Sujet: The music up, the windows down ► Alee Mar 6 Nov - 0:07
The music up, the
windows down
Un stylo Bic tourne sur la paume de ma main, virevoltant et contrastant avec la lenteur de mon cerveau. J’ai l’impression d’être éteint, de ne plus rien comprendre à ce que je lis. Je regarde autour de moi, soupire et essaye de prendre l’air sur mon balcon afin de reprendre mes esprits. J’allume nonchalamment l’ordinateur et regarde les nouvelles infos qui circulent sur le net, rien n’y fait. Rien n’y fait, je demeure dans ma bulle, exténué par mon travail. J’ai consacré toute mon après-midi à travailler, je n’en peux littéralement plus. Mon esprit divague et me mène à des pensées autrefois plaisantes mais dorénavant douloureuses. J’en devenais presque dépressif. J’exagérais, évidement, dépressif n’est pas le bon mot, mais presque. Après mon histoire avec Cheshire, qui m’avait subitement abandonné sans aucune raison valable, j’avais vécu une romance compliquée avec un jeune homme nommé Alee. Notre relation était complexe, contre balancée par la présence de Nelson qui compliquait le tout, et elle s’était terminée sèchement, sans réelle volonté de tout stopper mais davantage par pure nécessité. Une soirée et tout dérape, un verre de trop et ta vie bouscule. Alee avait trop bu, je m’en souviens comme si c’était hier. Le champ de mars, la voiture qu’il avait joliment salie, sa colère furibonde. C’était sur ces termes que je l’avais quitté ou plutôt qu’il m’avait échappé. J’apprenais son accident de voiture avec choc et le rejoignais rapidement à l’hôpital. C’est ici que nos chemins se séparèrent radicalement, à mon plus grand regret. J’aimais profondément Alee, et j’avais la sensation d’avoir réellement construit quelque chose de solide avec lui, mais cet accident avait tout bouleversé, de A à Z, balayant tout sur son passage. Une perte totale de mémoire, cela ne pardonne pas. Il ne me reconnaissait pas, n’imaginait même pas qu’il ait pu avoir une relation avec moi, ne m’acceptait pas dans le rôle que j’avais alors pris à ses côtés avant son stupide accident. Je ne pouvais le supporter, j’avais davantage l’impression de briser ce qui demeurait entre nous et d’enfoncer le couteau dans la plaie, plutôt que de l’aider. Il valait mieux tout arrêter. Je ne pouvais m’empêcher de me souvenir de notre première soirée avec un triste sourire, en Angleterre, chez ses parents. Soirée où tout avait basculé, si parfaite soirée malgré une légère prise de tête. Je ne pouvais m’en souvenir sans verser une légère larme. Je l’essuyais, me levais et me posais sur mon lit où épuisé je m’endormais à la vitesse de l’éclair et ce sans même avoir le temps de m’en rendre compte. Lorsque mes yeux s’ouvrent à nouveau l’énergie m’a regagné mais je demeure pensif. Afin de me changer les idées, je décide de prendre une rapide douche, et de me changer pour sortir ce soir. J’enfile une chemise à carreaux, classique, tel un bûcheron, ainsi qu’un jean slim foncé et de simples converses blanches puis monte en voiture. Je n’ai pas confiance en le métro le soir, surtout seul. On entend tellement de choses de nos jours que cela ne m’étonnerait même pas de me faire agresser sous les yeux d’hommes et de femmes impuissants. La vie, de nos jours, s’est transformée en un bordel collectif au sein de notre société. Je soupire, blasé à cette idée et conduit jusqu’au Queen, seul. A tous les coups je ferais des connaissances ce soir, il y a toujours moyen de rencontrer d’autres personnes dans les boîtes de nuit. Les lumières des lampadaires parisiens éclairent ma route et défilent à allure folle. J’adore observer Paris de nuit, je lui trouve un charme indéniable. Mais cela seulement quand je suis en sécurité. Depuis tous mes malheurs, j’ai tendance à voir le mal partout, à chaque coin de rue, derrière le masque de chaque personne. Après avoir tourné pendant une quinzaine de minutes sur un parking, je parviens enfin à garer ma voiture et me dirige vers la boîte. L’ambiance bat son plein, de nombreuses personnes se bousculent sur le dance-floor. Je souris alors davantage, je me sens moralement mieux. Rien ni personne ne m’empêche de supprimer les derniers chagrins que provoquent les souvenirs du passé, je squatte alors le bar pendant une bonne partie de la soirée. Un verre, deux, trois, je finis par ne plus pouvoir les compter. Peut-être que je finirai la soirée à l’hôpital, encore une fois. Au moins on m’administra de la morphine et je serai calmé, lessivé, et puis je retrouverai mes amis qui sont de service. Et voilà, je divague encore, je dis n’importe quoi. Encore et toujours n’importe quoi. Je souris, bêtement, et tourne la tête à droite puis à gauche. Je vois quelqu’un me fixer, mon regard se pose quelques secondes sur ce visage qui m’est connu, puis je tourne la tête. Mon cœur palpite soudainement à toute vitesse, j’ai l’impression que tout l’alcool contenu par mon corps s’est évaporé et que le malheur me rattrape et détruit l’insouciance créée par l’atmosphère de la discothèque, et certainement celle aussi créée par la bouteille que j’ai englouti. Une bulle m’entoure, j’ai le sentiment de ne plus entendre la musique. Je suis dans une sorte de brouillard. Je ne sais plus ce que je fais, comme si je savais réellement ce que je faisais avant. Je n’ose pas même tourner la tête à nouveau pour vérifier qu’il s’agit bien de lui. Alee. Je ne veux pas retomber dans toutes ces histoires. A tous les coups il ne se souvient même pas de moi, j’estime alors comme non nécessaire de ressasser les plaies du passé. J’en ai assez souffert comme ça. Je me lève avec le peu d’équilibre qu’il me reste et tente l’espace de quelques secondes de m’éloigner du bar, afin d’échapper à ma destinée. En vain. Tôt ou tard le destin vous rattrape et vous enferme dans sa cage diabolique, quitte à vous rendre fou si vous ne l’êtes pas déjà.
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Sujet: Re: The music up, the windows down ► Alee Ven 9 Nov - 1:22
I REMEMBER YOU, a little.
J’fume clope sur clope. Quel fumeur n’a jamais dit « bah, j’fumerais jamais de ma vie. fumer c’est pour les nazes » ? Personnellement je n’en connais pas beaucoup. Drek et Cody ne serait pas fiers de moi s’il me voyait me pourrir la santé comme ça. De toute façon, il faut bien mourir de quelque chose. J’aurais bien aimé crever de mon accident parce que tout c’qu’il m’a apporté, c’du négatif voyez. J’ai perdu plein de gens. Plein de gens que je ne reconnais même pas. Si c’pas une honte. J’en ai marre de plus me souvenir, ça me fatigue. Alors pour remotiver les troupes, je fume, fume et fume. Sympa comme passe-temps non ? Avec tous les déplacements que je fais à cause du travail, je n’ai même pas l’temps de me trouver quelqu’un pour baiser et ça me désole. J’entame ma seconde cigarette. Je n’ai même pas avalé un tiers de mon café que j’en suis déjà à ma deuxième clope. Je pense tout le temps et j’crois que ça m’use en fait. J’aimerais mettre mon cerveau en stand-by mais c’impossible. J’essaie tout le temps de chercher des souvenirs d’avant l’accident. Mais jamais rien ne vient. C’assez frustrant, déconcertant même. Aujourd’hui, je n’ai pas de rendez-vous pour le travail. L’patron m’a donné un jour pour m’installer, ensuite il fallait que j’attaque. Je repense au temps entre mon réveil à l’hôpital et mon départ pour Londres. Je pense à Nelson. Je baisse la tête, la nicotine pénètre dans mes veines, j’me sens détendu. Je recrache la fumée, écrase le mégot, le jette à la poubelle. Je rentre, termine mon café devant les dessins-animés, soupire, me lève, exaspéré.
Sous la douche, je voyage dans le peu de souvenirs que j’ai. Et ceux-là aussi ils ne sont pas très joyeux. Ma relation autodestructrice avec Nelson. Ma fuite avec Sephora, que je ne reconnais même pas. L’offre professionnelle ou plutôt le chantage qui m’a fait revenir à Paris. L’eau brûlante coule sur ma peau mate, mes tatouages, mes cheveux de jais, je la sens me brûler, me toucher. J’essaie de vider mon esprit, juste une petite seconde mais rien n’y fait. D’un coup de vent, j’sors de la douche, m’habille, quitte mon nouvel appartement encore entassé de tous ses maudits cartons, c’est comme des vieilles casseroles que j’me traine tout le temps partout. J’marche dans Paris toute la matinée, j’arrête chez ce nouveau petit traiteur qui vend des produits faits avec des produits frais. J’lui prends une grande salade César, un jus de fruit bio et une pâtisserie. L’après-midi, je l’ai passée à chercher la paire de chaussure coup de cœur. Alors en fin de journée, j’rentre avec une paire de bottines style ranger en cuir noir. Ce soir, je sors, seul. Il faut absolument que je revoie Paris, la nuit. Où ? Je ne sais pas encore.
L’soir arrive, je déambule dans les rues de Paris. La capitale française est toujours aussi belle, de nuit. J’ai des étoiles dans les yeux, je marche, marche. J’finis par me retrouver dans le XVIIIème. Inutile de me demander comment j’me suis retrouvé aussi loin. J’plonge mes mains au fond des poches de mon jean, plaquant mes bras contre moi, et mon cuir noir au passage. Il coupe du vent mais pas du froid. Cette veste est un bijou, un gros coup de cœur. De la lumière et de la musique attire mon esprit. Une pancarte intitulé « Le Queen ». Pourquoi pas ? Les videurs me dévisagent, je rentre dans la boite. Ça se bouscule, se roule des pelles, danse. Je me hisse jusqu’au comptoir, commande une vodka-redbull, une deuxième. Mes yeux se posent sur un garçon, je le reconnais. Après mon réveil à l’hôpital, j’ai appris qu’on était sortis ensemble mais tout cela était confus. Je n’arrive pas à détacher mon regard de lui. J’crois qu’il m’a vu, tant pis. Il se lève, titube, n’avance pas. J’dois faire quoi moi ? Aller le voir ? Je ne sais pas. Ma tête me fait mal tout à coup, comme si mon cerveau s’mettait à réfléchir au maximum tout d’un coup. Comme s’il voulait se souvenir d’avant l’accident, histoire que j’sois pas trop perdu. Je soupire et me lève. J’hésite tellement. Et si je lui avais fait du mal ? Et s’il me détestait ? Franchement, pourquoi j’me pose autant de questions-là ? C’pas moi ça. J’étais comme ça avant ? … Qui ne tente rien n’a rien, je m’approche. Salut. Ça y est, je sens déjà que c’était une mauvaise idée. On s'connait non ? Mais quel idiot je suis bordel de merde. J’fais une petite moue, j’m’en veux de lui avoir adressé la parole.
Dernière édition par Alee-Allana Archdeacon le Sam 24 Nov - 15:27, édité 1 fois
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Sujet: Re: The music up, the windows down ► Alee Lun 12 Nov - 21:27
J’essaye de me frayer un passage dans la foule, enfin c’est un peu optimiste étant donné que je ne tiens pas tellement debout et que tout un tas de personnes se remuent sur le dancefloor sur le son de la musique techno. Je sens qu’il m’en faudrait peu pour être emporté par le flot de la foule. J’ai espoir qu’Alee abandonnera ses tentatives, qu’il ne marchera pas en ma direction, qu’il ne me reconnaîtra pas. Il a dû sentir très coupable lorsqu’il est revenu à lui, ne se remémorant de rien ni personne, ayant oublié l’essentiel de sa vie et les personnes qui l’aimaient au plus profond de son cœur. Cela devait être difficile à vivre : être aimé par des personnes qu’on ne reconnaît, recevoir leur soutien sans même savoir l’essentiel, c’est-à-dire qui l’on est. On a beau le dire au patient, celui-ci demeure presque toujours dans une recherche d’identité personnelle, de souvenirs. Et c’est même tout à fait normal. Après tout, personne ne nous connaît à 100%, seuls nous sommes capables de nous déterminer en entier. Et voilà qu’un trou noir nous engloutit. Pauvre Alee. Je ne ressentais pas de pitié pour lui, mais davantage de la compassion. Mais évidemment de la compassion il avait dû recevoir suffisamment, suffisamment pour masquer ma présence, pour me rendre futile à ses côtés. Ça ne servait à rien, je ne servais à rien. Cette sensation d’être un étranger, de ne pas faire changer les choses, d’être là comme serait un pot de fleur posé là, de ne servir à rien sauf à remuer le couteau dans la plaie. On peut croire que j’avais agis comme un vrai lâche, comme si je ne supportais pas de vivre aux côtés d’un infirme amnésique. Mais personne ne peut réellement s’imaginer à quel point on souffre et à quel point l’autre souffre aussi. La meilleure des choses devient alors de se séparer. Après tout, c’est à peine si Alee m’acceptait en tant que tel. Comment faire croire à un jeune minet qu’il avait eu des relations homosexuelles ? Ça a dû lui faire un bon choc également. Je m’étais alors éclipsé de sa vie, et ce de manière totale, ne cherchant même pas à contacter ses parents adoptifs, Derek et Cody. Rien. J’en avais assez souffert comme ça. C’est tellement bête, lorsqu’on y pense. J’aurais pu prendre mon mal en patience et essayer de tout reconstruire avec Alee. Après tout, on m’avait presque adopté dans la famille, et même si tout ne tournait toujours pas rond avec Alee on passait de bons moments ensemble. Mais c’est bien ça le problème : tout ne tournait pas rond. Et bien trop souvent notre relation était bancale. Tout reconstruire pour que tout s’effondre à nouveau, telle était ma peur. Je n’étais qu’un froussard, accompagné d’une bonne dose de bon sens. N’allons pas jusqu’à dire que j’ai été altruiste, après tout j’ai autant calculé mon intérêt que celui d’Alee, bien que celui-ci a fait le plus pencher la balance. Malgré la musique qui résonne dans mes tympans, et qui je le croyais ne me laisserait aucune chance d’entendre des propos portés à mon intention, je sentis la voix d’Alee s’élever dans l’air, flottant autour de moi, m’isolant de la musique techno. J’ai l’impression que mon cœur s’arrête et que je suis transporté ailleurs le temps de quelques secondes. Pourtant je reviens vite à moi et mon cœur tremble et palpite à la vitesse d’un train. Il t'a parlé, il t'a reconnu Aaron. Alee t'a reconnu. Je me retourne par réflexe et me traite intérieurement de crétin. Crétin, pourquoi tu t’es retourné ? Maintenant tu vas devoir lui parler. Je le regarde, brièvement, mais j’ai l’impression que le temps s’est figé. Il n’a pas changé. Il a toujours ses cheveux joliment coiffés sur le dessus, une légère teinture blonde en plus, et sa petite barbe de trois jours. Je retiens un sourire, satisfait de le revoir en un morceau, hors de son lit d’hôpital, en relativement bonne santé. Mais lorsque je revins sur terre, je dû me confronter à un dilemme. Lui dire qu’effectivement je le connaissais, ou le laisser s’en aller, une fois de plus. Ma gorge se serre. Aaron, vas-tu tenter le diable à nouveau ? Vas-tu encore tomber dans ton propre piège ? J’ai l’impression de revenir à moi, de redevenir stable d’un coup, tout simplement de ne pas avoir bu, si l’on oublie le flou artistique qui entoure Alee. Je souris délicatement cette fois, me laissant guider par mon instinct, ou plutôt par mes émotions. Je saisis l’occasion, visiblement nerveux. « Effectivement on se connaît » dis-je. Waw, je lui en apprends des choses. Bon sang Aaron, dis-lui quelque chose, quelque chose de vraisemblable. Je ne sais pas, entame la conversation, parle lui du temps. Quelle jolie conscience lorsqu’on a bu, pas vrai ? Je réfléchis deux ou trois secondes, avec le peu de capacités cognitives qu’il me reste après cette soirée et reprends. « Tu t’es teint les cheveux en blond depuis la dernière fois que je t’ai vu. Enfin ta mèche quoi. Tu as l’air en meilleur forme, ça me fait plaisir. » Je disais tout cela sous un ton amical, sans aucune animosité, essayant de lui dire plus ou moins implicitement que je l’avais connu depuis un petit temps maintenant, que je l’avais vu à l’hôpital et même bien avant. Mais comment lui dire tout cela sans trop le secouer ? Je ne voulais pas remuer le couteau dans la plaie, je ne voulais pas le faire souffrir plus qu’il ne l’a déjà fait, ni même raviver de mauvais souvenirs. Peut-être même avait-il voulu mettre une croix sur cet élément de son passé. Peut-être. Il fallait être subtil, penser à tout ce que mes paroles pouvaient engendrer. Un léger vent du midi ou alors une tempête qui casserait tout sur son passage et qui laisserait s’envoler les esquisses de constructions ou de reconstructions. C’était quitte ou double.
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Sujet: Re: The music up, the windows down ► Alee Sam 24 Nov - 16:06
I'M SO SORRY, really.
Il me répond qu’on se connait, et mes doutes s’effacent quand j’entends sa voix à travers le boucan de la boite. Je le regarde, je ne fais que le regarder. Il n’a pas changé. Maintenant des souvenirs me reviennent en mémoire. Je m’appuie au comptoir de cette boite beaucoup trop bondée à mon goût. Tout c’bouscule dans ma tête, j’inspire grandement, le temps de me ressaisir. Je marche les yeux une fraction de secondes puis mon regard se repose sur lui. Lui qui était là après mon accident, lui qui a essayé de m’aider, lui qui m’a tendu son épaule quand je voulais pleurer, lui que je ne reconnais. Je ne sais plus ce qu’on a vécu mais j’ai le sentiment que ce n’est pas quelque chose d’anodin. Il est saoul, ou pas loin. Ça se voit, il titube mais ses dialogues sont clairs. Je crois que c’est le plus important. J’ai besoin de savoir mais je ne peux pas me permettre de tout balancer comme ça, de lui poser toutes ces question que je me pose à longueur de temps. Je ne peux pas me permettre de lui demander ce qu’on a vécu, ce qui s’est passé pour qu’on se perde, pourquoi je suis parti si vite, pourquoi je ne me sens pas équilibré et posé quand je le regarde. Non je ne peux pas. Je lui ai peut-être fait du mal, ou l’inverse. Et remuer le couteau dans la plaie doit être la chose la plus horrible au monde. Ne pas me souvenir me procure cet effet-là. C’est une vraie torture que je combats tous les jours.
Je l’observe toujours, ôte ma main de ce comptoir tout collant, récipient à microbes en tout genre. Je m’approche un peu de lui, histoire de mieux entendre ce qu’il me dit, ou d’être plus près de lui, je ne sais pas. J’suis tiraillé entre plusieurs sensations. Je serre légèrement la mâchoire, il me regarde, il a l’air de m’examiner. Sous un ton amical, il me dit que j’ai bonne mine, que la seule chose qui ait changé depuis la dernière fois que l’on s’est vu, c’est la mèche blonde que j’ai dans mes cheveux. Je souris brièvement. Oui, c’est une petite nouveauté, une petite envie que je me suis faite. Pourquoi ? Allez savoir. J’ai des envies qui me passent dans la tête comme ça. J’suis assez impulsif en fait. Il m’arrive de faire des achats compulsifs mais à côté de ça, il m’arrive aussi de faire des dons de nourriture à la banque alimentaire. Bref, je ne vois même pas ce que ça vient faire là ça. Revenons à nos moutons. Il m’arrive de m’égarer aussi, fréquemment. La situation est quand même comique. Je suis dans une boite branchée de Paris, je rencontre une des personnes qui a dû bercer ma vie et je pense à mes dons à la banque alimentaire. C’est fort, j’suis vraiment pommé en fait. C’était pas qu’un impression que j’avais.
En tout cas, je ne sais pas quoi répondre puisque moi, tout ce dont je me souviens à son propos c’est qu’on s’est perdu du jour au lendemain. Sûrement parce que je suis parti à Londres avec Sephora sans rien dire à personne. Sans rien lui dire. Il était à mes côtés presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre et je n’ai pas été fichu de lui dire que je me tirais, et encore moins que j’étais revenu. Ça devait lui faire un choc. Enfin, je ne sais pas vraiment tout compte fait. Je ne sais pas ce qu’il éprouvait à mon égard en ce moment même. Sûrement de la colère et un micro sentiment de joie, à l’idée de me revoir. Peut-être. Il n’y a que lui qui le sait. Aaron. “ Dans mes souvenirs les plus éloignés, toi tu n’as pas changé. À part qu’il me semble que tu étais sobre la dernière fois. „ Je rêve ou j’essayais de faire de l’humour ? Je crois que ce n’est pas vraiment le bon moment en fait. La honte, je crains. Je ne suis vraiment pas cool. Qu’est-ce qui m’arrive ? D’ordinaire je me fous de savoir si je blesse ou non mais là c’est différent et je ne comprends pas pourquoi. “ Écoute, je sais si mon départ t’a affecté mais je voulais te dire que … „ Je ne stoppe net. J’étais en train de m’excuser ou quoi. Je me retourne, face au bar. Je m’appuie de mes deux mains sur le comptoir en bois, puis enfile le premier verre qui me tombe sous la main. L’alcool passe directement dans mon sang. Je serre les dents, secoue rapidement ma tête de gauche à droite puis me retourne face à lui. “ Je suis vraiment désolée. „ Ma mâchoire se serre. C'est que j'étais sincère en plus. Je m'étonnais moi-même d'agir ainsi.
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Sujet: Re: The music up, the windows down ► Alee Sam 8 Déc - 19:30
Du coup je me tenais là, comme un pauvre crétin, sans être capable de pouvoir dire ne serait-ce qu’un mot. Était-ce à cause d’une gêne particulière envers Alee ou était-ce parce que j’avais bu ? Peut-être les deux. Sûrement d’ailleurs. Je le fixais, l’air vague, les yeux éblouis par les lumières, tout cela sans rien dire. Je ne l’avais pas vu depuis longtemps, très longtemps, et malgré tout cela je n’avais pas réussi à l’oublier. Le champ de Mars, la beuverie qu’avait eu Alee et ses conséquences dans ma voiture, l’accident de voiture, l’hôpital. J’avais passé la plupart de mon temps là-bas, autant en tant que visiteur qu’en tant que personnel. Je ne l’avais pas en charge, mais je passais de temps en temps. Sa santé était ce qui me préoccupait alors le plus. Sur le coup, je ne me souciais que très peu de notre couple. Il faut dire qu’avec le choc qu’il avait reçu, l’essentiel était d’abord de le mettre sur pied, de toute évidence. Mes illusions m’avaient mené trop loin, et lorsque la vérité et surtout la réalité se rabattaient sur moi, alors on pouvait dire que j’avais été secoué. Alee n’avait plus de mémoire. J’avais osé croire qu’elle allait revenir, que tout cela n’était que la conséquence d’un choc. Mais c’était définitif, il n’allait pas se souvenir de moi. Notre histoire avait été tellement particulière que je doutais en mes capacités pour le lui raconter. Je sentais qu’il ne m’aurait pas écouté. Tout cela avait été si dur pour moi, mais je ne pouvais qu’encaisser. Sans compter qu’Elyon en avait rajouté trois tonnes. Comme si ce n’était pas assez difficile pour moi, il fallait qu’elle ajoute des tonnes de culpabilité sur mes épaules. Je n’avais pas assez surveillé Alee, j’étais censé le surveiller à sa place. Bien sûr, je n’aurais pas dû le quitter des yeux à ce moment-là, bien entendu, mais Alee est adulte. Il est tellement facile d’accuser les autres, et elle : où était-elle à ce moment ? Pourquoi était-ce forcément moi le fautif dans l’histoire ? Et puis Alee s’était enfui, je ne sais où, avec je ne sais qui. Alors comme ça, d’un coup, j’avais perdu deux de mes repères. Alee et Nelson. C’était clairement une catastrophe pour moi. Un vertige me prend d’un coup à l’évocation de ces souvenirs, si l’on y ajoute l’alcool et le fait que je ne le supporte que très peu. Je ferme les yeux et tente de m’apaiser. Lorsque le calme revient en moi, ce qui paraît complètement contradictoire avec mon état et l’atmosphère de la soirée, je jette à nouveau un regard à Alee. Il n’a décidément pas changé. Alee me lança une plaisanterie, ou un reproche, en fait je ne saurais pas vraiment faire la distinction ce soir, le bruit m’empêche légèrement d’entendre distinctement le ton de sa voix. Je m’apprêtai à lui rétorquer lorsqu’un semblant de lucidité parcourra mon cerveau. Attendez, ça signifie qu’Alee se souvient de moi ? D’un coup mes sourcils se froncèrent, sans que je leur ordonne, trahissant à la fois ma curiosité et mon ébahissement. De quoi pouvait-il bien se souvenir ? Se souvenait-il de choses antérieures à son accident ? A peine Alee commençait-il sa phrase qu’il se stoppait, s’appuyant manifestement sur le bar derrière lui, le regard fuyant. Hm, j’ai du mal à suivre. Lorsque je m’approche de lui je le vois se retourner vers moi et s’excuser. J’ai l’impression qu’il y met tous les efforts du monde, et dans un sens tout cela me touche. Mais je ne comprends pas. Bien entendu je comprends qu’il puisse s’excuser, mais j’ai l’impression qu’il ne se comporte pas normalement. J’aimerais parvenir à décrypter tout cela, mais je n’y parviens pas. « Ça va… » Répondis-je alors avec plus ou moins d’entrain et de clarté. J’avais pris la peine de lui répondre, parce que je sentais que tout cela avait été dit avec difficulté, tout simplement. Mais à ce moment pourtant, je ne pouvais pas me réjouir au sujet de ses excuses. Ma tête me jouait des tours, alors je marchais vers un tabouret où je m’asseyais avec difficulté. Je commandais un verre supplémentaire auprès du premier serveur venu et posais l’espace de quelques secondes ma tête entre mes mains. Qu’est-ce que tu fais Aaron ? Et si tu laissais Alee rentrer de nouveau dans ta vie ? Nonsense. You can’t do that. Et pourquoi pas en fait ? Dans le genre perdu, vous ne pouvez presque pas faire aussi bien que moi. Je soupirais, l’esprit embrouillé, et ne disais plus rien. Qu’est-ce qu’il va croire ? Est-ce que tu vas le laisser partir encore ? Toi qui a souffert de son absence, toi qui préférerais vivre à ses côtés même s’il ne pouvait pas se souvenir de toi ? Toi qui n’arrivais pas à tourner la page ? Personne ne te demande de tourner la page si aisément, de toute manière tu n’y arriverais pas à mon avis Aaron. Le serveur posa la boisson que j’attendais. Je saisis son anse, et réfléchissais toujours sans un mot. Quelle impolitesse. « Alee, tu te souviens de quoi au juste ? Est-ce que tu te souviens au moins de mon prénom ? » J’avoue que la politesse ne m’effleurais pas vraiment à ce point de la soirée. Et s’il ne s’en souvenait pas ? Ne se sentirait-il pas mal à l’aise ? Oh et puis de toute manière je trouverais bien un moyen de détendre l’atmosphère. Ou pas. On verra. De toute façon ce qui est dit est dit, vous tous savez bien à quel point je suis incapable de remonter le temps, sinon je l’aurais fait depuis bien longtemps. Je ne regardais pas même Alee, m’attendant particulièrement à ce qu’il ne s’en souvienne pas. Je m’apprêtais à encaisser le coup, le regard vaguement posé sur mon verre. Il ne va pas s’en souvenir, comment peux-tu oser espérer Aaron ? Tu es minable, à cause de toi tous les mauvais souvenirs risquent de ressurgir. Tant pis, on mettra ça sur le compte de l’alcool, et puis il n’avait pas qu’à se barrer comme ça. J’oubliais à quel point je pouvais être susceptible lorsque j’étais blessé à vif.