Ca fait maintenant quelques semaines que j'ai retrouvé Noah par le plus pur des hasard. On s'est revus au moins 3 fois depuis cette fameuse journée où il m'a accosté sur la terrasse d'un café. Et dire qu'à la base, il était surtout venu pour me draguer. Cette pensée me fait toujours sourire, même quelques semaines plus tard. Et c'est lorsque je rentre du centre de loisir où je travaille pendant les vacances, que je décide d'envoyer un sms à Noah afin de l'inviter chez moi le soir même. C'est un vendredi soir, l'idéal pour commencer à se détendre de la semaine passée à travailler comme des dératés. Autant dire que dans le métro – bondé, pour changer, les gens ne sont pas vraiment loquasses alors je me fais un plaisir de répondre aux sms de mon meilleur ami d'enfance. Je dois d'ailleurs être la seule à sourire dans cette rame, pour des sms, qui plus est. On m'a toujours dit que 'j'exagérais trop mes sentiments', en partie parce que je pleure presque tous les jours. Quand on me donne une mauvaise nouvelle, quand on m'en dit une bonne. Bref, tout le temps. J'en suis pas au point de pleurer pour quelques sms, mais lorsque je vois 'Noah vous a envoyé un sms' sur mon écran, je ne peux m'empêcher de sourire et de me hâter à lire. C'est vrai, je suis contente de l'avoir retrouvé, contente de pouvoir lui raconter tout ce qu'il a loupé, contente de me remémorer des moments passés avec lui. Il est une bonne partie de mon histoire, une bonne partie de mon enfance, alors... ça a été difficile de passer l'éponge sur lui et de continuer tout ça sans lui. Y'a eu un grand moment de vide, je crois que je n'ai pas vraiment rit pendant plus d'un an et je ne suis retourné dans le bois qui se trouvait derrière sa maison que plusieurs années après. Et ça avait beaucoup, beaucoup trop changé. Pour résumer, mon enfance était partie en même temps que Noah et ça avait été dur à vivre. Enfin, le rendez-vous était fixé, chez moi. Parce que j'avais envie de lui montrer l'endroit où je vivais, bien que ça ne soit pas extraordinaire. Dans le 20ème, j'avais réussi à trouver un T4 de 80m² pour 800€ par mois, autant dire que j'avais un peu sauté sur l'occasion. Avec 800€ à Paris, c'est pas commun d'avoir plus qu'une pièce, alors je m'estime vraiment chanceuse.

Je rentre chez moi, pose mes clefs sur un meuble près de la porte et avance dans mon appartement. Je pose mes affaires et me met directement à réfléchir à ce qu'on va bien pouvoir manger, et à réfléchir à ce que j'ai niveau gâteaux apéritifs et alcool. Lorsque la sonnerie de l'interphone retentit, je délaisse ma cuisine quelques secondes pour ouvrir et j'attends qu'il monte en disposant les bouteilles pour l’apéritif sur la table basse. Quand il toque à la porte, je vais ouvrir, un sourire aux lèvres. « Salut ! » dis-je, tout en le prenant dans mes bras. Je me met sur le côté, le laissant faire quelques pas dans l'appartement pendant que je ferme la porte d'entrée. « Tiens, donne ton manteau, j'vais aller le mettre en haut ! » dis-je, tout en restant près de lui afin de réceptionner le-dit manteau.

J’aime mon job, non c’est même pire que ça : j’adore mon job. J’aime le fait d’être celui qui s’assure de la couverture médiatique d’une personne. C’est vivifiant, je décide de l’image a renvoyer. En fait mon travail s’apparente beaucoup a du marketing et je pense que quelqu’un qui fait du marketing a fait beaucoup de communication, tout comme j’ai fais beaucoup de marketing en communication. C’est pareil. On travaille sur une image. Sauf que moi, je travaille sur l’image d’une célébrité. Bon mon client n’est pas connu, j’ai commencé ce boulot il y a seulement deux ans donc en même temps il est tout à fait normal que je ne bosse pas encore avec, je sais pas, le président. Et pourtant dieu sait qu’il en aurait besoin. Bref, la journée passe et comme ce soir ce monsieur n’a pas de conférence de presse ni rien je m’apprête à rentrer chez moi sauf qu’avant de rentrer dans ma voiture je reçois un sms de la part d’Alexa. Je m’arrête sur le trottoir et ouvre le message. Elle m’invite a venir chez elle ce soir. Un petit sourire aux lèvres je tape rapidement un message en retour pour lui demander à quelle heure elle m’attend chez elle. Sur ce, je range mon téléphone portable dans la poche de ma veste et entre finalement dans ma voiture pour me rendre chez moi. Je n’ai pas énormément de temps puisque Alexa m’attend dans deux heures et rien que le trajet est plutôt long. Paris est une grande ville, mine de rien. Je retire ma veste que je laisse choir sur le canapé avant de laisser mes chaussures trainées ma chambre, je défait ma cravate – ce qui fait un bien fou – et retire mes vêtements afin d’aller prendre une douche. L’eau chaude est si agréable que j’y resterai bien des heures mais je dois aller vite et déjà que je mets des heures dans ma douche, j’ai perdu pas mal de temps. Après la douche je vais enfiler un jean et une chemise, c’est bien plus confortable que les vêtements que je dois porter pour le travail où tout n’est qu’apparence. En sortant du travail j’ai l’air de l’homme que je ne suis pas, parfait, classieux, un peu snob aussi peut être mais je ne suis pas comme ça. Là, maintenant, c’est le vrai Noah que je contemple dans le miroir. Je récupère mes souliers pour le boulot et les range dans un placard avant de prendre une paire de mocassins confortable et de jeter un œil à la montre. Il me reste encore un peu de temps donc je vais me poser dans le canapé pour regarder la télévision un petit moment. C’est nul, comme toujours, mon regard dévie souvent sur ma montre et quand finalement je me rends compte que je devrais y aller si je ne veux pas être en retard je me lève et enfile ma veste, j’attrape mes clés et sort de l’appartement. Je me rends ensuite chez Alexa dans ma voiture, je déteste les transports en commun, déjà parce qu’une fois sur deux ça n’avance pas et en plus on est tous collés les uns contre les autres, y’a ceux qui jouent de l’accordéon tout près de ton oreille enfin bref, je déteste le métro. Quand j’arrive chez Alexa je sonne à la porte et la jeune femme ne tarde pas à venir m’ouvrir, je souris alors qu’elle prend la parole en premier. « Salut ! » Fait-elle en me prenant dans ses bras, automatiquement mes bras se referment autour d’elle pour l’enlacer à mon tour, je souris, content d’être avec elle. « Salut. Tu vas bien ? » C’est la phrase type pour commencer une conversation mais elle fonctionne plutôt bien cette phrase, pourquoi en changer hein ? « Tiens, donne ton manteau, j'vais aller le mettre en haut ! » Je hoche la tête alors que je retire ma veste avant de la lui donner. Je m’avance dans son appartement à sa suite et admire la décoration. C’est exactement comme ça que j’imaginais Alexa vivre en fait, c’est un peu bohème, je me suis bien dans son appartement car il est chaleureux : comme elle. Elle redescends finalement et rien que la voir me fait sourire. « Va falloir que tu me racontes, au fait, tout ce que tu as fait depuis… Que je suis partit. » J’aime pas tellement repensé à ça, c’était déchirant et franchement je pense que ce n’est jamais vraiment passé, j’ai juste appris a vivre avec. Comme tout le monde, comme pour tout.

Souriante, épanouie, enjouée, c'est ainsi que je me présente à lui lorsqu'il arrive. Avant même d'ouvrir la porte, mon sourire était accroché à mes lèvres, parce que je savais pertinemment ce qui se trouvait derrière et cela me plaisait vraiment. Lorsque je vois la forme matérielle de ce à quoi je m'attendais, mon sourire devient naturellement plus large puisque je suis contente de le voir, contente de pouvoir le sentir contre moi lorsque nous nous enlaçons tout en nous saluant. On a jamais vraiment perdu cette capacité à être tactile l'un avec l'autre, à être sincère, à la fois par nos paroles et par nos gestes. Je sais et je n'ai aucune hésitation sur ce sujet... Je sais que notre amitié est restée intacte et que j'ai retrouvé l'enfance que j'avais perdu lorsqu'il avait quitté la Belgique en me laissant derrière lui. Je sais également que derrière nos apparences d'adultes responsables et matures se cachent toujours les enfants que nous étions autrefois. Ma personnalité enfantine ressort dès que Noah arrive dans mon champ de vision. Je redeviens Alexa, la petite fille aux bouclettes brunes, fragile et souriante, une petite poupée. Je n'ai d'ailleurs jamais réussi à quitter cette image de poupée fragile et souriante, je suis toujours la même, avec seulement plusieurs dizaines de centimètres de plus. « Ca va très bien ! » Surtout maintenant que tu es de retour dans ma vie. « Et toi ? » je demande, tout en prenant son manteau. Je me retourne légèrement pendant que j'écoute sa réponse, avant de monter doucement les marches afin de déposer son manteau sur mon lit. De cette façon, celui-ci ne traîne pas dans le salon et ne subira aucun problème, pas de verre renversé sur celui-ci, rien de tout cela. Je redescend les marches deux par deux, pressée de pouvoir enfin commencer à passer ma soirée avec lui. Je le retrouves à l'endroit où je l'ai laissé, souriant. Je m'approches, tout en pensant qu'il va falloir que je retournes dans la cuisine quelques minutes afin de finir ce que j'ai commencé à préparer. « Va falloir que tu me racontes, au fait, tout ce que tu as fait depuis… Que je suis partit. » dit-il, pendant que je l'invites à s'asseoir sur le canapé. Je prends une légère inspiration, tout en demandant avec un sourire et un léger rire enjoué : « Tu me demandes vraiment de te résumer seize années de ma vie, comme ça ? » Je ne suis pas sûre qu'il le prenne bien ou qu'il n'en soit pas blessé, mais je n'espère pas. Le Noah que je connais sourirai simplement un peu timidement et ne ferai pas plus de remarque. Je souris, ne lui laisse pas le temps de répondre avant d'ajouter un : « Excuse-moi, il va falloir que j'aille vérifier que tout n'est pas entrain de brûler... ». Je me lève ensuite, souriante toujours et l'invite à me suivre et à s'asseoir sur l'un des tabourets qui permettent de s'asseoir près du bar qui fait la transition entre la cuisine et reste de la pièce à vivre. Je lui tourne le dos et constate avec grande satisfaction que je suis dans les temps et que ma préparation n'a pas grillé dans la poêle. « Si ça te dérange pas... je vais tenter de finir tout ça, tout en répondant à ta question de tout à l'heure. » Je commence, tout en faisant sauter les patates dans la poêle. « Je sais pas par où commencer... » dis-je, tout en regardant distraitement le mur devant moi, incapable de réellement me concentrer sur ma cuisine. Et puis, j'ai déjà les larmes aux yeux, ce qui n'arrange rien. « La première rentrée sans toi, d'abord... Elle a été terrible, parce que je me sentais totalement seule et c'était la première fois que je n'étais pas dans ta classe, la première fois que tu n'étais pas là pour me tenir la main avant que mon nom ne soit prononcé par la directrice. Le premier jour ne s'est d'ailleurs vraiment pas bien passé et j'ai finit par rentrer chez moi à midi parce que la maîtresse n'arrivait pas à arrêter de me faire pleurer. » Je m'arrête, je me retourne, afin de lui demander gentiment. « Ca t'ennuie pas hein ? Enfin... je sais que c'est pas forcément la partie de mon histoire que t'as envie d'entendre, mais je crois que je dois commencer par là... Je crois... » Je me baisse soudainement afin de regarder dans le four si ce n'est pas non plus entrain de cramer, mais tout semble aller pour le mieux. « En tous cas, je ne dis pas ça pour te faire culpabiliser hein, sois en sûr. De toutes façons, t'y étais pour rien et t'y es toujours pour rien. »