Sujet: (AZAÏS) ▽ symphonie enivrante de ton corps Jeu 20 Déc - 11:46
Ah ! cette fois, viens ! Obtempère À mes désirs qui tournent fous. Je t'attends comme le Messie, Arrive, tombe dans mes bras ; Une rare fête choisie Te guette, arrive, tu verras !» Du phosphore en ses yeux s'allume Et sa lèvre au souris pervers S'agace aux barbes de la plume Qu'il tient pour écrire ces vers... ▲ verlaine
Cette lassitude qui emplit on corps. Rongeur malingre, de ses petites dents rapides et coupantes. Grignote tout petit à petit en un rien de temps. Elle s’insinue partout où elle le peut. Fracasse les barrières, anéantit tout sur son passage. Elle détruit, brise, brûle, extermine, sans un regard en arrière, sans un regret amer. Elle ne s’embarrasse point des autres émotions, toutes s’inclinent avec respect à son royal passage. Elle ne leur accorde pas un regard. Elle te laisse dans le chemin bourbeux de te routine. Dictées par toutes ses morales débiles. Toutes ces règles que veut imposer la société. Contrôler, réguler, nettoyer. Il faut que t’ailles travailler, que tu ramènes de l’argent. Faut que tu manges, tu boives, que tu paies le loyer, tu dois subvenir à tes besoins. Le travail, c’est l’opium du peuple. Et l’État veut vous faire mourir drogués. Elle veut vous voir vous tuer à la tâche. Vous lever tous les matins, jusqu’à devenir de vieillards laborieux. Alors parfois, tu te dis que tu devrais faire comme ces tarés qui se sont barrés. Ceux qui ne veulent pas travailler. Ceux qui ont tout refusés. Des normes jusqu’aux valeurs à la con. Alors t’irais avec tous ces marginaux et leurs foutus idéaux. Tu te construirais ta propre petite cabane au fin fond d’une campagne paumée. Cultiver ton petit potager. Entouré de toutes les autres hippies de merde qui refusent de s’intégrer à cette société. Tout ceux qui crachent sur le capitalisme comme d’autres le font sur dieu. Tu reviens bientôt à tes esprits. Tu sais bien que tout cela est ridicule. Que la vie est vaine et sans objectif. Que tu ne sers à rien. Pas même un pion sur l’échiquier. Et pourtant tu traine encore ta carcasse superbe à travers le tout Paname. Et pourtant, tu bois, tu manges, tu vis encore. Comme tous les autres âmes perdues. Il suffirait pourtant que quelques grandes nations craquent, pour que tout tourne au vinaigre aigri. Pour qu’on se mette à balancer des bombes de partout. Toutes les armes de destruction massive, faut bien qu’elle servent à quelque chose. Pour que tout soit détruit jusqu’à la moelle, sans que plus personne ne soit là pour reconstruire. Il n’en faudrait pas beaucoup, juste quelques unes aux rayons larges. Du nucléaire plein dans leurs faces. Pour que tout se brûle et se consume. Que tout soit difforme puis informe. Cendres redeviendront cendres et poussière sera poussière, c’est simplement l’ordre des choses. Les perspectives de la fin du monde se mélangent, se dessinent et s’effacent sur canevas apocalyptique de ton esprit. Tout te paraît si infiniment plus agréable que le blanc de cet écran. Les pixels qui te défoncent la rétine. Y’a ton regard qui s’injecte de sang, canaux carmins de fatigue liquide. Tes doigts qui gesticulent encore sur les touches. Les mots, les images, les cadres, les formes, les couleurs, dans un flot continu. T’as l’impression de ne jamais en voir la fin, qu’il t’en reste toujours plus à faire. T’es en retard encore et toujours, tu croules sous la masse de pages à finaliser avant la parution qui ne saurait tarder. Alors, t’enchaines les heures sup’, tu restes jusqu’à tard le soir. Et la fatigue te hante, creuse tes yeux, pèse sur tes épaules comme la plus lourde des enclumes. C’est un monstre effrayant qui blesse et terrasse. Une créature immonde et crapuleuse. Et tout ce que tu voudrais c’est t’enfoncer dans une surface moelleuse, de laisser ton corps flotter, ton esprit voguer en perdition, dans une immensité ténébreuses aux confins obscurs. Sans la moindre pensée ni angoisse. Mais t’es bel et bien coincé dans ce bureau que tu connais pas cœur, derrière ton geôlier d’ordinateur qui te force au travail. Tu sais que la chef n’est pas contente en ce moment. Sans doute est-elle frustrée, mal baisée par un mari trop absent. Pour quelle autre raison, te collerait-elle l’autre crétin de stagiaire aux basques ? T’es celui qui saura le mieux s’entendre avec lui, après tout vous avez quasiment le même âge. Bullshit. C’est rien qu’une punition, une façon de compenser ton brusque départ. De la pure délectation à te laisser impuissant. Elle sait que tu ne peux quasiment rien lui refuser. Parce que tu lui dois le peu que tu possèdes. Oui, ça ne peut qu’être une façon de te le rappeler. Et ne fais pas ton connard, Diego, son père a plus d’argent que ce que tu pourrais gagner en quarante-deux vies de travail acharné. Faut pas abuser non plus. Tu t’étais dit que t’allais faire un effort, ne pas le traiter comme l’esclave que tu as été. Mais toutes tes bonnes résolutions ont très vite fondu comme neige au soleil. Ce gosse est tout ce que t’as jamais pu détester. Pourri jusqu’à la moelle, du nom à rallonge aux vêtements hors de prix. Le genre qui n’aura jamais rien à faire de sa vie, à l’abri de tous les aléas et danger de la vie. Celui qui aura tout sans même avoir à levé le petit doigt, parce qu’il a eu cette connerie de chance qui lui a foutu une cuillère en or dans la bouche à sa naissance. T’as rien d’autre que du mépris pour son espèce. Au diable les dires de la patronne, sa pile d’argent à la banque ne compte pas à tes yeux. Il fera le serviteur comme tous les autres avant lui et tout ceux qui viendront après. Tu prends une autre gorgée de café qu’il t’a si gentiment apporté un peu plus tôt dans la soirée. C’est ton avant-dernière page et tu vas bientôt pouvoir te barrer. Tu manques de sursauter à sa silhouette dans le cadre de la porte. Tu te croyais seul depuis bientôt plus d’une heure. Mais il rôdait encore. Il attend peut-être l’autorisation pour rentrer ? Tu te décides à l’ignorer, t’as encore tes pages à finir. Mais son regard pèse sur ton corps. Son visage sort de la pénombre et il s’avance vers toi. Il a cette manière de te regarder, cette façon de se rapprocher, de se mouvoir tellement dérangeante. Il t’empêche de rester concentré. Putain. Qu’il rentre dans les jupes de maman et t’épargne sa présence. « Qu’est-ce que t’attends pour te barrer ? Après, papa et maman vont s’inquiéter. » Sarcasmes pleins la voix qui brise le silence relatif de la pièce, par-dessus le ronronnement des machines. Tu ne parviens pas à en détacher ton regard. Dégage, merde. Il te perturbe tellement. Tu veux juste qu’il te tourne le dos, entendre le bruit de la porte qui se ferme. « Va rejoindre les autres petits gosses de riches qui font la bringue et laisse moi bosser. » La fatigue ramollit ta verve. T’es lassé, excédé. T’as même plus la force de continuer. Pourquoi est-il encore là. Pourquoi ne peut-il pas disparaître ?
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Sujet: Re: (AZAÏS) ▽ symphonie enivrante de ton corps Mar 5 Fév - 1:59
Carcasse de papier affalé sur l'carrelage souillé. Les doigts dégueulasses, les chiottes tâchées. Empreinte digitale enfouie dans la gorge. T'as vomi les maux. T'as hurlé la beauté. T'as évacué la souillure. La gerbe s'mêle à l'hémoglobine. T'as encore dégueulé des bouts d'cœur. Tes lèvres s'déchirent en un sourire d'horreur. Malfaiteur ayant accompli son crime. Même pas l'courage d'effacer les traces, d'effacer à coup de javel cette crasse. Portrait ridicule, cliché parfait, pauvre gosse de riche en manque d'amour. Couverture choc d'un magazine à potins à gerber. Grelottant. Prisonnier des aiguilles qui défilent. Le temps. Le temps qui passe, le temps qui file, le temps qu'on perd, le temps qu'on retrouve, le temps qui s'étiole, les temps des étoiles. Et Paris s'allume, la belle se pare de lumières. Léthargie dans Babylone. La ville est folle. Forêt de béton. Tu te hisses à la rambarde de la minuscule fenêtre. T'observes les gens. Leurs pas hésitants. Perdus entre deux vertiges. Tout tourne autour de la capitale et des rêves qu'elle nous promet. Rien que du divertissement, rien que des chimères. Partout, partout. Ce couple qui s'tient main dans la main, tu l'imagines quelques années plus tard, à rechercher l'souvenir sous le crachat de leurs rêves éclatés, entres les cris du bébé qu'ils avaient jadis tant désiré. Ou ce garçon, seul sur le trottoir, les cheveux et les vêtements noirs, le casque sur les oreilles, du métal déchaîné, tu l'parierai. Il a la gueule de c'lui qui va bientôt péter les plombs. Tu perçois ces idées noires, tu verrais presque les cicatrices cachées sur ses bras, ses cuisses. Tous pareil, rien d'singulier. C'est le peuple, ouais, la société. Contrôlé, remastérisé, connecté aux bonnes idées. La masse est maîtrisée, sismogramme des pensées implanté dans les quelques neurones qu'on a daigné nous laisser. Mélancolie et soupir. T'as la maladie des habitués, le mal des initiés. Les illusions au brancard. Tu vois l'envers de l'endroit, tu vois l'cauchemar. C'est comme des lignes aléatoires tracées à la craie sur un tableau noir. Comme la neige souillé, qui a perdu sa pureté. Immaculée oubliée. Ici ça pue la majesté. Le dos sur le papier peint kaki pourri. Éclairage jaunâtre, lumière de sodium. Lugubre, lubrique. Aucune esthétique. Qu'est-ce que c'est laid. Laid à crever. À faire sourire un tortionnaire. Boursouflure qui grandit encore et encore. Est-ce que tous les demains sont morts ? Le vent s’essouffle sur tes plaies, tes brûlures ; de l'oguent sur les blessures. Il faut s'relever, empêcher Morphée de t'emporter, alors t'appuies tes mains contre le sol, tu plies tes jambes. Et dans un mouvement ridicule et grotesque, tu t'élèves dans l'atmosphère. p'tit oisillon sorti de son nid. Inspiration. Expiration. Étouffé par l'oxygène. Tu sors des toilettes, les couloirs crient la solitude. Seul dans c'batiment trop grand. Les pas qui résonnent, écho du cuir sur le parquet. T'entends du bruit, solitude feinte. Presque déçu. Tu vas voir d'où ça vient. Un homme est affalé contre une de ces chaises à roulettes immondes. valise arc-en-ciel sous les yeux. Une ride profonde entre les sourcils. Puis d'conflits. L'visage qui s'est froissé trop jeune. Les yeux fixés sur son écran, les doigts, sur le clavier, tapant nerveusement. Le cliquetis des touches martyrisés te bourdonnent aux oreilles. Marteau piqueur entre les nerfs. Le corps dans la pénombre, ne pas se montrer, non, surtout pas. Peur d'affronter ces yeux psyché. Ils seraient parfaits pour écraser les rêves. Intimidé. Mais tu te sens comme attiré. Un esprit invisible qui t'pousse à ses côtés. T'as perdu l'contrôle de tes mouvements, tu t'approches. Le cœur qui frappe, cogne, fort, boum boum. KO sur le ring des sentiments. Il ne semble pas t'avoir vu, obnubilé par son écran bouffeur de vie. « Qu’est-ce que t’attends pour te barrer ? Après, papa et maman vont s’inquiéter. » tu sursautes. Et l'organe reprend d'plus belle. Il veut s'projeter en dehors de ton corps, voir si ailleurs la vie est faite de merveilles. L'emphase de ton cœur commence à bouffer tes pensées. Que dire ? De quoi parler ? Tu restes muet. L'visage livide comme un cachet. C'est fou ce que c'est laid le silence. Il jette sa cape d'agonie sur vous et vous étrangle les poumons. Il vous fait suffoquer, vous empêche de respirer. Se délecte du malaise. Le silence est une catin. Il est le Démiurge et le Destructeur. L'avaleur de monde et le créateur. Le silence est roi. Le silence qui danse. Entrecoupés par le crissement stridents des touches torturés. Clic clic. Boum boum. Symphonie à rendre fou. « Va rejoindre les autres petits gosses de riches qui font la bringue et laisse moi bosser. » Encore des paroles assassines, venin de serpent. À faire pleurer un enfant. « Non. C'est pas comme ça. j'voulais, enfin... j'veux juste rentrer chez moi » alors pourquoi est-ce que tu restes là, à admirer sa lumière viciée ? T'attends une réponse qui peine à arriver. Et rien. Il reste aphone. C'est sans une parole que tu t'en vas, l'échine courbée, le corps qui tremble. Quasimodo moulé dans un jean Levis. Le dos bossu de maux. Tu fais hurler le parquet sous tes pas. Les ascenseurs dévoilent leur massives portes de fer. Contact froid du métal contre ton doigt, tu l'appelles. Attente interminable. Tu sens une présence derrière toi. Il est là. À t'observer en silence, frappant un beat incohérent, son talon contre le sol. Tu n'existes pas. Invisible, insignifiant. Le temps vous traverse mollement. Puis l'cliquetis mécanique de l’ascenseur résonne. Ça remplit l'atmosphère, vous deux toujours aphone. Tu montes, il est à ta suite. T'as toujours détester les ascenseurs. Descend ou monte. Des fils de fer qui t'relient à la vie. Il suffirait d'une étincelle, d'une corde rouillé, de rouages qui s'emballent. Et ta tête s'écrase contre le béton, en bas d'la tour. Amas d'boyaux crachés ; corps désarticulé, pantomime figée. Une odeur pestilentielle de fin du monde, putain d'senteur d’hécatombes. Et puis y a la lumière aussi : artificielle. Elle agresse les pores, rend tout plus moches. Et ces putains d'miroirs tout autour de nous, pour nous renvoyer la vanité déformée. Léger bruit d'fond. L'ascenseur semble avoir stoppé sa descente. Immobile au milieu du vide. Tu paniques. Sueur froide, peur bleue. Mal de tête grandissant. Des étincelles dans la face. Que tout s'efface, que tout s’efface. Ravale tes plaintes, Cosette, la marraine la Bonne Fée viendra pas tout effacer, d'un coup d'baguette magique, en t'balançant des serments mélancoliques. Pour l'instant t'es bloqué dans une cabine mortuaire miteuse. Avec ce mec au sourire de fou, celui qui respire l'étrange. Cœur qui s'emballe encore. Au grand CV des handicaps de ta vie, tu pourras désormais rajouter claustrophobe. T'auras appris quelque chose aujourd'hui. Tu te laisses glisser contre le mur, tu t'enfouis la tête entre tes jambes. T'as envie de t'enfoncer une lame dans les paumes. Et que le sang coule. Au rythme de tes pulsations. Ça atténuera peut-être la douleur. Besoin d'décompresser. Tu sors de ta poche un paquet d'clopes. Tu marmonnes un bref Ça ne te dérange pas ? À ton camarade de galère, qui en a visiblement rien à faire. T'as toujours l'air d'une tapette quand tu fumes tes cigarettes, des Marlboro Light en plus. Archétype du pédé parisien. T'es un tel réservoir de clichés. À vomir de rire. Comment il font dans les films déjà, pour lancer une conversation avec un inconnu ? « Est-ce que t'aurais un briquet ? s'il te plaît. » réservoir à clichés. ouais.