, à fixer mon hôte qui sortit de la douche avant de se dépêcher à s'emparer d'une serviette qu'il enroula rapidement autour de sa taille. « Bah écoutes, tant mieux pour toi. Tu vois, t'as bien fait de venir vivre ici. Toi qui ne voulait pas au début... » Je ne fis aucun commentaire bien que j'approuvais totalement ses paroles, j'avais eu tort de refuser au début. Cependant, je m'en étais pas mal sorti en acceptant à la fin et en découvrant tout ce beau monde. Cassandre. Pepsy et leur appartement convivial. « La douche est entièrement à ta disposition. Tu vas pouvoir te faire beau pour ta future dulcinée. Vu qu'elle est si canon et que tu n'es pas trop mal non plus. Ça devrait bien se passer. » Souriant nerveusement, je me déplaçai -de pas beaucoup- afin de lui laisser un plus grand espace -bien qu'encore mince-, buvant totalement ses paroles. Je relevai le commentaire "tu n'es pas trop mal non plus". C'était une perche, un signe. Secouant légèrement la tête, je tentai de me convaincre. Conneries. C'était juste un compliment, dit dans le vent. Cassandre semblait sûrement hétérosexuel. Et devait collectionner une tonne de filles par mois. Seulement depuis une semaine, à cause de ma présence, il avait du stopper ses escapades et ses folies nocturnes en compagnie de belles demoiselles. « Et elle s'appelle comment ? » J'ai failli répondre instantanément Cassandra. Et heureusement, je me suis retenu. Je ne devais faire aucune erreur, aucun dérapage ou sinon ce serait la porte. Il devait être aussi un de ces mecs qui quand on lui fait du rentre-dedans vous donne un coup de poing dans la figure pour vous remettre dans le droit chemin. Timidement, j’énonçai le nom de l'inventée :« Lena. » Quel prénom débile mais c'était celui de la meilleure amie de mon premier amour. Aka celui de la fille que je n'ai jamais pu supporter au collège puis ensuite au lycée. Je ne savais pas comment je faisais mais je m'étais toujours retrouvé dans la même classe que Lena Desfores. Et dans le genre petite peste, elle remportait le premier prix du stéréotype.

Un contact des bras. Un effleurement. Et voilà que mon intimité se releva brusquement, encore plus fort. Gêné, je me retourna de sorte à ce que je sois de dos à Cassandre. Il fallait que je sorte de sa vue et instinctivement, je baissai mon caleçon pour l'ôter avant d'accourir dans la douche. Me mettant dans la même position que mon hôte, j'allumai à mon tour l'eau qui se mit alors à frapper mes épaules, ma chevelure et mon torse, offrant alors une scène assez sensuelle. M'obligeant à penser à autre chose, je décidai soudainement de penser au travail : « Et sinon toi, tu vas à l'hôpital travailler ? Tu veux que je fasse quelque chose pour toi ? Une course ou un truc du genre ? » Par la même occasion, cela allait peut-être occuper ma journée aussi.

Avoir un colocataire était différent de ce que j'avais pu imaginer et entendre surtout. La plupart regrettait. Pour le moment, ce n'était pas mon cas et Justin savait y faire pour ne pas me décevoir. Certes, il me surprenait mais, au moins, je ne pouvais pas dire que l'ennui comblait mes heures à l'appartement. Ce matin encore, cette situation nous ferait plus rire une fois la gêne disparue. Pour le moment, elle était toujours présente et j'en rigolerais probablement plus une fois que je ne serais plus nu sous ma serviette. « Lena. » Me répondit-il. Elle s'appelait donc Lena. Je levais les yeux au ciel pour finalement secouer légèrement la tête, un peu comme une approbation de ma part même si je n'avais rien à lui dire sur ces faits et gestes.

Je me dégageais alors de la douche, laissant la place au jeune Fabre pour qu'il puisse lui aussi se laver et quitter l'appartement pour rejoindre cette fameuse Lena. Sans le vouloir, j'effleurais alors son bras. Continuant mon chemin, je me stoppais à nouveau face au lavabo. Lui tournant le dos, je n'osais le regarder jusqu'à ce que mes yeux se posent sur le miroir et que je puisse l'observer faire par le reflet de ce dernier. Justin retira son caleçon, et honteux, mon regard se posa sur ses fesses. Je le regardais se précipiter vers la douche et un léger sourire se dessina sur mon visage alors que je baissais mes yeux bleus sur mes mains. Je jetais un dernier coup d’œil dans sa direction et sa question stoppa mon esprit de dériver vers des idées plus intimes. « Et sinon toi, tu vas à l'hôpital travailler ? Tu veux que je fasse quelque chose pour toi ? Une course ou un truc du genre ? » J'attrapais une deuxième serviette pour me sécher, la première étant déjà utilisé pour cacher mes parties intimes. « Je...oui, c'est ça. Ma garde commence à 8 heure. Donc dans moins d'une heure, je crois. Je sais même pas l'heure qu'il est. » Je retournais dans ma chambre, me séchant au passage. « Bon ça va. Il me reste encore 45 minutes. J'ai le temps pour un p'tit-dej'. » L'informais-je en revenant dans la salle de bain. Je déposais ma serviette sur le radiateur et je quittais pour de bon la pièce pour ne plus y revenir avant un long moment. Laissant la porte entre-ouverte, je continuais de discuter avec Justin. « Pour ce qui est des courses... Je crois pas qu'il y ait besoin de quelque chose. J'en sais rien, en fait. Au pire tu regardes et tu peux te prendre quelque chose que t'aime qu'on mangera au dîner. » En effet, maintenant qu'il vivait avec moi. Il pouvait se permettre d'acheter ce qu'il aimait. Je ne lui en voudrais pas. Je n'étais absolument pas difficile lorsqu'il était question de nourriture et de repas. « A moins que tu ne sois trop pris avec ta future dulcinée. Dans ce cas, je dînerais en tête-à-tête avec Pepsy. » Ajoutais-je pour le taquiner. Je sortis alors un boxer que j'enfilais rapidement après avoir fait tombé mon autre serviette et je m'habillais tout simplement d'un jean, d'un tee-shirt et d'un sweat, vu qu'il faudrait que je me change à nouveau à l'hôpital pour enfiler mon uniforme. Je me glissais une dernière fois dans la salle de bain, ne posant pas mon regard sur Justin. Je fonçais tout droit, déposant ma seconde serviette à sa place. « Je nous fais le petit-déjeuner et je te laisse tranquille ici. » Je m'éclipsais de la salle de bain.

Quinze jours. Quinze jours que j'étais maintenant arrivé dans la petite famille de Cassandre. Petite famille semblait être le mot approprié. Il y avait Cassandre, le bel hôte qui m'hébergeait et son chat Pepsy tellement attachant que mignon. Et moi, maintenant, le paumé Justin Fabre, nouveau membre de cette petite famille sympathique. Cependant, même si cette place était maintenant obtenue, mon moi intérieur me soufflait que je méritais pas vraiment cette place. Que je n'étais toujours qu'un simple profiteur qui bouffait la gentillesse de Cassandre à pleines dents. Que j'étais un vil menteur, un p'tit con, ou peu importe après tout. Je ne méritais pas Cassandre et ma conscience ne cessait de me répéter ces douloureuses tortures ancrées en moi. Je me souvenais encore d'avant-hier où Cassandre avait sa garde de jour. J'en avais profité pour rester toute la journée sur le canapé ... avec de la cocaïne fraichement achetée. Bien que je voulais m'en séparer, j'en avais inconsciemment besoin. De cette drogue. Comme d'une multitude de drogues. Accro ? Peut-être bien oui. Mais je me l'avouerai pas. Hors de question. La drogue, c'était comme une cigarette, du tabac, c'était pour se détendre. Oui, voilà, se détendre. Certes, par un moyen pas vraiment orthodoxe. Mais qui marchait au moins, au contraire des merdes médicinales.

Et aujourd'hui, j'avais passé mon après-midi à comater sur le canapé devant des émissions télévisées plus débiles les unes que les autres. Au moins, cette merde qu'était Secret Story avait enfin disparu de la grille télévisée pour enfin laisser place à ce truc de mariées. Complètement bidon. Pourquoi Diable TF1 et les autres chaines s'amusent à créer des programmes aussi ... dénué d’intérêt les uns que les autres ? Et j'avais posé ce sachet de cocaïne sur la table basse. Je devais résister, je me forçais à résister à cela. Et finalement, résister semblait une torture. Et pitoyable, je me cachais derrière la plus ridicule excuse que j'avais : celle de la citation d'Oscar Wilde. Pour résister à une tentation, il fallait y céder. Sniffant, je lâchai enfin un soupir de soulagement. Cependant, Cassandre reviendrait bientôt de l'hôpital et je me devais de cacher cette merde. Ni plus, ni moins, je la mis dans la poche arrière de mon pantalon. Bientôt huit heures du soir, je préparerai à manger. Ou du moins, je ferai cuire une pizza surgelée achetée quelques jours plus tôt. Certes, c'était pas très sain pour le corps, ça faisait grossir. Mais parfois, il y avait des soirées où on avait pas envie de se prendre la tête à faire quelque chose d'élaboré. Mettant la pizza au four, j'entrepris d'aller dans la salle de bain, histoire de prendre une douche et de paraître clean lorsqu'il reviendra. Pendant trente-minutes, je restai assis dans la douche, laissant l'eau se déverser sur mon visage, sur mon corps, tentant de m'éveiller. J'arrêtai le jet d'eau et je m'emparai d'une serviette que j'enroulai autour de mon torse. Et merde ! La pizza ! Me donnant une tape sur la tête, j’accourrai au salon où je vis la porte par laquelle Cassandre venait à l'instant de pénétrer. « Hey Cass ! T'as passé une bonne journée ? » Retournant ma tête pour faire face au four, je tenais fermement ma serviette tout en pressant le pas pour tourner le thermostat et tout éteindre. Gêné, je prononçai : « Je nous ai fait une pizza. Ça te convient, j'espère. »

La journée était longue. Une garde de 12 heures n'était pas là le problème mais plutôt le comportement de certains patients. En effet, le tiers d'entre eux était irritant, énervant voire carrément insupportables. J'en entendais tous les jours. J'avais des « ça fait des heures que j'attends », des « pourquoi il passe devant nous ? » ou encore des « si ça continue, je m'casse de là ». Et comme toujours, nous ne disions rien. Enfin, ils ne disaient rien car moi, cela faisait bien longtemps que je n'étais plus à l'accueil des urgences. J'étais bien mieux avec mes patients lorsque je les prenais enfin en charge. Même si la plupart se plaignait encore de l'attente dans nos services (en même temps venir pour un rhume ou un simple mal de gorge nous faisait perdre notre temps mais, ça, personne ne le comprenait encore). Je faisais mon travail comme je le pouvais, avec les moyens que j'avais et surtout avec attention. C'était primordial pour un hôpital comme la Pitié.

Je marchais donc dans les rues du 13ème arrondissement, pensant déjà à la soirée détente que j'allais passer chez moi. Je n'avais aucune idée de ce qu'avait prévu Justin. Je savais simplement qu'après une garde de 12 heures, j'étais complètement vanné, crevé, incapable de faire quoi que se soit pour le restant de la soirée. Rentrant d'un pas rapide dans mon appartement, je fus surpris de voir mon colocataire en serviette dans la cuisine. Je restais un instant sans bouger et sans voix avant de refermer la porte à clef derrière moi. « Hey Cass ! T'as passé une bonne journée ? » Je déposais mes affaires dans l'entrée pour venir m'accouder au bar délimitant la cuisine du salon. J'observais le jeune Fabre éteindre le four dans sa tenue décontracte. « Je nous ai fait une pizza. Ça te convient, j'espère. » Je souris. « C'est une pizza ? Ok, t'as bien fait de me prévenir. » Lui répondis-je avec un certain ton ironique. Je le taquinais et j'avais pris l'habitude de le faire depuis quinze jours. « Ca me va très bien. » Lui répondis-je franchement. « Je sors les bières. » Je m'avançais alors dans la cuisine ouvrant le réfrigérateur pour en sortir deux Heineken pour débuter notre soirée.

« Et putain, cette journée a été longue. J'en peux plus. » Je piétinais en direction du canapé dans lequel je m'affalais. Je posais nos bières que je décapsulais avant de retirer mes chaussures que je balançais vers l'entrée. Je n'avais qu'une envie me mettre à l'aise. « Je reviens. » C'est ainsi que je me levais du canapé pour me rendre dans ma chambre. Je me déshabillais, changeant mon jean pour mon pantalon de pyjama et mon tee-shirt pour un simple débardeur noir. Je retournais d'un pas lent vers la salon pour reprendre la place que j'avais pris dans mon canapé quelques minutes plus tôt. « C'est beaucoup mieux comme ça. » Je bus une gorgée de ma bière. « Et toi alors, t'as fait quoi de ta journée ? T'es sortis aujourd'hui ? » Lui demandais-je alors que je le regardais toujours, lui et sa serviette qu'il tenait fermement autour de sa taille. Mon ventre gargouilla. La faim réclamait son dû et cette pizza viendrait l'assouvir.

C 'est une pizza ? Ok, t'as bien fait de me prévenir. » Je ne sais pas si ce n'était qu'avec moi, ou si j'avais reçu le privilège mais Cassandre avait l'habitude d'employer ce petit ton ironique seulement pour me taquiner. En quinze jours, j'en avais reçu des remarques semblables à celles ci. Je sais que c'est pas méchant, juste pour l'amusement. Mais les débuts avaient été difficiles à accepter. N'ayant pas l'habitude avec cette forme de plaisanterie, je poussais une grimace les premiers jours de notre colocation. Et aujourd'hui, je lui lançai un simple sourire amusé. Maintenant, je savais m'y faire. « Ca me va très bien. Je sors les bières. » Ce serait donc bières et pizza. Pas mal comme soirée. Et bien évidemment, sur le canapé devant la télévision. Sortant la pizza encore chaude du four, je m'empressai maladroitement de la placer dans une grande assiette. Déposant un doigt là où il ne fallait pas, je me mis à pousser un juron instinctivement. Putain ! Ça brule ce bordel. Je soufflais à plusieurs reprises sur mes doigts avant de m’interrompre pour retenir ma serviette qui s'apprêtait à tomber sur le sol.

« Et putain, cette journée a été longue. J'en peux plus. » Je le comprenais. Ou du moins, j'essayai de le comprendre. Être à l’hôpital avec tous ces malades, ces urgences et autre. Ce devait être l'enfer. Courir partout. Il devait y avoir masse de travail. Et encore cette appellation n'était qu'un vulgaire euphémisme. Pour être infirmier, il fallait du courage et heureusement des personnes en possédaient, comme ce cher Cassandre. J'avais assez honte ; pendant que je m'étais prélassé sur le canapé, lui s'occupait de sauver des vies. « Je reviens. » Il partit sûrement pour se changer. J'en profitai alors pour amener la pizza sur la table basse, accompagné d'un digne couteau. Je m'installai au côté de Cassandre, sorti il y a quelques secondes de sa chambre, vêtu d'un vêtement simple, léger et confortable pour cette nuit. « C'est beaucoup mieux comme ça. » Je hochai la tête pour acquiescer et m'emparai de ma bière pour en boire une gorgée. « Et toi alors, t'as fait quoi de ta journée ? T'es sortis aujourd'hui ? » Non absolument pas. Je suis resté sur le canapé, les pieds en éventail à me droguer à la cocaïne avec le pauvre Pepsy qui me regardait dans mon agonie, ça, ce sont mes journées. Je répondis le plus détendu possible : « Rien de spécial. J'suis resté sur le canapé à regarder les émissions débiles de la télévisions avec Pespy dans les pattes. J'avais rendez-vous avec Lena pour une virée en amoureux ... mais elle était indisponible. Motif : Virée Shopping avec les filles. » Levant un doigt en l'air, je fis signe que je partais m'absenter quelques petites secondes pour me vêtir d'une tenue plus conforme. Ainsi, je m’enfuyais en direction de la salle de bain où je ne tardai pas à me vêtir d'un bon vieux pyjama que me prêtait mon colocataire. Entendant le gargouillement qui émanait du ventre de mon colocataire, je ricanai avant d'ajouter à son encontre : « Allez ! Dépêche-toi de manger et fissa au lit après. T'es crevé et tu tiens plus debout et je paris que la couette et ton oreillers sont en train de t’appeler pour que tu te blottisses avec eux. »

Avoir Justin comme colocataire m'était bénéfique. Depuis quinze jours qu'il était là, je me sentais mieux dans ma solitude. Après tous ces échecs sentimentaux et mon célibat, il était arrivé au bon moment pour me redonner une grande bouffée d'air frais. Et il m'en donnait tous les jours. C'est ainsi que je survivais face à l'inévitable conclusion que je m'étais faite il y a peu : Personne ne voudrait de moi en tant que petit-copain. En effet, tous me fuyaient. L'un avait préféré partir en guerre, l'autre avait tout bonnement préféré aller voir ailleurs et le dernier avait quitté la France pour les États-Unis, son pays natal. J'étais maudit. Il fallait bien l'avouer. Mais encore une fois, le jeune Fabre vivait maintenant avec moi et sa présence était un véritablement soulagement pour ma conscience. Ma solitude était ainsi rangée au placard et, en aucun cas, je ne regrettais de lui avoir proposer mon toit et mon canapé.

Je voulais qu'il se sente chez lui comme je me sentais chez moi. Pepsy l'avait déjà accepté et moi aussi alors autant qu'il en profite pour ne plus penser à la rue et tous ces problèmes. Désormais, son passé de SDF était loin et plus jamais il n'y retournerais s'il décidait de rester. « Rien de spécial. J'suis resté sur le canapé à regarder les émissions débiles de la télévisions avec Pepsy dans les pattes. J'avais rendez-vous avec Lena pour une virée en amoureux...mais elle était indisponible. Motif : Virée Shopping avec les filles. » Le pauvre. Je le regardais. Il n'avait pas l'air trop désemparé. Tant mieux, après ce n'était qu'une virée entre filles. Cependant, je n'eus pas le temps de la rassurer à ce sujet qu'il s'éclipsa dans ma chambre, puis dans la salle de bain puisque le seul passage possible était par là. J'avais presque finis par oublier sa serviette mais lorsqu'il se leva du canapé, le souvenir de cette unique protection me revint rapidement à l'esprit. Je l'ai suivi du regard jusqu'à ce qu'il entre dans ma chambre. Je bus une nouvelle gorgée de ma bière alors que Pepsy venait enfin me saluer. Il sauta sur le canapé, me rejoignant. Lui, c'était probablement mon plus fidèle ami. Je le caressais, l'entendant ronronnait à chacune de mes caresses sur ses poils noirs. Mon ventre gargouilla à nouveau et je ne pus m'empêcher de bailler alors que Justin revenait en rigoler face à tout ce que je lui montrais ce soir. « Allez ! Dépêche-toi de manger et fissa au lit après. T'es crevé et tu tiens plus debout et je paris que la couette et ton oreillers sont en train de t’appeler pour que tu te blottisses avec eux. » Je lui souris, l'observant de la tête au pied dans son pyjama. « J'ai plus besoin de compagnie que de sommeil, à vrai dire. Mais je ne vais pas me faire prier pour manger rapidement cette pizza. Je meurs de faim. Et ça tu l'avais surement remarqué. J'arrête pas de gargouiller depuis que je suis arrivé. » J'attrapais Pepsy pour le déposer à mes pieds. Il ne comprenait surement pas ce qu'il lui arrivait mais la faim avait pris le pas sur les caresses.

Je coupais alors la pizza en quatre pour en prendre une part dans la foulée. Je croquais à pleine dent dans la pâte et je me régalais déjà. « Finalement, elle est pas si mal que ça cette pizza. » Repris-je en direction de Justin, vu le juron qu'il avait lancé et la précipitation dont il avait fait preuve pour la sortir du four, j'aurais pensé qu'elle aurait beaucoup plus cramé qu'elle ne l'était. Je lui donnais un coup d'épaule, signe que j'aimais le taquiner et que je continuerais probablement encore longtemps. « Et t'inquiètes pas pour Lena. Vous trouverez d'autres moments pour n'être que tous les deux. En amoureux. Il faudra d'ailleurs que je la rencontre cette jeune femme. J'veux savoir à quoi elle ressemble, tu m'en parles tellement. D'accord ? » Lui demandais-je avec une certaine douceur.

J'ai plus besoin de compagnie que de sommeil, à vrai dire. Mais je ne vais pas me faire prier pour manger rapidement cette pizza. Je meurs de faim. Et ça tu l'avais surement remarqué. J'arrête pas de gargouiller depuis que je suis arrivé. » Sa réaction semblait tout à fait compréhensible et justifiée. Et normale ; lorsque vous faites des journées chargée, qui plus est à l'hôpital de la capitale, vous n'aviez qu'une envie, c'était de rentrer chez vous. Je ne savais même pas comment Cassandre pouvait endurer tout ça. Ce devait être dur. Être infirmier. Voir une centaine de patients, les soigner, en prendre d'autres en urgences. Enfin, tout dépendait du mot Urgence. Car certains prenaient leur maux de têtes pour une urgence alors que cela pouvait être soigné par du Doliprane. Compatissant, je le regardai attentivement couper la pizza en quatre pour en extirper un bout et le croquer à pleine dents. « Finalement, elle est pas si mal que ça cette pizza. » Sourire amusé, je sentis le coup de coude qui me donnai et en retour, puérilement je lui tirai la langue, malin et fier de mon coup. Je savais y faire avec la cuisine ; bien doser, comme il le fallait. Certes, j'avais vraiment eu peur ce coup-ci, et je ne voulais nullement qu'elle soit cramée. J'avais eu une de ces peurs et quel soulagement de voir qu'elle avait été épargnée, de peu même. A mon tour, je pris une part que je mordillai aussi, beaucoup plus calmement. Je n'avais pas spécialement faim et je devinai aussi que cette première part serait aussi la dernière de ce que mon appétit en voulait. Peut-être que Cassandre finirait l'assiette en avalant les deux autres bouts. Après tout, si j'avais cuit cette pizza, ce n'était pas réellement pour moi mais simplement pour lui. « Et t'inquiètes pas pour Lena. Vous trouverez d'autres moments pour n'être que tous les deux. En amoureux. Il faudra d'ailleurs que je la rencontre cette jeune femme. J'veux savoir à quoi elle ressemble, tu m'en parles tellement. D'accord ? » J’acquiesçai la tête en guise de réponse, toujours en train de manger mon morceau de pizza. Même si sérieusement, j'avais honte. Honte de mentir à lui. Mes journées, je me trimbalais seul dans Paris. Et il n'y avait jamais eu de Lena. C'était de la pure invention que j'avais du imaginer le jour où je l'avais surpris en pleine douche. J'avais dit ça parce que je ne voulais pas être perturbé.

Après tout, c'est vrai. Je suis hétérosexuel ; je n'ai aucune crainte à avoir avec ça. Cassandre, aussi, sûrement. D'ailleurs, j'osai enfin poser la question, ma curiosité m'incitant à le faire : « Et toi, t'as personne dans ta vie ? Même pas une petite infirmière qui te drague entre deux services ? Rien du tout ? J'y crois pas. On a toujours quelqu'un dans sa vie. Et bon, t'es pas mal dans ton genre. » Après tout, cela faisait bien quinze jours que je vivais avec Cassandre. Et il fallait bien qu'on connaisse mutuellement nos vies. Qu'on en apprenne plus sur chacun. D'où il venait, ce genre de choses. Parce qu'au final, c'est ce qu'on était : un parfait inconnu aux yeux de l'autre. Et pourtant, avoir un inconnu et ne connaitre rien de l'autre avait du bon.

Je dégustais ma pizza avec un certain plaisir. Dîner était la chose dont je rêvais depuis que j'avais quitté l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière. En effet, je n'avais eu que très peu de temps pour déjeuner et je n'avais avalé qu'un fruit accompagné de quelques biscuits. Dans la salle de repos, alors que je prenais ma pause du midi et que je buvais tranquillement mon café, le chef de service était venu chercher les soignants car un accident était survenu. Manque de chance, je n'avais pas terminé mon repas et je fus dans l'obligation de manger sur le chemin des urgences. Cependant, ici et maintenant, je pouvais dévorer cette pizza, manger à ma faim et boire cette bière avec un grand plaisir aux côtés de Justin qui ne semblait pas très réceptif à l'idée de dîner. Peut-être était-il trop tôt pour lui.

Il acquiesça d'un signe de tête lorsque je lui demandais s'il me présenterait un jour Lena. La fameuse Lena dont j'entendais l'éloge depuis quelques jours déjà. Je la connaissais presque aussi bien que le jeune Fabre. Il était donc inévitable que je mette un visage sur ce prénom. Je pris une nouvelle bouchée de la pizza. « Et toi, t'as personne dans ta vie ? Même pas une petite infirmière qui te drague entre deux services ? Rien du tout ? J'y crois pas. On a toujours quelqu'un dans sa vie. Et bon, t'es pas mal dans ton genre. » Je faillis m'étouffer. Je ne m'étais pas attendu à ce genre de question. Ma vie sentimentale n'était un secret pour personne. Mais le fait que Justin demande me surprenait. Il ne se doutait donc de rien. Pour lui, j'étais l'homme viril purement hétérosexuel flirtant avec la première infirmière que je trouvais et qui me résistait. C'était sans doute l'image qu'il se faisait de moi.

J'avalais alors le morceau qui faillit me tuer d'asphyxie. et je plantais mon regard dans celui de mon colocataire. Je restais un instant silencieux. Pas que j'étais gêné de lui répondre mais c'était difficile de tout avouer à un presque inconnu nos préférences sexuelles. « Non, personne. J'ai eu quelques déceptions et j'crois que j'ai besoin d'une pause. Être célibataire n'a pas que des inconvénients. Et t'es là donc je ne suis pas complètement seul une fois chez moi. » J'étais resté assez vague, ne révélant pas mon homosexualité à Justin. Je préférais y aller en douceur car je n'aurais pas aimé que son comportement vis-à-vis de moi change après mon annonce. C'était sans doute ce que j'appréhendais le plus à cet instant. « Et la petite infirmière n'aurait aucune chance... » Articulais-je difficilement. « Un infirmier aurait plus de chance. » J'attendais désormais sa réaction et je gobais le reste de ma part de pizza avant de boire une grande gorgée de ma bière et prendre un autre morceau du repas que Justin avait fais chauffé.

Je n'arrêtai pas de me retourner sous ma couette. On sentait bien que l'été avait fini de se propager sur Paris et que l'hiver, bien déterminé, avait pris des forces et avait donné un coup de pied pour que le soleil dégage. Ou du moins s'estompe. L’automne semblait malheureusement bien arrivé. Plus vite qu'on ne le croyait même. Et si j'avais pu faire mon fier il y a deux semaines en déclamant qu'une seule couette me suffisait, je regrettai déjà mon choix. En effet, la fraicheur s'était instauré dans l'appartement. Et mon fin pyjama ne suffisait pas à faire barrage. Cette saleté se glissait même sous la couette. Cependant, il n'y avait pas que la fraicheur qui m'embêtait. Mais aussi la déclaration de Cassandre il y avait quelques heures. Il était homosexuel. Ou du moins, c'est ce que j'avais bien cru comprendre lorsqu'il avait dit que l'infirmière n'avait aucune chance alors que l'infirmier si. Et sur le coup, même si j'avais té silencieux pendant quelques instants, j'avais finalement bien pris la nouvelle, en lui adressant un « C'est cool. Tu vois que c'est important qu'on en sache plus l'un sur l'autre. » Qu'il soit attiré par les garçons ne me dérangeait pas plus que ça, j’acceptai la différence de chacun. Et s'il trouvait l'amour avec un garçon alors c'était bien pour lui. Et en ce moment, il prônait le célibat à cause de nombreuses déceptions amoureuses. Arf, j'avais de la peine pour ce gars. Cassandre semblait vraiment quelqu'un de bien et je ne comprenais pas pourquoi on voulait lui faire du mal. Il méritait d'être heureux, vraiment. Après cette révélation, on finit la pizza à deux, lui en reprenant une part et moi la dernière. On buvait un coup, parlant de tout et de rien. Surtout de rien en fait. Enfin, plutôt de moi. Je lui avais révélé suite à cela mes quelques conquêtes amoureuses et mon ancienne fiancée. Et donc que je provenais en fait d'une famille bourgeoise de Paris assez stricte et c'était pourquoi j'avais préféré fuir, préférant me débrouiller tout seul. Et la soirée s'était finie ainsi, révélant alors à Cassandre que je préférai aller dormir maintenant.

Il devait déjà être minuit passé et la pièce semblait plongée dans la pénombre la plus complète. Je frissonnais et tremblait, essayant de me retourner pour avoir un brin de chaleur minimum. Et finalement, je n'arrivai à rien, grognant silencieusement, je m'extirpai du canapé. Et dire que Cassandre avait de grosses couettes chaudes. Cependant, je n'allai pas le déranger. Hors de question de le réveiller pour lui demander des couettes. Et pourtant, le sommeil était considéré comme sacré à mes yeux et si je n'avais pas ma nuit de sommeil alors je pourrai devenir vite grognon. Voilà maintenant que je faisais mon difficile alors que j'avais vécu pendant un an dans la rue. Marchant silencieusement jusqu'à la porte de la chambre de Cassandre, je remarquai qu'elle était entrouverte. Forcément, c'était fait exprès pour Pepsy. En effet, le chat faisait régulièrement des allers-retours dans la nuit pou grimer aux côtés de Cassandre ou aux miens lorsqu'il le voulait.

Je me surpris à marcher à travers la chambre. Et Cassandre devait dormir à poings fermés. Et avec envie, je remarqua les gros draps qui le couvraient. La chance. Peut-être qu'il serait d'accord à partager ? J'espérais que oui. J'avais besoin d'une chaleur et maintenant que je savais où en obtenir, délaisser serait assez dur. Et je me lançai alors, ouvrant pour me glisser sous la couette aux côtés d'un Cassandre totalement nu. Je buguai face à cette vision. Il ne portait aucun caleçon et voir ses fesses me troublait quelque peu. Mais pas de scènes obscènes, si j'étais venu c'était seulement pour me trouver un coin bien chaud. Et essayant de faire le moins de bruit possible, je m’engouffrai sous la couette.

La soirée s'était finalement bien déroulée. Après ma révélation sur mon homosexualité que j'avais annoncé d'une manière plus subtile qu'un simple "je suis gay". Je n'aimais pas les stéréotypes et j'espérais ne pas en être un. Non, je n'en étais pas un. Je n'avais les manières de certains et lorsqu'il fallait frapper ou montrer qui était l'homme, j'étais présent. Une preuve de plus, Justin pensait que j'étais hétéro alors que j'étais gay en réalité. Les apparences sont trompeuses et je suis bien content que personne ne sache à première vue ma préférence sexuelle. Je voulais être considéré comme monsieur tout le monde et c'était là la réaction que j'avais eu de la part de mon colocataire. Ce qui me soulagea énormément. Il n'était pas homophobe, à moins qu'il ne vienne m'étouffer cette nuit pendant que je dormirais paisiblement sous la couette. Et c'est d'ailleurs la direction que je pris après avoir bu ma bière et manger cette délicieuse pizza. Une fois dans ma chambre, j'allumais ma lampe de chevet et laissais la porte entre-ouverte pour Pepsy. Je retirais mon pantalon et mon débardeur et je m'allongeais nu dans mon lit pour passer une excellente nuit de sommeil.

Tout était si paisible. Le brise matinale venait effleurer mon visage. Je marchais en plein milieu d'un champ de blé au bout duquel un arbre - le plus grand que je n'ai jamais vu de ma vie - prônait. Je me prenais sa direction, désirant profiter de son feuillage pour me protéger des rayons du soleil. Je marchais, écoutant le champ des oiseaux. Finalement, j'arrivais à destination. Un lit majestueux m'attendait. Fatigué, je m'avançais à son pied et je commençais à me déshabiller pour me glisser sous la couette. Une apparition me réveilla. Un homme, nu, venait me rejoindre. Je le regardais, sourire aux lèvres. Observant chaque parcelle de son corps avec attention, je finis par reconnaître cette apparition. Justin. Il s'allongea à mes côtés. Je me tournais dans sa direction et je glissais une main sur sa hanche. « Justin... » Je me rapprochais dangereusement de lui et...

« Justin ?! » Hurlais-je dans la pénombre. Je me reculais brusquement, retirant cette main de sa hanche pour me lever d'un bond hors de mon lit. « Putain, c'est toi Justin ?! » Demandais-je une nouvelle fois alors que je m'offrais à lui dans la tenue la plus infime. J'étais nu. Sans protection. Devant lui. La nuit me protégeait légèrement mais je me retrouvais tout de même en tenue d'Adam devant le jeune Fabre. « Je...heu...tu fais quoi dans mon lit ? » J'attrapais un oreiller que je plaçais alors immédiatement sur mon entre-jambe. Il m'avait surpris. Me croyant dans un rêve, je m'étais laissé allé à quelques rapprochements car je savais que personne (et surtout pas Justin) aurait été au courant d'un fantasme que j'aurais pu avoir à son sujet. Désormais, ce n'était plus un secret et le manque de relations sexuelles s'en faisaient ressentir dans mes rêves qui devenaient de jour en jour plus érotiques.

Je soupirais et je décidais de me réallonger dans mon lit. Une fois la couette sur mon intimité, je replaçais mon oreiller derrière mon dos. Je n'allumais pas ma lampe de chevet, j'avais trop peur de voir le visage de mon colocataire face à ce geste que j'avais entrepris lorsqu'il s'était immiscé dans mon lit. J'avais honte. « Tu m'as fait peur, putain... » Lui révélais-je alors que je remontais la couette jusqu'à mes pectoraux. « J'espère que je ne t'ai pas trop fait peur non plus en hurlant comme ça. J'ai pas l'habitude d'avoir quelques dans mon lit comme ça. » Je tentais un sourire et je croisais mes bras sur mon torse alors que je faillis tomber du lit car je restais sur le bord de ce dernier. « Désolé... Pour tout ça... »

Mes yeux fermés, je sentis un contact agréable se glisser sur ma chambre. Contact accompagné d'une voix suave. « Justin... » Une voix qui ressemblait à celle de Cassandre. Je ne prononçais qu'un « Mmh... » sans même lever les yeux. J'étais beaucoup trop bien, placé à l'aise, sous cette chaleur enivrante qui s'emparait de mon corps. Il n'y avait pas à dire, la couette de Cassandre semblait faire aussi parti du paradis royal qu'il possédait. Quel chanceux. Souriant simplement face à ce contact, je me concentrai dans mon propre rêve. Un rêve où j'avais de l'argent, une immense demeure et où je faisais un doigt d'honneur à mes parents, leur stipulant bien que je n'avais nullement besoin d'eux et de leur argent et que maintenant, j'avais pu construire ma vie. Cependant, un tremblement de terre indésirable vint casser cette demeure. « Justin ?! Putain, c'est toi Justin ?! » Mes yeux s'ouvrirent instantanément face à ce hurlement qui avait percé le silence nocturne ainsi que mes oreilles frêles. Tournant brusquement la tête tout en sursautant, je fis face à Cassandre dans son plus simple appareil. Et mes yeux ne s'attardaient pas sur les siens mais bien sur son entrejambe à l'air. Une vue qui provoqua instantanément une érection qui déforma ensuite mon boxer. J'espérais juste qu'il ne fasse pas attention à ce détail gênant ; chose possible vu que Cassandre fut occupé à cacher son entrejambe grâce à son coussin. « Je...heu...tu fais quoi dans mon lit ? » Erf, c'est vrai. Tout ne devait pas se passer comme ça. De ce que j'avais prévu au moins. J'avais juste penser pouvoir m'extirper du lit avant le réveil de Cassandre et faire comme si rien ne s'était passé mais là j'étais grillé.

Heureusement, la pièce était toujours plongée dans la pénombre et aucun de nous deux pouvaient se voir distinctement. Après tout Cassandre n'avait pas eu à allumer la lampe de cheveu, bien trop pudique de montrer son intimité. Ce dernier se recoucha alors, remplaçant la couette par dessus lui et déposant alors sa tête sur son coussin à nouveau. « Tu m'as fait peur, putain... J'espère que je ne t'ai pas trop fait peur non plus en hurlant comme ça. J'ai pas l'habitude d'avoir quelques dans mon lit comme ça. Désolé... Pour tout ça... » Me grattant la tête, j'étais beaucoup trop gêné face à cette déclaration. Cassandre était un véritable ange ; beaucoup trop gentil et se rendant coupable de chose dont i n'était que la victime au final. Penaud, je prononçai alors timidement : « Non, non, c'est moi qui est désolé. » Je soupirai, me mettant alors à me reculer pour finir près du bord du lit et essayant de laisser le plus de place à Cassandre. « Je ...j'avais trop froid. Et lorsque j'ai vu l'épaisseur de ta couette, j'ai pas pu résister, je me suis infiltré. J'ai pas réfléchi, j'ai été con. Désolé. J'espère que tu m'en veux pas ... » Je me doutais de la plausible suite qui allait se passer. Celle de quitter ces draps confortables et divins pour retourner dans l'affreux clic-clac froid trop froid pour moi. « Non, tu m'as pas fait peur. C'est sûr qu'un hurlement soudain, ça surprend. M'enfin bon, je vais repartir sur le canapé. J'veux pas te déranger. Et t'as sûrement envie d'être seul. » Je décidai enfin à m'extirper des couvertures pour me remettre ensuite à ce dur contact sur le sol avec mes pieds. Direction le salon pour dormir sur le canapé ! Cette pièce devenait un vrai labyrinthe la nuit et pour marcher, j'avais besoin de lumière. J'appuyai sur l’interrupteur présent sur l'un des murs de la chambre pour que cette dernière s'éclaire. « Désolé, mec, j'ai pas envie de m'casser la gueule ... mais si la lumière te fait trop mal ... j'peux éteindre. Faut que je fasse des efforts. » Et malencontreusement, j'apparais bien en caleçon, mon érection bien distincte, face à Cassandre.

Justin m'avait fait peur. S'immiscer dans mon lit avait été une erreur de sa part mais, alors que mon rythme cardiaque redescendait, je m'en voulais de lui avoir hurlé au visage comme je l'avais fait. De nouveau allongé dans mon lit, j'étais gêné. Il avait probablement vu ce que j'avais tenté de caché ans la douche l'autre fois. Le pire restait sans doute cette érection que j'avais eu suite à mon rêve dans lequel le jeune Fabre était également. J'étais mal à l'aise. « Non, non, c'est moi qui est désolé. » Un grand espace nous séparait. J'étais au bord e mon lit et mon colocataire était à l'autre bout. Cela faisait vieux couple retraité pour qui l'attirance n'existait plus ou avait disparu. « Je...j'avais trop froid. Et lorsque j'ai vu l'épaisseur de ta couette, j'ai pas pu résister, je me suis infiltré. J'ai pas réfléchi, j'ai été con. Désolé. J'espère que tu m'en veux pas... » Je m'en voulais encore plus de lui avoir hurlé. Il avait eu froid et, pour se réchauffer, il m'avait rejoint dans mon lit. J'étais stupide, idiot. Je n'aurais jamais dû élevé la voix ainsi. « Non, tu m'as pas fait peur. C'est sûr qu'un hurlement soudain, ça surprend. M'enfin bon, je vais repartir sur le canapé. J'veux pas te déranger. Et t'as sûrement envie d'être seul. »

J'observais sa silhouette se déplacer dans la pénombre. Je ne le distinguais pas vraiment mais j'arrivais tout de même à le suivre d'après l'ombre que j'apercevais et les bruits de ces pas. « Woo ! » Lançais-je alors que le jeune Fabre venait d'allumer la lumière. Surpris, je fermais les yeux rapidement. Habitué au noir et à la nuit, j'eus beaucoup de mal à me remettre de cet luminosité soudaine. « Désolé, mec, j'ai pas envie de m'casser la gueule ... mais si la lumière te fait trop mal ... j'peux éteindre. Faut que je fasse des efforts. » Je ne disais rien, tentant d'ouvrir un oeil pour le regarder. « Non, c'est bon. T'inquiètes pas. » Le second suivi et alors que j'aurais pu resté figé sur le visage de Justin, mon regard dévia vers son sexe en érection. Mes yeux bleus étaient désormais grand ouverts face à cette vision que je n'aurais cru réelle. Je restais bouche-bée. Est-ce moi qui était à l'origine de cette effet typiquement masculin ? Oui, c'était évident. Il ne pouvait pas en être autrement. C'était surprenant.

« Attends ! » Lui lançais-je alors que mon colocataire s'apprêtait à retourner dans le salon. Je me redressais dans mon lit. Ce mot était sorti tout seul. Je plongeais mon regard dans celui de Justin, déviant parfois mes yeux sur son entre-jambe qui me déstabilisait. Je pris alors une grande inspiration. Maintenant qu'il était à nu devant moi, je ne devais plus avoir peur. Je me levais donc de mon lit, le rejoignant dans l'encadrure de la porte. J'attrapais sa main pour le tirer dans ma chambre. « Viens avec moi... » Je refermais la porte derrière lui et je le menais jusqu'à mon lit dans lequel je m'engouffrais rapidement. Le froid était prenant. J'éteignis la grande lumière de la pièce pour ne laisser que ma lampe de chevet. Je m'allongeais délicatement, m'installant de côté pour regarder Justin qui me rejoignait. Je ne disais rien. J'observais. Je le regardais et j'osais même un regard sur son corps ce que je ne m'étais jamais permis jusque là. Je me mordis la lèvre inférieur. Plus proche que précédemment, nous étions tous les deux allongés côte à côte, chacun sur notre oreiller. Je restais toujours silencieux, glissant alors une main sur la joue de Justin. « Je suis content que tu sois là. » Je réalisais alors mes paroles. Elles étaient ambiguës. « Enfin avec moi dans l'appart', comme colocataire. » Continuais-je rapidement pour éclaircir mes propos. « Je suis également content que tu sois là, dans mon lit... » Murmurais-je, honteux. « Les bras d'un homme me manque... »

C'était gênant d'avoir ce genre de chose. En fait, c'était extrêmement gênant d'avoir ce genre de chose à la vue d'un homme qui était également homosexuel. Je ne voulais aucune ambiguïté entre nous, on était que des amis, c'est tout. Maintenant, le fait qu'il ait vu que j'avais une érection pouvait lui faire produire une multitude de scène obscènes et indésirables. Non, je ne souhaitais pas être l'objet d'un fantasme d'un homme. J'étais bien trop viril et attaché à la gente féminine pour qu'un gay ait des vues sur moi. Même s'il s'agissait de Cassandre, mon extraordinaire colocataire. « Non, c'est bon. T'inquiètes pas. » Je souriais face à sa réponse. Trop gentil, le Cassandre, je n'arrêterai pas de le répéter. Je continuai mes pas afin de rejoindre le salon pour revenir à mon canapé où le froid avait sûrement pris possession des lieux et qu'il ne ferait qu'une bouchée de moi et de mon corps en me frigorifiant encore plus. Tant pis, dans le pire des cas, j'attraperai un rhume. Ce n'était pas si grave, si ? Du Stodal et tout ça passe. « Attends ! » Je retournai vivement la tête. Qu'est-ce que Cassandre souhaitait de plus de moi ? J'étais surpris par le ton de cette déclaration qui semblait si spontanée. Se redressant dans son lit, Cassandre se leva finalement. Et j'étais choqué par cet acte. Qu'est ce qu'il faisait là ? Wow, wow, wow. Je ne comprenais absolument rien. Pourtant, il avait bien tout fait pour que je ne voie pas son entrejambe alors pourquoi se lever précipitamment pour me rejoindre ? « Viens avec moi... » Je souriais, gêné de l'invitation. Finalement, il semblait d'accord pour ne pas me laisser dans les griffes du froid et pour m'accueillir dans son lit amicalement. Histoire d'être au chaud, A deux. C'était gentil de sa part. Cette qualité devait bien être innée chez lui, c'était forcément ça. Il n'y avait pas d'autres explications.

J'acceptai et me voilà à refaire mes pas en sens inverse pour regagner le lit. Cassandre s'occupa d'éteindre le grande lumière pour ne laisser que la petite. Celle de la lampe de chevet. Je m'engouffrai à nouveau dans la couette grande et chaude, équitable pour nous deux et tourna alors la tête vers Cassandre. Cette aventure nocturne serait à graver dans les mémoires des pires gaffes de colocataire. Surpris par la main de Cassandre qui se déposa sur ma joue, je me laissai toutefois faire. « Je suis content que tu sois là. ... Enfin avec moi dans l'appart', comme colocataire. » Je souriais face à cette chaleureusement annonce. Moi aussi j'étais heureux d'être là. J'avais tout. Du confort et mon bonheur. Certes, pas associé à l'amour mais j'étais néanmoins heureux d'avoir cette vie bien tranquille. Tranquille. J’exagérai car de nombreux problèmes me surveillaient à l'horizon. J'entendis aussi son murmure. « Je suis également content que tu sois là, dans mon lit... Les bras d'un homme me manquent ... » Était-ce une sorte d'annonce ? Peut-être bien. Je ne savais que faire. Mais je n'allais sûrement pas le rejeter. Pas avec tout ce qu'il m'avait fait et offert. Je lui souris tout simplement. Et finalement, je décidai de craquer et je rapprochai ma tête de la sienne pour déposer mes lèvres contre les siennes. Un baiser qui se voulait doux. Et je voulais paraître honnête. « Ecoute ... On va pas se mentir. Tu as envie de moi. J'ai envie de toi. Alors ... » Je rapprochai mon corps du sien, l'embrassant plus profondément avec un baiser un peu plus solide que le premier. Et j'espérai juste une seule chose : que Cassandre ne me repousse pas. Je prenais des risques, des gros. Mais je m'en foutais, ce n'était pas ma raison qui parlait. « Fais moi l'amour, entre en moi. »

Décider qu'il reste avec moi, dans mon lit, alors que je dormais nu, s'était spontanément. Ce simple mot "Attends" m'avait trahi. Je m'étais trahis tout seul, révélant une envie plutôt que d'être raisonnable. Mais la raison se retrouvait également dans ce choix. Justin ne mourrait pas de froid dans le salon. Je n'avais pas réellement peser le pour et le contre de cette situation. Je m'étais levé du lit, nu, pour venir le chercher et le diriger vers mon lit, chaud et confortable, qui l'accueillerait pour le reste de la nuit. Allongé aux côtés du jeune Fabre, je plongeais mes yeux dans les siens. Je le regardais, glissant ma main sur sa joue pour lui faire quelques révélations. Certaines à voix hautes, d'autres plus silencieusement car je ne pouvais prédire la réaction de Justin face à mes propos. Il sourit. Je lui répondis par la même expression sur mon visage. Il rapprocha ses lèvres des miennes. Je ne bougeais pas et je le laissais déposer un doux baiser sur les miennes. J'appréciais. C'était simple et pourtant si divin. Personne ne m'avait embrassé depuis Wade, depuis mes vœux de célibat. Et cela me manquait. La proximité avec un homme aimé, ces caresses, sa présence. Même si j'avais fait vœux de célibat, tout me manquait. Je retrouvais ici ces sensations que j'aimais tant mais qui me faisait toujours souffrir au final. « Ecoute... On va pas se mentir. Tu as envie de moi. J'ai envie de toi. Alors... » Je ne pouvais détacher mes yeux des siens. Mon air innocent disparut presque aussitôt lorsque Justin se pressa contre moi pour m'embrasser fougueusement. J'étais perdu. Mais c'était si bon. Je devais tout arrêter. Mais comment résister ? Je tentais de percer un signe, un indice me permettant de connaître les intentions de mon colocataire. Je ne voulais pas m'attacher. Je ne voulais plus connaître l'horreur d'une relation qui se termine. J'avais besoin d'un homme sincère, d'une personne sûr de ces sentiments et qui pourrait m'aimer comme je suis. Je ne disais pas que Justin n'était pas cet homme mais n'était-il pas hétérosexuel ? J'en doutais maintenant. « Fais moi l'amour, entre en moi. » J'en doutais énormément. Pourquoi ne m'avait-il rien dit ? Pourquoi avait-il caché son attirance pour la gente masculine. Et Lena ? La pauvre Lena. Je ne pouvais pas. Je n'étais pas comme ça. Je l'avais subi. Je ne pouvais pas le faire subir à mon tour.

Collé à moi, je passais une main sur les hanches du jeune Fabre, jouant avec l'élastique de son boxer comme je jouais avec mes pensées. Oui ou non ? Sexe ou abstinence ? Plaisir ou raison ? Je déposais un nouveau baiser sur les douces lèvres du jeune homme. Je passais une main dans ses cheveux, caressant son cuir chevelu avec tendresse et douceur. « Je suis désolé, Justin. Je peux pas. On peut pas faire ça. Y'aurait pas Lena, la situation aurait été différente. Mais elle est là et je ne veux pas devenir celui que j'ai hais pendant des mois pour avoir couché avec mon ex alors que nous étions encore ensemble. » Ma main glissa sur sa joue, ses lèvres, son cou pour finir sur son torse que j'effleurais de mes doigts. L'envie était présente. Après ces mois de solitude et d'abstinence, le besoin purement sexuel était présent. Le désir pour Justin était également une raison de passer le cap et de devenir intime avec lui. Mais je ne pouvais pas. « Je suis désolé... » Répétais-je une dernière fois. La déception se lisait sur mon visage. La tristesse aussi. Mais je ne transgressais pas cette ligne de conduite. Je ne voulais pas être l'autre de son couple, la troisième personne cachée de tous. Je l'embrassais une dernière fois et je lui tournais le dos malgré l'érection que j'avais et l'envie qui me démangeait.

J'avais finalement décidé d'exposer mon attirance pour Cassandre. Mon beau et cher Cassandre. Deux baisers. Un premier, léger et timide, pour s'approcher de ce bel Apollon. Et le deuxième, beaucoup plus osé pour insister sur cette attirance. J'avais envie de lui et mon corps l'avait bien prouvé par une érection digne de ce nom. A quoi bon combattre mes sentiments ? Je remarquais bien là que j'étais bien griffé des blessures du passé et de mon éducation reçue. Je me mentais à moi-même parce qu'être homosexuel, c'était ne pas être normal d'un côté. On avait toujours insisté sur le fait que je me marierai jeune, que j'aurai des enfants. Ce genre de choses qui m'emprisonnaient dans un moule dans lequel j'avais de grosses difficultés à entrer. Je sentis les doigts de Cassandre descendre vers mon caleçon pour en jouer avec l'élastique. Et un autre baiser tendre se créa entre les deux lèvres affamées. « Je suis désolé, Justin. Je peux pas. On peut pas faire ça. Y'aurait pas Lena, la situation aurait été différente. Mais elle est là et je ne veux pas devenir celui que j'ai hais pendant des mois pour avoir couché avec mon ex alors que nous étions encore ensemble. » Et je payais le prix de mes erreurs. Visiblement. Ou comment un mensonge pouvait absolument tout détruire, faire obstacle à quelque chose dont on avait éperdument envie. Soit je devais m'abstenir, soit je devais lui raconter toute la vérité. Mais aura-t-il encore envie de moi après cette révélation ? Je ne pense pas. Les contacts doux, du toucher furent toujours présents avant de s'estomper par un définitif. « Je suis désolé... »

Lire sa déception et sa tristesse sur son visage me poignardait le cœur. Je détestais cela, le voir malheureux. Encore plus à cause de moi. Il n'avait pas le droit d'être malheureux. Je ne voulais pas qu'il le soit. Il avait du apparemment bien vivre des horreurs pour en accumuler d'autres. M'embrassant une dernière fois, Cassandre me tourna le dos. Et une larme sortit de mon œil. Je devais arrêter de mentir sinon j'en paierai le prix fort. Très fort. Timidement, je passai aux aveux : « Cassandre ... Léna n'existe pas. Elle n'a jamais existé. J'ai inventé ça parce que je n'assumai pas d'être attiré par un homme et à l'époque, je te croyais hétérosexuel ... Alors j'ai tout inventé pour me convaincre ... Mais j'peux pas résister ... Je ... suis attiré par toi ... » J'avais eu bien du mal à prononcer les derniers mots. Se révéler bisexuel ou carrément homosexuel semblait bien plus dur qu'on ne le pensait. Et pourtant, paradoxalement, cela me faisait un bien fou. Je me sentais comme libéré. D'un doigt provocateur, je le déposai en haut de sa colonne vertébrale avant de le descendre lentement et d'arriver jusqu'à l'arrêt de ses sublimes fesses. « Pardonne moi, je t'en supplie ... » S'il y avait bien une personne dont je ne voulais absolument pas me mettre à dos, c'était bien Cassandre. Le seul, l'unique et le désirable. Pour demander pardon, je déposai un baiser dans sa nuque, espérant fortement qu'il accepte mes aveux et excuses.

Je ne pouvais pas. C'était impossible. Je ne pouvais pas être cet homme. Je ne pouvais pas faire de Justin un homme infidèle. Tout serait de ma faute même si le désir de coucher ensemble était réciproque. Je ne pouvais être Grayson Langlois. Tous ces souvenirs me revenaient alors en tête. Aaron, sa tromperie, Grayson. Toute cette histoire émergeait dans ma tête comme si elle n'avait jamais disparu. A cause de cette histoire, j'avais perdu un homme que j'aimais énormément et surtout j'avais perdu mon meilleur ami. J'avais tenté de reprendre contact avec lui. Nous avions même convenu d'un petit-déjeuner pour discuter. Mais le jeune Parker ne se manifesta pas. Seul à ma table, je compris que nous nous étions perdu et qu'il avait choisi de m'ignorer. Depuis, j'avais abandonné l'idée de le voir, de lui parler, de lui pardonner.

Je tournais donc le dos à Justin, préférant dormir et ne pas l'avoir dans mon champ de vision. Céder serait facile. Ce que j'entreprenais était beaucoup plus courageux et difficile. La tentation était si grande. Le fait qu'il soit en simple sous-vêtement à mes côtés augmentait grandement cette envie. Pourtant, je fermais les yeux et tentais d'oublier sa présence. « Cassandre... Léna n'existe pas. » Je rouvris mes yeux mais je ne bougeais pas. J'écoutais ce qu'il avait à me dire. « Elle n'a jamais existé. J'ai inventé ça parce que je n'assumai pas d'être attiré par un homme et à l'époque, je te croyais hétérosexuel... Alors j'ai tout inventé pour me convaincre... Mais j'peux pas résister... Je...suis attiré par toi... » Mon coeur battait la chamade. Mais je ne saurais dire pour lequel de ces aveux. Son attirance ? Son mensonge ? J'étais perdu dans mes sentiments. J'étais heureux et déçu à la fois. Je sentis alors son doigt descendre le long de ma colonne vertébrale. Rien de ce qu'il me disait ne me laissait indifférent. Son geste était également délicieux. « Pardonne moi, je t'en supplie... » Finit-il par me supplier. J'avais toujours ces sentiments ambivalents. Déception et joie. Tristesse et envie. Il déposa un dernier baiser au niveau de ma nuque et je ne pus rester de dos plus longtemps.

Je me retournais, lui faisant face. Je l'observais, je scrutais son regard pour déceler la vérité et je ne vis que l'espoir d'être pardonné pour ces mensonges. D'une certaine façon, je pouvais le comprendre. Être attiré par une personne de même sexe pouvait être dérangeant et difficile à accepter. De plus, les fausses croyances de Justin à mon sujet l'avait mené à ce résultat. Je lui souris, glissant mes deux bras autour de sa taille pour le tirer vers moi. « Je comprends, tu sais... Et je t'en veux pas. Pas vraiment. » Je déposais un simple baiser sur ces lèvres. « T'as fait ça pour te protéger et tu m'as finalement tout avouer avant que je le découvre par moi-même. » Je l'embrassais à nouveau. « Et même si j'aurais préféré que tu n'inventes pas cette Lena, tout est au clair maintenant entre nous et...je... » Je joignais une fois de plus mes lèvres aux siennes, cherchant le bout de sa langue pour un baiser bien plus passionnel que les précédents. Caressant d'un bras les hanches de mon colocataire, j'en vins à glisser son sous-vêtement le long de ses deux cuisses alors que notre baiser ne s'en terminait plus. Nu tous les deux, je le serrais contre moi, mêlant mes jambes aux siennes. Nous n'avions jamais été aussi proche, aussi intimes. J'en oubliais tous ces mensonges et la seul chose dont j'avais envie, c'était lui.

Cassandre se retourna enfin et posa ses yeux en face des miens. Tous deux, nous nous contemplâmes. Et je ne savais rien encore de sa réaction. J'avais peur et l'anxiété m'avait mordu en plein visage. Ma plus grande peur serait qu'il ne me pardonne pas, voire carrément qu'il m'expulse de chez lui pour lui avoir menti. Seul, je n'y arriverai pas. J'étais persuadé que j'y arriverai pas. Il me fallait l'appui de quelqu'un. Une sorte de béquille ou de main tendue qui puisse m'aider à me relever de ma chute. Et c'était Cassandre qui m'avait tendu sa main, littéralement. Et je ne voulais pas qu'il me lâche. Cependant, ce n'était pas moi qui avait le contrôle et dans ce genre de moments, je détestai ne pas l'avoir. Et j'attendis une quelconque réaction. Les secondes se déroulaient lentement. Et je pus voir enfin sa réponse. Un sourire. Et ses bras qui se plaçaient autour de ma taille pour m'inciter à me rapprocher de lui. Mon cœur fit un bond. J'avais un artifice de sentiments qui explosait en moi. Et la joie et le soulagement semblaient dominatrices, marquant des traits sur mon visage. « Je comprends, tu sais... Et je t'en veux pas. Pas vraiment. » Ses paroles avaient l'effet de me rassurer et le simple baiser qui déposait sur mes lèvres confirma mon impression. « T'as fait ça pour te protéger et tu m'as finalement tout avouer avant que je le découvre par moi-même. » Un autre baiser. « Et même si j'aurais préféré que tu n'inventes pas cette Lena, tout est au clair maintenant entre nous et...je... » Un instant, j'affichais une moue boudeuse que j'extirpai avec un sourire en suivant. Il m'avait pardonné. Enfin, j'avais cette impression. Au moins, il m'en voulait pas. Ses lèvres se scellèrent aux miennes de nouveau, plus profondément. Et je lui rendis réciproquement pour présenter ma langue et l'unir à la sienne. Mon sous-vêtement glissa le long de mes deux cuisses grâce à la main de Cassandre et je vins l'aider quelques secondes plus tard à ôter ce caleçon qui commençait à devenir gênant pour ainsi le laisser à terre. J'étais nu, collé contre le corps de Cassandre, nu et admirablement sculpté par une musculature spectaculaire. Nos jambes se mêlèrent et je sentis son membre tendu rencontrer le mien, se mettant côte à côte. J'en pouvais plus et le désir grandissait à vue d’œil. Et pourtant, je me laissais faire, m’enivrant quelques instants des caresses qu'il me donna. J'interrompis soudainement notre baiser pour prononcer, tout en caressant le visage de mon colocataire : « Tu mérites qu'on prenne soin de toi ... Et laisse moi être cet homme qui prend soin de toi ... »

Je collai de nouveau mes lèvres aux siennes un court instant avant de commencer à descendre dans le cou pour lui offrir une multitude de simples baisers. Et je descendis pour faire face à son torse musclé. Légèrement et essayant d'être sensuel, je léchai ses deux tétons pour ensuite les mordiller doucereusement. Relayant entre baisers et coup de langue sur son bassin, j'espérai que son envie grandissait comme la mienne. J'arrivai au bas-ventre et essayant de ne pas me jeter directement sur sa verge gorgée de sang, je le titillai encore, l'embrassant près de la cible. Encore quelques instants. Accompagnés de ma langue tentatrice. Et finalement, j'englobai l'intimité tendue et virile de mon colocataire, commençant des vas-et-viens.