« Vous savez, je danse peut-être au Crazy Horse mais je ne suis pas une fille facile pour autant… quand il m’arrivait de passer une nuit dans les bras d’un inconnu, je ne me faisais jamais payer. Il était juste un homme qui voulait être aimé un peu, et j’étais juste une femme qui voulait être aimée un peu aussi. Je ne peux parler qu’en mon nom mais plusieurs de mes collègues pensent aussi ainsi : les danseuses de CH ne se dénudent pas pour des bêtes, elles ne dansent pas pour le désir ; elles dansent en exposant de manière subtile et élégante leur courbes, elles n’ont rien de vulgaire. Nous défendons le spectacle du corps féminin. Peu d’entre nous ont des poitrines généreuses et pourtant, nous sommes aussi désirables qu’elles. L’amour est un fait et un sentiment qui existe depuis la fin des temps, nous ne faisons que montrer un des aspects de l’amour. Nous ne faisons que de donner de l’amour. Je sais que dans cette société, ce n’est pas ainsi que cela marche, mais j’aime à penser que le Crazy Horse est une utopie. »
Coco, danseuse au Crazy Horse, le samedi 11, interviewé par Bernard Girardin.
Coco est une femme née à Canossa et malheureusement pour elle, elle est née belle. Là-bas, les hommes ne voient vos yeux que pour leur beauté et rarement pour ce qu’ils regorgent. Carmen a été élevée ainsi : tais-toi femme et lave. Elle ne s’est que rarement révoltée, mais dans cette société où on reconnait l’égalité des hommes et des femmes sans pour autant l’appliquer, il est impossible de ne pas se sentir méprisé quand on est une femme à Canossa. Elle a toujours refusé d’être ainsi. Coco est une femme d’esprit, elle le sait et elle a toujours cherché à se le prouver. Elle essaie d’apprendre, tout, n’importe quoi. Le montrer aux autres… ? Coco n’en a jamais éprouvé le besoin, l’intérêt. Il y a comme un désintérêt chez cette femme vis-à-vis de l’avis populaire. Elle est partie en France, à Paris, elle-même ne sait pas pourquoi. Elle n’agit qu’en fonction de ses envies, l’alerte est une chose que son esprit connait mais qui n’arrive pas à l’appréhender correctement. La France fait rêver mais Coco n’est pas faite que pour le songe. Elle s’y refuse, elle ne veut pas être comme toutes ces femmes de Canossa qui espèrent en ne faisant rien.
Elle y est donc allée, au début pour perfectionner son français et découvrir un peu tout ce qu’elle a lu dans les brochures et les livres. Mais peu à peu, les lumières malades de Paris l’enivrèrent tel qu’elle ne put lâcher la capitale. Naturellement, elle avait visité tous les monuments et lieux qu’en bonne étrangère qu’elle était, elle se devait d’aller. Elle a découvert donc le Crazy Horse et ses femmes qui faisaient tourner la tête de plus d’un homme. « Tais-toi homme et admire »
Elle envoyait une lettre, deux lettres, trois lettres… maman je ne rentre pas, Paris, si tu la voyais, toi aussi tu en tomberais amoureuse.
Elle voulait être comme ces femmes pour lesquelles des hommes pourraient se battre. Elle savait que cela n’impliquait pas le respect mais au moins, elle n’avait pas à se taire et à laver la vaisselle. On vous regarde étrangement quand on apprend que vous travaillez dans un cabaret, mais Carmen a… comme un désintérêt vis-à-vis de l’avis populaire. Ce que Coco a, certainement plus qu’une autre femme, c’est du charisme. Et c’est grâce à son charme, à son attitude, à sa manière de s’habiller parfois comme un homme, qu’elle a réussi les castings il y a 4 ans, avec le soutien de la Folle Tante qui n’était pas encore patron de l’entreprise à l’époque.
Elle mène une vie de danseuse épanouie avec une bande de copines. Elle rit à gorge déployée avec sa voix de fumeuse, dans les rues de Paris. Elle ne rentrera pas à Canossa non, elle continuera à vivre dans la nuit azimute et fera briller ses yeux bleus sous l’éclat de la lune, ses talons claquant seuls dans les ruelles sombres.