« - Hey, beau gosse. Je te vois ce soir en show privé ?
- Nop, je travaille pas. C'ma nuit de repos.
- Huuum ... alors, je peux venir chez toi pour faire quelque chose de moins catholique ?
- Tentant. Mais j'peux pas, enfin, ce soir, je sors ... avec un pote. D'solé Brad.
- Roooh, tant pis alors, je m'en contenterai d'un autre. »

Appel classique. Appel habituel. Oui, les clients du Queer&Folk avaient accès à son numéro de portable pour lui réserver des shows privés, pour lui parler -surtout lui dire qu'ils avaient besoin de lui dans leur lit- et d'autres douceurs qui se rapprochaient plus ou moins de son travail de strip-teaseur. Et en ce début de soirée, Brad, un client régulier, qui par le temps était devenu un amant, venait de l’appeler pour savoir s'il pourrait s'occuper de lui cette nuit. Habitué à dire oui, Baesyl avait cependant refusé l'offre. Sortie ce soir avec Alaska. Et si quelqu'un chose égalait l'importance de la baise, c'était les sorties entre amis. N'ayant pas vraiment l'habitude de visiter Paris -parce qu'il ne voulait pas se promener seul-, il sautait à chaque occasion qu'il offrait. Et si lui et Alaska pouvaient être amis, alors ce serait superbe. Après sa sortie du foyer, le beau brun n'avait pas jugé bon de garder contact avec les connaissances, ni ceux du lycée. Il voulait commencer sa vie d'adulte comme vierge, dénué de connaissance pour que personne n'éprouve de jugement à son égard. Et se faire des amis à Paris demeurait un véritable défi, voire parfois trop dur à relever. Cependant, le fait d'avoir connu Alaska lui donnait une chance de le réussir.

Ôtant ses habits décontractés devant le miroir pour contempler son reflet, le parisien optait pour une tenue de ville ce soir. Il ne voulait pas faire tâche. Ne pas être banal non plus. Être habillé. Certes, c'était une soirée. Anodine pour Baesyl. Basique pour l'anglais. Finalement, un smoking serait parfait. Avec cravate. Aux yeux du strip-teaseur, sa tenue semblait impeccable. Regardant sa montre encore une fois, il se décida à partir. Le septième arrondissement n'était point à côté et entre les tramways et le métro bondé, s'y rendre pouvait être compliqué.

Arrivant enfin à destination, du moins, ce que lui avaient indiqué les passant qu'il avait croisé pour savoir la route, il découvrit pour la première fois le parc du champs-de-mars. Certes, il en connaissant l’existence, mais à quoi bon s'y rendre en temps normal ? Il fallait se l'avouer, le parc était magnifique, sujet aux merveilleux paysages qu'il cachait. Tournant la tête, il vit au loin le jeune homme avec qui il avait couché quelques jours plus tôt dans la boite. Il se rapprocha, allant ainsi à son encontre. « Heeeey. Ne sachant que faire, il avait décidé qu'il lui donnerait une bise sur la joue. Ça va ? » Cette situation semblait étrange et mettant carrément le beau brun mal à l'aise. Sortir en ville avec un amant qu'on avait rencontré qu'une fois réellement était vraiment bizarre. « Je fais tâche ? Je ne savais pas quoi mettre, j'ai pas vraiment l'habitude de sortir. » Maintenant, empli de questions qui lui trottaient à la tête, Baesyl semblait curieux. Pourquoi ce lieu et pas un autre ? Paris avait pour don de posséder une multitude de lieux et de monuments aussi magnifiques les uns que les autres. « Alors, pourquoi ce lieu ? »

Après que Baesyl lui annonce qu'il était en forme et pas vraiment épuisé par les soirées de la semaine, le jeune Alaska lui répondit, une main passant dans ses cheveux ébènes. Il lui expliquait que cet endroit avait été le coup de foudre, son lieu coup de cœur. Et qu'il adorait prendre des photos ici. Ou encore dessiner. Un lieu où il était agréable de passer du temps. Cependant, le strip-teaseur n'avait pas pu s'empêcher de rire nerveusement face à la dernière phrase de son p'tit discours. un coup de cœur comme lui. C'était mignon ... et étrangement plaisant. Mais gênant. On lui disait pas ça. Jamais, il n'avait entendu ça à son adresse. « Je veux bien. Enfin, ça a l'air cool comme lieu. Et 'te suis, c'est toi l'organisateur ! » avait-il déclaré calmement à la proposition de son partenaire de marcher et de contempler la vue en sa compagnie. Et même si Baesyl habitait à Paris depuis deux ans, il ne connaissait pas vraiment les recoins. Hormis le deuxième arrondissement qu'il connaissait évidemment par cœur, où étaient regroupés son appartement et son lieu de travail. Mais le reste, il était semblable à un touriste venant seulement pour les vacances et pouvant se perdre instantanément. S'extirpant de ses pensées futiles, le parisien fixait avec surprise la rose rouge que lui tendait Alaska. C'est pour lui ? Timidement, Baesyl la prit avant d'ajouter : « M-Merci. C'est ... gentil. » Inédit et complètement grisant. Alaska avait donc le don de lui faire perdre l'usage de la parole. Ou du moins de montrer clairement sa gêne. Il n'avait pas vraiment l'habitude. Normalement, les potes allaient dans un bar boire un verre et forniquer juste après s'ils avaient envie. Là, l'anglais lui faisait la totale. Un lieu personnel et une rose rouge. Et ne voulant pas s'accaparer de préjugés sombres, Baesyl laissa alors couler. La promenade commença donc où Baesyl se mit à tourner la tête de droite à gauche pour voir ou encore scruter différents paysages. « Et sinon ? T'as prévu le resto dans ton circuit ? Enfui, je ne pense pas à la bouffe hein ... Enfin, je te laisse domin .. je veux dire, guider. »

Nerveux. Et merde ! Qu'il avait encore foutu ? Quel con ! s'insulta intérieurement le strip-teaseur. A parler de bouffe, ça avait rendu mal à l'aise son partenaire. Ça se voyait dans ses yeux, son regard, ses gestes, à tirer sa chemise. Ne voulant pas faire durer plus longtemps le malaise, le parisien déclara fermement : « Non mais Alaska, si tu veux pas ... On fait pas ! C'est pas grave hein. » Mais quelle ne fut pas la déception du Caennais lorsque son ami lui déclara qu'il n'avait actuellement rien prévu en fait, et que ce serait à lui de choisir. Le problème, le gros, c'était que Baesyl était vierge en connaissance de Paris. Il ne sortait la journée que pour faire des courses, ou faire du sport. Et rarement, faire des sorties en amis. Alors qu'est ce que deux gays pourraient faire dans une soirée hormis baiser ? Parce que Baesyl avait cette envie qui commençait à le titiller, cette envie de faire l'amour à ce beau mâle qui se tenait devant lui. Cependant, il devait se calmer. Il ne devait pas céder à ses pulsions. Sinon, il décevrait Alaska qui ne voulait pas ça. Et Alaska était devenu une sorte d'ami alors gâcher cette amitié, il ne pouvait pas en fin de compte.

« Beh je dois t'avouer que c'est la première fois que je vois le lieu mais ... » Pour une fois que le jeune homme avait eu une illumination, une espèce d'idée folle qu'il trouvait géniale, il n'allait pas cracher dessus. Et s'agrippant au bras du jeune homme, il le tira pour l'emmener jusqu'à la pelouse à un endroit du parc. « Si t'as ton appareil, on a qu'à faire de shoots. De toi, ou de moi ? Enfin, si tu veux. »

Un grand sourire enveloppa le visage du strip-teaseur. Alaska semblait visiblement réciproque à l'idée de faire des photoshoots dans le parc du champs-de-mars. Tant mieux ! Cette activité pourrait peut-être faire comprendre à Baesyl la passion qu'avait son ami pour la photographie. Cependant, ce dernier n'était pas enchanté à l'idée de se faire prendre en photo. Le gars était plutôt à être derrière l'appareil. Soit. S'il voulait. Mais avant, il fallait qu'ils règlent une dernière chose, le restaurant. Sujet que le parisien avait maintenant regretté d'aborder vu la tournure qui était entrain de se produire. Caressant doucereusement les joues de son ami, il prononça d'un ton ferme : « Arrête avec le restaurant ! Je ne veux plus manger ! Le temps que j'suis avec toi, tout va bien ! » En ayant mis les points sur les i, il espérait simplement qu'Alaska finisse par oublier cette mauvaise idée de restaurant. Lui faisant signe de prendre son appareil photo de le braquer sur lui, Baesyl s'éloigna de son compère, prenant place sur la pelouse, en prenant une pose des plus sexys. « Prends sur le meilleur angle ! »

Et un photo. Shlack. Une autre avec une pose différente. Schlack. Et Baesyl décida de changer de ton, en mettant un plus osé. Sur la troisième, il s déboutonna. Et sur la quatrième photo, il apparaissait torse nu. « Pour le grand final, j'me mets en caleçon ? » Et sans même attendre l'avis de son camarade, le strip-teaseur se mit à déboutonner son pantalon avant de l'ôter sauvagement. Se mettant en position graou, il déclara avec joie « Allez prends-moi ! »