je tapote doucement contre le bois, positionné face à la caisse en attendant que le ticket daigne enfin montrer le bout de son nez. Je souffle, agacé et souris à la demoiselle en face de moi. c'est lent, affreusement lent. Mes yeux glissent vers ma montre et mon sourire s'agrandit un peu plus. 18h50. Je finis dans dix minutes à peine et pourtant le kiloshop est encore plein à craquer. la faute aux soldes qui attirent mille fois plus de clients qu'à l'accoutumé. Je me penche légèrement sur ma collègue juste à côté et lui souffle,alors faussement curieux "vous n'allez pas mourir sans moi, ça va ?" son sourire est moqueur. évidemment qu'ils vont mourir sans moi. j'ai choisi le mauvais jour pour demander à finir plus tôt, mais je voulais me détendre, j'avais absolument besoin de me détendre et personne ici ne pouvait m'en tenir rigueur. Ce n'est pas dans mes habitudes de poser des congés. 18h55, julien se décide enfin à venir me remplacer en caisse tendis que je file directement dans la salle réservé au personnel. cinq minutes plus tard, me voilà enfin dehors, saluant une dernière fois les collègues à travers la vitre. bordel, ce fut les cinq minutes les plus longues de ma vie. Je m'empresse d'allumer une cigarette, marchant alors d'un pas traînant jusqu'au métro. Je dois  rejoindre ella au cinéma paradisio et le cœur n'y est qu'à moitié. Cela faisait quelques semaines que j'avais coupé les ponts avec elle, bien décider à lui faire violemment la gueule. J'avais alors accepté de voir tout nos amis en commun, même taser, en dehors d'elle. J'ai toujours été capable d'une rancœur abusive lorsqu'il s'agit d'Ella. elle a l'art de me rendre injuste pour je ne sais quel raison. Je n'ai jamais été capable de tact en sa présence. je souffle, tire une taffe et tente de finir ma cigarette le plus rapidement possible alors que mes yeux s'accrochent à l'entrée du métro. Le chemin me semble interminable. Est-ce que je devrais m'excuser ? Elle ne mérite pas d'être ignoré autant de temps, même si elle a partagé un peu plus que ce que ma tolérance autorise avec ma famille. Le fait est qu'elle est passé outre tout mes débordements. alors bon, ça ne devrait pas être si dramatique non ? tant qu'elle ne recommence pas. je ne sais même pas si je peux me permettre de lui demander ça. t'approches pas de taser, prends pas l'risque de m'embrouiller avec lui, ça me ferait vraiment chier. c'est pousser le bouchon un peu trop loin non ? je passe une main dans mes cheveux, sortant mon pass de l'autre. je verrais plus tard. on en est pas encore là de toute façon. 19h24. au moins vingt minutes plus tard me voilà ici. j'observe les gens sur la piste d'un air à peine intéressé, tapotant légèrement mon téléphone. Je viens à peine d'arriver. de peur de manquer trop rapidement de nicotine, je m'étais enfilé deux cigarettes d'affilé. Je ne vois pas vraiment quel est l’intérêt de rendre hommage à la bonne époque du cinéma américain si on ne peut même pas fumer ici. je soupire et regarde autours de moi. la cherchant du regard. une chevelure brune, une demoiselle terriblement petite à côté de moi. ah. la voilà. je me force à sourire. C'est à mon tour de me sentir ridicule. Je ne savais pas quoi lui dire. un peu comme si j'avais passé deux/trois ans à lui faire la gueule. "salut". je passe nerveusement les doigts dans mes cheveux et l'observe. "ça va ?" je rajoute, rapidement "j'ai déjà pris les places, c'est tellement galère ici que bon..." mon regard dérive quelques secondes sur la piste. "faut juste aller récupérer des rollers". J'ai presque l'impression de vouloir la noyer dans assez de paroles pour que l'idée de me demander des explications ne lui effleure pas l'esprit "écoutes, on parlera une fois sur la piste d'accord ? je me sens pas de faire d'efforts là." ni après d'ailleurs, mais je me garde bien de le lui dire.

Afin d'être totalement sure de ce que je venais de voir, je relis une, deux, trois fois le message avant de comprendre que ceci était bien réel. Tout d'abord septique, j'acceptais tout de même son invitation ne sachant pas réellement à quoi m'attendre. Je n'avais pas eu de ses nouvelles depuis un bon moment, malgré notre sortie en groupe à la fête de la musique je ne l'avais pas vu depuis des semaines et encore je n'avais pas réussi à oublier sa froideur ce jour là. Je me rendis dans ma chambre afin de me changer très rapidement en jetant un rapide coup d'œil sur le mur de ma chambre ou se trouvait plusieurs photos et bien entendu il y en avait une de lui et moi. Je ne pensais pas qu'il puisse y être si têtu et si en colère contre moi pour une chose qui pourtant me semblait si futile, en repensant à tout ceci, je n'avais pas imaginer une seconde que mon premier ébat avec le cousin Al-kâtib en arriverait là, peut être qu'au fond je n'aurais du rien lui dire et continuer à agir dans son dos mais voila j'étais incapable de lui mentir. Une fois changée, je pris quelques affaires que je balançais dans mon sac avant de descendre les escaliers de l'appartement. Nerveuse, j’enfilais mes chaussures afin de prendre la route, j’ignorais si il avait choisit un endroit proche de chez moi exprès ou non mais au moins je n’aurais pas loin à faire. Au bout de plusieurs minutes, ma musique dans les oreilles, j’apercevais la piste de roller non loin de nous, il ne me fallut que quelques pas pour être devant. Je m’appuyais contre le petit muret en l’attendant, ce fut sans doute les secondes les plus longues de ma vie durant lesquels je m’imaginais une conversation ou il me dirait qu’il avait tirer un trait sur notre histoire d’amitié et qu’il ne voudrait plus jamais me revoir. En levant le regard, je réalisais qu’il était arrivé, je le regardais très rapidement en lui rendant une petit sourire assez rapide « Salut » dit-je d’une petite voix douce avant de me redresser. Je le regardais et j’avais la sensation de ne pas avoir vu ce sourire dès plus mal à l’aise sur son visage depuis une éternité, je me demandais si il avait réalisé à quel point toute cette histoire et sa façon d’agir m’avait réellement blessée. Je hochais doucement la tête en le suivant vers la piste de roller sans réellement oser le regarder dans les  yeux « Je vais bien et toi ? » tout en marchant je ne pouvais pas m’empêcher de me dire que nous n’étions pas encore sortie de cette situation. Il était pourtant là avec moi mais n’importe qui autour de nous pouvait sentir cette tension glaciale entre nous. J’entrais dans le bâtiment en regardant autour de nous, il n’avait pas envie de parler et d’une certaine façon je n’avais pas envie d’avoir cette longue discussion sur le pourquoi du comment, parce que dans le fond il n’y avait rien à dire, je l’avais fais et je ne regrettais pas d’avoir partagé ce moment avec Tâser même si je m’en voulais de l’avoir blessé lui. Je pris place dans la file qui n’était pas bien longue avant de saluer poliment la personne qui s’occupait de nous donner nos rollers, je me pris un 36 ainsi que sa taille que je connaissais comme beaucoup de chose sur lui. Je m’installais sur un banc avant de les enfiler et de regarder tout les gens sur la piste « Je dois te dire que c’est la première fois que j’en fais alors ne te moque pas de moi s'il te plait » dit-je en croisant son regard lui avouant que je risquais d’avoir beaucoup de mal à tenir debout sur ses chaussures à roulettes.