Roxan and Léo

Nuit orageuse, mais très loin de me déplaire. Je terminai de monter les quelques marches jusqu'à l'appartement que je partageai avec mon cousin Léo Montgomery. Une collocation atypique entre grand délirium et bonne humeur à foison. Je n'aurai pu être jamais assez reconnaissant de tout ce qu'il avait fait pour moi. Il m'avait donné un toit, permis de retrouver ce lien qu'on appellait: Famille. Oui, je ne pouvais m'arrêter de sourire quand je pensais à mon grand abruti de cousin - comme j'aimais l'appelé dans nos moments les plus intimes. Il me donnait tellement de courage. J'étais fier d'être moi-même avec lui et cela malgré mon passé qu'il connaissait. Ce passé qui venait me hanter la nuit parfois. Et, même si je refusai toute aide, je savais qu'il était là dans l'embrasure de la porte de ma chambre alors que je me tordais de douleur dans mon lit. Est-ce qu'il savait à quel point je l'aimais pour ça ?

C'est vrai que chez nous, nous n'étions pas du genre à nous dire ces quelques mots si facile chez d'autre. Nous préférions cette folie qui coulait dans nos veines avec euphorie. Chez Montgomery and Meyer, ce n'était pas le temple du bon goût, mais plutôt le temple du n'importe quoi. Comme ma manière si particulièrement pour que mon cousin arrête de laisser trainer ses vieux caleçons sales dans notre salon. Comment ? On lui mettant sous le nez au réveil alors qu'il venait à peine de prendre son café. Bien lui écraser sur le visage son caleçon aux taches les plus suspectes avant de m'enfuir en courant. D'abord, par peur des représailles, mais aussi car j'aimais qu'il traverse l'appartement à ma recherche et en maudissant mon prénom. Mais aussi, comme ma fâcheuse manie d'aimer agacer Léo avec mon absence de pudeur. Combien de fois j'avais préparé le petit déjeuner avec simplement le tablier couvrant l'impensable ? Aimant agiter mes petites fesses en lui apportant ses gaufres.

Je savais que pour le regard extérieur que c'était très étrange ce rapport, mais pour moi c'était ma manière - particulière je le savais bien - de montrer mon attachement totale et sans faille. Je l'aimai et je n'avais pas peur de le redire. Léo était pour moi à présent ma seule famille, mon seul point d'encrage dans ce monde qui me donnait l'impression de vouloir me dévorer. J'avais beau me cacher derrière ses sourires, cette bonne humeur. Je doutais - comme tout un chacun. Je doutais de ce que je pouvais apporter. Je n'étais qu'un grain de sable indéfinissable. Je n'avais pas d'avenir. Je n'avais personne qui tenais à moi - amoureusement. Je pouvais en finir demain, personne ne le remarquerait, personne ne pleurait...Sauf, Léo ! Alors, il était hors de question de l'abandonner, de le fuir ou tout simplement de briser notre lien.

Je débarquais dans notre appartement un peu intrigué. Il était plus de deux heures du matin et l'appartement était vide. Je posai mes affaires et je tombai dans notre canapé, tout en regardant d'un œil mon téléphone portable. Mon cousin avait-il trouvé chaussure à son pied ce soir ? J'en aurai été content. Je pense que même si nous avions pas la même sexualité, nous avions le même appétit. Quand la porte s'ouvrit, je sautai sur mes jambes, heureux tout simplement. Je lançai alors avec mon humour légendaire. C'est à cette heure que tu rentres ? Tu n'as pas honte ? Je m'approchai avec virulence avec mon doigt levé, parfait dans mon rôle de composition. Tu as pensé à notre enfant ? Et, que vont dire les voisins ? Ma mère avait raison, tu n'es qu'un bon à rien !

J'étais sorti en vitesse du bar qui me servait de seconde maison depuis le début de la semaine. En effet, je reconnais y avoir trouvé les meilleures pintes de bière depuis mon arrivée, mais la faune locale me plait vraiment bien ! Quoi de mieux qu'une divine créature qui tente de croiser votre regard, savourant sa boisson et plantant ses yeux surmontés d'une couche d'eye-liner dans les vôtres ? Pour moi, rien. Un sourire, un regard et tout peu s'emballer ! Une magnifique brune m'avait véritablement tapé dans l’œil quelque peu après mon arrivée; j'avais eu beau essayé de m'intéresser à ce qu'elle me racontait, je ne pouvais m'empêcher de me focaliser sur ses jambes, croisées et décroisées. L'ambiance, nos regards et la conversation prédisaient une fin de soirée en tête à tête et cette image restait gravée en moi, tout était presque calculé. Elle m'avait sorti de mes rêveries, m'avait entrainé hors du bar, avec juste le temps de prendre mon pull, posé sur un siège. Je ne savais vraiment pas ce que j'étais entrain de faire. Elle tourna à l'angle de la rue et m'avait plaqué contre le mur en pressant ses lèvres contre les miennes. J'étais à deux doigts de l'emmener dans mon appartement lorsqu'elle me dit qu'elle devait absolument partir et qu'elle espérait que tout cela n'était que partie remise. Elle s'était sauvée, en courant presque, ruisselante de pluie, les vêtements trempés. Et moi j'étais là, comme un con. En quelques minutes, mes plans s'étaient envolés, ma fin de soirée anéantie.

La seule chose qui me restait à présent à faire était de rentrer dans mon appartement. Le visage de Roxan me vint alors devant les yeux, comme si j'avais complètement oublié qu'il habitait avec moi. Évidemment c'était faux, puisque son tablier rose me rappelait chaque matin ses talents culinaires et son corps, qu j’espérai vraiment voir moins découvert ! Je mis mon pull, passais ma main dans mes cheveux et pris la direction du 20ième. Je me demandais bien ce qu'il faisait à une heure pareille. Je regardais mon portable, et cherchait furieusement à marcher droit, car les verres d’alcool que j'avais consommés, au delà de la bière, commençaient à m'atteindre sérieusement. Est-ce que j'allais arriver entier à la maison ? Pas de message, pas d'appel manqué. En même temps, ce n'était pas étonnant, nous n'étions pas du genre à être tout le temps au bout du fil, l'un avec l'autre. Chacun avait sa vie, et l'autre la respectait, malgré les petites dérives de la vie quotidienne. A chaque fois que je pensais à mon cousin, j'avais se souvenir, dans la salle de bain de mon appartement. Peut être quelques mois après que Roxan ait emménagé. J'avais eu beau lui expliqué que c'était parce que j'avais rejoint une équipe de natation, le fait que je me rase les jambes l'avait à jamais marqué dans sa vie de jeune homme. D'ailleurs, j'étais persuadé qu'il se demandait secrètement si je n'étais pas une femme. Et ça, c'est mon cousin tout craché.

Je ressassais ces souvenirs alors que je marchais, j'avais vraiment envie de m'affaler sur mon lit, de vomir dans une bassine tout l'alcool que j'avais dans mon estomac et de me plaindre toute la nuit à Roxan de cette fille qui m'avait expressément dit que ce qu'il s'était passé n'était que "partie remise". Comme si MOI, Léo Montgomery, je pouvais être considéré comme une personne qui aurait pu combler un vide dans son emploi du temps. Et seul Roxan trouvait les mots. Ou pas d'ailleurs, puisque la plupart du temps il s'en allait faire ses trucs de son côté et moi je continuais de me plaindre, persuadé qu'il se trouvait encore là. J'ouvrais la porte doucement, ne sachant pas s'il dormait ou non, et entrait discrètement dans l'appartement. La lumière du salon était tout de même allumée, et je me retournais pour fermer la porte sans la claquer. Mais, Roxan restait Roxan et je n'étais pas surpris de le voir encore debout. « C'est à cette heure que tu rentres ? Tu n'as pas honte ? Tu as pensé à notre enfant ? Et, que vont dire les voisins ? Ma mère avait raison, tu n'es qu'un bon à rien ! ». Il s'approchait de moi, la tête levée, essayant de garder son sérieux malgré tout et je ne peux m'empêcher de lâcher un petit rire. Je posais mes mains sur mes hanches, puis passais la main dans mes cheveux, en essayant d'imiter au mieux les caricatures gays que connaissait tout Paris. « De toute manière j'en ai marre de ta mère ! Toujours là à fourrer son nez dans nos affaires; j'en ai MARRE MARRE MARRE ! ». Je passais une nouvelle fois ma main dans mes cheveux et fit un mouvement de tête, pour remettre la mèche, que je n'avais donc pas, en place, apothéose de mon imitation. « Si tu m'avais laissé l'éduquer un peu ce gosse hein ! Tu crois que c'est normal qu'à son age il veuille faire esthéticien ? Tu le crois ça ? Encore ton influence néfaste sur lui. Tu vas lui ruiner son karma à ce petit ! ». Je fis un mouvement de tête, mais ne pus m'empêcher de sourire. Nos regards se croisèrent et nous ne pûmes nous empêcher de rire. Je m'approchais de lui, lui donnant une petite tape sur l'épaule. Il avait l'air exténué et ses affaires étaient encore sur le canapé. « Ben dis donc, tu viens juste de rentrer ? ». Mon stratagème ? Lui demander ce qu'il avait fait ce soir, en espérant évidemment avoir droit à un court résumé et me plaindre toute la nuit de cette sainte nitouche qui m'avait laissé en plan.

Garder son sérieux avec Léo, c'était comme se lancer dans la physique quantique. Sa tête, ses manières, notre profond lien, tout me donnait envie d'exploser de rire face à son entrée discrète. Mais, ce n'était pas me connaitre ? Combien de fois j'étais entré dans sa chambre alors qu'il était en charmante compagnie ? Je n'étais pas du genre à vouloir apercevoir quelque chose que je ne voudrais pas. Alors, je rentrai dans ces moments comme une tornade sans allumer la lumière, tout en criant: BAZINGA ! Avant de refermer la porte en la claquant la plus fort possible et d'aller trouver refuge dans ma chambre. C'était puéril, complétement enfantin, mais c'était tout moi. Et, en repensant à cette annecdote je me demandais encore comment mon très cher cousin ne m'avait pas jeté à la porte par la peau des fesses ? L'amour filiale ou tout simplement je le faisais rire ?

Car, Léo, lui, me faisait mourir de rire. Pourtant, je gardais mon sérieux face à mon jeu de vieux couple gay prêt à jeter toute la vaisselle aux murs. Cela n'allait pas encore ce soir que les voisins qui ne pouvaient nous supporter allaient nous aimer. Je pris une position tout aussi efféminé en écoutant le grand brun, le corps légèrement en arrière et une une main contre mon front. Qui a dit qu'on ne pouvait pas se moquer un peu des siens ? « De toute manière j'en ai marre de ta mère ! Toujours là à fourrer son nez dans nos affaires; j'en ai MARRE MARRE MARRE !» Dur de garder mon sérieux, ma lèvre frémissante prêt à imploser. Je fixais alors mon regard vers notre collection de DVD et je m'approchai avec un nouveau sourire carnassier. J'attrapai le premier DVD venu et je menaçai de le jeter à la figure de mon camarade de jeu. « Je t'interdis de PARLER de ma mère ! Elle n'aurait pas à fouiner dans nos affaires si tu remplissais ton rôle avec ta MAIGRE contribution.» Mélange entre joute et petite pique. J'envoyai une œillade pleine de sous-entendus à Léo tout en baissant mon regard vers le bas de son jean. Depuis, que j'avais surpris Léo - Merci, les joies de la collocation - sous la douche, j'aimais le taquiner sur sa virilité. Quel homme apprécié cela ? Qu'il soit gay, hétéro ?

Gardant le dvd dans mes mains. Je tapotai le couvercle sur ma paume tout en admirant son meilleur jeu d'acteur.« Si tu m'avais laissé l'éduquer un peu ce gosse hein ! Tu crois que c'est normal qu'à son age il veuille faire esthéticien ? Tu le crois ça ? Encore ton influence néfaste sur lui. Tu vas lui ruiner son karma à ce petit ! » Là, je ne peux retenir mon rire, que j'étouffai bientôt pour essayer d'installer un peu de sérieux sur mon visage. J'allai reposer le DVD dans son étagère et j'ajoutai tout en agitant mes mains comme une dinde à laquelle on aurait coupé la tête. « Tu crois que tu es mieux ? Quel image tu donnes à ce petit en passant ta vie sur ses sites qui me donnent envie de VOMIR ! Tu vas voir qu'il va devenir un dépravé comme son PÈRE !» Nous regards se sont croisés et nous avons ris ensemble. Je le poussai amusé sur le canapé juste derrière lui. Je profitai de l'occasion pour retirer mes affaires tout en l'écoutant d'une oreille. « Ben dis donc, tu viens juste de rentrer ?» J'allai jeter mes affaires aux sales et je sortais deux bières du frigo, même si mon cousin me donnait l'impression d'avoir assez bu pour la soirée. Je m'installai prêt de lui et je lui tendis la deuxième bière. « Ouais ! Mais, tu veux pas savoir ce que j'ai fait...» Mais, cette phrase imposait avec mon sourire sadique que j'allais me faire un plaisir de lui raconter. Je penchai ma tête vers mon cousin tout en débouchant ma bière.« Alors, il y a eu cette équipe de foot...Au moins une cinquantaine de garçons...Ils ont voulus d'abord que je les...Puis, ils ont tous essayés de me...Ensuite, tu te doutes que je les ai...Mais, le plus drôle fut le moment ou...» J'explosai de rire et je donnai une petite tape sur l'épaule de Léo tout en ajoutant.« Non, je plaisante. J'ai bossé et on m'a posé un lapin pour un rendez-vous et toi ? » Ma vie sentimentale était tellement pitoyable qu'il était hors de question que je m'attarde sur ce lapin qu'un garçon m'avait posé.