so fill your heart
with what's important

Nez froncé, sourcils froncés, front froncé, je lève mes yeux vers le plafond et je répète la phrase quelques fois à voix basse, mais je ne comprends pas plus le sens de cette phrase, qu'est-ce que l'auteur voulait dire par ça ? Sans quitter le plafond des yeux, ma main cherche mon portable, plutôt je cherche mon portable avec ma main. Dans mes contacts, je la cherche elle, j'écris rapidement un sms lui demandant ce qu'elle pense de cette phrase, je doute qu'elle soit couchée, elle doit bosser sur un livre tout comme moi. Mon coeur bat rapidement à cette pensée, à savoir qu'elle va recevoir ce sms, qu'elle va le lire, sourire et puis me maudire parce que je l'ai dérangé. À croire que mon insomnie peut plaire comme déplaire. 5h15 du matin, la nuit passe vite pourtant les rayons du soleil tardent à apparaître. Un soupire traverse mes lèvres, mes yeux se déposent sur la porte de ma chambre, me demandant si Sephora dort, sûrement. En temps normal, je serais déjà dans son lit à la réveiller ou la faire chier avec des histoires, mais depuis un moment, je suis doux avec elle, depuis cette histoire. Je repense à ce baiser, mon coeur se sert, au visage de Tay, aux larmes de Sephora, je dois arrêter de repenser à ça. Les histoires de coeur ne sont pas simples, elles ne le seront jamais. Poussant ma couette plus loin, je me faufile en-dessous, baissant la luminosité de la lumière et j'enfonce ma tête dans l'oreiller. Je dois dormir. Et si je n'étais pas été à cette fête du nouvel an, est-ce que Sephora aurait embrassé un autre garçon, est-ce que ça l'aurait été Tay au final ? Et si je n'avais pas embrassé ma patronne cette journée, est-ce que je serais en plein questionnement en ce moment sur l'état de mon coeur ? Celim, tu penses trop. Je passe une main sur mon visage en soupirant. Je dois dormir. Qu'est-ce que j'ai à faire demain déjà ? Le ménage, sinon je vais pouvoir le faire demain en rentrant du boulot ? Je ferme les yeux, je dois dormir. Je dois arrêter de me dire ça et le faire. Au final, je crois que je m'endors, car je ne pense plus. Demain, j'ai envie de faire le petit déjeuner à Sephora, un peu comme un petit déjeuner au lit, une éternité s'est écoulée depuis la dernière fois. Trois petites heures passent, je me lève, ferme ma lumière et enfile un t-shirt avant de poser mes yeux sur mon portable. Elle m'a répondu que ça voulait certainement dire que j'allais mourir. Sourire aux lèvres, je rentre dans la chambre de Sephora et me faufile sous ses couettes. Du bout de l'index, je commence à appuyer contre l'une de ses côtes. 'Sephora, tu dois te réveillleeeeerrrrr, sinon je pète sous ta couette et ça va puer pendant une éteeerrnitééééééé.' Elle sait que je ne vais pas le faire pour de vrai, je l'entends marmonner, ou peut-être grogner, j'en sais rien. Si seulement ça peut la faire sourire ou si seulement elle pouvait me traiter de con ou d'enfant, ça me ferait sourire à mon tour, elle va pas être triste pendant ce court instant. Je dis ça comme si elle au fond d'un gouffre de mélancolie destructrice et d'une tristesse infini, mais en fait je cherche seulement à faire mon rôle. Je plisse le nez en la regardant se réveiller. Parfois, j'ai l'impression d'être le meilleur ami amoureux, alors que je me vois mal l'aimer de cette manière, alors que je ne me vois pas l'embrasser, lui prendre la main affectueusement, lui dire des mots d'amour. Un spasme, voilà j'ai un spasme l'espace d'une fraction de seconde. Je l'aime pour tout lui donner, mais pas cet amour, comme elle ne me donnera jamais cet amour, je l'aime pour manquer le boulot et rester devant la télévision à regarder des films d'amour et à manger du chocolat. 'Je vais te faire des gaufres, tu en penses quoi ?' Je n'ai pas précisé des gaufres qui se mangent. J'enfonce mon visage dans l'oreiller, manquant de suffoquer.

Plusieurs jours que je tourne en rond désormais. Tourner la page. Ne pas tourner la page. Croire. Abandonner. Je jette un coup d'œil à mon réveil. Nous sommes en plein milieu de la nuit. Je soupire, incapable de m'endormir. 2013 pour reprendre ta vie en main, ma vieille t'es plutôt mal barrée pour le moment. Je m'extirpe du lit, me glisse dans une doudoune qui me donne des airs de bibendum et part rejoindre le balcon. Paris dort. La Tour Eiffel s'illumine lorsque je franchis la baie vitrée. C'est toujours aussi magnifique. Je ne m'en suis pas encore remise depuis le temps. Le froid me permet plus ou moins de faire le vide dans ma tête. Disons que mes pensées se bousculent moins à la porte d'entrée. Je me laisse tomber sur un fauteuil du 'salon externe' face à la plus célèbre des dames de fer, souffle dans l'air froid et observe la fumée s'échapper. Moi aussi je souhaiterai faire de même. M'échapper. M'enfuir. Ce n'est pas tant le fait que Tay soit passé à autre chose aussi vite qui me rend dans cet état. Enfin pas que. C'est également le souvenir de l'année dernière. Gaël. Mariage. Un scénario quasiment similaire. J'étais partie, du jour au lendemain. Aujourd'hui, la tentation de recommencer est grande. Il faut croire que j'ai un véritable don pour disparaître. Mon nouveau hobby. Je cligne des yeux. Retour à la réalité. Il serait temps que je rentre avant d'attraper froid. Je frotte mes mains, pousse la baie vitrée afin de la refermer, laisse tomber ma doudoune dans un coin de la chambre et me glisse dans mon lit.

J'ai la sensation que je viens tout juste de fermer les yeux alors que plusieurs heures se sont peut être bien écoulées. Aucune idée. Je n'ai pas le temps de consulter mon réveil ou mon téléphone. Je sens le lit bouger, sans même être certaine qu'il s'agit de Celim ou d'un psychopathe qui se serait faufiler dans l'appartement à cause de mon inattention. Aucune réaction de ma part pour autant. Je sens un contact au niveau de mes côtes, mais toujours rien. Je grogne encore. Ours mal léché du matin. En temps ordinaire, je parle rarement avant d'avoir terminé mon café. 'Sephora, tu dois te réveillleeeeerrrrr, sinon je pète sous ta couette et ça va puer pendant une éteeerrnitééééééé.' Celim donc et pas de psychopathe. Voilà qui me rassure, mais ne m'aide pas à devenir plus chaleureuse. J'essaye de décrocher un sourire. Vraiment. Pour lui. Il n'a pas mérité la fille, la colocataire, la meilleure amie, qui fait la gueule sans arrêt. Mais c'est plus fort que moi. J'en suis incapable. En temps normal, une telle chose me fait rire, aussi conne, aussi bête soit elle bien que je ne sois pas du matin. Cette fois-ci, je grogne et m'enfonce sous la couette, les oreillers. 'Je vais te faire des gaufres, tu en penses quoi ?' Gaufres ? Sucre ? Chagrin ? Bref, c'est presque un accord parfait. De toute façon, je ne dirai non à rien quand il s'agit de manger. En réalité, je ne me suis rien mis sous la dent depuis un moment. Pas le courage de faire quoique ce soit. Pas le courage non plus d'aller chez un traiteur. « Si tu veux, oui. » Je finis par me retourner pour faire face à Celim, mais n'ajoute rien. Je suis tellement désolée mon vieux. Je baisse les yeux en attendant.

Voir son air triste m'enlève l'envie de sourire bêtement ou de raconter une connerie. Elle veut des gaufres, je vais lui en faire, avec un café, si seulement ça peut lui faire un minimum de bien. On dit que le coeur d'une femme est un océan de mystères ou de secrets, parfois, je n'ai aucun mal à me dire que c'est la vérité, je n'ai pas toujours compris Sephora, sur ses choix, ses décisions ou ses actions, je me contente seulement d'essayer de la comprendre même si une bonne partie du temps, je reviens au point de départ. Elle est grande, elle sait ce qu'elle fait, alors je me contente seulement d'être là pour elle. - Est-ce que je peux avoir un sourire, un petit sourire ? On peut revenir à cette soirée, à ce jour de l'an, qu'elle ne me croise pas parce que j'ai décidé de ne pas venir et qu'au final, elle se retrouve pas dans ce lit avec le coeur triste. J'aimerais aller voir Tay et lui en parler, sauf que je n'ai pas à intervenir dans leur histoire à eux. - Si tu veux quoi que ce soit, tu me le dis et je te le fais. Je disparais de son lit et me dirige vers la cuisine. Il fait froid, je crois que mes pieds vont de transformer en gros glaçons, l'hiver est la pire saison qui existe. Je cherche le lait, les oeufs, en cours de route, je me demande si les crêpes et les gaufres, c'est la même recette ou si au contraire tout se fait à la cuisson. - Sephooooo, les gaufres, c'est la même chose que les crêpes dis ? Mon regard se dépose sur ce contenant et je casse les oeufs en tentant de ne pas échapper un morceau de coquille dans le mélange. Zut. Je vide tout le contenu dans ce truc qu'on a acheté ensemble, qui fait des gaufres, ce truc dont je me souviens plus le nom. Je lui coupe des fruits alors que ça cuit, je fais couler le café, une odeur saute au nez, je suis presque fière. Quand la gaufre termine de cuir, je la dépose dans une assiette, dépose des petites boules de crème chantilly et fait un bonhomme souriant avec les fruits. Je suis fière de mon oeuvre, je ne sais pas si c'est bon, mais c'est beau. Le café prêt, je dépose le tout dans un plateau. Il ne manquerait plus qu'une marguerite pour compléter le tout, un peu comme dans les films. Une fois dans la chambre, je dépose son petit déjeuner sur le lit. - C'est fait avec amour. J'ai l'impression d'être un enfant de cinq ans. - Attends, j'ai oublié un truc. En courant, je vais prendre un couteau, une fourchette et je lui tends. Prenant place sur son lit, je prends un petit fruit et je le mange en continuant de l'observer, une critique culinaire ? Commentaire ? J'ai peur qu'elle s'étouffe parce que ce n'est pas bon. Oh non. Un petit stresse monte au fond de mon estomac. - Et puis ? Je me mords presque la lèvre inférieure. Celim faut te calmer. Finalement, j'ai perdu le but de ce déjeuner, la vraie raison, j'espère que ça va lui plaire, j'espère qu'elle va tout manger et après qu'on discute tranquillement de la vie ou écouter un film pourquoi pas. Je ne sais pas.


hs; je suis désolée pour tout ce temps mathildou.