13 mars 1989. Il pleut fort au dehors, il fait froid. Une buhée se forme sur la vitre. La vitre d'un hôpital. Un premier souffle, une larme de mère roulant sur sa joue. Deuxième enfant, une fille. Andréa. La petite fille grandit, à Paris. Sa nounou la promène dans le grand parc de Bercy. Elle était jolie, sa nounou. Elle se souvient ensemble. Elle déposait sa petite tête d'enfant entre ses deux seins. La petite Andréa n'aimait pas les poupées. Elle trouvait ça moche. Elle devenait rouge lorsqu'on l'obligeait à faire des choses qu'elle ne voulait pas faire. Elle aimait jouer avec la terre. Jouer avec son grand frère. Il n'était pas méchant, seulement étrange à cette époque. Il lui montrait des jeux de garçons, lui montrait un peu sa nouvelle gamecube, lui montrait comment serrer la main. Ils ne se considéraient pas comme frères et soeurs. Plus comme un copain... Et un autre copain. La famille Orlans déménagea à Hossegor. La petite Andréa était contente d'emménager près de la grande plage, de voir tant d'enfants sortir. Les siens travaillaient sans arrêt, cependant ils couvaient Matthias et Andréa de cadeaux. Ils ne jouèrent plus que chacun dans leur coin. La fillette avait du bon caractère. Elle ne se laissait pas faire à la récréation. Un jour elle cracha sur le visage d'un garçon qui l'avait cherché. Certains la trouvaient... Sauvageonne. Enfants comme adultes. Mais beaucoup s'intéressèrent à elle, à ce qu'elle valait vraiment et ainsi commença-t-elle à se lier d'amitié avec certains. Elle n'était pas le genre d'enfant à vouloir sublimer les autres mais qui cherchait d'avantage à s'affirmer. Elle grandit, grandit encore. Son regard était perçant. Elle était gentille avec ceux qu'elle aimait. Elle apprenait à découvrir les autres. Elle ne se fiait jamais à l'apparence que se donnaient les autres, et ainsi ne jugeait jamais les personnes sans réellement les connaître. A la maison, elle répondait farouchement à ses parents. Elle les voyait chaque soir après leur travail. Eux l'aimaient sincèrement et réellement. Elle, cependant, ne supportait pas de leur obéir et adorait transgresser leurs règles. S'habiller dignement pour commencer. A dix ans, Andréa faisait tout un caprice pour une tâche de rose, un peu trop de rouge par ci, pour une jupe ou une robe trop gamine. Les salopettes, c'était son truc. Andréa ne riait pas souvent. Cependant lorsqu'elle riait, elle en devenait sublime. Elle n'était pas belle ou moche, ses cheveux courts et légèrement ondulés n'offrait pas à son visage une frimousse merveilleuse mais elle était tout de même assez mignonne. Arrivée au collège, son changement de nom opéra en elle une sorte de déclique. Elle s'affirmait à part entière. Rebelle, fière. Chacun avait sa propre opinion de cette jeune fille spéciale. C'est aussi à cette période que son frère sombra et entraîna sa soeur vers le bas. Matthias était fort, bien portant et aimait le danger. Il lui apprit à faire des soufflettes, à manier une arme. A frapper au bon endroit, à placer ses doigts correctement. Il lui parla de tout. D'argent, du monde. De sexe, de drogue, des femmes. Il lui apprit ce qu'elle aurait prit certainement dix années à découvrir. Il lui ouvrit les yeux sur le monde... Et il lui faisait peur. C'était bien le seul être qui lui fasse éprouver un tel sentiment. Au fil des mois, elle évita de se trouver nez à nez avec lui. Il se faisait une réputation de buteur dans le quartier. Cependant un soir, où ses parents étaient conviés à un important dîner, Maxime se trouva nez à nez avec son grand frère. Elle était alors âgée de quinze ans. Dans les mains de son frère, elle ne pouvait guère oser de montrer ce dont elle était capable et de parler comme elle le faisait avec les autres. Cette soirée là figura parmi les plus dures de sa vie. Il ne viola pas, cependant il lui fit des choses et l'obligea à lui faire plaisir. Suite à cette soirée, elle savait avec conviction ce qu'elle était et ce qu'elle voulait. Elle aimait les femmes.


Et plus rien ne pourrait lui changer ça. C'est du moins ce qu'elle pensait à cette période... Et elle était loin d'imaginer qu'elle rencontrerait un homme capable de changer la donne. A ses quinze ans également elle découvrit la musique. La guitare lui apporta une inspiration, et lui permit de s'exprimer à travers sa musicalité. Elle suivit des cours avec plusieurs professeurs avant de monter son propre groupe, à dix-sept ans. Max' commença à profiter de l'argent de ses parents à juste titre. Elle n'était pas populaire au lycée de Hossegor, seulement elle commença à organiser de plus en plus de soirées chez elle. Elle y jouait de la guitare avec son groupe, faisait tourner alcool et Matthias en profitait pour faire son petit deal.


C'est en l'occasion d'une de ces soirées que, le lendemain, elle découvrit un drôle de jeune homme, dormant à points fermés. Elle n'osa pas le brusquer et le réveiller, il semblait emprunt à un profond sommeil. Elle lui laissa donc le temps de se réveiller. Ils se servirent du café, puis papotèrent. De tout et de rien. Il s'appellait Igor. Elle ne le connaissait pas. Lui non plus, et pourtant en peu de temps une amitié solide se créa entre les deux ados. Ils se virent régulièrement. Les balades sur la Jetée, les cinoch' avec pop corn. Maxime n'avait jamais eu d'ami en qui elle pu dévouer une confiance presque aveugle. C'était le cas avec Igor. Il était intriguant. Différent. Et Maxime aimait la différence. Leur amitié au fil des mois et des années se renforça d'avantage... A en devenir ambigüe. Elle sentait le regard d'Igor se poser sur elle d'une différente manière. Et elle en avait... Peur. Pas peur de lui. Peur d'elle-même. De ce qu'elle voulait être. De ce qu'elle ressentait, de ce qu'elle était... Si bien qu'elle s'emmura, s'enferma sur elle-même et évita de le voir. Elle l'évitait partout. Dans la rue, sur internet, elle ne passait plus par sa rue, n'allait plus à leur plage. Et c'était dur. Il lui manquait, mais... Non. Igor, lui, ne cessa pas de la chercher, de tenter de revenir auprès d'elle. Il désirait d'ailleurs son amitié plus que son amour. Ils avaient été bien trop proches, et l'un et l'autre étaient importants pour eux, pour continuer à avancer. Pourtant, ils furent réunis de nouveaux par la présence d'une seule et même personne. Matthias. Son frère borné n'était pas dupe. Si bien qu'il chercha Igor et le défia. Il était fort, robuste. Igor était à présent un homme, un vrai, un beau jeune homme. Mais il n'avait aucune chance face à son adversaire... Max' eut la chance de passer à l'épicerie acheter des clopes et trouver à quelques mètres de là son meilleur ami ensanglanté se faire mettre en pièce par cet bête qu'étais son frère. Elle accourut. Eut le temps de cracher à la figure de Matthias, de l'insulter de tous les noms, de le frapper. Lui, ricanait. Fier et surtout pas près à s'arrêter là. Elle s'en voulait. Igor l'observait. Elle, à son tour, l'observa. Entre cet intense échange de regard, Matthias en profita pour s'approcher de nouveau de sa victime. Igor envoya son poing dans la gueule de Matthias, prit simplement la main de Maxime et l'entraîna loin. Très loin... Dans le Nord de la France : Paris. Une nouvelle vie les attendait...

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