HOME WAS WHERE SHE AND HIM WERE TOGETHER.

CARENA ♥ « Millions and millions of years would still not give me half enough time to describe that tiny instant of all eternity when you put your arms around me and I put my arms around you. »

J’évitais tout sujet houleux avec Savannah, la trouvant encore trop frêle. Déjà que d’ordinaire elle semblait si innocente et fragile. Avec tout ce qui lui retombait dessus je craignais le moindre faux pas. N’allez pas penser que j’adopte le même comportement avec d’autres. Je me suis jurée de garder un œil sur elle, et Jeff m’a toujours fait promettre de veiller sur elle. Le retour d’Enzo ? Pretty Liar qui me l’avait annoncé, je parlais avec la jolie Walsh aussi souvent que possible mais nos discussions se tournaient essentiellement vers les jumeaux. Sur ma princesse Aloysia, le rythme prenant de mes études ou bien sa remise en question professionnelle. Savannah ne savait toujours pas qu’avec Casey nous traversions une tempête, et que si d’habitude nous arrivions à en sortir toujours aussi soudés cette fois ci semblait la fois de trop.
En m’avouant qu’il n’avait plus de contact avec elle, je ne pouvais réprimer une certaine jubilation. Par pur égoïsme de ne pas avoir à m’infliger sa présence. Je savais que je ne le pourrais pas, que mon sang méditerranéen extrapole les moindres de mes émotions, les décuplant à une puissance infinie. En plus du perfectionnisme et de l’ambition, la jalousie pouvait aspirer mes tripes, et me rendre capable du pire. La vision même qu’il partage du temps avec une autre femme suffisait à me faire briser un verre… Qu’est-ce que serait le supplice de devoir les avoir à côté de moi lors d’une soirée censée se dérouler entre ami-e-s. Casey le savait aussi fort qu’il pouvait le sentir. Notre relation pouvait nous être aussi enrichissante que nocive ; et si auparavant l’un de nous deux pouvait tendre la balance vers une égalité parfaite à présente celle-ci allait aux antipodes de tout ce que nous avions vécu. Qu’il voie en Savannah un échappatoire, ne me dérangea guère. Au contraire je préférais le laisser dans cette pensée là, dans la perspective que je n’aurais plus jamais l’envie de le revoir.

Insouciante, totalement naïve. Casey tu l’as dans la peau résonna cette fameuse conscience que tu le veuilles ou non vous êtes liés. Stop. Inspiration, expiration. Ce n’est pas cette chose qui me bloquerait, qui nous coincerait dans notre impasse. Il fallait qu’on aille de l’avant, qu’on se détache l’un de l’autre. Le laisser aller voir ailleurs, se sentir aimer par une autre. Un nœud se forma dans mon estomac, douleur encore plus forte que celles du ventre supportées quelques jours plus tôt. Ma raison me dictait une action, mon corps agissait dans tout son contraire. Serrant le poing et niant cette bataille intérieure à laquelle j’assistais impuissante. Je préféra revenir aux basiques ; à l’ignorance et à la bassesse. « La mienne aussi finalement. » Chieuse jusqu’au bout, briseuse de nerfs ambulante. On lui accorderait pourtant tout le bon vouloir du monde à cette jeune femme.
Pourquoi seulement le bon vouloir quand on peut avoir cent fois plus ?

Face à sa déclaration, le nœud laissa place à des frissons. J’avais tout fais pour éviter ce moment, cette phrase. Phrase que je redoutais mais qui semblait pouvoir panser des blessures. Laisser même penser à un arrangement, un nouveau départ. N’importe quoi qui me prouverais que Casey n’était pas en train de me filer entre les doigts. Je ressentais encore le besoin d’entendre ses mots, en ayant l’utopie qu’ils pouvaient agir magiquement. Une sorte de poussière de fées nouvelle génération, une preuve que notre lien était indestructible. Qu’on ne contrait jamais le pouvoir d’un amour véritable.
Tous à côté avec leurs histoires tragiques, et à peine supportables n’avaient rien à envier. Avant nous étions uniques, je me sentais encore plus forte à ses côtés. Maintenant nous étions comme les autres ; forcés de passer par de multiples détours pour se séparer.
Tu m’aimes c’est ça ? Pourquoi ne pas le prouver pile maintenant. Pourquoi ne pas te battre pour montrer que tu y crois encore. J’étais à deux doigts de craquer Casey, mes poings encore serrés un moyen comme un autre d’empêcher un torrent de larmes s’échapper de mes yeux. J y ai cru à ce rendez-vous-même si je te donnais l’attitude opposée. Et là les battements de mon cœur étaient si violents que mes tempes s’en souviendraient longtemps. Les questions se bousculaient, « m’aimeras-tu encore ? » la première.
Je nous connais trop Lockart, je serais fière et heureuse les premiers mois et ensuite tu me manqueras. Enfin non tu me manques déjà là maintenant. Mais ce manque là sera différent, il me rendra encore plus intransigeante et guerrière. J’essaierais de garder le contact en abusant de messages pour des motifs puériles, tout ça pour éviter de te croiser face à face.
Et te voir heureux.

J’avais tellement peur de ça, de te voir heureux grâce à une autre. Que tu puisses lui dire ces trois mots enfin nos trois mots avec une aisance déconcertante. Que tu te mettes à parler de moi au passé, que tu me ranges dans un tiroir de ta mémoire et qu’en pensant à moi l’affirmation « j’ai trouvé mieux » clignote dans ton esprit. Notre situation me tue, le quotidien a eu notre peau. Et ne pense pas que j’en suis fière, je le regrettais amèrement. Baissant la tête, une sensation de vertige qui coupa court à tout le reste. « Pense bien à cette phrase la prochaine fois quand tu l’as diras à une autre. » Love, hate such a fine line. Décidément l’idée même que tu puisses aller de l’avant me donne envie d’hurler. Invoque toutes les divinités pour que je ne tombe jamais sur elle.

Et là comme si nous ne souffrions pas assez, la conversation prit un énième virage. Une nouvelle déception, et cette sensation de n’être pas prise au sérieux. Osait-il mettre en doute ce que j’avais vécu ? Me pensait-il capable de ce genre de mensonges ? J’ai eu besoin de toi Casey c’est aussi simple que ça. Te connaissant je te sentais bien capable de me poser la question de savoir si cet enfant était le tien ou non. Voilà pourquoi j’ai préféré garder ça pour moi et daigner espérer que tu ne fasses une apparition ( même brève ), n’importe quoi… « Je ne sais même pas pourquoi je t’ai raconté ça en fait. » Répondis-je déçue et fataliste. L’expression de mon visage se tordit d’amertume, et de rancœur. Il me rendait coupable de mes craintes, me renvoyant en pleine figure des responsabilités n’émanant même pas de ma personne.

J’ai pris conscience que je t’ai mené la vie dure depuis quelques semaines. Mais j’étais prête à passer à autre chose. Cependant pas à un tel nombre de sacrifices. La soumission c’est terminé. Se voiler la face encore plus. Une nouvelle phrase qui ne fût pas du goût de mes oreilles, j’en pensa même à saigner. Penses-tu que la réciproque n’est pas applicable ? Ais-je l’air d’une femme parfaitement heureuse de ce qu’elle fait ? En croisant son regard je n’ai pas eu à avoir le son, la vue me suffisait amplement. Casey disposait d’une acuité à transmettre des émotions rien qu’à l’aide d’un regard.
Et celui-ci atteignait mon cœur en plein milieu. Le voir pleurer m’est insupportable, il m’en venait des idées de vengeances durant ces rares fois. Aujourd’hui j’en revêtais l’implication, j’avais réussi à le rendre quasiment malade. Tourmenté, troublé, triste, et blessé. « Je t’aime. Je t’aimerai toujours. » Ajoutais-je d’une voix liquoreuse, il attendait un retour. Cette déclaration pour lui montrer que ses larmes me touchaient plus que je ne le montrais. Que j’aimerais toujours. Que notre histoire avait beau marquer une pause, une issue bien plus heureuse se dessinerait plus tard. It wouldn’t be my world without you in it.

Je n’attendais plus rien, je ne cherchais même pas à obtenir de réponse. C’était la fin. Inutile de le rattraper ou de courir après lui. Je devais le laisser s’éloigner pour mieux revenir vers lui ensuite. Quand nous serions prêts. Ma main tendue chercha à effleurer son avant-bras sans succès, mes laborieuses tentatives de contacts coupées net. En un tantième battement de paupières il avait filé.
Me laissant assise, face à une chaise vide.
La serveuse apporta ma commande, je sentis à son regard qu'elle se délectait de ce qui venait de se passer. Son allure faussement réconfortante, bienveillante qui jubilait de voir une de ses parfaites jeunes femmes tomber de leurs piédestal. Balayant du revers de la main la chope qui atterrit sur le sol fraîchement nettoyé, mes lèvres formèrent un oh de surprise. L'émotion mon petit chat, l'émotion... Aucun mot d'excuse ne sortit de ma bouche, ni même une quelconque commande.
Me redressant, démarche impérieuse. Mon visage afficha un rictus mauvais, les sachets balancés d'avant en arrière. The head bitch is back and you're gonna all enjoy the ride.

If two people are meant to be together, eventually they’ll find their way back.