Tu ne sais pas trop comment tu t’es retrouvée ici. Enfin, si. Tes petites jambes t’ont traînées jusque là. Pourquoi ? C’est dans cette question que demeure le problème. L’étage de sous-vêtements et de lingerie. Oui, il est essentiel de faire la distinction entre les deux. Les sous-vêtements sont pour les filles. La lingerie pour les femmes, plus ou moins jeunes. Bref, il y a celles qui vivent, se contentent de la simplicité et du cent pour cent coton, et celles qui veulent attirer. Pas besoin de s’étaler pour dire que tu appartiens à la première catégorie : tu te vois absolument pas face à Basile en très très petite tenue quasiment transparente si ce moment était à venir. Un jour. Ou sinon, à quoi bon porter ces « choses » si c’est pour être seule. Alors tu es passée des rayons avec tu ne sais trop quoi entre les doigts – digne de ce que porte une adolescente tout juste pubère – à la cabine d’essayage.

Ouais, ça fera l’affaire. Maintenant, il ne te reste plus qu’à enlever tout ça, remettre tes fringues, payer et partir. Grand blanc dans ta petite tête : l’agrafe est bloquée. Tu paniques. Tu t’entortilles sur toi même pour résoudre ton problème toute seule comme une grande, mais rien n’y fait. Alors tu continues de paniquer. De plus belle. Au bout de 10 minutes à tourner en rond dans la cabine, tu baisses les bras. À ce rythme, tu vas finir par te blesser. Option numéro un : tu t’en vas comme une voleuse, ni vue, ni connue, tu glisses tes propres sous vêtements dans ton sac, tu dévales les escalators sans te retrouver à plat ventre sur le sol et sans penser que tu puisses faire « bip bip » à l’entrée du grand magasin. Toujours un brin trop innocente. Option numéro deux : tu prends ton courage à deux mains et quémandes un peu d’aide à une vendeuse. Tu tires sur le rideau. Personne. Merde. Tu te mords la lèvre. Le rideau enroulé autour de toi tel une serviette après la douche, tu ne fais pas plus de deux mètres : il manquerait plus que tu arraches tout dans un accès de peur et de stress.

Oh bah tient, une jeune femme te passe sous le nez : une vendeuse, t’en es certaine, t’as rien à craindre. Elle a déjà du croiser des situations similaires, ce n’est pas possible que tu sois la première. « Psiiiit. Excusez moi ? » Tu murmures, sans pour autant vouloir être trop… invisible, inexistante. Tu irais presque jusqu’à prier pour que blondie numéro deux daigne tourner la tête dans ta direction. Pitié. En dehors de sortir avec un type qui a dix ans de plus que toi, qui est ton professeur et que tu le caches à tes parents, tu n’as rien fait de mal pour mériter un tel moment humiliant, hein ? T’es trop sainte nitouche pour t’attirer les foudres de Dieu (même si tu n’es pas particulièrement croyante et que tu te contentes de la messe du dimanche et des grandes fêtes du calendrier), n’est-ce pas ?