Je suis né à Montauban, une ville du sud. Oui je suis un vrai sudiste. J'ai toujours aimé ma ville, l'atmosphère, le soleil. D'ailleurs je crois que ma mère s'était installée là bas pour cette raison. C'était une parisienne pure-souche. Ses parents possédaient un hôtel particulier sur l'avenue Foch. Mais elle a quitté la pollution et sa famille pour s'installer dans le sud, après avoir rencontré mon père. J'ai donc grandi là bas. J'étais fils unique et j'avais quasiment tout ce que je voulais. Pourtant j'étais un gosse simple. Je passais mon temps dehors avec des amis. Très vite, je me suis rendu compte que les choses n'allaient pas entre mes parents. Ma mère criait souvent et finalement, alors que je devais avoir six ans ou sept, mes parents ont divorcé. Mon père est parti à l'étranger, à New York pour son boulot et depuis, on ne communique que par émail. Et encore, j'ai de moins en moins de ses nouvelles. Ma mère, elle, s'est remariée deux fois avant que je n'entre au collège. Je m'étais affirmé et il était hors de question que des mecs, autre que mon père, puissent avoir une quelconque autorité sur moi. Je crois que c'est à cette époque, que je me suis rendu compte que j'avais besoin d'indépendance. A la fin du collège, je suis partie à Marseille. Là, j'ai étudié mes trois ans de lycée dans un établissement privé de la ville. Un établissement à l'enseignement bilingue. La « maison » ne me manquait pas trop. Je n'étais pas du genre à vouloir revenir en arrière. Ma mère, mon père, faisaient leurs vies et je faisais la mienne. Et finalement, je me sentais bien loin de la maison. Je n'avais pas trop de mal à me faire des amis, j'avais même une certaine facilité. Avec les filles, c'était pareil. J'avais un physique qui attirait l'œil même si au départ je n'en ai pas joué. Je crois que cela ne m'intéressait pas encore. J'étais plus branché sport et soirées entre potes. Puis à l'obtention de mon baccalauréat, j'ai à nouveau déménagé. Je suis parti pour Paris. J'ai retrouvé quelques cousins et la famille de ma mère. Auparavant, je ne pouvais les voir que lors des fêtes familiales. Je suis entré à l'E.S.J pour débuter des études de journalisme. J'ai toujours aimé écrire et je dois dire que j'avais une aisance pour parler devant une caméra ou un micro. Je n'étais pas du tout timide, ce qui m'avantageait pas mal. J'ai étudié là bas pendant 3 ans avant de décrocher un boulot dans un journal de la capital, « Le Figaro ». J'ai gravi peu à peu les échelons et je suis devenu journaliste, spécialisé dans les nouvelles technologies, le web. Je dois dire que j'ai rapidement trouvé mes marques. En dehors du boulot, je suis devenu un véritable glotte-trotter. J'ai voyagé pas mal et visité la plupart des pays qui me faisaient envie, les États Unis, le Mexique, l'Afrique du Sud, l'Australie, la Japon. Autant je bougeais pour mon travail, autant je le faisais pour le plaisir. Entre temps, je vivais la vie de tous les gars de mon âge, je sortais, j'allais en boite, je prenais quelques psychotropes en soirée. Ce n'était pas une addiction même s'il m'arrivait parfois d'avoir la main lourde. J'essayais de tenir le coup face au rythme frénétique de ma nouvelle vie. Je sortais beaucoup pour décompresser et pour m'amuser. Je draguais. J'avais du succès auprès des femmes et la drague était devenue un jeu. Je ne jouais pas avec les femmes mais j'aimais savoir que mon charme agissait sur elles et que j'arrivais toujours à avoir ce que je voulais. Puis, il a fallu une rencontre. Une seule pour que je me rends compte que je n'avais plus envie d'une aventure sans lendemain. Elle était interne et c'était l'une des plus belles femmes que je n'avais jamais vu jusqu'à maintenant. Je l'ai dragué dès que mes yeux se sont posés sur elle. Elle semblait, si...différente. J'avais envie de la connaître, de passer du temps avec elle. Le jeu s'était transformé en quelque chose de plus sérieux. JE suis devenu sérieux. Oubliées les autres filles, je ne prenais plus leurs numéros, je ne draguais plus. Enfin j'aimais toujours savoir que mon charme opéré, mais cela n'allait jamais plus loin qu'une brève discussion. J'ai même arrêté de prendre des produits illicites. Jamie était devenue ma drogue. Je n'avais besoin que d'elle. J'étais sérieux. J'étais amoureux. Mais tout a été gâché par un bonhomme en blouse blanche qui m'a annoncé, il y a presque cinq mois, que j'avais un gliome oligoastrocytome de grade II. En plus clair, j'avais une tumeur au cerveau. Je m'étais bien rendu que quelque chose « cochait ». J'avais des migraines régulières très douloureuse. J'avais des troubles de la perception, j'avais parfois les mains qui tremblaient. Mais à vingt-quatre ans, j'étais loin de penser à ce genre de chose. Je pensais que j'avais toute la vie devant moi. Que j'étais maitre de ma destinée mais en fin de compte, j'étais juste un pantin, devenu désarticulé, désordonné. Cette nouvelle remettait tout en question. Je n'étais pas prêt à en parler, pas prêt à l'accepter. J'ai quitté le cabinet sans même prendre un rendez-vous. Avec Jamie, c'était devenu difficile. Plus elle se rapprochait de moi et plus je m'éloignais d'elle. Je n'avais aucune envie qu'elle sache. Je n'avais pas envie de sa compassion et encore moins de sa pitié. Mais je savais qu'elle était amoureuse et que j'aurais du mal à l'éloigner de moi. Alors j'ai joué les cons. J'ai dragué une femme lors d'une soirée en sachant pertinemment que Jamie y passerait après son boulot. J'ai joué le mec assez explicite pour lui faire comprendre que j'avais envie de me taper cette nana. Et vous savez quoi? Et bien cela a marché. Jamie m'a quitté. J'aurais du être soulagé mais je savais que je venais de briser quelque chose que je ne retrouverais jamais. Mais je l'ai laissé partir. Je ne l'ai pas retenu. C'était mieux ainsi, enfin je m'en persuadais. Au niveau du boulot, j'avais postulé pour entrer dans un magazine, les « Inrockuptibles ». J'avais un nouveau boulot mais je continuais à animer certaines émissions sur le câble et à la radio, des émissions musicales, ou des chroniques sur l'actualité. Je crois qu'on aurait pu dire que j'avais repris un peu les rênes de ma vie, sauf que Jamie a recroisé ma route. Elle m'a annoncé qu'elle était enceinte mais qu'elle ne voulait pas pour autant me revoir dans sa vie. Elle voulait se débrouiller seule. Je n'avais pas vraiment mon mot à dire. Alors encore une fois, je l'ai laissé à nouveau quitté ma vie. Mais cette fois-ci j'avais un goût amer dans la bouche. J'avais être papa. J'allais peut-être mourir et je ne savais plus vraiment ce que je devais faire. A quoi bon entrer à nouveau dans la vie de cet enfant, alors que j'allais probablement en faire un orphelin? Je devais rester loin d'elle. S'il se passait quelque chose, cela serait moins dur pour Jamie. Parce que malgré ce qu'elle pouvait penser, si j'ai agi comme je l'ai fais, c'était pour la protéger. J'ai toujours voulu la protéger, parce qu'elle le méritait, encore aujourd'hui.