Ophélie regardait l'écran de la télévision d'un air distrait. Elle se sentait faible et légèrement vaseuse...Trop vaseuse pour sortir de chez elle et faire quelque chose de mieux. Mieux que d'entendre sa mère et ses clients hurler à la lune tout en tâchant d'oublier les sons bestiaux qui la hantaient chaque nuit. Elle détestait être chez elle. Pas une partie de son être n'était pas dégoûtée par les lieux de son enfance. Les murs, les odeurs, les gens, l'ambiance tout lui donnait mal au coeur dans cette maison de débauche d'esprit et de corps. Elle rêvait de s'en aller loin d'ici et de les laisser tous tomber...Dès qu'elle obtiendrait son diplôme, elle partirait pour toujours de cette endroit qui l’étouffait de plus en plus...Ophélie n'était pas faite pour cette vie même si elle en doutait...Elle valait mieux qu'eux....que cette vie qui la confinait à une misère restreignant ses moindres choix. Pas question de se laisser tomber dans la douceur de l'abandon. Elle serait forte, ne serait-ce que pour prouver à sa mère qu'elles étaient différentes. Que elle, Ophélie Helena Demontagne ne serait pas de celle qui accepte son sort avec docilité et résignation. Le canapé du salon lui-même était médiocre et l'avalait de ses cousins qui portaient une étrange odeur mélangeant alcool et désespoir. La lune ne disait rien..Son obstination muette gonflait Ophé d'une chagrin réconfortant. Les cris continuaient, mais elle n'entendait rien...Une bataille entre sa mère et son père...Des cris, des hurlements de bêtes sauvages et des insultes à faire frémir les plus durs des criminels. Elle n'entendait pas les cris, elle n'entendait pas la verre qui se brise...Puis le sang coula...Une goûte perla sur le bout de son nez la ramenant à la réalité. Un éclat de verre lui avait coupé le front, mais personne ne semblait s'en rendre compte...Ophélie se leva d'un bond et alla s'enfermer dans sa chambre les deux mains sur les oreilles.

Dans sa minuscule chambre, Ophélie se sentait un peu mieux. Tout en regardant dans le miroir les dégâts causés par l'éclat de verre, elle s'alluma un joint d'une main distraite. L'herbe calmait un peu la douleur, mais son coeur était toujours meurtri et la blessure ne guérirait pas. La jeune fille essuya doucement le sang sur son front cachant la blessure par une couette de cheveux bien placé. Les volutes bleutés de fumée formaient de doux cercle sur le plafond de sa chambre. Elle les regardait d'un air paisible jusqu'à ce que de nouveaux cris retentissent dans toute la maison, faisant trembler ses murs de cartons. Ophélie ressentait le besoin pressant de foutre le camp... Elle devait partir et c'est ce qu'elle faisait à chaque fois que s'en était trop. Par la suite, elle espérait que les choses deviennent meilleurs, mais tout recommençait de la même façon à chaque fois... La belle brune troqua son pijama pour une paire de short très courte par dessus des bas résilles et une petit haut provocateur. Cela consistait en une tenue habituelle pour la jeune femme qui adorait par dessus tout provoquer...Elle se délectait des réactions que les gens avaient à sa rencontre et elle adorait ramener quelques proies dans ses filets lors des longues journées grises.

Vêtue très légèrement, elle sortie de la maison accompagnée de ses cigarettes, d'une bouteille de vodka et d'autres substances illicites qui seraient ses meilleurs compagnons. Elle marcha durant un moment, ruminant les idées noirs de la soirée. Décidément, Ophé n'en voyait plus le bout avec sa vie qui partait de tous les sens. Elle se sentait perdue et un peu inutile. Une bonne à rien...Tout le monde semblait le penser...Le lycée la faisait chier et elle ne se sentait pas à sa place, ses parents n'étaient que deux pauvres cons et ses amis avaient peur d'elle, car elle les rejetait pour ne pas avoir mal...Elle était seule au monde dans un univers qui s'acharnait sur elle sans relâche. Parfois, en regardant le soleil, elle espérait vivre dans un cauchemar. Quelle n'était pas vraiment entrain de vivre sa vie...Qu'elle n'était qu'un songe et elle avait peur...Tellement peur et tellement froid...


Rien n'était perceptible dans la noirceur de la nuit sauf la petit lueur de sa cigarette qui la guidait comme un phare. Un guide qui l'emmena jusqu'à la gare pourtant loin de chez elle. Pas un son au loin...Seulement l'immense quiétude de la nuit. Le calme paisible des étoiles qui rêvaient en silence. La jeune fille pris place sur le rebord du chemin de fer et attendit. Une gorgée de vodka et une cigarette à la fois. Un train arrivait dans la nuit, mais la jeune fille n'avait pas la force de se lever...Elle restait assise n'entendant même plus le son de la locomotive...Le temps n'était plus...