SEPHORA & TAY

7H00.  mon alarme sonnait, encore et encore.  j'm'en foutais, limite.  avant, j'étais du genre à m'lever à cinq heures pour être au travail à huit.  j'voyais la vie un peu différemment depuis mon retour à la source, même si au fond, j'étais toujours le même, avec les mêmes tracas.  j'avais juste perdu un peu d'motivation, j'me tournais vers les chemins faciles, et j'bossais moins pour me rendre plus loin.  je n'me reconnaissais pas vraiment, à vrai dire.  j'voyais en mes motifs beaucoup, beaucouuup d'hypocrisie.  j'étais comme tous les autres.  j'étais un pion d'l'industrie.  j'avais fini par me lever, après ce beau p'tit moment philosophique, haha.  j'avais pris une douche rapidement, dans laquelle j'avais ennncore eu un p'tit moment philosophique, puis j'm'étais dirigé vers ma chambre pour me changer.  j'avais pris autant d'temps, sinon pluuus, qu'une fille en aurait prit pour choisir une robe de soirée.  j'étais encore et toujours aussi pitoyable sur ce point.  breeeef, après deux siècles devant l'miroir, j'mettais enfin la clé dans mon appartement.  un peu en retard, certes, mais mâle, très mâle.  as usual, j'ai envie de dire.  suite à ce moment de prétention, j'avais décidé de m'arrêter au starbucks question d'prendre le café qu'on m'apportait directement à l'appartement autrefois.  j'essayais de n'pas trop y penser.  j'savais pas si j'voulais la revoir, uniquement parce que j'savais pas du tout comment .. m'excuser, ou m'faire pardonner.  je m'avais créé une sorte de carapace, avec le temps.  j'tentais de me convaincre que j'lui en voulais.  pourtant, pas besoin d'avoir passer l'bac pour comprendre que jamais je n'allais arriver à réellement lui en vouloir.  j'étais un faible type, qui n'avait jamais eu l'contrôle de son coeur.  « un café, par pitié. »  ha ha ha, j'étais tellement drôle.  ou pas.  ou pas du tout.  mais elle, elle trouvait ça drôle, juuuuste parce que c'était moi, et qu'elle m'avait assez facilement reconnu. « merci beaucoup. » j'l'avais payé d'un billet d'cinq et d'un sourire (lolilol), puis m'étais retourné, pour tomber pile devant la reine de (mon) coeur.  oh, mince.  l'ignorer?  pas possible, nos regards s'étaient déjà croisés, et continuaient de s'croiser d'ailleurs.  et comme j'maudissais mon sms d'au revoir, maintenant. et comme j'me maudissais, tout court.  « bonjour, sephora. »  j'avais l'choix de partir, maintenant, mais j'étais collé là, tel un imbécile avec de la classe.  « tu.. » énorme malaise.  pire que ça, même.  « tu.. » viens souvent par ici?  not.  « .. vas bien? »  misère.

Les jours passent et se ressemblent, sans se ressembler dans le fond. On se lève, on se prépare, on boit sa caféine du matin, on travaille, caféine de l’après-midi, on finit par rentrer. On voit des personnes, on parle, on vit. On survit, surtout. Il est tôt, sauf pour ceux qui travaillent dur. Oui, écrire est un travail dur. Après tout, elle est en free lance. La jeune femme est tout bonnement matinale avec ses rituels. C’est dingue ce qu’un simple café Starbucks (une chaîne américaine quoi, plus impersonnel tu meurs) peut contenir comme souvenirs. Tous les jours, Sephora s’est rendue ici. Tous les jours, Sephora avait ces frissons, cette décharge électrique parfois. Tous les jours, Sephora jetait ce coup d’œil dans l’optique (ou l’espoir ?) de le voir. Ou pas. L’éviter, le retrouver. Elle n’a jamais su faire la part des choses. Pourtant son message avait été clair : elle devait tirer un trait sur tout, tourner la page, passer à autre chose. Basta. Horreur. Ce matin, encore, la rouquine est là dans la file à pianoter sur son téléphone. On ne change pas une équipe qui gagne. Il est toujours absent. Elle ne fait pas plus attention que cela à ce qui l’entoure. Elle lève ses yeux, entre ouvre à peine ses lèvres pour passer commande… Et puis il n’y a rien qui sort, même pas de l’air. Ah si, la jeune femme parvient enfin à déglutir, puis à reprendre son souffle. Ce serait bête et fâcheux de s’étouffer ici et maintenant, surtout. « bonjour, sephora. » Alors il n’était pas absent. Depuis quand ? Comment ? Pourquoi ? Ouais, Sephora ne passe pas sa vie scotchée devant l’écran de la télévision comme certains pour apprendre que l’ancienne célébrité locale faisait son grand retour. « tu… » Son visage se décompose au moment où il est enfin temps de s’adresser la parole. « … vas bien? » On ne pouvait rêver mieux comme question. Ironie. Non, elle ne va pas bien dans l’immédiat. Cependant, elle va articuler un petit « oui et toi ? » qui sonne comme une envie de s’échapper, parce que… c’est bien trop tôt pour faire comme avant, pour pouvoir tout lui déballer et se confier, parler, rire. Et puis, ce n’est plus son rôle de la réconforter même si personne ne l’a vraiment repris entre temps.

et j'me sentais comme un faible, comme un lâche. comme un château d'sable piétiné. je n'pouvais même pas dire si j'me sentais mieux maintenant, qu'à mon départ quelques mois plus tôt. je n'avais pas eu l'impression d'évoluer. mais de rétrécir. et j'étais là, devant elle, à lui dire bonjour d'un naturel de plastique. je reconnaissais son regard, j'savais que la même tempête traversait nos deux esprits, au même moment. je me surprenais à penser de nouveau à nos premières retrouvailles, lorsqu'elle était revenue d'angleterre suite à un (long) moment d'absence. la petite scène cliché.  s'enlacer, s'embrasser, se pardonner. non, c'était très loin d'être ça, actuellement. je lui avais difficilement demandé si elle allait bien, même si je pouvais voir dans ses yeux que son état se comparait au mien. eh non, la tempête n'était pas passée. ses lèvres avaient finalement bougé, libérant ainsi l'genre de mensonge qui ne fait pas mal. les clients étaient peut-être dérangés de ma présence, trop près du comptoir, et c'est pour cette raison que j'avais fini par m'éloigner un peu, osant entraîner sephora avec moi par le biais de son bras. évidemment, j'avais été doux. doux comme un agneau. devais-je m'excuser? oui, assurément. pas de ce contact, bien évidemment, mais plus de mon absence. de ce sms d'au revoir, comme si elle n'était pas assez importante pour que j'prenne la peine de lui dire de moi-même, de voix vive. de lui expliquer. j'avais pris pour acquis qu'elle comprendrait. je voulais plutôt me donner toutes les raisons valables de ne pas la confronter. ainsi, j'me faisais croire qu'elle comprendrait. comme pour me libérer d'un poids. « si on veut. » pourquoi, l'avais-je amené à part, déjà? avions-nous véritablement quelque chose à se dire? j'avais expiré, inspiré, expiré puis inspiré. pause. longue pause. « tu peux me gifler, si tu veux. » c'était le seul truc intelligent (ou pas) que j'avais trouvé à dire. « je.. » m'excuse. et j'me disais qu'elle allait finir par croire que le brésil avait kidnappé mon sens de la communication. « je sais. j'aurais dû agir autrement. mais j'crois que j'en avais .. marre. pas de toi. de la situation. » j'avais rapidement regardé ma montre, puis avais nerveusement bu une gorgée de café. « en tout cas. je bosse. et j'imagine que toi aussi. » froid.

La rouquine louche sur son café. Plus d’étonnement, mais toujours pas la moindre trace d’un sourire pour autant. « Je suppose que c’était le mieux à faire. Partir. Chez toi, tes racines. À l’autre bout du monde. » Elle n’a pas le droit de critiquer alors qu’elle-même, elle avait agit de la sorte quelques mois plus tôt. Départ précipité pour l’Angleterre. Alee, la pression du quotidien. « Je te vois pas faire autre chose que bosser. » Sephora se permet (enfin) un sourire tout en soulignant cette réalité. Elle l’a aimé, puis détesté pour cela. Pour son dévouement dans ce qu’il faisait. Pour son pétage de plomb qui l’a fait partir, fuir. « Ouais, les choses ne changent pas. » Sephora pourrait bien passer en mode interrogatoire. Qu’est-ce que tu fais maintenant ? T’as repris ton poste à la radio ? Toi aussi tu vis dans le coin ? Ah ça va être dur de le croiser dans ce café, le matin. Il ne manquerait plus qu’ils se donnent des horaires pour s’éviter : tu passes dès l’ouverture et moi plus tard, mais une semaine sur deux, parce que je suis plutôt matinale en fait. Ou sinon, il faudra se résoudre à ne pas emporter de café jusqu’au bureau et se contenter de celui de la nouvelle stagiaire, qui est tout sauf buvable. Terrible, au sens péjoratif du terme, peut être convenable pour décrire l’horreur. En tout cas, si ce n’était pas Tay en face d’elle, elle ne se gênerait pas de poser toutes ces questions et conditions.« Je… Je te souhaite une bonne continuation, hein. » Adieu le sourire. Bonjour le chagrin. Le retrouver, c’est finalement tout aussi pire que son départ. On ne sait pas quoi dire, quoi s’autoriser. Est-ce donc la fin de chez fin ? Il va bien falloir se rendre compte de l’évidence : ils n’ont peut-être plus rien à se dire. C’est triste, hein ? Elle ne veut pas connaître sa vie privée. Tay est Tay… Elle doute qu’il ait vraiment changé. Physiquement, il est toujours aussi… Il y a définitivement de quoi se rincer l’œil. Pour ce qui est du reste, la jeune femme l’imagine bosseur, drôle (pas quand il est surpris comme maintenant). Il a tout pour lui. Bref, pas de raison pour qu’il soit (encore) célibataire et ça, elle ne tient pas à le savoir officiellement. D’ailleurs, Sephora devra se retenir pour ne pas mener son investigation une fois arrivée sur son lieu de travail.

« Je suppose que c’était le mieux à faire. Partir. Chez toi, tes racines. À l’autre bout du monde. » ou pas. ou pas. j'me disais que si je n'avais jamais décidé d'retourner à la maison, je n'aurais jamais eu cette idée stupide d'engager une meuf pour qu'elle fasse croire à l'univers qu'elle est ma copine. j'me demandais comment j'avais fait pour devenir cinglé au point d'faire un truc que jamais, ô grand jamais j'n'aurais fait jadis. en toute honnêteté, j'aurais préféré baigner, voir mourir noyer dans ma tristesse, que d'assumer les stupides choix que j'avais pris au brésil. et là, je n'pouvais juste pas m'en sortir. je n'étais pas pour 'rompre' tout d'suite, après l'ampleur que cette histoire de coeur avait prise dans les journaux. alors j'allais endurer jusqu'à la toute fin, pendant quelques mois, si mademoiselle décidait de n'pas rompre le marché avant, c'qui était aussi très possible. j'avais murmuré un simple « ouais .. exactement. »  pour éviter une longue discussion profonde sur mes intentions et mes erreurs. l'même genre de mensonge qu'un bien sûr que j'vais bien. « Je te vois pas faire autre chose que bosser. » et voilà qu'elle avait sourit, et voilà qu'j'avais fondu. dur dur que d'être un homme faible. j'avais ris, tout en baissant les yeux. bosser. encore et encore. pour le restant d'mes jours. j'allais finir par me marier avec le boulot, avec l'argent, parce que c'était tout c'que je possédais. que du matériel, rien d'très très sentimental. rien qui n'fait mal. du superficiel, rien d'profond, du sécuritaire. exactement c'que j'étais. un robot. « Je… Je te souhaite une bonne continuation, hein. » déjà? no way. j'avais des choses à t'dire, sephora. et pourtant, c'était moi qui venait touuuut juste de rompre le moment, en parlant du boulot. et voilà que j'patinais. ennnncore une fois, j'voulais revenir dans le passé. « on peut.. discuter.. aussi. » marcher directement sur mon orgueil, je venais tout juste de faire. aouuutch. tout en tenant mon café, j'avais pointé une table non loin. « à moins que tu n'sois pressée. je.. comprendrais. évidemment. » je n'savais pas vraiment si je voulais rattraper le temps perdu. je n'savais pas également si j'voulais.. la revoir. ou j'sais pas. tout ça m'semblait impossible avec la situation dans laquelle je m'étais mis les pieds. d'ailleurs, j'avais terriblement peur qu'elle soit au courant, même si j'ignorais si.. enfin. si j'avais encore la même place dans son coeur, disons. si cette situation était jadis complexe, alors elle ne pouvait l'être plus qu'actuellement. j'croyais, et je crois toujours, que le mieux était de ne pas évoquer le sujet. nous étions particulièrement tout deux bien talentueux en matière de zone grise, de déni.« enfin.. pas.. longtemps. juste histoire de.. en tout cas. » grosse grosse respiration. « as you wish. »  

Sans vous le cacher, Sephora s’attendait à une réponse sèche de la part de Tay… Ce sont les derniers souvenirs qu’elle a de lui, d’ailleurs. Une personne sèche, fatiguée, usée par son travail. Un « très bien, au revoir » ou adieu, c’était au choix. Mais non. Discuter, c’est ce qu’il vient de lui proposer. La question ne se pose même pas. Réponse instinctive, mais forcément certaine d’elle-même, parce que c’est encore et toujours étrange l’ambiance entre ces deux-là. « Je… Ouais, bien sur. » Elle ne se voyait pas lui dire non. Elle ne se voyait pas… Merde c’est compliqué. Elle veut aller de l’avant tout en faisant un détour par le passé… Vous savez ce passé où tout allait encore pas trop mal entre eux, où il y avait une possibilité. Et sinon, elle pressée ? Oui et non. C’est dans ses gènes de parisienne en même temps. Ce n’est pas chose aisée de s’adapter à la nouvelle liberté que lui offre ce nouvel emploi quand on est une ancienne boulimique de travail. « Je suis certaine que tu en as des choses à raconter. » Un second sourire. Sephora n’est toujours pas du genre très extravertie, mais elle adorerait, tuerait pour savoir, plus de détails, sur comment était son séjour. Elle espérait également qu’il déballe tout (ou presque) par lui-même, sans qu’elle ait besoin de mettre au point un interrogatoire. Et si elle devait parler, ce ne serait pas à propos d’elle, mais plus sur le fait qu’il avait laissé sa propre sœur ici ou le beau temps, tiens… Ça peut être un sujet passionnant la météo ? L’été a été chaud dans la capitale, il paraît. Deep down, Sephora veut l’entendre, le voir, le voir sourire si possible, ne pas apprendre de « mauvaises nouvelles » de sa bouche et surtout pas se retrouver enfermée dans son bureau. Seule.

Tête baissée, la rouquine se dirige vers la table que Tay venait de désigner. Manteau, sac et arrière train désormais posés sur la chaise, elle lui fait de nouveau face. « Je suis… toute ouïe. » Entièrement. De A à Z. Depuis le jour où tu as pris l’avion pour traverser l’Océan Atlantique jusqu’au jour où tu l’as repris dans l’autre sens. Savoir où se trouve ton nouvel appartement, à moins que tu aies conservé l’ancien tout ce temps… Tout. Absolument tout.

je n'savais pas trop à quoi m'attendre. ni à un oui, ni à un non. la plus grosse stupéfaction était surtout de la voir aujourd'hui. je n'm'étais pas préparé mentalement, le scénario que je m'étais fait de ce moment n'était pas encore à point.  c'était trop rapide, beaucoup trop rapide. et qu'allais-je lui dire maintenant? lui parler de ma mère, peut-être? d'la bonne bouffe de ma grand-mère? à ce stade, je me voyais mal me confier sur à quel point elle m'avait manqué, entre deux tranches de rancune. « Je suis certaine que tu en as des choses à raconter. » puis, elle avait sourit de nouveau. je n'étais pas plus à l'aise, pas plus confortable. j'avais légèrement sourit, en hochant la tête. j'me demandais si j'allais être honnête, sur ce coup. si j'allais lui balancer comment j'm'étais senti, là-bas. comment j'aurais tout fait pour revenir à l'arrière. l'nombre de fois où j'avais pensé revenir. l'nombre de fois où j'avais regardé les billets d'avion, en me convainquant que c'était inutile, que rien ne s'arrangerait. que tout s'empirerait. elle s'était assise, puis j'avais fait d'même, avant d'la regarder dans les yeux un bon moment. « Je suis… toute ouïe. » j'avais soupiré, puis m'étais passé les mains dans le visage.  « tu ne m'aides pas vraiment.. » j'avais légèrement rit, en me demandant ce que je devais dire, et c'que je devais éviter de dire. loooong, très long silence. grande respiration. « tu pourrais croire que j'me suis trouvé un boulot là-bas, et que j'm'y suis donné à fond. tu pourrais également croire que j'ai profité des plages, du soleil, des trucs que nous ne retrouvons pas toujours à paris, disons. » rire, pause. « tu pourrais croire que .. j'étais heureux, que j'pleurais de rire à tous les jours, que j'avais une vie sociale plus élevée que jamais. tu pourrais croire que j'me suis fait une copine, dont qui j'suis tombé follement amoureux, ou que j'me suis tapé plein de fille, puisque c'est tellement mon genre. ou pas. » deuxième moment de silence. et mes yeux alternaient de la table à son regard, pour finalement s'fixer sur son regard. « tu pourrais croire que paris ne me manquait pas. que ma vie ici ne me manquait pas.. » coup d'oeil nerveux à ma montre. même si j'me foutais du temps. « sephora .. je n'ai rien fait, au brésil. rien. mis-à-part penser à toi. une fois de temps en temps. » ou une seconde sur deux. j'avais souris, comme pour détendre l'atmosphère qui était à son comble -ou pas du tout-. « je n'ai .. rien fait. du tout. et j'pense pas que ça m'ait fait.. du bien. » parce que s'retrouver avec soi-même H24 c'pas forcément ce qu'il y a de mieux, dans la vie.

Elle l’écoute, boit littéralement ses paroles, sans l’ouvrir une seule fois, comme quoi c’est possible de la faire taire par moment. Cependant, Sephora n’est pas capable de lui cacher son étonnement. Chaque mot. Chaque phrase. Elle fronce les sourcils quand il coupe son récit pour réfléchir : la tention est presque à son comble. C’est exactement ce à quoi elle s’était attendue : que Tay s’amuse et soit heureux au Brésil, qu’il trouve une fille bien aussi, bref qu’il fasse tout ce qu’il n’avait jamais fait ici. Et pourtant, rien de tout cela. « sephora .. je n’ai rien fait, au brésil. rien. mis-à-part penser à toi. une fois de temps en temps. » Elle a beaucoup cligné des yeux. Comme jamais. Cette révélation… Ce n’était pas du tout prévu au programme. « Moi aussi j’ai pensé à toi », reste bloqué au fond de sa gorge. Beaucoup. Au final, elle en apprend beaucoup et si peu à la fois. « T’as eu raison de revenir alors. » Pause. C’est sorti tout seul, sans la moindre satisfaction dans sa voix, sans le moindre sourire, mais surtout sans le moindre sous-entendu. De son point de vue, Tay a eu raison de revenir pour lui. Avant de frôler la folie, il avait bien connu une période tranquille dans vie, non ? La jeune femme avait connu un Tay drôle et souriant. Dans le cas contraire, il aurait été un excellent menteur et elle va se mettre à faire un tas d’idées. « Enfin je veux dire par là que ça te changera les idées, te fera probablement du bien de… revoir certaines personnes, rencontrer d’autres retrouver des habitudes. » Pause, encore. Ces besoins de précision et de justification sont toujours plus forts qu’elle. « En dehors de vivre à et pour ton travail, tu vois ? » Regard compatissant. Quoiqu’il ait pu se passer et quoiqu’il puisse encore se passer entre eux, Sephora tient à ce qu’il finisse par remonter la pente. Quitte à se croiser tous les matins dans ce café, autant qu’il aille mieux. « En tout cas… Je suis… » Touchée ? Ravie ? Contente ? Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire non plus. Oui, elle est contente, quelque part, qu’il soit revenu. Voilà enfin l’instant où elle agrémente son visage d’un sourire franc, petit bout de bonheur, malgré une certaine rengaine qui perdure toujours. « Merci de me dire la vérité. »