Les choses ne passent pas si mal finalement. Les amis ? Ça va, ça vient et les tensions finiront bien un jour par s’apaiser. Elle a retrouvé son boulot, elle reprendra les cours en septembre pour une dernière année, plus par besoin de s’occuper l’esprit que par envie. Oui, la rouquine qui s’est éloignée des autres élèves par amour pour ce type qui l’a laissée tomber et redoute les travaux en groupe. Elle sort de chez Publicis soulagée. S’appeler de Brantes, comme la famille de journalistes, ou d’Abzac, comme les producteurs, n’ouvre pas toujours toutes les portes.

L’esprit ailleurs, la jeune femme se laisse diriger dans les rues de Paris. Elle se laisse même pousser jusqu’à ce quartier qu’elle affectionnait et manque de tomber nez à nez sur l’une des personnalités les plus… atypiques de la ville. Et s’il y a eu comme une tension entre eux ces derniers mois et Sephora est consciente que le changement de comportement de Tay n’est pas anodin. Jamais, oh non jamais, il ne s’était montré comme ça. Mais trop bien installée dans son petit nid, cocon ou nuage idyllique, elle s’est comportée comme une parfaite petite égoïste avec lui et s’est contentée des quelques échanges de paroles, quelque peu froid certains jours, qu’ils avaient encore. Dire qu’il lui a manqué est un euphémisme. « Ça se sent que c’est toi. » Aujourd’hui, la jeune femme veut mettre fin à cette distance et ce n’est pas dans le but de se rapprocher d’avantage comme une groupie, comme une propriétaire qui vient récupérer ce qui lui ait du et faire main basse sur lui. Non parce que c’est Tay, parce que c’est leur amitié étrange, dont les limites n’ont jamais été vraiment précisées et dont le nom n’a jamais été défini non plus. Sont-ils réellement amis ? C’est plus compliqué. Pas amant, pour autant. Ils sont peut être pas faits pour se supporter ensemble, qui sait, et se complaisent dans ce qui s’offre déjà à eux. Et peu importe la foule de touriste dans ces petites rues de Montmartre, Sephora court jusqu’à lui pour le rattraper et se jette dans ses bras. Vous savez, le saut digne… digne d’un film à l’eau de rose et tutti quanti. Et sous les yeux d’un groupe de Chinois choqués, la rouquine se blottit contre Tay, bras croisés dans sa nuque, jambes au niveau de sa taille et visage contre sa nuque. C’est carrément l’image de la gosse épuisée dans les bras d’un parent au parc Disney. S’attacher à celui qu’elle doit affectionner le plus. « Oh pitié, m’en veux pas… » Le reste se passe de commentaire.

mon crayon entre les mains, j'dessine un lion dans l'coin de ma feuille comme un petit enfant d'cinq ans qui veut impressionner sa mère, t'sais. je croyais qu'avant, j'travaillais beaucoup, mais là .. c'est pire que jamais. j'm'en fiche, parce que c'est carrément ce que je veux. j'ai pas forcement envie d'sortir, de voir mes potes, de charmer mesdemoiselles, simplement parce que celle que j'voudrais bien voir n'est pas là, et ne sera peut-être jamais plus là. j'pense à elle, comme à .. à peu près tous les jours, mais bon, j'le garde pour moi, parce que c'est stupide de s'attacher à quelqu'un à ce point, non? s'attacher à quelqu'un, c'comme .. foutre ses rêves à l'eau, cependant. sauf si ton rêve à toi, c'est d'avoir une famille, une petite fille et un petit gars habillés d'la même manière, dans une grosse maison avec une grosse voiture et un gros chien qui bave comme un attardé. j'voulais pas que l'amour me tombe dessus comme un piano qui tombe du deuxième, en plus, j'suis certain que ça fait l'même effet, au final. j'sais même pas ce que je veux, j'ai ce désire si profond qui m'fait si peur, ça vient pas d'moi, ce n'est pas moi, ça vient .. probablement d'son sourire, ahah. au final .. au final c'est peut-être une bonne chose qu'elle soit partie. comme ça, j'peux me concentrer sur quelque chose qui pourra évoluer, genre, mon job.

j'fais quelques appels, mais sérieusement, je n'arrive pas du tout à me concentrer, aujourd'hui. « tay, va prendre l'air. sors un peu, t'es toujours ici, t'as travaillé combien d'heures, cette semaine, 80? » tiens, le patron qui s'pointe. « j'ai pas fini c'que j'avais à faire, j'dois contacter truc chose pour obtenir une interview avec elle, et après, j'dois préparer l'émission de vendredi, c'est assez urgent. et puis j'dois passer un coup d'fil à rodriguez pour m'informer sur les nouvelles horaires, et .. » j'suis interrompu par mon patron qui ferme mon macbook en plein devant mes yeux et qui m'dit .. « ce n'était pas un choix, tay. j'veux bien que tu fasses ton boulot, mais j'veux pas passer pour le patron qui profite de son employé trop compétent.. » clin d'oeil. mon ego est flatté, mais j'aurais préféré sans clin d'oeil, considérant l'fait que mon patron est tout sauf hétéro. j'avoue, j'suis mort, fatigué, épuisé comme jamais, j'ai les nerfs à bout, j'ai envie d'tuer tout le monde, so .. j'rouspète pas j'laisse tous mes affaires sur mon bureau, puisque j'vais certainement revenir ce soir. j'sors à l'extérieur, j'sais pas trop où aller, alors .. je fais comme il m'a dit de faire, j'tente de prendre l'air en 'marchant'. et pis .. soudainement, rapidement, vite comme l'éclair, comme flash mcqueen, j'sens une fille s'attacher à moi, m'sauter dans les bras, et pendant l'espace de quelques secondes, j'imagine la groupie par excellence d'owlie-shit, et pis .. j'reconnais son odeur, et la planète terre n'est soudainement plus ronde, et elle ne tourne surtout pas. finalement, j'ai soudainement envie d'me concentrer non seulement sur mon travail, mais sur autre chose en parallèle, j'me dis qu'après la gloire, le sentiment l'plus beau, c'est ce truc trop année '70 qu'est l'amour, et j'ai honte, c'que j'ai honte .. « Oh pitié, m’en veux pas… » mon coeur s'emballe, seigneur, dis-moi que j'suis pas amoureux, .. en fait, dis-moi que j'suis pas amoureux à ce point. je me distance un peu pour la regarder et pour évaluer à quel point elle m'a manqué, quoi que c'est très facilement évaluable. « la prochaine fois, tâche de m'avertir avant quand t'auras dans tes plans de te faire kidnapper par des aliens. au moins, t'es pas devenue verte, t'es toujours aussi .. belle. » malaise. et j'me demande pourquoi il y a toujours cet énorme malaise entre nous lorsque .. lorsque voilà.

Vous voyez dans Harry Potter, quand ils disent tous 'celui dont on ne doit pas prononcer le nom' à la place de Voldemort, imaginez la même chose ici, dans ce cas bien précis, on pourrait dite 'le groupe nominal définissant exactement ce qu'elle ressent pour Tay depuis pas mal de temps déjà et qu'elle refuse encore de se l'admettre' pour évoquer 'sentiments amoureux' ce qui semble être bien plus flippant, dans le fond. « la prochaine fois, tâche de m'avertir quand t'auras dans tes plans de te faire kidnapper par des aliens. au moins, t'es pas devenue verte, t'es toujours aussi .. belle. » Lorsque voilà ses lèvres se retrouvent contre Tay et là c'est juste trop bizarre, parce qu'il n'est pas Gaël, pas un ex non plus, pas ce type qu’elle ne connaît ni d’Ève, ni d’Adam et qu'elle a envie de câliner dans le simple but de se sentir protégée. C'est Tay, un ami, surement le plus proche, le plus compliqué, le plus inexplicable certes, le plus tout un tas d'autres choses si cela vous chante, mais il doit être et rester un ami. Point. Pauvre de lui. Pauvre d'elle aussi quelque part. Elle plaidera innocente quand il faudra expliquer ce geste, puis fera appel à la folie. Cette putain de douce folie, à défaut de pouvoir mettre ça sur le coup d'un état d'ébriété qui n'a pas lieux. Et puis le froid entre eux des derniers mois, ça n’a pas aidé. La distance entre eux est désormais comblée. Sur la pointe des pieds, elle s'est agrippée à ce qui lui est tombé le premier sous la main : le col de son haut. Et elle revient à la raison, et finit par se détacher de Tay, un peu beaucoup hébétée, un peu beaucoup rouge pivoine. Et c'est juste trop bizarre quand même comme scène, non ? Elle cligne des yeux plusieurs fois, cherchant ce qui a pu lui traverser l'esprit. Elle n’ose même pas jeter un coup d’œil autour d’eux. Elle se sent épiée par les touristes. Sephora voudrait bien être une autruche, se planquer la tête dans le premier carré de terre venu. Hop comme ça, ni vue, ni connue. Et puis finalement, stoïque comme elle est, elle n'est pas capable de prendre ses jambes à son coup. C'est peut être bien pour ça qu'elle n'est jamais devenue une groupie du grand owlie-shit à l'école. Face à lui, il n'y a pas vraiment d'échappatoire. Enfin, à quoi bon vouloir fuir la présence d'une personne qui vous fait sourire, à moins qu'un drame soit arrivé. Oui, gaël fut un drame il y a deux mois de ça. Et puis, elle repense à ses paroles. Oui, il l'a fait vraiment sourire pour pas grand chose. Virer une nouvelle fois rouge écrevisse tant que nous y sommes. Elle lui donne cette petite tape amicale sur l'épaule. « Hey, dis pas de conneries toi, mais j'y songerai la prochaine fois. Je t'enverrai des signaux avec de la fumée, tiens. » Sentir qu'il la flatte sincèrement c'est… elle s'en remet, là n'est pas le soucis, mais disons qu'elle va finir par ressentir ce besoin de se cacher à tout prix, si ce n'est de rire à vive voix sous son nez pour faire passer le maudit malaise et son maudit geste, et le vexer par la même occasion. « C'est bien rare de te voir le nez dehors, t'avais rendez vous quelque part ou dois-je faire une énormissime croix sur le futur calendrier que je vais devoir acheter ? » Sachez que la jeune femme a plus ou moins vérifié en quelques minutes si monsieur a des traces de rouge à lèvres, une odeur de parfum typiquement féminin incrustée dans ses fringues ou - encore pire que tout - si une alliance a fait son apparition à son doigt. On ne sait jamais. « Tu te portes pas trop mal non plus. » T'es toujours aussi magnifique, tu me rends toujours aussi spdfjzfe même si t'as juste la tête du gars qui a passé plus de temps à bosser que chez soi, limite tu aurais pas dormi sur place avec ton charmant patron que j'ai bien du croiser une ou deux fois en venant te chercher. Mais ma foi, tu n'as pas la peau sur les os et tu sens la propreté, t'es pas encore une cause perdue. « Et puis si tu tiens à me gifler à ton tour pour me faire comprendre que c'était stupide de partir, te gêne pas, enfin préviens moi d'abord… » Elle pointe son index vers le haut. « Un, pour que je m'y prépare psychologiquement. » Index qui est bientôt rejoint par le majeur. « Deux, pour que je prenne ça en photo, parce que je serai bien la première à être giflée par toi et bon si jamais j'ai besoin de te faire chanter, ça pourra toujours être une bonne monnaie. » Ayons un peu d'humour, évitons le tragique et la scène clichée après son moment d'égarement avec son baiser. C'était quoi ça ?

tous les jours, il y a des choses qui m'étonnent, voyez-vous. lorsque mes collègues n'arrivent pas en retard, j'suis étonné. lorsque je prend un café au starbucks et qu'il est dégueulasse, j'suis étonné. lorsque mon père me passe un coup d'fil, j'suis étonné. mais j'croyais jamais être aussi étonné de voir sephora poser ses lèvres contre les miennes aussi rapidement, devant tout le monde. c'est .. agréable. et j'me retrouve encore à être niais grâce à des stupides sentiments qui ne devraient même pas avoir lieu, vu la relation awkward que nous entretenons. néanmoins .. pour l'une des premières fois d'ma vie, j'voudrais que ce soit plus que ça. cependant, il s'avère que cette fois-ci, ce n'est pas moi qui décide. j'me sens juste énormément forever alone d'être le dude que beaucoup de gens idolent, mais qui retourne chez lui l'soir dans un lit vide, t'sais, alors que l'autre mec qui fait un petit 40H/semaine comme cuisiner au restaurant du coin a une femme et des kids, .. une vie, en gros. je n'ai pourtant jamais désiré ces choses, mais j'ai l'impression qu'elle me fait vouloir ces choses. cette vie m'fait de l'oeil depuis que mon coeur ne sait plus se contenir comme il l'a toujours si bien fait. j'me sens con, mondieu. sephora fini par se détacher, mais je l'observe attentivement, abasourdi. j'suis bouche-bée, carrément. mon premier réflexe est de regarder à droite et à gauche question de vérifier les prédateurs (et j'parle pas de prédateurs sexuels, namého ..), parce que j'crois pas qu'elle serait heureuse de voir sa tête dans un magazine au cours des prochaines semaines, avec un 'owlie-sh*t, en couple?' en titre au dessus de nos têtes. et j'crois que je ne serais pas trop heureux non plus, parce que bon, j'me ferais harceler pour une interview, et pis j'ai pas l'temps pour ça. sephora est rouuuge, j'trouve ça absolument adorable. j'souris, malgré l'énoooooorme malaise. j'suis sous le charme, je l'avoue, je l'avoue. « C'est bien rare de te voir le nez dehors, t'avais rendez vous quelque part ou dois-je faire une énormissime croix sur le futur calendrier que je vais devoir acheter ? » bitchhhh please! j'ris, ça camoufle le malaise, j'aime ça. « tu vas devoir t'acheter un calendrier, je crois. et faire une croix dessus. c'est mon patron qui m'a obligé .. t'sais, mon adoooorable patron .. » sephora étant bien au courant des intentions de celui-ci. enfin, je crois, étant donné que c'est plus qu'évident. « Tu te portes pas trop mal non plus. » j'souris, j'réplique pas .. « Et puis si tu tiens à me gifler à ton tour pour me faire comprendre que c'était stupide de partir, te gêne pas, enfin préviens moi d'abord… » elle serait bien la dernière personne que je giflerais, en fait. « j'te giflerai pas, mais j'veux bien te faire comprendre que c'était très stupide de partir .. » j'sais que ça va créer un énorme malaise, mais .. j'sais pas. j'ai pas réfléchi, j'suis impulsif et pis .. voilà. j'pose mes lèvres sur les siennes, comme elle l'a fait il y a .. une minute ou deux. j'le fais durer, au moins quelques secondes, et pis j'm'arrête rapidement parce qu'au final, je me trouve tellllllement trop con d'avoir fait ça, surtout qu'elle venait tout juste de parvenir à éliminer le malaise du premier baiser .. comme quoi c'était plus fort que moi. « .. hum. finalement, j'crois que t'aurais préféré la gifle .. n'est-ce-pas .. ? » et j'fais mine de rire, mais .. rrrr, j'suis stupide. bref.

Elle tremble tout de même à l’idée qu’ils n’aient plus rien à se dire désormais, vous savez qu’ils soient passés à autre chose. Parce que vous avez beau tenir à quelqu’un comme à la prunelle de vous yeux, la distance fait parfois en sorte que toute la magie disparaisse. Et peut importe le passé, leurs histoires respectives, Sephora ne s’en remettrait surement pas si elle ne pouvait pas se retrouver de temps en temps dans ses bras, lui envoyer des messages plus idiots les uns que les autres et lui apporter le café tous les matins. « tu vas devoir t’acheter un calendrier, je crois. et faire une croix dessus. c’est mon patron qui m’a obligé .. t’sais, mon adoooorable patron .. » Oh, ooooooooooooh le retour de l’adoooooooorable patron. La jeune femme ne peut s’empêcher de rire Elle qui a toujours cru qu’il malmenait son employé et que c’était par sa faute qu’elle ne le voyait pas autant qu’elle l’aurait souhaité. Heureusement qu’il subsiste encore des sujets de conversation pour détendre l’atmosphère, le regarder dans les yeux n’est plus si compliqué… « j’te giflerai pas, mais j’veux bien te faire comprendre que c’était très stupide de partir .. » Jusqu’à ce que oui, il sorte cette phrase très étrange et… woooooooooow. Ce ne serait pas plus mal que Tay s’arrête avant qu’elle oublie de respirer pendant une fraction de seconde et s’étouffe par la suite. Non… ce n’est juste pas possible. Ce nouveau baiser ne va pas lui éclaircir les idées. Loin de là. Très très très loin d’elle une telle idée. « .. hum. finalement, j’crois que t’aurais préféré la gifle .. n’est-ce pas .. ? » Et Sephora a chaud. C’est soudain. C’est le sang qui lui monte à la tête et elle reste agrippée à Tay. Non, non, pas la gifle finalement. Se faire embrasser par le ô bien connu « Owlie shit », qui dirait non. En attendant, elle a parfaitement compris le message. Cependant, la jeune femme n’a pas saisi ce qu’il y a dorénavant entre eux. Enfin, cela n’a jamais été bien clair par le passé, ils n’ont jamais pris le temps de mettre un ou deux mots sur leur amitié et les rares arrangements spontanés du passé. Oui, tout le monde a ses faiblesses, aussi rares soient-elles. Sephora prend une profonde inspiration et rassemble ses esprits quelque peu égarés dans le feu de l’action. Contre lui, sans jeter un regard elle finit par lui donner une réponse la plus cohérente et censée possible. « Disons que tu m’as donnée une seconde raison pour acheter un calendrier le plus vite possible… ou un journal intime aussi épais qu’un parpaing, parce que je sens que les surprises sont de rigueur. En fait, je préfèrerai que l’on ait une discussion. Aujourd’hui. Demain. Un autre jour. Quand on sera prêt. Mais je me vois pas tourner la page sur ça, comme si de rien n’était. » Elle hausse les épaules et le fixe du mieux qu’elle le peut, c’est à dire sans fondre en larmes parce que ce fut une scène trop niaise et cute sur les bords, ni même rougir une nouvelle fois de plus belle. C’est extrêmement gênant, vous savez. Il y a un peu plus de deux mois, elle venait de se faire lâcher par son fiancé et aujourd’hui, l’enthousiasme de retrouver Tay la fait réagir de façon inattendue. « Tu en as d’autres des comme ça, des histoires inattendues, tant que nous y sommes ? Parce que bon, l’anecdote de ton patron, tout le monde est au courant je pense. » Prête à ne pas le lâcher pour un bon moment, la jeune femme l’attrape par la main histoire qu’ils ne restent pas sur place et qu’ils attirent les regards à la longue. Elle a tout sauf besoin de se sentir observée à cet instant. « Donc, je te propose un café, comme au bon vieux temps et à la limite, tu m’aides à trouver un beau calendrier et un journal intime, à moins qu’un de tes adoooooorables groupies vienne pourrir l’ambiance, si ce n’est tout un régiment. » Jalouse ? Non pas du tout. Elle ne les porte pas dans son cœur, tout simplement.

j'sais pas trop ce qui nous pousse à agir de la sorte. j'imagine que c'est .. le temps? j'sais pas.. elle m'a manqué, et j'imagine que j'lui ai manqué aussi. comme quoi j'avais pas l'habitude de recevoir mon café par quelqu'un d'autre qu'elle, de ne pas la voir régulièrement, de ne pas pouvoir lui dire tous les détails d'ma vie en lui faisant totalement confiance. parce que bon, ce n'est pas à n'importe qui que je confierais en quoi mon actuel boxer est tellement plus confortable que tous les autres. des trucs pourtant insignifiants, mais quand même 'personnels', haha. « disons que tu m’as donnée une seconde raison pour acheter un calendrier le plus vite possible… ou un journal intime aussi épais qu’un parpaing, parce que je sens que les surprises sont de rigueur. en fait, je préfèrerai que l’on ait une discussion. aujourd’hui. demain. un autre jour. quand on sera prêt. mais je me vois pas tourner la page sur ça, comme si de rien n’était. » j'souris, mais la fin d'phrase m'inquiète. comme quoi j'viens tout juste de réaliser en quoi engagerait cette fameuse discussion. parce que bon .. premièrement, j'risque de me prendre encore un poteau en pleine figure, d'me faire dire que c'est mieux qu'on reste amis, et je n'en ai vraiment pas envie, c'est vraiment très très mauvais pour l'estime de soi, et tout. malgré que ça me ferait peut-être du bien, j'me fais parfois dire que j'en ai trop. et pis j'répond que j'suis réaliste, c'est tout. haha. bah quoi? .. breeef, pour en revenir à c'que je disais, eh bien, si elle me dit qu'elle veut passer au deuxième niveau, t'sais le genre de relation qu'on pourrait nommer .. hum .. 'est passé de célibataire à en couple', .. eh bah .. j'sais pas, ça me fait limite peur. depuis tout à l'heure, j'me dis que je n'attends que ça, et puis pourtant, maintenant que j'y pense, j'suis un tantinet effrayé. « tu en as d’autres des comme ça, des histoires inattendues, tant que nous y sommes ? parce que bon, l’anecdote de ton patron, tout le monde est au courant je pense. » l'embrasser une troisième fois serait peut-être de trop. du coup, j'me retiens. « t'es entrain de dire que j'suis pas intéressant, là? parce que j'trouve ça intéressant, moi, l’anecdote de mon patron, t'sais. » elle m’agrippe par la main et me traîne dans un café. ça m'rappelle beaucoup beaucoup de souvenirs. « donc, je te propose un café, comme au bon vieux temps et à la limite, tu m’aides à trouver un beau calendrier et un journal intime, à moins qu’un de tes adoooooorables groupies vienne pourrir l’ambiance, si ce n’est tout un régiment. » j'lâche un rire. sacré sephora. « moi j'les aime bien mes groupies, tu sais. elles sont canons. » provocation. rire. clin d'oeil. et pis il y a cette fucking discussion qui me revient encore et encore en tête. ça m'stresse beaucoup trop. « .. t'insinuais quoi par la mot .. discussion .. tout à l'heure? .. tu veux pas .. hum .. tout m'dire maintenant? qu'on en finisse .. haha .. ça m'stresse, tu vois. »

Cette conversation tourne au vinaigre. Le sixième sens de Sephora lui envoie comme des messages d’alerte, elle devait s’arrêter avant que les choses finissent vraiment mal entre eux. C’est bien le dernier truc dont elle aurait besoin d’ailleurs. Ils peuvent utiliser le ton de l’humour pour faire passer un malaise, mais ce dernier revient toujours au galop et ils ne pourront pas échapper au sérieux très longtemps. La jeune femme se fait craquer les doigts et imagine tout un tas de scénarios, pus plausibles les uns que les autres. Elle fait le tour de la question, tourne et retourne le problème dans tous les sens et pour que Tay ne le prenne pas mal, elle devra se confier le plus tôt possible. Autant être claire le plus vite possible. « moi j'les aime bien mes groupies, tu sais. elles sont canons. » Tout juste installés à leur table, la rouquine lève les yeux au ciel. Elle voudrait bien avoir le pouvoir de le foudroyer du regard. Si, si, ça lui serait sacrément pratique. « Mauvaise réponse. » bzzzzzz, ahah. Il est plus que certain qu’elle les déteste, même s’il a toutes les bonnes raisons de les avoir. Nécessité pour son travail, pour son égo de grand enfant et puis avouons le, il est tout sauf désagréable à regarder. « Canons, ouais, je vais pas le nier, mais avoue qu’elles sont parfois malades… Je suis sure que certaines rêvent de se faire un manteau en peau de Tay… Mais je deviens quoi, moi sans toi ? » Sephora fait mine de pleurer, jouer la tragédie grecque c’est parfaitement dans ses cordes. Et puis, il faut croire que même dans l’humour il y a des messages cachés. Enfin, non, sincèrement même en toute amitié, elle serait perdue. « .. t'insinuais quoi par la mot .. discussion .. tout à l'heure? .. tu veux pas .. hum .. tout m'dire maintenant? qu'on en finisse .. haha .. ça m'stresse, tu vois. » Elle déglutit. Moment fatidique. Par où commencer… C’est l’adorable serveur qui l’extirpera de ses pensées, comme si cela faisait déjà quelques minutes qu’il poireaute à côté d’elle et qu’il commence à perdre patience. Café latte. Revenons à nos moutons et nos histoires délicates. « Émotionnellement, je me sens pas prête, mais vu que monsieur est stressé, je fais une exception et me lance parce que je m’en voudrais tout de même si tu me fais une crise d’angoisse ou si tu es incapable de dormir. Ça risque d’être… violent, hein. Et puis, ce n’est pas tout. Il s’est passé ce qu’il s’est passé avec Gaël et je me suis pas reconnue, j’avais plus d’échappatoire, alors qu’avant mon excuse c’était le travail, t’es le mieux placé pour le savoir… Tu vois, je me suis tellement investie dans cette relation, ça m’a épuisée moralement et c’est un terrain qui me fout la trouille, dorénavant. Mais allons y. » Sephora prend alors une profonde inspiration et s’enfonce sur la chaise en espérant finir six pieds sous terre. Enfin maintenant que nous y sommes, elle le fixe dans les yeux. « Owlie Taylor Enea Januario… J’ai… Tu me mets la tête à l’envers, depuis plusieurs mois… beaucoup trop de mois, même.[/color] » Et ça c’est fait. Mais autant lui expliquer le fond de sa pensée avant de voir sa réaction, parce qu’il… « Ce n’est pas la distance ou le temps qui me font réagir comme ça, imagine que je doive faire une telle déclaration à chacun de mes proches. Non, ça me rend malade de te voir draguer ou être avec une autre fille, et d’un autre côté, j’ai la sensation que ce n’est pas vraiment le meilleur moment pour… tu vois quoi… » Elle jette un coup d’œil au serveur qui revient avec leurs consommations. Encore quelques mots et promis elle lui laisse la parole, parce que normalement une discussion ça concerne deux personnes, un échange en somme. « Et puis, je me fais surement des histoires, parce que c’est certainement à sens unique et que ton pauvre patron t’attends lui aussi pour une looooongue et belle et heureuuuse histoire. » Idiote, il n’aurait pas embrassé une fille en toute amitié pour lui faire comprendre que partir sans rien dire fut une mauvaise idée, n’est-ce pas ? « Alors oublie, hein. » Elle baisse les yeux. Nouvelle gorgée de café.

« canons, ouais, je vais pas le nier, mais avoue qu’elles sont parfois malades… je suis sure que certaines rêvent de se faire un manteau en peau de tay… mais je deviens quoi, moi sans toi ? » j'souris à l'entendre parler comme ça. j'répond pas, j'me contente de baisser la tête en laissant échapper un petit rire de ma bouche, et puis j'prend mon courage à deux mains pour lui demander ce qu'elle insinuait tout à l'heure par 'discussion', parce que .. autant j'ai envie d'avoir cette 'discussion', autant j'ferais tout pour l'éviter. j'ai toujours eu l'habitude d'être certain de moi, et pourtant, cette fois-ci, j'suis l'homme le plus incertain du monde, ça fait vachement peur, en fait. le serveur arrive, j'espère sincèrement que sephora n'utilisera pas cette astuce afin de changer de sujet. elle prend un café latte, et tant qu'à être un homme indécis pour la journée, soyonnnns fou, je commande la même chose. elle commence avec ses explications, je l'écoute attentivement. « ... tu vois, je me suis tellement investie dans cette relation, ça m’a épuisée moralement et c’est un terrain qui me fout la trouille, dorénavant. mais allons y. » ça commence bien. j'avoue qu'actuellement, je m'attend à tout sauf à quelque chose de positif. elle me fixe en plein dans les yeux, tellement que j'détourne le regard et puis .. voyons owlie-shit, t'es pas faible à ce point, ne te laisse pas intimider comme ça .. et j'replante mon regard dans le sien, comme si rien ne m’apeurait dans ce qui allait suivre. « owlie taylor enea januario… j’ai… tu me mets la tête à l’envers, depuis plusieurs mois… beaucoup trop de mois, même. » j'suis tellement pessimiste aujourd'hui que j'vois déjà la phrase suivante arriver, un genre de .. tu me mets la tête à l'envers, mais j'viens de réaliser qu'en fait, toi et moi ça ne pourra jamais fonctionner. t'es qu'un meilleur ami, c'est tout. je t'aime, en meilleur ami, voilà. et ça m'fait peur, mais d'une force, alors j'souris pas et je reste sur mes gardes. « non, ça me rend malade de te voir draguer ou être avec une autre fille, et d’un autre côté, j’ai la sensation que ce n’est pas vraiment le meilleur moment pour… tu vois quoi… » eeeeet voilà. et voilà. et j'imagine que ce ne sera jamais le moment, jusqu'à ce que le prince charmant non-addicted à son boulot se présente devant elle et qu'elle ne puisse pas résister. au diable owlie-shit, lui, c'est qu'une sortie de secours, celui avec qui j'serai lorsque je serai sur le point d'être une vieille fille et que j'aurai déjà accumulé une bonne dizaine de chats après avoir eu une bonne vingtaine de peine d'amour. et dieu sait à quel point j'déteste passer deuxième. alors j'passerai certainement pas trentième. « et puis, je me fais surement des histoires, parce que c’est certainement à sens unique et que ton pauvre patron t’attends lui aussi pour une looooongue et belle et heureuuuse histoire. alors oublie, hein. » t'insinues quoi, sephora? que j'vais finir avec mon patron? aucun sourire sur le visage, j'prend une gorgée de mon café et j'regarde ma montre. « on va mettre un truc au clair, sephora. j'ressens absolument rien pour toi. » j'baisse les yeux au sol et j'attends que les secondes s'écoulent. « c'est pour cette raison que je t'ai embrassé deux fois, tout à l'heure, comme un imbécile, et que tu m'as manqué comme jamais lorsque t'es partie, et c'est également pour cette raison que j'tiens pas une petite-amie plus que deux semaines étant donnée que j'sais pertinemment que celle qui me faut est .. » pause. « .. juste devant moi. » j'observe l'imprimé, sur mon verre, mais j'l'observe pas vraiment, c'est juste pour observer autre chose que ses yeux. « .. mais bon, puisque ce ne sera jamais le moment, j'vais aller avec mon patron, comme tu me le conseilles tant. »

Rouge de honte, la jeune femme entend encore sa mère lui répéter maintes fois lors de son enfance qu’elle ferait mieux de tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de l’ouvrir. C’est tout bête comme principe, mais cela lui éviterait bien de dire des conneries. Conneries. Conneries. Putains de conneries. Nouvelle gorgée de café chaud pour panser son petit cœur. « on va mettre un truc au clair, sephora. j’ressens absolument rien pour toi. » C’est la descente aux enfers. La jeune femme prend tout au pied de la lettre. Tay ne ressent rien. Pas de sentiments. Très bien. Elle finira par s’en remettre. Ce n’est pas la première fois qu’on lui « brise » le cœur. Mais qu’entend-il vraiment par « ressentir » ? Leur amitié ? Que du vent depuis tout ce temps ? Ou est-ce toujours d’actualité ? Ou. Ou. Fuuuuuh, trop de questions existentielles. « c’est pour cette raison que je t’ai embrassé deux fois, tout à l’heure, comme un imbécile, et que tu m’as manqué comme jamais lorsque t’es partie, et c’est également pour cette raison que j’tiens pas une petite-amie plus que deux semaines étant donnée que j’sais pertinemment que celle qui me faut est .. »

Je me terre sur ma chaise. Je ne sais plus trop où regarder. J’entends vaguement ce qu’il me dit. Il n’est pas loin, mais ça sonne plus comme un écho. Je rêve. Je délire peut-être. Je ne sais plus trop. Je suis au moins à un parsec de notre table. Je n’entends finalement que la fin et porte une nouvelle fois mes lèvres à la tasse lors de sa pause.

« .. juste devant moi. »

Je manque sérieusement de m’étouffer. Je lui parle de sentiment pour lui et il me parle de sentiments à son tour. Sauf que je ne saisi pas l’essentiel. Je comprends pas que c’est fille c’est moi. Je déglutis.

Un coup de tête vers la droite. Personne. Vers la gauche. Que des hommes. Elle se repositionne trèèèèèèès doucement. C’est un peu comme dans un film d’horreur – admettons Scream – quand le personnage se rend compte qu’il est dans la merde. Jusqu’au cou. « .. mais bon, puisque ce ne sera jamais le moment, j’vais aller avec mon patron, comme tu me le conseilles tant. » Encore en pleine analyse de la situation, Sephora ne prend pas le temps qu’il est tombé dans le panneau à son tour. Ironie mon cher.

Moi ? Ceci explique donc cela. Non, c’est juste pas possible. Je suis donc une fille aveugle, doublée de cruelle. Je sens mon souffle coupé. La dernière gorgée de café ne passe pas. Du tout. Avec toute cette histoire, j’ai soudainement oublié ma capacité à ingurgiter, respirer et réagir.

« Non. »

Ça vient tout seul. Je ne sais pas exactement à quoi ça rime. Je reviens dans la conversation et il est hors de question qu’il pense que je sois cruelle, que je tienne à ce qu’il finisse avec son patron ou une autre fille. Bien que j’ai la certitude d’être une Bridget Jones en devenir, je le veux. Pour moi. Toute seule.

« Non. Je n’y tiens pas, à ce que tu finisses avec lui. » Elle relève enfin son regard, sans trop le fixer sérieusement, mais sans s’échapper pour autant. Sephora lui a promis une discussion, autant se montrer la plus sérieuse possible. « C’était à prendre… au second degrés. Uniquement la fin, évidemment. » Petit tic au niveau de la tête et de ses épaules pour faire passer la sensation de malaise. « J’ai pas dit que ce ne sera jamais le moment. » Et là c’est le drame.

Rien n’est clair dans ma petite tête. Mais faut que je lui dise tout ce qui me traverse l’esprit. En vrac, s’il le faut. Tay est assez intelligent pour faire le tri. Comprendre le sens.

« Mais tu trouverais pas ça bizarre que je te dise le même jour, après deux mois d’absence, que tu m’as horriblement manqué, et que j’ai des sentiments pour toi, et que j’aspire un jour à sortir avec toi. »

Tu t’enfonces. Tu t’enfonces. Mais tu continues. Je la sensation que le sang me monte à la tête pour la énième fois depuis notre rencontre, voire nos retrouvailles du jours. Et je crains que les larmes me montent aussi aux yeux.

« Et puis qui me dit que des petits hommes verts ne t’ont pas enlevé, toi. Physiquement, t’es toujours le même… Avec des poignets d’amour, à la limite en plus. Passons les plaisanteries. Mais est-ce que tu es toujours le sale gosse, marié à son boulot, qui me fera toujours rire chaque moment passé avec lui ? Suis-je devenue ennuyeuse à tes yeux depuis ? » Questions philosophiques, bonjouuuuuuuuur.

Je m’étais fait la promesse de ne plus tomber amoureuse. Jamais. Me tenir éloignée des drames. Aussi. Sauf que je tiens à lui. Sincèrement. En amour ou en amitié, il est hors de question de perdre Tay. Il paraît que c’est mignon. Mais à vingt trois ans, je ne suis toujours pas capable de gérer ces histoires sans être rouge de honte.