UN JEU, DEUX JEUX, TROIS JEUX
ft. danièle

En fait, j'aurais pu passer ma vie dans ce coin spécialement crée pour l'occasion. Cinéma, discothèque avec piste de roller, et un super coin avec des vieux jeux rétros, toute ma jeunesse en somme. J'étais tout à fait dans mon élément, et je redécouvrais avec nostalgie ces vieux jeux qui avaient bercé mon enfance en 8bits. Ça valait même le coup de payer un pass journée, pas donné, mais amorti par toutes les émotions que ce palais du jeu vidéo me donnait. J'étais fan, j'étais un gameur depuis gamin, je possédais encore la plupart des consoles exposées ici chez moi, parce que jamais je n'avais osé m'en défaire, c'était trop de souvenirs et trop d'heures passées à défaire des monstres sur l'écran de ma vieille télé.
Oh, bien sûr, les jeux récents, j'aimais bien, il y en avait de très bons, d'excellents, même, et puis l'avantage, c'est qu'on pouvait jouer en réseau. Mais le rétrogaming, oh, c'était un tourbillon d'émotions, ça me rappelait tous ces moments de mon adolescence, c'était terrible, et le gamin qui n'était jamais mort en moi se manifestait à la limite de l'hystérie. J'étais grave. Grave, mais content, et épanoui dans un tel environnement.

Je m'arrêtais à tous les stands, me permettant même de gratifier de mes précieux conseils les joueurs inexpérimentés -souvent de moins de vingt-cinq ans, cette génération qui ne connaissait que les Assassin's Creed et autres Call of Duty sur PS3 et Xbox-, car des aberrations telles que je pouvais en voir avaient tendance à m'agacer. Tire plus haut, bon sang, plus haaaaut ! Non, mais ne saute pas là-dessus, tu vois bien que c'est pas la bonne plateforme ! Mais vas-y, rentre dans le lard, sois pas si timide ! Des conseils comme ça, j'en donnais à tire-larigot, et, preuve de ma bonne foi, je permettais à des newbies de progresser follement. J'étais un homme bon, je crois.
Soudain, alors que j'avais perdu Pat et que j'étais absorbé dans la contemplation d'un gros barbu qui suait sur une borne d'arcade, et qui se débrouillait par ailleurs pas trop mal, une nana me rentra dedans. Ah, ça aussi, ça m'intéressait. « Excusez-moi, je n'ai pas fait gaffe. » Hm, jolie, et d'après ce que j'en voyais, un peu perdue. « Oh, t'inquiète, y'a pas de mal. » Je souris à la chanceuse qui avait eu le bonheur de me tomber dessus, et comme elle faisait comme si je n'existais plus, et qu'elle était seule de surcroît, je décidai de prendre les devants. Je me penchai vers elle, et lui parlai : « Si tu veux, y'a quelques consoles de libre là-bas. On peut se faire un multiplayer si ça te botte ! » Nouveau sourire. J'étais adorable.

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UN JEU, DEUX JEUX, TROIS JEUX
ft. danièle

Ce qui était bien, dans ce genre de conventions, c'est qu'on faisait toujours plein de rencontres, plus ou moins intéressantes, certes, mais j'avais un paquet d'amis que je m'étais fait de la sorte. Alors, ça me bottait bien, même si, entre nous, ce n'était pas la première motivation qui me poussait à y aller. L'amour du jeu, l'amour du jeu. J'aimais jouer plus que je n'aimais mes voisins, j'aimais jouer plus que je n'aimais Pat, j'aimais jouer plus que les spaghettis, c'est dire.
Alors tant qu'à faire, si je pouvais combiner le plaisir du jeu et mon amour démesuré pour la race humaine, c'était d'autant mieux. Et là, j'étais plutôt pas mal tombé. « D'accord, à vrai dire, ça fait un bail que je n'ai plus jouer à des jeux de ce genre. Je crois bien que vous allez vous marrer. » En fait non, pas si bien que ça, à la réflexion.

En fait, si j'avais bien remarqué un truc dans la vie, c'était que les jolies filles ne savaient absolument pas jouer, en règle générale. Proposez-leur une console, et là, c'est l'anarchie, elles se mettent à chavirer dangereusement pour tourner une voiture dans un jeu de bagnole, elles se mettent à détruire et leur pouce et les boutons de la manette pour placer un combo dans un jeu de combat, et ça se met à crier, et c'est mauvais joueur en plus de ça.
Alors, en repêchant une nana dans un stand d'arcade, je m'étais dis qu'il y avait peut-être un espoir, mais en fait, ma foi en la féminité était, je crois, définitivement réduite à néant. Dommage.
En revanche, ce que je savais aussi sur les femmes, c'est qu'elles mentaient à tord et à travers, presque plus que moi. Ça ne m'aurait donc pas étonné qu'il s'agisse d'un stratagème, un peu à la façon qu'ont les femmes de dire "je suis grosse", pour le simple plaisir qu'on leur soutienne le contraire. Là, dans son cas présent, il devait s'agir de dire qu'elle ne savait pas jouer pour que son instinct félon de femelle ait le plaisir de me mettre la misère à un jeu quelconque. Si ça trouve, je parlais à championne européenne de retrogaming.

Mais bon, si ça se trouve, j'étais juste parano, et elle ne savait vraiment pas jouer.

Enfin, je n'avais pas d'autre moyen pour le savoir que de jouer avec elle. « Bomberman ! Ca te dit, un bomberman ? J'ai ouï dire qu'on pouvait y jouer jusqu'à dix. Bon, on n'est pas dix, mais on trouvera forcément des gens pour jouer avec nous là-bas, et puis tant qu'il reste des places... » C'était tant pis pour elle. Elle avait accepté mon invitation. Je considérais donc que j'avais à présent certains droits. Alors, je la chopais par la main, et comme je ne voulais pas me retrouver derrière à regarder des joueurs s'éclater, je me mis à courir comme un débile et continuai ma phrase. « ...Cours ! » Et hop, ni une ni deux je me dirigeai vers le fameux bomberman, la traînant derrière moi à l'instar d'un cerf-volant (peut-être n'était-ce pas la métaphore appropriée, mais enfin tant pis).

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