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 (louise) fix you

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MessageSujet: (louise) fix you   (louise) fix you EmptyDim 3 Nov - 2:19

Evidemment qu'il n'était qu'un raté, Octave. Même pas foutu d'aimer quelqu'un tranquillement, dans son coin, sans emmerder tout le monde autour. Même pas foutu de faire ce qu'il aimait. Même pas foutu de lire, même pas foutu de s'abstenir de fumer, même pas foutu de trier les affaire de son frère. Pauvre con. Bien sûr que oui t'es un raté.
Alors, le froid de novembre arrivait. Parce qu'il arrive toujours, le froid, tôt ou tard mais il arrive. Et de toute façon, personne n'avait plus le coeur à la chaleur de l'été. On n'en voulait plus, du chaud. La chaleur, c'est les vacances et le bonheur. Et depuis quelques temps, le bonheur était parti, ses petites valises dans les mains, sans dire au revoir, en faisant un doigt d'honneur magistral, comme un ingrat qu'on ne pense plus revoir avant longtemps. Ou plus jamais. Lui aussi c'est qu'un pauvre con, à s'en aller comme ça. C'est que tu le méritais pas, le bonheur, alors.

Et puis, malgré le vent de novembre, il y avait encore la petite poupée de porcelaine, toute fragile et effroyablement belle qu'on en avait la tête qui tournait et le coeur qui chavirait. Louise. Louise et ses grands yeux, Louise et son teint pâle, Louise, la merveilleuse. Comme un petit rayon de soleil à elle seule dans un nuage gris, comme un ange au milieu de la foule.

Alors, Octave, il avait honte, presque, de lui avoir envoyé ce message. Il avait été sec. Pourtant, ça faisait combien de temps qu'il ne l'avait pas vue ? Trop longtemps. Il était égoïste, juste égoïste. Cependant, ce n'était pas l'envie de la voir, de la sentir, qui manquait. Non, depuis la mort de Thibault, il se sentait mal, bien trop mal pour faire comme si c'était juste un accident, ou juste un suicide. Il n'arrivait pas à prendre la gueule du mec qui n'a rien à se reprocher. Non, il ne pouvait pas. Il avait tout à se reprocher. De eux six, du malheur de qui n'était-il pas responsable ? Alors, même s'il l'avait aidée, Louise, il l'avait bousillée en même temps. Est-ce que ça en avait valu la peine ? C'était juste s'il avait pu soutenir son regard à l'enterrement de Thibault. C'était juste s'il lui avait adressé la parole. Il s'était même demandé si ça n'aurait pas été déplacé d'y assister. Evidemment que c'était déplacé, on ne va pas à l'enterrement de ses victimes. Demeuré.
Elle était si gentille avec lui. De quoi pouvait-elle se douter ? Il se dégoûtait. Pour éviter de lui faire du mal, il lui avait fait du mal. Faut vraiment être con.

Dix-neuf. C'était le nombre de cigarettes fumées depuis ce matin. Et la vingtième arrivait, là, au coin des lèvres, prête à se faire brûler et prête à causer des problèmes pulmonaires. Et le son caractéristique du briquet sur le chemin du Louvre se fit entendre d'Octave seul, comme un murmure. Ce chemin, il ne le connaissait que trop bien. Depuis son magasin, il lui fallait exactement trente-quatre minutes pour s'y rendre à pieds, soit le temps de fumer deux cigarettes pour arriver sans sentir la fumée près de Louise. Pourtant, le Louvre, il n'y foutait jamais les pieds. Il n'aimait pas les musées, de toute façon. Il peinait à comprendre en quoi se poster devant toiles pouvait s'avérer réjouissant pour quiconque, mais c'était ainsi. Si Louise aimait, alors il n'avait rien contre. Pour elle, il aurait presque pu s'y intéresser, seulement, vraiment, il n'y arrivait pas. Alors, à chaque fois qu'il était venu la chercher, comme aujourd'hui, en fin d'après midi, ils allaient faire un tour quelque part, dans un café, dans un parc, peu importait. Il s'en fichait, Octave, du moment qu'il était avec elle. C'était l'important. Le reste, c'était dérisoire.
Pas aujourd'hui.

Il devait lui demander. Il avait besoin d'elle, il ne se sentait pas d'y arriver tout seul. Et puis merde, ça fait plus d'un mois, tu peux faire le tri, maintenant, sinon, tu pourras jamais payer ton loyer tout seul, crétin. Il fallait libérer la chambre. Celle de Thibault. Il fallait faire le tri. Le balayer, lui dire au revoir pour de bon. Renvoyer ce que papa et maman demandaient au pays, et balancer le reste. Tant pis pour la valeur sentimentale, elle n'avait plus sa place ici. C'était trop tard pour ça. Le suicide du fils prodige. C'est moche, hein ?
Ouais c'était moche. Et surtout, c'était tard pour regretter.

Et puis, trente-quatre minutes après qu'il eut fermé le magasin, il la vit. Quand elle était dans les parages, il ne pouvait voir qu'elle, elle et son voile de tendresse. Seulement, à la réflexion, il n'avait qu'une seule envie ; faire demi-tour. Il ne voulait plus s'expliquer. Il voulait garder tout ça pour lui dans un coin de sa tête, consulter un psy si c'était nécessaire, mais affronter Louise, lui dire, ça, c'était au dessus de ses forces. Parce qu'assumer un tel acte, ça n'est pas possible. Ça ne s'assume pas. Pas son propre frère. Il ne pouvait pas se pointer comme une fleur, devant elle, qui le croyait étranger à toutes ces affaires. Oh, au fait, Louise, j'ai un peu oublié de te le dire avant, mais Thibault, il ne s'est pas exactement suicidé. Oui, en fait, j'l'ai tué sans trop le vouloir, mais que veux-tu, c'était toi ou lui.

« Salut. » Sourire gêné, mains dans les poches. Non, ce ne serait pas tactile aujourd'hui. Il ne l'avait pas vue depuis trop longtemps pour ça. C'aurait été impoli. Et puis, peut-être qu'elle non plus, elle ne demandait pas mieux qu'une certaine distance. Ou peut-être pas. Quoi qu'il en soit, le temps n'était pas aux signes d'affection. Non, résolument, il se sentait trop coupable vis-à-vis d'elle pour se permettre une telle proximité. « C'est sympa de m'accorder du temps. Et... Oui, dis-lui maintenant si ça te fait plaisir, au moins, ça sera fait. Toute façon, dans le pire des cas, elle te dit non, mais tu sais bien qu'elle est trop polie pour décliner. J'ai besoin de toi, en fait. Tu sais, le mec qui est clamsé chez moi, là ? Bah, dans l'idéal, faudrait débarrasser, quoi, si ça te gêne pas. Ouais, tout seul c'est pas très drôle, tu comprends. C'est débile mais... Faudrait vider la chambre de Thibault. Et j'y arrive pas. » Evidemment que t'y arrives pas. T'as déjà essayé au moins cinquante fois, mais t'oses même pas mettre un pied dans cette foutue chambre. Et puis, tu crois que Louise va se pointer et que ce sera plus facile ? Oui, t'es vraiment un raté, toi.
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(louise) fix you

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