il venait de naître. je n'étais qu'une erreur. l'erreur d'une enfant qui avait voulu jouer à la femme le temps d'une nuit et qui s'était brûlée les ailes. qui avait perdu. à peine né, elle m'avait déjà oublié, effacé de sa vie. comme si elle avait jamais fauté, comme si elle avait jamais trimé pendant des heures dans cette petite maison lugubre. elle voulait juste que je disparaisse. et c'est ce qu'ils ont fait. ils m'ont fait disparaitre sous ce grand manteau noir.

il n'était qu'un gamin. d'aussi loin que je me souvienne, j'ai jamais eu de véritable enfance. j'étais ce gamin emporté sous ce grand manteau noir, destiné à n'être qu'une boniche pour les restants de ses jours. j'étais ce gamin qu'on enfermait dans la cave pour éviter de l'entendre. qu'on enfermait dans le placard à la moindre connerie. et le grand manteau noir est devenu vieux. le grand manteau noir, il avait plus la force de me traîner à la cave pour oublier mon existence. le grand manteau noir, il a disparu. pour toujours.

il était prêt à tout pour exister. j'étais ce gamin frêle qui avait peur du noir, qui stressait au moindre bruit et qui peinait pour ne pas faire la moindre erreur. mais je voulais être plus que ça. je voulais me dépasser, faire comme les grands que je voyais traîner dans la rue à la tombée de la nuit. parce qu'il avait l'air si fort, si sûr d'eux. inatteignable. les rois du monde.

il était dans la merde. j'étais devenu l'un des leurs. très difficilement. on devient pas l'un des leurs en quelques jours ou quelques mois. je n'avais plus peur. du moins, c'est ce que je voulais faire croire. même si quand je me retrouvais tout seul, je supportais toujours pas d'être dans le noir. j'étais comme eux, je faisais partie de la royauté. la rue était mon terrain de jeu. je n'avais plus peur de rien. au fil du temps j'avais oublié que tout pouvait basculer du jour au lendemain. parce que j'étais comme eux, beaucoup trop sûr de moi. loin de l'idée qu'on pouvait m'avoir, moi aussi. un peu trop d'alcool, un black-out et je me réveillais à côté d'un cadavre. une arme à la main. avec la nette impression que tout ça n'était qu'une pauvre mise en scène et que j'm'étais bien fais avoir.c'est toujours le dernier arrivé qui doit porter le chapeau. le petit dernier était dans la merde. et je refusais d'avoir ce rôle. je devais fuir. fuir avant de me faire avoir pour quelque chose que je n'avais pas fais. je devais me faire oublier afin qu'on m'enferme pas dans le noir jusqu'à la fin de mes jours.

elle est arrivée de nulle part. j'étais en fuite, toujours à cavaler pour pas me faire rattraper. toujours à traîner dans les mauvais coups pour m'en sortir, pour vivre. quand j'l'ai trouvé. quand j'l'ai sauvé. la pauvre, elle était encore plus paumée que moi. je pensais pas que ça pouvait exister, quelqu'un de plus perdu que moi. je voyais dans ses yeux. que je pouvais pas la laisser. qu'il fallait que je l'emmène avec moi. dans ses yeux, il y avait presque plus de vie. et je sais pas pourquoi, quand j'ai vu ses yeux, j'avais envie d'y voir une étincelle de vie. plus forte, plus belle. alors j'l'ai prise avec moi. j'l'ai entraîné dans ma fuite.

ils ont fuis, main dans la main.

pseudo ▸ nature du lien.
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