©Cristalline

« Je me présente : Nolaan Ugo Lambert. Un prénom aux sonorités plutôt étrangères pour un nom de famille typiquement français. Mon père dit que mon prénom a été choisi par ma mère - avec son accord évidemment – qui était d'origine anglaise. Je ne l'ai pas connu, elle est décédée en me mettant au monde. Et je dois avouer, que ce serait trop simple d'affirmer qu'ainsi, je ne peux pas souffrir de sa disparition. À vrai dire, je m'en suis toujours voulu et ce, depuis mon plus âge. Pour moi, c'est de ma seule et unique faute si elle n'est plus de ce monde aujourd'hui. Ma seule et unique faute si mon père a été plongé dans le chagrin des années durant... Oh évidemment, il a tout fait pour me convaincre du contraire et me rassurer concernant cette histoire. Mais rien n'y fait. Encore aujourd'hui je porte ce poids sur les épaules. Ce n'est pas facile tous les jours, mais j'ai appris à vivre avec, à être heureux malgré tout. Mais il est clair que sans mon entourage, je n'y serais sûrement jamais arrivé.

Très vite, mon père est tombé sous le charme de la jolie Luna, une de ses collègues de travail. À l'époque, j'étais bien trop jeune pour comprendre ce qu'il se passait mais à force de la voir débarquer à la maison, elle est devenue comme ma mère. Si bien que ça m'a semblé totalement normal de la voir arriver avec ses valises pour s'installer chez nous. J'avoue avoir même été plutôt content ! Avec eux, je n'ai jamais manqué de rien bien que nous ne soyons pas riche non plus. Ils m'ont donné tout l'amour dont un enfant a besoin et je me plais à appeler Luna « maman » depuis que j'ai environ cinq ans. Allez savoir si c'est dû à la perte de ma mère biologique mais, j'entretiens une relation toute particulière avec ma belle-mère et mon père. Une complicité que l'on trouve peu dans les foyers de nos jours.
Mais ils ne sont pas les seuls à faire partis intégrante de ma vie, à être de ceux qui comptent le plus pour moi et pour qui je donnerais tout, sans compter. Je me suis toujours bien entendu avec tout le monde à Marseille, cette célèbre ville où je suis né et où j'ai grandi. Excepté évidemment avec ces racailles de bas étage qui semblaient éprouver une jalousie certaine à mon égard. Peut-être parce que j'étais proche des filles... (a) Mais au milieu de tout ce petit monde, une personne en particulier s'est toujours démarquée à mes yeux : la jolie Clémence. « Tu devrais rentrer maintenant. », cette phrase là, nous l'avons entendu des milliers de fois de la part de nos mères respectives pour finalement passer la soirée ensemble. Depuis notre plus tendre enfance, on ne s'est jamais lâché. Nous avons grandi au rythme de nos invitations ; un week-end chez l'un, un week-end chez l'autre. Ah ça, nous partagions une amitié et une complicité certaine, que tout le monde pensait indestructible. C'était vrai, jusqu'à ce fameux jour...

J'avais environ dix-sept ans quand j'ai appris toutes ces horreurs sur sa vie. Le coup a été dur à encaisser et pourtant, ce n'était pas le pire. « Nolaan, la mère de Clémence est décédée cette nuit. », le temps que l'information parvienne à mon cerveau, j'enfilais déjà une veste et claquait la porte derrière moi avant de courir jusque chez mon amie. Dieu, si seulement j'avais su tout ça avant. Si seulement j'avais pu la protéger, peut-être que nous n'aurions pas eu à subir tout ça. Je courrais comme jamais je n'ai couru, sans m'arrêter pour au final découvrir que... Clémence, MA Clémence n'était plus là. Portée disparue, avec sa sœur. Tss, et la police ne s'est pas foulée pour les retrouver malgré ce qu'il venait de se passer. Ô combien j'ai pleuré cette nuit là et les jours qui suivirent. C'était une première pour moi : perdre un être cher, celle avec qui j'ai grandi, celle que j'aime. Encore aujourd'hui je refuse de l'admettre, je ne peux tout simplement pas gâcher notre si belle amitié avec de stupides sentiments. Mais j'ai vraiment souffert de son absence. C'était pire encore de me dire que je ne savais strictement rien de ce qu'elle était devenue. Était-elle morte ? En fuite ? Recommençait-elle une nouvelle vie loin d'ici, loin de moi, où son passé l'avait-elle rattrapé ?

Les années passèrent. Des années pendant lesquelles j'ai fait de mon mieux pour remonter la pente. À vrai dire, je me suis simplement contenté de cacher ma peine derrière des sourires et regards enjôleurs. C'est à cette période-ci que je suis devenu totalement accroc à la cigarette. Ça me permettait de me déstresser et de tenir bon. Bien sûr, comme n'importe quel jeune d'aujourd'hui, je me suis pris des cuites durant des soirées où j'étais convié. Tout mes potes pensaient que je faisais ça pour m'amuser, j'essayais de m'en convaincre également mais, ça m'aidait surtout à oublier. J'ai commencé des études de journalisme. Allez savoir si c'est à cause de cette histoire mais, je veux réellement travailler dans l'information. Révéler aux gens quelle cruauté abrite ce monde, toutes ces horreurs que l'on se plaît à nous cacher pour « notre bien ». C'est écœurant. Les filles dans tout ça ? Jamais rien de bien sérieux, à vrai dire. C'est vraiment con, mais je n'arrive tout simplement pas à me lancer dans une relation sérieuse et durable. Ainsi, j'ai limité mes relations amoureuses. Après tout, je n'ai jamais été quelqu'un de méchant malgré mes quelques airs de bad boy, je ne veux pas faire de mal aux autres. Certains commencent à penser que je suis gay, d'autres préfèrent affirmer que je suis un cœur brisé. Haha, les ragots. Ça me fait doucement rire malgré la part de vérité de la deuxième hypothèse.
C'est alors que je termine ma première année d'étude avec brio que des bouleversements surviennent à nouveau dans ma vie. Vous avez mis dans le mille : Clémence était de retour, cet été 2011.

« Nolaan, c'est toi ? », très franchement, je n'ai pas tellement su comment réagir sur le coup. Mon cœur cognait contre ma poitrine, à tel point que j'avais l'impression que ses battements étaient audibles à des kilomètres à la ronde. Ah, je me suis sentie con et pas qu'un peu ! À ce moment là, j'étais mal à l'aise de la voir débarquer soudainement de nul part alors que pourtant, hormis son absence, rien n'avait changé radicalement dans ma vie. En réalité, j'avais l'impression d'avoir mes sentiments écrit sur le front. C'était perturbant. Il m'a fallu quelques secondes pour me ressaisir, avant d'afficher un sourire immense et sincère comme je n'en avais plus fait depuis des lustres alors que je la prenait dans mes bras. Les choses n'avaient pas changer du tout entre nous et si je n'avais pas tant souffert, j'aurais pu me dire qu'elle n'était jamais partie. Comme si cette difficile période de ma vie n'avait jamais existé. Mais c'était trop dur. Et mon esprit est encore rongé par des interrogations sans réponses... Pourquoi avoir fuit de cette manière ? Pourquoi ne pas m'avoir contacté ? Jack leur avait-il fait du mal ? Trop de questions pour trop peu de réponses. Et en un rien de temps, la voilà repartie pour sa nouvelle vie, à Paris. Bien que nous gardions désormais contact, ce fut un déchirement de la voir me laisser seul à nouveau...

« Pourquoi ne continues-tu pas tes études à Paris ? », un rictus faussement amusé apparu sur mon visage face à cette question qui me semblait totalement dénuée de sens. Ce serait tellement stupide. Tout plaquer : ma famille, mes amis, ma ville natale, mes repères. Tout, pour rejoindre une seule et unique personne. Étrangement, cela fit sourire mes parents lorsque je le leur fit remarquer. « Oui mais, tu l'aimes. », tss ! N'importe quoi, les parents j'vous jure... C'est ainsi que je me suis retrouvé dans le train à destination de Paris, déjà inscrit dans un établissement pour continuer mes études. Une nouvelle vie ? Oui, et pas qu'un peu. Mais même si je commence doucement à accepter mes sentiments qui ne cessent de grandir, je continue de me demander à quoi est-ce que ça rime. La jolie brune ne ressent que de l'amitié envers moi, rien de plus. À quoi bon la rejoindre pour supporter de la voir dans les bras d'un autre mec ? C'est vrai, sa seule présence à mes côtés me suffit mais j'ai bien peur que toute cette histoire finisse par mal tourner. Mh, il est trop tard pour faire marche arrière de toutes façons, j'aperçois déjà la tour Eiffel... »