Il est chiant, agaçant, railleur, insensible, irrespectueux, non-croyant, arrogant, borné, égocentrique, humiliant, impatient, instable, méprisant, mesquin, orgueilleux (ce qui, rappelons-le, est un pêché), pervers, prétentieux, vulgaire et sans gêne. Bref, il est in-vi-va-ble. Et pourtant, j'ai pas d'autre choix que de le supporter puisqu'il s'incruste dans ma vie sans que je puisse rien y faire. J'ai pourtant prié, supplié... Mais non, Dieu s'est bien gardé de m'enlever cette ordure de mes pattes. Je suis d'ailleurs presque persuadée – oui, encore et toujours – que sa présence est une façon de prouver à Dieu que je crois en lui, une épreuve de plus vers le salut de mon âme. Ou bien... Tim serait la représentation de Satan ? Je l'ai toujours cru, mais maintenant, j'ai l'image de Faust dans la tête. Vous savez, le vieux sage qui voudrait redevenir jeune afin de pouvoir profiter d'une autre façon de la vie, celui qui fit un pacte avec le diable dans ce but ultime. J'ai l'impression d'être Faust en ce moment et j'ai l'impression que Dieu me pousse vers la perversion la plus pure et autant dire que ça me rend malade. Alors lorsque le prêtre m'a conseillé d'aller voir Tim afin de mettre les choses au clair entre nous, j'ai d'abord hésité avant de finalement me plier aux exigences du tout puissant. Et pour la.... première fois depuis que je connais Tim, je me suis rendue jusqu'à la porte de son appartement, que j'ai cependant franchie une fois, une seule et unique fois. Lorsque je me suis évanouie devant son immeuble et que je me suis réveillée sur son canapé. Je souffle, doucement, histoire de pouvoir trouver un minimum de courage et je frappe à la porte doucement – comme ça, j'peux faire comme s'il n'était pas là et repartir aussi vite que je suis arrivée. Mais je crois que Dieu en a encore décidé autrement, et je commence à en avoir assez qu'il aille contre ma volonté...

Je toque. Assez doucement pour faire comme si j'avais essayé et ne pas vexer le tout puissant. Oui, ça m'arrive d'essayer de tromper le Seigneur, mais généralement, je paie le prix fort. Et comme prier pour ne pas avoir de punition divine n'est pas tellement conseillé lorsqu'on tente d'échapper à un autre châtiment divin... J'évite de faire cette bêtise de débutante, mais malheureusement, Dieu ne semble pas vouloir aller en mon sens et je me retrouve rapidement face à un Tim toujours très... Tim. Je crois qu'être Tim est une philosophie de vie, quelque chose que je serai à jamais incapable de comprendre car trop attachée à ma philosophie déjà en place. Je me demande d'ailleurs si Tim croit en quelque chose... Une divinité bien à lui, je sais pas. J'imagine qu'en tant que futur médecin, peut-être que la science est la seule chose à laquelle il puisse se raccrocher. Cette théorie est d'ailleurs la plus plausible selon moi et coïnciderai avec de nombreux éléments qu'il m'a donné sans vraiment faire attention lors de nos différentes rencontres. Mais là n'est pas le sujet. En fait, je crois que j'essaye de repousser le moment où je vais devoir me poser les bonnes questions, parce que ça n'est pas simple, finalement, de se poser les bonnes questions lorsqu'on est face à quelqu'un. Et il ne me laisse pas tellement le temps de réfléchir puisqu'aucune remarque désobligeante ne franchit ses lèvres mais qu'il se pousse légèrement sur le côté pour m'inviter à entrer. La politesse, j'ai presque oublié ce que c'était et je le regarde comme s'il venait de me démontrer par A+B qu'Adam et Eve n'ont jamais existé. « Salut. » dis-je, hésitante, tout en arrivant à mettre un pied devant l'autre afin de rentrer dans la demeure de l'envoyé de Satan. Je tente de faire un léger sourire, qui s'efface pourtant bien vite sans que je puisse y faire quoi que ce soit. A vrai dire, je ne sais pas ce que je fous ici et j'ai peur que la discussion tourne en rond. C'est vrai après tout, je ne l'ai pas revu depuis qu'il m'a embrassé sans grand ménagement et j'ai vraiment du mal à savoir quoi faire à présent. Non parce que, j'avais réussi à surmonter l'affront fait par Sedlecina à mon égard lorsque celle-ci m'a donné mon premier baiser... Mais je n'arrive pas à surmonter l'affront de Tim, parce que ça ne revient tout simplement pas au même. Sedlecina est une folle furieuse incapable de se contrôler, Tim lui-même la traite de tous les noms les plus sales possibles et imaginables. Mais Tim... C'est autre chose, car bien que pervers, il n'a jamais tenté quoi que ce soit avec moi et les quelques répliques de ce genre qu'il ai pu me dire ont été prises sur le ton de "la rigolade" (quoi que, pas tant que ça) et c'est réellement quelque chose qui diverge et me perturbe. Je m'installe sur le canapé, après avoir enlevé les corn flakes tombés dessus et les avoir posé sur la table avec un dégoût non-dissimulé. « T'es toujours pas rentré dans les ordres ? Parce que, j'avoue que quand le prêtre m'a conseillé de venir te voir, j'ai cru que tu m'avais encore fait le coup. Mais non, heureusement ! » dis-je, avec légèreté. A vrai dire, j'espère qu'il ne m'a pas encore fait le coup... Et dire que lorsque j'avais apprit qu'il s'était déguisé en prêtre pour me faire croire qu'il fallait que je sois indulgente et que je me plie en quatre pour lui, j'avais pleuré toutes les larmes de mon corps... Il faut croire que de l'eau a coulé sous les ponts et que ma résistance aux tentatives de Tim pour me faire souffrir ou simplement pour m'amuser, se fait beaucoup plus fragile.

Spoiler:

Les mains posées sur les genoux, comme si j'étais une grande dame et comme si j'étais actuellement vêtue d'une robe très chic, des gants blancs remontant jusqu'aux coudes et entrain de prendre le thé avec la Reine d'Angleterre. J'avais souvent fait ce rêve, étant enfant. Parce que j'adorais jouer à la dînette et donc, je prenais le thé très souvent avec mes amies les peluches, dont la Reine des Abeilles, qui symbolisait certainement la vieille Reine que je n'avais jamais eu la chance de rencontrer. Mais là, ce n'est pas à Buckingham que je suis, mais bel et bien Rue Caille, chez Tim. Ca perd tout de suite tout sa classe. Je change mes mains de position, ce n'est pas du tout approprié et j'en suis consciente. Et puis, j'ai pas envie qu'il finisse par relever ce minuscule petit détail, mais je sais qu'il y a de fortes probabilités pour qu'il le fasse, ce qui est pour le moins perturbant. « Ma conseillère d'orientation me l'a déconseillé. » me répond-t-il. Je lève les yeux au ciel, je m'adresse un peu à Dieu de cette manière. Même carrément. Je sais pas, j'ai envie de lui dire 'pourquoi t'as voulu que je sois là ?'. « Dieu soit loué... » Non parce que, Tim prêtre... Ca ne promet rien de très rassurant de très bon. Et puis, il aurait la flemme d'apprendre la Bible, même l'idée générale. Il s'assoit, du coup le coussin du canapé bouge sous mes fesses. Il a beau pas peser très lourd, ça se sent quand il s'assoit. « Bon laisse tomber ton excuse bidon, t'es là parce que je te manquais trop ? », il y a une pointe d'ironie dans sa voix, comme d'habitude. A croire qu'il ponctue chaque phrase par ce ton sarcastique qu'il me réserve. Je souris, légèrement amusée tout de même. Mine de rien, je crois qu'il a raison lorsqu'il dit qu'il m'a manqué. Mais ça, je pense que je ne le reconnaîtrai jamais vraiment. J'ai honte, parce que ce mec est insupportable et que j'arrive quand même à l'apprécier. « Je ne mens jamais. » dis-je simplement, tout en tournant la tête pour que mon regard soit en contact avec le sien et qu'il comprenne que même dans cette situation, je suis sincère. Non, ce que je viens de lui dire, ça n'est pas une excuse bidon. On m'a vraiment envoyé ici, alors je suis là... J'ai vraiment l'impression que Dieu me manipule parfois. Et je sais qu'il (Tim, pas Dieu) est bien conscient de tout ça, mais qu'il joue avec mes nerfs, pour ne pas changer. « Tu veux boire ou manger un truc d'ailleurs ? » Mon regard se pose sur le bol de céréales de Tim, et puis finalement, je relève la tête et je dis timidement : « De l'eau ? S'il te plait ? » Et puis, quelques secondes plus tard, je commence à rougir. Je le sais parce que je sens que j'ai chaud au visage. Tout ça parce que je viens de demander timidement et prudemment : « Et sinon... ça va... la santé ? » Oui parce qu'il a faillit mourir dans un ascenseur récemment, quand même.