Les 5 jours les plus importants de ta vie :
> A commencer par les jours les plus importants de ma vie autant commencer par le plus important de tous : celui de ma naissance. Je suis née le 14 juillet 1994 à 3h 45 du matin prématurément après 23 heures du travail, autant dire que même pas née j’en faisais déjà bavé à ma mère qui malgré la difficulté devait sans doute être bien préparée à ma venue et à m’élever seule. Autant dire que de ce jour, je n’en retiens que les éléments figurant sur mon acte de naissance et que je suis née et m’a mère m’a donné comme prénom Alabama ; ce qui est – avouons-le – plutôt laid. Surtout quand on sait pourquoi elle l’a choisie,
« Carte Postales d’Alabama » de Johnny est sa chanson préférée ; on comprend pourquoi je préfère me faire appeler par mon second prénom : Naïs, qui était le prénom de ma grand-mère. Ma mère m’a élevé seule ; c’est une femme brillante et talentueuse. Talentueuse parce qu’elle est une musicienne de renommée connue mondialement ; j’ai été conçue durant l’une de ses tournées. Ça pourrait presque être hyper cool si elle avait fait partie d’un groupe de rock ou quelque de moins ringard qu’un orchestre. Mais non, ma mère est une femme avec du style et de la classe qui aurait mieux fait de se protéger le seul soir où elle a décidé de se relâcher. Quoique, je ne vais pas m’en plaindre ; j’aime l’idée d’exister et au final je lui dois tout ; alors voilà même si ma mère n’a pas fait les meilleurs choix. Je l’aime. Je l’ai juste réalisé trop tard.
> J’ai tenu un pinceau pour la première fois de ma vie dans l’atelier de mon grand-père à l’âge de 5 ans. C’est ce jour-là, le deuxième jour le plus important de ma vie, car c’est ce jour-là que j’ai découvert la passion qui m’animera ma vie entière. Avant que je n’aie l’âge d’aller à l’école, mes grands-parents me gardaient l’après-midi et bien souvent, je me réfugiais dans l’atelier de grand-père. Dans ce grand cabanon au fond du jardin d’où s’échappait une très forte odeur de peinture et de poussières ; certaines toiles étaient là depuis plus de vingt ans et certaines était même plus vieille que ma mère ; être dans cet atelier c’était comme visiter la caverne d’Ali Baba et de découvrir de nouveau trésor tous les jours. Il y’avait de tous ; des portraits, des paysages, des images que grand père avait eu dans sa tête ; comme il me le dira plus tard.
« Il y’a plusieurs étapes dans une vie et l’artiste a la chance de pouvoir les peindre pour que chacun les voit comme lui ». Je n’ai pas toujours compris ce qu’il voulait dire mais je suppose que ça viendra avec l’expérience. Ce jour-là ; grand-père m’avait pris avec lui à l’atelier en disant « il est temps de savoir quel genre d’artiste elle sera » Grand-mère était écrivain, grand-père peintre, maman musicienne et il était capital pour eux que j’ai hérité de cette fibre artistique qui faisait la fierté familiale. Maman m’avait déjà mis un violon entre les mains sans succès ; je suivais des cours de danse classique sans n’avoir montré aucun vrai talent et je ne savais toujours pas écrire. Grand père me plaça alors devant une petite toile avait quelques échantillons de peinture ; je me demande si il s’attendait à ce que je lui peigne une vraie toile de maître ; à cinq ans : impossible. Non, lorsqu’il plaça le pinceau entre mes doigts ce fût juste un coup de foudre qui se produisit. J’étalais la peinture sur la toile et au fur et à mesure que je le faisais, je prenais encore plus de plaisir. C’était encore mieux que tous les jouets que j’avais eu jusque-là ; encore mieux que tous les dessins animé que je regardais. Je n’arrêtais pas tant que la toile était encore blanche quelque part et mon grand-père eut du mal à me retirer le pinceau de doigts à la fin de l’après-midi. Il était fier ; fier de voir que j’avais hérité d’eux, j’étais comme eux et surtout j’allais prendre sa suite à lui. J’eus un coup de foudre pour la peinture et ceci combiné à l’admiration que j’avais pour lui, a fait de moi l’artiste d’aujourd’hui. Depuis je n’ai eu qu’une seule ambition celle d’apprendre à dessiner. Cela a donc commencer par des cours de dessins puis d’Arts tout court ; l’enseignement de mon grand-père me permettait d’avancer et petit à petit je construis ce que je veux être. Ce jours-là est celui où je me suis fixé un objectif, il est important pour moi.
> « ENCORE ? Je peux savoir ce que tu leur fais pour être encore expulsée ? » Ma mère criait dans tout l’appartement alors venait de recevoir un appel du proviseur. J’avais quatorze ans et l’école, ça ne se passait pas hyper bien. Je n’y étais pas à ma place et je voulais des cours par correspondance ce que ma mère me refusait. J’avais trouvé la solution.
« Mais arrête ! Tu sais bien que c’est inutile de la disputer ; elle se fout de tout. Tu veux lui faire comprendre un truc, punie la ! Mais c’est inutile de lui parler. » Mon beau-père, ou plutôt le dernier « truc » de ma mère avait ouvert la bouche. Lui, maintenant que ça faisait trois mois qu’il était ensemble, il prenait beaucoup trop la confiance.
« Mais la ferme ! T’as pas de conseil à donner à ma mère et t’es pas mon père. Va t’occuper de tes enfants si parfaits ! » lui avais-je craché au visage, seule ma mère pouvait décidé pour moi et à cette époque, nos relations n’était pas des meilleures. J’avais appris depuis peu que mon père ne connaissait rien de mon existence ; c’est beaucoup facile de lui en vouloir pour son absence si ce choix est de lui, mais non, maman avait pris cette décision et c’est à elle que j’en voulais. Je me construisais et pour combler le manque affectif je n’avais que ce nabot qui s’apparentait plus à un esclavagiste qu’à un père.
« Ne lui parle pas comme ça’ Il parle pour ton bien. » avais crié ma mère pour prendre la défense de son conjoint. Parce que bien sûr, me punir c’était la solution à tout dans cette maison.
« Pour mon bien ? Ou pour le siens. Parce que de toute façon ce qui lui ferait du bien à lui, c’est que je me barre de cette maison. C’est connu, on dégage la mauvaise graine ! » Pour toutes réponses, je recevais une claque. Ma mère ne m’a jamais frappé hormis cette fois-là ; et je l’ai très mal pris. En silence, j’ai filé dans ma chambre et dès que tout le monde est parti se coucher, je me suis enfui par la fenêtre. Paris la nuit, quand on a quatorze ans ça peut paraître très effrayant et pourtant très excitant, après tout c’était interdit et moi j’ai toujours pensé que les règles avait été faite pour être enfreinte. Je m’étais retrouvée dans le XIe, au Gibus plus exactement. Le soir le plus excitant de toute ma vie. J’avais fait une fugue. J’avais réussi à entrer dans une boîte et surtout un inconnu avait placé mon premier verre d’alcool dans les mains. Et je crois bien que l ‘excitation avait atteint son plus haut sommet sur la piste de danse.
« Comment tu t’appelles ? » avait-il crié face à moi.
« Naïs » « Comment ? » « NAÏS ! Et toi ? » On ne s’entendait pas, la musique était bien trop forte et j’avais beau le hurler, rien ne parvenais à ses oreilles.
« Naïs ? » Je fis un grand « oui » de la tête ; dans ce genre d’endroit, mieux valait connaître la langue des signes. Nous dansions là, sans vraiment nous comprendre, ça me suffisait à moi. Avec la dispute avec ma mère, je ne voulais que danser sans vraiment me soucier de mon entourage, puis à la fin de la chanson, il approcha son visage du mien et y posa ses lèvres. C’était mon premier baiser et je ne connaissais même pas son prénom. Je ne l’ai jamais connu d’ailleurs. Il est parti avant qu’on ne puisse trouver un moment pour s’entendre ; et puis de toute façon, si il avait su mon âge, il n’y’aurait rien eu de plus. Je suis donc rentrée ce soir-là et j’ai eu droit à la dispute la plus grosse dispute avec ma mère. Nous ne sommes plus parlées comme avant après ça.
> « Alabama St-James ? » Mon portable avait sonné à trois heures du matin, je n’étais pas à la maison mais chez Louise, ma petite amie. Elle disposait de son propre appartement et depuis le temps que je n’avais pas vu ma mère, on pouvait presque dire que j’y avais élu domicile.
« Oui, c’est moi. » « Naïïïs, reviens te coucher ! » avait-elle exigé encore dans son sommeil, je me levais hors du lit pour parler tranquillement et repris ma conversation.
« Je peux vous aider ? » « C’est votre mère. Nous venons de la recevoir aux urgences ; votre père la trouvé les poignets ouvert dans la salle de bain, il m’a demandé de vous contacter. » « C’est pas mon père » avais-je répondu comme si l’information qu’il venait de m’apprendre n’était pas plus importante que le fait que le médecin ait appelé cet homme « mon père »
« Vous pouvez venir le plus rapidement possible ? » « Oui, je me met en route. » Je raccrochais puis venais me recoucher dans mon lit, les bras de Louise m’enserraient, et alors que d’ordinaire elle me rassurait de tout, là ça changeait rien. Je devais y aller.
« Ma chérie, j’ai un truc à faire. C’est ma mère. » C’était tout ce que j’avais dit sur le sujet avant de courir à l’hôpital. J’avais passé toute la nuit à son chevet dans l’attente qu’elle se réveille. J’avais été surprise de la trouver seule ; puis au final, ce type venait juste de me donner raison : Il s’en foutait complètement et m’avait fait appeler pour me refiler le bébé en gros. Elle avait fini par se réveiller vers midi
. « Alabama ? Qu’est-ce que … » Je serrais le poing pour ne pas lui rétorquer que l’hôpital c’était là qu’on allait quand on tentait de mettre fin à ses jours, c’était dur et d’ailleurs je ne voyais pas pourquoi je le faisais. On vivait encore, mais de vraies discussions on en avait pas eu depuis deux ans.
« Où est Adrien ? Je veux le voir. » Elle exigeait en plus, à croire qu’elle pouvait exiger quelque chose
. « Il n’est pas là. Le médecin m’a appelé parce qu’il ne voulait pas rester. » « Tu mens ! » Je n’avais pas eu le temps de finir. Comment ça je mens ? Non, c’est la stricte vérité. Il devait préférer passer une nuit dans leur super appartement plutôt que de la veiller là.
« Non, je ne mens pas. Il a appelé l’ambulance et m’a fait prévenir. » Je restais calme, du moins j’essayais.
« Non tu mens ! C’est toi, tu as profité que je dormais pour lui dire de partir. » Elle continuait ses accusations en plus.
« Non ! Il s’est barré tout seul. Et c’est peut-être à cause du fait que tu te sois ouvert les veines ! Nan mais il t’es passé quoi par la tête ? T’es pas heureuse ? T’as un mec c’est ce que tu voulais ; tu l’as fait fuir seule alors arrête de m’accuser de tes erreurs. » J’avais perdu mon sang froid ; lunatique & agressive c’est tout ce que je suis. Mais c’est surtout difficile de rester calme quand vous avez en face votre mère couchée sur un lit d’hôpital. Comment en est-elle arrivée là ?
« Ma seule erreur, c’est de t’avoir laissé naître. » Sa remarque eût l’effet d’un coup de feu, je ne pouvais pleurer devant elle.
« Je vais faire venir Adrien. » avais-je finalement dit avant de quitter la pièce. J’avais seize ans et ce soir-là, je coupais totalement les ponts avec elle. Je n’ai jamais su ce qui l’avait poussé à s’ouvrir les veines, à vrai dire je ne suis même pas sûre qu’elle le sache elle-même.
> « Pourquoi tu lui parle ? Tu sais que tout ce qu’il veut, c’est te sauter ! » Louise était jalouse ; une vrai passionnée qui s’emportait rapidement. J’en avais été dingue durant deux ans qu’elle ne décide d’aller voir ailleurs et de rompre avec moi. Nous étions restées colocataire dans son petit appartement vu que je ne parlais plus à ma mère. Vu que nous continuions à partager le même lit malgré la rupture, nous essayions au max de ne ramener personne à la maison. C’était une situation assez confuse ; excitante d’un certain point de vue mais surtout source de conflit entre nous. « C’est ce que tu veux c’est ça ? Un mec ! Tu me dégoûte Naïs. » criait elle en jetant les assiettes ; à force j’avais l’impression qu’on était en plein préliminaire.
« Arrête ; dis pas n’importe quoi c’est un con. Il porte bien son prénom d’ailleurs. » Je tentais de me défendre, même si en plus d’être mon ex, ma colocataire, mon amante ; Louise était ma meilleure amie et me connaissait très bien.
« Tu mens ! Je suis sûre que tu aimes ça, quand il te courtise et qu’il te provoque. Je te connais bien avec les hommes, tu aimes tellement les embêter. » C’est vrai qu’elle me connaissait mieux que quiconque, au point que j’avais à chaque l’impression d’être violée.
« Louise ; justement. Tu sais que je vais préférer m’amuser plutôt que de céder alors calme toi ! » « NON ! » Cria t-elle avant de briser un vase.
« Ca va finir, un jour tu diras « oui » et je veux pas que tu fasse l’amour à un homme dans mon lit. » Cette foutu, c’était parfois excitant, parfois risible. Je gaspillais ma salive à rien et j’étais prête à faire un tour pendant que Louise ne se calme, mais avant que je n’ouvre la porte elle dit.
« Je veux que tu trouves un autre appartement. Ou alors je le ferais. Je ne veux plus vivre avec toi. » Sans répondre, je refermais la porte derrière moi.