ANGEL – « Docteur Blake ? »
DOCTEUR BLAKE – « Pas un mot Novak si vous ne souhaitez pas que mes dents du fond qui baignent ne vous disent ce qu’elles pensent de votre intervention. Appelez-moi le docteur Brown et dites-lui que je suis dilatée à trois et que je viens de perdre les eaux sur vos Vans. »

Le stress, l’adrénaline. Beaucoup s’engagent dans l’armée pour connaître ces deux émotions grisantes, et d’autres deviennent simplement chirurgiens. Angel fait partie de la seconde catégorie. Depuis toute petite, c’était son rêve que de devenir médecin, suivant à la fois les traces de son père, Amaury Novak, brillant neurochirurgien connu dans le monde entier, et cette véritable vocation pour laquelle elle a le feu sacré. N’importe qui d’autre aurait paniqué en voyant sa résidente en chef, que tous avaient surnommé le tyran, apparaître enceinte jusqu’aux yeux et prête à accoucher. Ce n’était évidemment pas pour ses précieuses Vans d’un gris métallisé que Angel était inquiète, mais plutôt pour cette « seconde mère », possédant toujours le mot pour botter vulgairement le cul des traînes savates du service de chirurgie ayant été affectés à son groupe. Sans perdre ses nerfs une seconde, ou laisser la moindre goutte de sueur s’écouler le long de son front pâle, preuve que la peur serait sa maîtresse et non la volonté d’agir, Angel se dirigea aussitôt près de l’accueil afin de demander à ce que l’on bipe le docteur Brown, chirurgien obstétrique dont la renommée n’était plus à faire exerçant pour le plus important hôpital de Paris depuis près de deux mois maintenant. Un accouchement ne devait surtout pas être pris à la légère, et le fait que ce soit sa chef directe ne devait pas non plus être à détail à mettre de côté, bien qu’Angel soit elle-même dans la peau d’une femme enceinte…Mais ça, c’était une autre histoire. Ce fut sans doute pourquoi la jeune femme se sentit pousser des ailes en la voyant marcher seule dans le hall de cette imposante bâtisse : Elle bondit littéralement sur le premier fauteuil roulant qu’elle trouva à proximité, tâchant désormais de la forcer à asseoir son séant dessus afin de pouvoir la conduire elle-même au service de chirurgie, où elles passaient énormément de temps à sauver des vies depuis près d’un an maintenant. N’allez pas croire que la charmante blonde au tempérament à la fois flamboyant et glaçant en soit à sa première année : Au préalable, elle avait effectué quatre ans d’études théoriques en médecine à Fordham, l’une des universités les plus cotées de New York, avant de passer quatre autres années en tant qu’interne en chirurgie à l’hôpital le plus connu de la Grande Pomme. Elle avait donc de la bouteille, bien qu’elle n’arrive pas encore à la cheville de sa résidente et qu’elle n’ait emménagé que très récemment à Paris. Angel n’était pas quelqu’un de particulièrement violent, et si son charisme était indéniable, n’importe qui à sa place aurait eu beaucoup de mal à forcer son résident à s’asseoir où que ce soit, y compris sur un fauteuil roulant, marque du respect de la procédure de l’hôpital quant aux transports des femmes sur le point d’accoucher.

ANGEL – « Avec tout le respect que je vous dois, Docteur Blake, vous devez vous asseoir afin que je vous accompagne. C’est la procédure… »

Ne vous y trompez pas : La syntaxe impeccable des phrases de la charmante Angel n’avaient strictement rien de trop doux ou de trop effacé. Elle marquait chaque mot grâce à l’urgence de la situation et ne manqua pas d’avancer légèrement plus le fauteuil afin d’inciter sa résidente à s’asseoir. Le Docteur Blake avait toujours éprouvé un profond respect envers Angel, habilement dissimulé certes, mais tout de même existant, et ce fut certainement ce qui la sauva de ses foudres : Son regard d’un bleu saisissant et redoutablement insistant permit à Angel de faire finalement entendre raison à cette femme enceinte entêtée et par chance, il ne lui fallut pas batailler davantage pour obtenir gain de cause. Il y avait urgence, de toute manière…La poche de liquide amniotique s’étant déversée précédemment contre ses Vans bien aimées, ce n’était qu’une question de temps avant que le col de l’utérus ne soit suffisamment dilaté pour lui permettre un accouchement par voie naturelle. Sans courir mais en adoptant un pas pressé, il ne fallut pas plus de quelques secondes à Angel pour rejoindre le premier ascenseur de service qui était à sa portée : Puisque le Docteur Brown avait été bipé, il serait sûrement dans l’une des salles de préparation à l’accouchement lorsque la jeune femme arriverait avec sa résidente. Ce qui la gênait dans ce trajet, c’était le silence pesant régnant dans l’ascenseur. Angel n’avait évidemment aucun souvenir de l’accouchement de sa propre mère, ni connaissance du fait qu’elle ait souffert ou non, mais ce n’était en rien rassurant que d’entendre les crispations presque silencieuses de sa chef directe. C’était le tout premier accouchement auquel Angel assistait, qui plus est. La plupart du temps, lorsqu’elle était sur des opérations au bloc, cela avait davantage un rapport avec la chirurgie générale, cardiaque ou, et il s'agissait les moments qu’elle préférait, avec la neurochirurgie, qui allait très bientôt devenir sa spécialisation. Quelque part, cela la décevait de savoir que ni son père ni sa mère de seraient jamais en mesure d’assister à ses différentes réussites. Hélas, elle n’avait côtoyé son père que pendant douze ans, douze merveilleuses années baignées par l’insouciance et le bonheur. Elle se souvenait relativement bien de son géniteur, dont elle avait hérité aussi bien son feu sacré pour la médecine que ses cheveux d’un blond doré. Elle avait son obstination mais également sa diplomatie, si elle croyait les dires tous ceux l’ayant côtoyé durant sa brillante carrière. La malchance avait voulu qu’il ait choisi une voie particulière de la médecine, exerçant dans divers hôpitaux à travers le monde. Il partait durant des mois sans que sa famille n’ait de nouvelles de lui, et c’était la raison pour laquelle sa femme, Charlotte, n’avait pas souhaité avoir un second enfant. C’était du moins ce qu’elle avait toujours seriné à son unique fille…Mais Angel n’était pas idiote, bien au contraire. Très vite, elle avait fait des recherches et avait finalement découvert que leur mariage, bien que bâtit à force sur la tendresse, l’amour et la confiance, était un mariage arrangé. Si Amaury était d’origine Autrichienne, Charlotte, quant à elle, était Australienne et fille de l’un des hommes les plus fortunés au monde. Leurs deux familles, les Novak et les Xavier, avaient toujours été proches, aussi incroyable que cela puisse paraître, et les parents d’Amaury avaient largement poussé pour que ce mariage se fasse. Les deux jeunes gens ne se connaissaient pas vraiment à l’époque, notamment à cause de leur différence d’âge, Charlotte étant âgée de seulement dix-huit ans, et Amaury, vingt-neuf. Au départ, leurs débuts furent aussi divers qu’enrichissants. Ce n’est qu’au fil des mois et des années qu’ils finirent par tomber réellement amoureux l’un de l’autre, et que la conception de la petite Angel fut une évidence. Angel espérait simplement qu’aucun mariage d’aucune sorte ne lui serait jamais imposé. Elle ne pouvait certes pas être inquiétée du côté de ses parents : Son père, véritable modèle à ses yeux, était parti travailler pour un hôpital au Japon et elle n’avait plus de nouvelles de lui depuis des mois. Tout ce qu’elle avait encore de lui, c’était une blouse de chirurgie impeccable, des dizaines de lettres qu’il avait écrites au cas où sa mort surviendrait plus vite que prévu, et quelques bouquins de médecine. Rien qui puisse combler l’absence d’un père comme lui, en somme. Quant à sa mère, gynécologue de renom, elle avait subit les premiers symptômes d’un Alzheimer précoce. Elle avait fait promettre à sa fille que nul ne serait jamais au courant et avait fait en sorte de pousser Angel à la faire entrer dans une maison de repos parisienne. Depuis, c’était à peine si sa propre mère la reconnaissait…Et c’est la raison pour laquelle la jeune femme n’avait jamais eu le réflexe de lui annoncer que sous quelques mois, elle allait devenir mère. Délicate situation…

DOCTEUR BLAKE – « J’ai toujours pensé qu’il fallait remplacer ces ascenseurs datant de Mathusalem ! Regarde cette lenteur, Novak ! C’est intolérable, d’autant plus si on est sur le point d’accoucher ! »

Cette fois-ci, Angel ne prit pas la peine de répondre, se contentant d’offrir en pâture sa main gauche afin qu’elle ne la serre en cas de contraction. Sa résidente ne manqua pas de la fusiller du regard dans un premier temps, avant d’accepter finalement le cadeau qui lui était fait : Ce n’était pas une situation ordinaire. Il n’y avait donc pas à tenir de rôle particulier, d’autant qu’Angel n’était pas du genre à profiter de la faiblesse d’autrui, bien au contraire. Certes, elle avait une réputation d’arriviste finie et d’ambitieuse parmi les ambitieuses du fait qu’elle veuille devenir chirurgien cardiaque, mais c’était un tempérament qu’elle n’avait qu’au sein de l’hôpital, afin de ne surtout pas se laisser marcher sur les pieds. C’était une arène…Et Angel ne serait pas la dernière sur la liste, au contraire, elle voulait être la première et ne rien devoir à personne. Surtout depuis qu’elle avait appris sa grossesse, survenue dans d’étranges conditions. Pour l’instant, personne n’était au courant et c’était parfait ainsi…Elle n’en n’était qu’à son deuxième mois, et pouvait encore feindre. Il n’était pas question que qui que ce soit n’apprenne qu’elle s’était fait avoir par les belles paroles d’un titulaire à New York. Après l’avoir séduite, ledit chirurgien, dont elle souhaitait plus que tout oublier le nom, lui avait fait passer la nuit la plus incroyable de sa vie. Jusqu’au bout, Angel savait qu’il ne fallait surtout pas qu’elle cède. C’était dangereux pour sa carrière et vis-à-vis des autres internes si d’aventure cela venait à se savoir. Résultat, Angel avait contemplé avec horreur, quelques semaines plus tard, le résultat positif d’un test de grossesse après avoir subit plusieurs jours durant des nausées violentes. Il ne fallait pas oublier qu’elle était en médecine…Évidemment, son premier réflexe avait été de faire une prise de sang, ayant confirmé hélas le diagnostic, et la poussant dès lors à l’avouer au titulaire, le père de l’enfant…Il l’avait traitée comme un chien. Dans l’histoire, Angel avait bafoué cette fierté, cet orgueil dont elle était si fière auparavant. Dans cette course folle contre la montre, elle s’était perdue en voulant croire à des sentiments stupides et inutiles. Résultat, elle se retrouvait avec un bébé sur les bras sans savoir au juste ce qu’elle allait bien pouvoir faire. Non pas qu’elle n’ait jamais eu envie de fonder une famille, mais les conditions n’étaient pas idéales, sans compter les semaines folles qu’elle supportait. Pour sa carrière, Angel était facilement prête à tout. Mais désormais qu’elle n’était plus « seule » dans son corps, hors de question de merder davantage. Comme il n’était pas question d’avorter et de mettre un terme à cette vie humaine n’étant nullement responsable des conneries de sa génitrice givrée, Angel avait décidé d’assumer en attendant de prendre une décision : Garder l’enfant ou passer par la case adoption ?
Elle n’irait jamais demander à sa résidente à participer à une opération quelconque en échange de ce service rendu, pas plus que lors de son enfance elle n’abusait de la gentillesse indéniable de sa meilleure amie, Athena. Tout dans cette situation était propice à réminiscence particulière, et ce probablement parce que sa chef était sur le point de mettre au monde son bébé. Angel ne pouvait s’empêcher de sourire rien qu’en se souvenant de la complicité qu’elle partageait depuis des années désormais mais celle qui l’avait toujours soutenue. Elles s’étaient connues à l’arrivée d’Angel aux USA, après son déménagement précoce de l’Autriche, son pays natal. Charlotte en avait eu assez d’être reléguée au rang de mère au foyer et souhaitait que sa fille ne se mêle à une civilisation autre. Elle avait donc faire en sorte que son petit trésor, âgé de dix ans à l’époque, soit absolument bilingue allemand-anglais, avant d’acheter un grand appartement en plein cœur de New York et de prendre un poste important en gynécologie. Angel avait étudié là-bas dès son arrivée, et avait très vite sympathisé avec celle qui allait devenir sa meilleure amie. Non seulement elles allaient se révéler aussi fêtarde l’une que l’autre, mais toujours prête à remporter la palme aux bals de promo. Toujours, elles brillaient, tel le tandem fabuleux qu’elles formaient, ne se cachant jamais rien. Dans la peine comme dans le bonheur le plus total, Angel savait qu’elle possédait toujours une épaule sur laquelle se reposer et une oreille à laquelle se confier…Tout en se montrant capable de rendre la pareille, balayant ainsi l’égoïsme ayant été le sien durant tant d’années. Jamais aucune ombre ne vint s’ajouter à ce tableau amical parfait, du moins jusqu’à ce qu’Athena ne décide de déménager sur Paris. C’était la première fois qu’elles étaient vraiment séparées, et par un manque de chance incroyable, c’est à ce moment précis qu’Angel vécu son déboire amoureux avec son titulaire. Elle n’allait donc confier sa grossesse surprise à son amie que bien plus tard, à son arrivée dans la région parisienne. Arrivée attendue, semble-t-il…Mais ces souvenirs ne manquèrent pas de lui faire perdre tout sourire et de lui faire serrer un peu trop brutalement la main de sa résidente, qui ne manqua pas de la frapper au bras pour la réveiller : Elles étaient arrivées au service chirurgie et ce n’était pas le moment de se reposer sur leurs lauriers.

DOCTEUR BLAKE – « Je refuse d’accoucher si mon mari n’est pas présent pour me tenir la main, il n’en n’est pas question ! Novak, expliquez-lui, ce n’est pourtant pas difficile à comprendre ! Non, c’est non ! »
DOCTEUR BROWN (A Angel) – « Il faut à tout prix que l’on fasse quelque chose, le travail a commencé et le fœtus commence à être en détresse… »

Difficile pour quelqu’un de non titulaire « d’obliger » un patient à faire en sorte d’accepter d’accoucher même sans la précieuse présence de son mari…Hélas, Angel n’avait pas le choix. C’était poursuivre le travail sur la table d’accouchement ou risquer de graves lésions cérébrales chez le bébé. La jeune femme eut donc l’idée de demander à l’obstétricienne de renommée de sortir temporairement de la pièce afin qu’elle puisse lui parler sans être épiée. Puisqu’il y avait urgence, autant la laisser faire et faire en sorte de laisser son charme opérer…Un chirurgien, ce n’est pas qu’un virtuose du bistouri, c’est également une âme. Et à ce petit jeu, Angel était un chirurgien incontestable et incontesté, y compris au sein du groupe uniquement masculin dont elle avait fait partie depuis quatre ans à New York.

ANGEL – « Docteur Blake, écoutez-moi, s’il vous plaît. Vous êtes sur le point d’être à l’origine de l’acte le plus noble d’une femme…Vous allez mettre au monde votre bébé ! Vous allez le voir grandir, il va vous rendre fière et je suis certaine que votre mari aura mille et une occasions de tenir votre main avec émotion. Mais en attendant, il faut laisser le docteur Brown vous aider. Si vous me faites cet honneur, j’accepte de vous tenir la main et de rester avec vous aussi longtemps que durera votre accouchement. Je ne vous abandonnerai pas au même titre que vous ne m’avez pas abandonnée pendant ces quatre années d’internat. »

Afin de lui faire entendre raison, Angel s’était emparée de sa main et lui avait sourit d’un air à la fois doux et amical. Certes, ce n’était pas le rôle de sa résidente que d’être trop douce avec elle en temps normal, parce qu’il fallait que chaque interne soit parfaitement conscient de la dureté des études de médecine et de ce qui les attendaient après…Mais là, c’était une situation particulière. Situation pour laquelle il y avait effectivement urgence et, malgré ses yeux embués de larmes et ses membres tremblants à cause de la douleur des contractions, le Docteur Blake finit par abdiquer et s’asseoir sur la table de travail. Angel tint sa promesse jusqu’au bout : Elle se glissa juste derrière sa résidente afin de se saisir de ses deux mains qu’elle tint fermement pour qu’elle se sente entourée et soutenue. C’était un geste très noble que l’interne qu’elle était eut : N’importe qui d’autre aurait fuit toute responsabilité n’étant pas la sienne…Mais Angel avait l’âme noble, et un cœur en or sous l’apparence d’une femme froide et impassible. Ca aussi, c’était un fait indéniable.

ANGEL – « Vous allez y arriver Docteur Blake, respirez profondément, je suis avec vous. »

Devenir mère…Qui n’avait pas eu ce rêve à un moment donné ? Il était arrivé à Angel d’être secouée par ce genre de rêve avant qu’elle ne tombe enceinte, et ce depuis le diagnostic de sa génitrice. Elle ne se doutait pas que, plusieurs mois plus tard, elle allait donner naissance à une ravissante petite fille qu’elle allait prénommer Maxine. Naissance qui allait avoir lieu en présence de sa meilleure amie, bien évidemment. Dès lors qu’elle aurait pris son petit bout de chou dans les bras, Angel allait définitivement dire adieu à l’idée de l’adoption. Qu’importe ce que cela lui coûterait, elle comptait assumer ses responsabilités. Mais elle n’imaginait pas que peu de temps plus tard, elle allait devoir être à l’origine du décès tragique de son père, devenu alcoolique sans qu’elle ne le sache. Pour la énième fois, elle avait dû aller le récupérer pour le ramener chez lui, allant jusqu’à prendre l’avion jusqu’à Sydney dans le but de le ramener à Paris, sauf qu’une fois en voiture pour l’emmener chez elle, ils eurent un grave accident de voiture. Angel fut éjectée de la voiture, traversant ainsi le pare brise, mais la voiture explosa peu de temps après, brûlant le corps de son père, anesthésié par l’alcool, sans qu’elle ne soit en mesure de se lever pour l’aider. A ce moment-là, Angel était enceinte jusqu’aux yeux…Et si le bébé n’eut rien, les jambes de la jeune femme portent toujours les lourdes cicatrices dudit accident. Ce serait la toute première nouvelle qu’Angel n’irait pas confier à Athena. Sans savoir pourquoi, hormis le fait que ladite nouvelle ne l’ait sonnée, elle allait vouloir garder cette peine pour elle. Comme si désormais il lui était impossible de flancher à cause des nouvelles responsabilités étant les siennes.

DOCTEUR BROWN – « Continuez Mina, continuez, je vois presque la tête ! »

Angel serrait d’autant plus les mains de sa résidente qu’elle était littéralement secouée par l’émotion d’assister à une naissance. Les hormones étaient sûrement pleinement responsables ! C’était un évènement aussi brutal qu’une chirurgie cardiaque et aussi merveilleux que lorsque c’était décrit dans un bouquin à l’eau de rose ayant un tant soit peu d’envergure. Angel refusait d’assimiler ce qu’elle était en train de voir comme une boucherie, bien au contraire. Son accident de voiture et ses cicatrices, ça, c’était une boucherie. Mais la naissance d’un bébé, c’était une merveille, surtout pour le futur chirurgien qu’elle était.

ANGEL – « Regardez Docteur Blake ! Vous avez un magnifique petit garçon, et vous pouvez en être fière : Il a dix doigts de pied et deux mains…Regardez comme il vous ressemble ! »
DOCTEUR BLAKE – « C’est ce que j’appelle une affaire rondement menée, Novak… ! »

Angel laissa échapper un petit rire ému, tandis que sa résidente était en train de reprendre son souffle. Ce n’était pas là un merci habituel, mais la jeune femme le prit pour argent comptant quoi qu’il en soit. D’autant que le travail avait été particulièrement rapide et qu’elle pu retourner vaquer à ses occupations en deux coups de cuillère à pot, à partir du moment où elle eut l’occasion de constater que le bébé était en pleine santé et que sa résidente allait être montée dans une chambre confortable à l’étage. Chose plus étonnante, ce fut les remerciements chaleureux du Docteur Brown : Cette femme-là était habituellement considérée comme une sangsue, mais force est de constater que ces rumeurs n’étaient que d’odieux mensonges. Angel pu en faire le compte rendu à Athena, dès qu’elle eut la possibilité de retourner à la cafétéria où elles s’étaient donné rendez-vous. C’est à peine si elle ne lui sauta pas sur le poil dès son entrée afin d’être au courant du dernier potin de taille : L’accouchement de sa résidente.

ATHENA – « Désolée pour le passage du coq à l’âne ma biche, mais pourquoi tu nettoies tes Vans, au fait ? »
ANGEL – « Le tyran a perdu sa poche de liquide amniotique dessus… »

Fou rire. L’atmosphère précédemment tendue s’était soudainement détendue et ce n’était pas plus mal : Angel n’aurait pas pu supporter de parler encore et encore de sa grossesse et des complications que celle-ci risquait d’avoir par la suite. A l’heure de cette scène, le rire d’Angel était véridique et il n’existait pas encore de non-dits entre les deux acolytes.