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 (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept.

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MessageSujet: (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept.   (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept. EmptyJeu 14 Nov - 23:00



Jeudi. Seize heures. Elle n'a pas encore l'habitude de traîner dans les rues si "tôt". C'est l'appel de la bibliothèque qui résonne dans sa tête et qu'elle doit réfréner. Foutues habitudes de prépa. Le carton à dessin, son nouveau projet d'avenir, tire sur son bras endolori. Les arts appliqués ça fait mal. La clope au bec elle remonte la rue d'Avron sans faire trop attention à ce qui l'entoure. Le quartier qu'elle connait par coeur. L'odeur de kébab qui fait remonter des souvenirs. Le type du tout-à-vingt-balles qui la reconnait. Elle tire une dernière taffe qu'elle balance dans le caniveau en prenant la rue de Buzenval. Elle lève les yeux, tente d'apercevoir l'appartement où elle a passé ses dix-neuf premières années. Les rideaux sont tirés. Maman bosse. Papa aussi. Elle hésite à passer prendre une ou deux fringues qu'elle a laissées là. Peut-être même qu'elle pourrait attraper un paquet de thé, elle n'en a plus chez elle. La vie étudiante qui lui revient à la figure. Elle sort sa clé et la rempoche directement. Plus tard. Peut-être. En attendant elle continue de marcher. Le franprix ouvert jusqu'à minuit, partenaire des soirées de galère. L'immeuble de ce gosse qu'elle a jamais aimé et qui lui balançait des vieux chewing-gum dans les cheveux quand elle sortait avec son frère. Et puis le 46. Les pères populaires. Le fin fond du vingtième, ce coin un peu planqué, un peu inconnu, et puis ce bar. La pinte pas chère et l'assiette de charcuterie que papa prenait souvent le dimanche matin avec son café. Un des meilleurs souvenirs d'enfance. Elle entre et c'est comme à la maison. L'endroit est encore un peu vide mais il est tôt. Elle salue les deux personnes qui s'affairent derrière le bar et qui lui lancent un regard entendu l'air de dire "comme d'hab?". Elle hoche la tête en souriant et traîne sa carcasse jusqu'au fond, ou presque. Elle se laisse tomber sur une vieille banquette toute défoncée et prend d'assaut la grande table. Le carnet à dessin. Le matériel de dessin qui s'éparpille. Un ou deux cours théoriques qui traînent. Le portable, trois messages, toujours en silencieux. Un pinceau qu'elle utilise pour s'attacher les cheveux. L'heure est au progrès. L'art, la technique. Et puis, vite, elle relève la tête. Elle n'y arrivera pas. Un modèle. « y'a pas quelqu'un ici qui aimerait poser une petite heure pour une pauvre étudiante en arts appliqués ? » Appel à la foule. La charité. L'aumône. « j'paye ma tournée » qu'elle ajoute comme le messie.

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Aimé Levy
administrateur
Aimé Levy
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MessageSujet: Re: (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept.   (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept. EmptyDim 1 Déc - 19:52

Nous étions là, jakob et moi, avachis contre un banc du « secteur » 20 à attendre que le temps passe. Le nez en l’air, j’observais le ciel sans face de paris, d’un gris tirant sur le blanc et parfois, je me surprenais à rêver qu’il me tombe sur la tête, avec la même violence que cette dépression hivernal qui les traumatisent tous. Je donnerais un peu n’importe quoi pour voir de quoi ça à l’air là bas, vraiment n’importe quoi. Sauf peut être celui-là, à côté de moi. D’ailleurs il baille, à s’en décrocher la mâchoire. On pourrait presque croire qu’il a passait sa nuit à fêter et dans le fond, c’est sans doute ce qu’il a fait. Il m’a délaissé hier soir aux alentours des vingt heures et est réapparu, épuisé, courbaturé il y a de ça deux heures. Alors, dans ces moments-là, la seule question qui me vient à l’esprit, ce n’est pas de savoir où il était mais si elle était blonde ou brune. Jakob s’étire et pose sa tête contre mon épaule, faisant mine de s’endormir. S’il passe ses soirées à s’amuser, je passe les miennes à travailler, ces longs soirs à distribuer verres après verres pour les voir s’illuminer que par la présence de sofie, de lui. Je me penche un peu et sans gestes brusque, passe mes doigts dans sa poche, à la recherche de feuille, de tabac et d’une pièce de deux euros. Avant qu’il m’appelle, pitoyable et fatigué, notre belle m’avait chargé d’aller chercher de quoi nous nourrir ce soir. Le placard nous avait livré toutes ses ressources et nous devions bien nous rendre à l’évidence : Jeûner deux jours d’affilés, ce n’est pas fait pour nous. L’espoir, on l’a, la foi, on l’a laissé derrière nous depuis bien longtemps déjà. Je termine de rouler, coince ma première œuvre entre les lèvres de jakob et tapote doucement sa joue. Tu rentres, tu restes ? Il va rentrer, qu’il me souffle doucement en se relevant. Alors je lui tends un briquet, me remet au travail. Jakob me raconte sa soirée, m’explique le pourquoi du comment et se fait presque rêveur l’espace d’un instant, le temps pour moi d’en finir une fois pour toute avec ma tâche et d’en inspirer enfin la fumée. La première de la journée. L’instant d’après, il revient sur terre et s’inquiète pour moi. Alors je souris, moqueur. T’es mignon tu sais ? Non je ne rentre pas avec toi. Je vais trainer, acheter de quoi manger et seulement là, je rentrerais. Je tends les doigts et tire sur son écharpe. Files, sofie  a égaré la mienne. Il la défait d’une main, râle pour la forme et me la tend. C’est comme un rayon de soleil sous moins six degrés, je me sens au chaud. Alors, au moment de nous quitter, je me décide à lui rendre son tabac à rouler et m’éloigne, envoyant un baiser dans le vent. Ne souffres pas de mon absence, crétin. Si t’as un souci, appelles. Le à ce soir se perd au milieu du bruit. S’il y a bien une chose que j’aime en paris, c’est ce bruit, celui qui me rappelle Berlin et son mouvement sans fin. De nous trois, celui qui a le plus de mal à se faire à cette vie-là, c’est moi. Si bien que parfois, j’en viens à chercher le pourquoi. Venir ici, s’installer, s’y perdre, c’est le rêve d’un soir qu’on c’est décidé à réalisé. Un peu ivre, un peu fou aussi. Alors, accepter la réalité de la situation, je n’y arrive pas. J’enroule l’écharpe autours de mon cou et lève les yeux. Perdu. Ce quartier-là, je ne le connais pas. Je connais le métro de paris, sa gare, notre appartement, sa cage d’escalier, le udobar et le reste, ce n’est que du hasard. Lorsque je marche, lorsque je me balade et lorsque je cherche de quoi nous nourrir, c’est aussi du hasard. Je m’engouffre dans les vieilles rues, abandonne la foule et sent mon cœur s’emballer à la vue d’un bar. Mes patrons, ils connaissent paris comme leurs poches, me citent mille et une annecdote sur les clients et me rendent le travail moins déprimant. Les patrons de chez moi connaissent berlin comme leurs poches et rendent son souvenir plus accablant. Alors pourquoi pas eux ? J’entre, caresse du bout des doigts le tissu autour de mon cou et m’approche du comptoir. Le coin a la gueule d’un vieux souvenir. Je pourrais presque m’adoucir. D’une voix mal assuré, je tente de me faire comprendre, de me souvenir de ce que j’entends ici et là dans le métro et de ce que sofie tente de m’apprendre. Et s’exprimer. C’est bien plus difficile qu’il n’y parait. Alors, au bout de quelques secondes à se regarder dans le blanc des yeux, je lâche, d’un français scolaire agrémenté à de l’allemand que je me refuse d’abandonner. Supermarkt, vous avez, dans le quartier ? Si je peux sentir au son de sa voix qu’il est ravi de m’aider, c’est tout ce que je comprends dans le flot de paroles. Je plisse les yeux et tente un sourire mal assuré. En allemand, vous pouvez ? C’est une voix qui me coupe dans ma tentative de communication. Une phrase lancée dans le vent, à la face d’un peu tout le monde. Je me penche sur le comptoir et souffle, curieux. Elle a dit quoi ? La minute d’après, je m’engouffre à la recherche d’une fille aux cheveux long, qui veut qu’on « pose » pour une « tournée ». Poser quoi et tourner où, ça, je ne le savais pas. Le principe de récompense est la seule chose que mon esprit a imprimée. Lorsque j’en vois une, de fille, au milieu d’un bordel monstre, je m’installe instantanément à ses côtés. Je l’observe, de haut en bas et fronce les sourcils. « Poser », c’est quoi pour toi ? tu veux qu'on pose quoi ? Je tente un sourire polie, de ceux que jakob trouve trop rare et continue Je « pose » pas pour une tournée, montres moi le chemin d’un supermarkt et je fais ce que tu veux. Et si je devais passer trois heures à poser sur une table trois tonnes de choses. Je le ferais, tant que la finalité me permet de manger.
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MessageSujet: Re: (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept.   (sully) le beau c'est ce qui plait universellement et sans concept. EmptyLun 2 Déc - 0:00




Les vieux habitués qui lancent vers elle des coups d'yeux rieurs. Le radiateur qui couine au fond de la salle. La courant d'air froid lorsque la porte du bar s'ouvre sur de nouvelles têtes. La réponse ne tarde pas. Elle paye sa tournée, forcément ça plait. Ses yeux suivent le chemin d'un grand brun qui vient vers elle. Elle sait qu'il vient pour elle à la manière dont son regard à lui s'accroche sur le petit coin qu'elle occupe. Elle regarde par dessus l'épaule de l'inconnu et aperçoit Pat', le gérant, qui la regarde l'air de dire qu'elle s'est fait un nouvel ami. Elle sourit. Il s'assoit. Elle le scrute. Lui aussi. Elle détaille les contours de son visage, l'arrête de son nez, la courbe de ses lèvres, la profondeur de son regard. Le regard presque voyeur qu'elle pose sur lui en aurait fait fuir plus d'un mais ça n'a pas l'air de le déranger. Peut-être qu'il a l'habitude. Il a sûrement l'habitude, il est très beau. Ou peut-être qu'il est juste trop occupé à faire de même. Le crayon qui retombe sur l'amas de feuilles. La mèche que la main aide à retrouver son chemin derrière l'oreille. Je ne veux pas que tu poses quoi que ce soit. Je veux que tu te poses toi. Je veux te dessiner. qu'elle explique en montrant d'un geste de la main, ses esquisses éparpillées sur le bureau improvisé. Elle apprécie le sourire qu'il lui offre. C'est un sourire sincère. Du moins c'est ce qu'elle croit deviner. Elle arque un sourcil. Elle tombe de haut. Elle qui était persuadée que le coup de la tournée était ce qui allait lui ramener du monde. Une nouvelle preuve que le monde entier n'est pas alcoolique. On pourrait presque se reforger une foi en l'humanité. Mais plus que le contenu du discours, c'est l'accent qu'elle attrape au vol. Ce sont ces mots et la mélodie allemande qui la frappent. L'allemand. Son grand-père, avant de mourir, n'avait de cesse de lui répéter que l'allemand n'avait rien d'une langue, que c'était une maladie de la gorge qui sonnait comme des mots les uns à la suite des autres. Ce genre de piques qu'il lançait aux diners de famille et qui faisaient sursauter la grand-mère maternelle, la polonaise, qui s'offusquait et jetait des regards noirs. Béatrice rigolait quand il lui disait ça. Elle rigolait parce qu'elle savait qu'en soi, il n'avait rien contre l'allemand. Parce qu'elle s'avait qu'en réalité il en avait après un allemand particulier, un physicien véreux qui était parti avec sa première femme il y avait bien longtemps. Entendre son interlocuteur parler lui rappelle aussi dylan et elle soupire un peu. Elle se souvient l'avoir entendu réciter des poèmes de schlegel en préparant le petit dej' quand il s'échouait chez elle à une époque. Elle se rappelle la vieille édition de 1812 de la faculté de juger de kant qu'il lui avait offerte pour leurs un an. Et puis elle le revoit, la semaine dernière encore, en caleçon dans sa petite chambre de bonne à elle, une casserole dans la main et du Goethe sur les lèvres. D'amour point désormais, mais une amitié qui teste ses limites devant la playstation. C'est ce qu'ils aiment croire en tous cas. Elle réfléchit un peu et Béa replonge ses yeux dans ceux de son inconnu. Je t'accompagne à ton supermakt ensuite on revient là, je dessine ta belle gueule et je t'offre quand même un verre. Un petit tour au franprix de la rue semble être une bonne idée. D'autant qu'elle est en dèche de jus d'orange chez elle qu'elle aura sûrement la flemme de faire le tour des épiceries de pigalle ce soir quand elle rentrera chez elle. Elle n'attend pas la réponse de son modèle et se lève. Elle enfile sa veste, attrape son portefeuille et l'autre n'a toujours pas bougé. Elle se faufile entre lui et la table, l'attrape par le poignet et l'enjoint à la suivre. Pat', tu gardes un oeil sur mes affaires ? J'accompagne monsieur chez franprix ! Pat' hoche la tête, comme toujours, heureux d'aider la petite béa qu'il a vu grandir dans le quartier. Une fois dehors, Béa attend. Elle tire son paquet de clope de sa poche et s'en cale une entre les dents. Et puis elle tend le paquet à l'allemand. Aujourd'hui elle est généreuse. Les clopes. La tournée. L'allemand l'intrigue. Il a dit oui sans connaître la question. Il a sauté sur l'occasion. Il a les mots précis et le regard profond. Il l'intrigue. Elle tire sur sa première taffe en le fixant. J'm'appelle béa. L'esquisse sera belle.

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