Le deuxième arrondissement, le quartier de mon enfance. Le quartier dans lequel mes parents habitaient. Je n'étais jamais revenu ici depuis que j'étais sorti de prison, je n'avais pas de nouvelles d'eux depuis maintenant plus de cinq ans. Je ne sais même pas si je pourrais reconnaître ma mère, elle avait du gagner des rides et surtout elle avait perdu l'amour de son grand fils. Car oui, je l'avouais, mon unique et actuelle famille n'était autre que ma nouvelle femme et ma fille. J'avais épousé Mia il y a de ça trois jours. Nous revenions à peine de Las Vegas, ville dans laquelle je lui avais passé la bague au doigt. Nous envisagions de partir faire notre lune de miel, mais ce voyage improvisé avait creusé un peu notre budget alors nous avions remis notre nuit de noce à plus tard, ce n'était pas un drame puisque nous étions à présent marier et j'avais tout pour être heureux. Julia me reconnaissait encore comme son père, Mia était devenue ma femme et à présent, je cherchais un associé pour ouvrir un cabinet médical. Je me reconstruisais mais je sentais toujours qu'il manquait quelque chose. Ma vie avait été tellement détruite par la prison et les affaires de crimes que aujourd'hui, j'avais une envie de vengeance notamment sur mon horrible petit frère. Il pouvait trembler cette vermine, il allait souffrir. Je pense que si j'avais atterrit au bord de cette fontaine, juste en bas du logement familiale, il n'y avait pas trente raisons. L'heure de la vengeance avait sonné. J'ignorais encore ce que j'allais faire si j'allais le croiser, mais peut être que je n'allais pas du tout l'apercevoir et que j'allais rentrer chez moi, bien sagement, sans avoir faire couler le sang d'Esteban, qui était censé être mon frère mais qui ne s'était absolument pas comporté comme tel. Je lui en voulais, j'avais la rage sans même voir son visage, je n'osais imaginer la colère qui allait venir en moi si je croisais son regard.

La liberté. Esteban la savourait du bout du nez. Depuis ces dernières années, il n'avait jamais été si heureux. Oublier ses soucis, vivre au jour le jour sans plus penser au passé. Etre le roi, aimé de tous. Il savourait sa vie tel un cocktail d'une valeur incroyable. Il était un peu le leader du groupe. Lui et sa bande cartonnait dans les ruelles de Paris. Était-ce un début de gloire? En tout cas ça y ressemblait. Esteban marchait posément avec deux de ses amis inséparables. La fumée de leurs clopes se mélangeaient avec leurs rires. Ils allèrent vers la fontaine Gaillon, se relaxer un peu comme presque tous les jours. La fontaine n'avait pas changée, tout semblait normale. Pourtant, Esteban avait la pré-sentiment qu'il y avait quelque chose qui clochait. Ses amis continuèrent d'avancer alors que le cadet des Dumont s’arrêta, impossible de continuer. Il était immobile face à... son frère; Jonathan. Son coeur se mit à s'accélérer méchamment. De la sueur coulait presque derrière son coup. Son souffle s'emportait. L'avait-il reconnu? Pour l'instant Jonathan ne regardait pas dans sa direction. Peut être arriverait-il à passer inaperçu, histoire de l'esquiver. Comment se faisait-il qu'il était là? Serait-il déjà libre? Esteban essayait de calmer ses pensées qui hantaient son esprit. Mais voilà qu'un de ses amis cria son prénom pour qu'il les rejoigne. Jonathan releva la tête et Esteban se précipita vers ses amis. Cassons-nous! ordonna-t-il. Mais la voix de son frère se faisait retentir derrière eux. Des amis se stoppèrent et regardèrent Esteban affronter le regard de son frère. Après quelques secondes de silence, le jeune Dumont éclata de rire en voyant son frère dans cet état. A quoi bon s'énerver? Esteban ne voulait pas piquer une crise le premier. Voir Jonathan dans tous ses états le faisait bien plaisir. Il mit ses mains dans ses poches et lui lança d'un air faussement ironique:

Ben alors mon vieux, on est déjà rentré? La bande des trois échangèrent un rire collectif. Esteban alluma ensuite une clope, histoire de se la jouer rebelle. Cette journée n'était pas prête de finir. C'était une sensation étrange de revoir quelqu'un qui revenait de prison, quelqu'un qui était son frère. Surtout qu'il n'avait pas commis le meurtre. Le plan d'Esteban semblait pourtant bien fonctionner.