Lucky Bambi Miles est un enfant. Un rêve à lui tout seul. C'est un sourire franche toujours dessiné sur ses fines lèvres. Des yeux pétillants de bonheur. Un amour grand comme ça. Des mains souvent tremblantes, témoins d'un malêtre constant. Lucky c'est aussi le jour et la nuit, un rire enfantin facilement remplacé par des larmes tranchantes. Puis aussi, y a ce silence, toujours ce même silence. Mais, tu sais, il est comme ça, on peut pas le changer. Lucky il est pas comme tout le monde. Pour lui, tenir une conversation est bien trop difficile. Comme tout le reste d'ailleurs. En fait, Lucky, c'est un combat constant envers les autres. Lucky on l'aime bien mais on le comprend pas. Il n'écoute jamais rien mis à part les vagues s'échouant dans son esprit. On cherche pas à le connaître parce qu'il est pas assez intéressant. Pourtant, il a tellement à offrir. Foutue carapace. Et, derrière sa cigarette, ce n'est pas un homme qui se tient là, non, c'est un monde. Une vision de voir les choses.

Je suis né en France. Je ne sais plus quel âge j'ai. Je sais juste que je suis assez grand pour pouvoir acheter de l'alcool sans autorisation de maman. Du moins c'est ce que j'entends souvent. Ma vie se résume à une seule et unique chose : la solitude. J'ai toujours eu ce manque de bol, celui d'être mis de côté. J'ai pourtant essayé de me fondre dans la masse. D'y croire. Mais non, on m'a jamais laissé le choix. Je n'y peux rien moi, si, le reste du monde a une façon différente de voir les choses. Tout semble si lointain. Dés ma naissance, lors de mon premier jour sur cette terre une étoile a posé une barrière entre mon esprit et celui des autres. Je n'sais pas si elle peut se briser. En fait, je ne sais absolument rien. Et, je ne veux rien savoir. De toute façon, en suis-je capable ? Ça m'a toujours chagriné de devoir lutter contre les regards sombres des personnes que je croise dans la rue. Ce n'est pas pour autant que je me pose plus de questions. Je me souviens de ces paroles que me disait maman. « Ça va aller. C'est pas de ta faute. Allez, sèche tes larmes. Je vais te faire un bon chocolat chaud. » C'est alors, que de cette simple phrase, ou plutôt ce simple mot, 'chocolat' mes larmes se séchaient. De plus, la voix de maman avait quelque chose de magnifique. Elle était si lointaine et pourtant, me touchait toujours en plein cœur. Tu sais, c'était l'une des rares personnes à pouvoir m'approcher. Son doux parfum enivrant. Réconfortant, aussi. Puis, un jour, elle a décidé de ne plus m'offrir ce chocolat. Mes pleurs ne semblaient plus rien lui faire. Elle continuait tout de même de répéter sans cesse que c'était pour mon bien. Mais moi, j'étais bien à tes côtés, maman, j'aimais entortiller une mèche de tes cheveux blonds autour de mon index. Puis aussi, m'endormir contre toi quand un voile d'insomnie tentait de se poser sur ma tête. Ouais, mon enfance, c'était ça. La douceur de maman lorsque je n'allais pas bien. Et le reste était sans importance. Je voulais juste rester à ses côtés, ne rien changer à cela. Sa simple présence me suffisait. Le monde autour de moi semblait si lointain. Il l'est toujours d'ailleurs. Un point d'interrogation, un labyrinthe, une difficulté à lui seul. Puis, il y a moi. L'aphte qu'on a dans la bouche, celui qui fait mal, qui pique, gênant mais qui ne part que quand il en a envie.

« Tu dois grandir, Lucky. »

Grandir ? Mais, je n'savais même pas la signification de ce mot le jour où je l'ai entendu pour la première fois. Fin si mais … Quand j'regardais les photos de l'album de famille j'étais si … petit. Minuscule. Alors, je n'avais cessé de hurler sur maman que j'étais grand. Que j'pouvais enfin attraper le pot confiture posé sur cette étagère. Qu'avant, j'avais besoin d'une chaise pour m'aider. Plus maintenant. « Maman. » Les larmes menaçaient de couler, à nouveau. Mais non, j'avais pas eu le choix. Je devais changer d'école. C'était comme ça, pour mon bien, again.

Et, ces années d'école furent pour moi les pires années de ma vie.

Puis il y a eu ce jour, où j'ai rencontré ce type. Fantastique. Ouais, au début je savais même pas qu'il existait. J'étais, je pense trop occupé à me cacher dans un coin de la cours avec mes figurines pokémon. Parce que de toute façon, personne ne venait à ma rencontre et, je ne voulais que personne ne vienne à moi. C'est fou, j'voulais qu'on voit que j'existe mais, d'un côté, j'laissais personne entrer dans ma petite bulle. Sauf que ce putain de type a trouvé une fissure à ma barrière, comme ça, du jour au lendemain. Lui, j'sais pas pourquoi, il s'est approché de moi. Je voulais pas, j'vous jure. Ouais, mon corps tout entier le refusait à l'exception de mon cœur. J'savais absolument pas ce que c'était, ce petit truc qui bouillonnait en moi. Mais, c'était attirant alors j'me suis laissé guidé par cette chose. De toute façon, je ne pouvais pas y résister. J'ai toujours trouvé étrange la façon que mon cœur avait de battre à la vue de Cheshire. J'ai pas cherché à comprendre. J'me suis dis que c'était passager. Sauf qu'encore une fois, j'avais tout faux. J'ai vite compris que je pouvais plus me passer de sa gueule d'ange. Ouais, quand il m'embrassait, je partais juste dans un autre monde. Bien plus beau, bien plus grand, bien plus coloré … plus tout en fait. J'avais l'impression d'être quelqu'un quand il me serrait dans ses bras. Je flottais sur un petit nuage perché quelque part dans ce ciel vaste. Je ne sais pas exactement combien de temps notre histoire a duré mais je suis sûr d'une chose, pas assez longtemps.

Les larmes coulent sur mes joues. Brûlantes. Je tente de les retenir mais rien n'y fait. Mes cheveux s'arrachent entre mes doigts fins, tremblants. Un nouveau sanglot agite mon corps, mon coeur se serre. Merde, je comprend pas, je comprends plus. « Je suis désolé Lucky. Je t’aime, mais j’y arrive plus. » Mais non, il plaisante. Une connerie comme une autre qu'il a tant l'habitude de faire. Alors, pourquoi je chiale ? C'est certainement le sérieux de sa voix qui m'a déstabilisé. C'est vrai, qu'il m'en faut peu pour trébucher. Mais, j'parviens pas à lui dire quoi que ce soit pour tenter de le retenir. Mes mots, comme toujours, se bloquent à la barrière de mes lèvres. La porte claque. Les minutes défilent. Parfois, mon regard tente de fixer cette pièce. Immédiatement, j'ai l'impression de voir son regard flotter dans l'air. Je le déteste. Je n'trouve rien d'autre à penser que la haine. Mon poing s'abat finalement sur ce mur jauni par la fumée de cigarette. Je le déteste. J'ai mal et putain, c'que je me sens seul. Je m'acharne alors sur ce mur, comme un véritable dingue. Je gémis de douleur lorsque mes mains se mettent à saigner mais je continue. Je ne peux plus m'arrêter de toute façon. Pourquoi la vie est si dure ? Pour le monde est si con ? Pourquoi diable suis-je comme ça ? Un frisson traverse ma colonne vertébrale, se perd dans ma nuque. Je m'étale au sol. Malade de tristesse. J'ai juste l'impression de crever, dans cette chambre. « Cheshire. » Ma voix se brise, je l'appelle, dans l'espoir qu'il revienne. Pourtant, je sais déjà qu'il ne reviendra pas. C'est terminé. Je ne cesse de hurler son nom. Jusqu'à l'épuisement. De toute façon, je m'en remettrais. Ouais, hein ? Parce que Lucky c'est ça. Il se remet toujours de ses histoires ratées.

C'est comme ça que mon bonheur s'est barré. Il a pris la porte, sans se retourner. J'ai pas eu le courage de le rattraper et pourtant, j'ai qu'une envie, qu'il me revienne. Putain, Cheshire … Pourquoi ? J'te jure j'ai fait de mon mieux pour pas t'en faire baver. Mais parfois, c'est comme ça, j'contrôle rien. Je veux bien y mettre du mien pour tourner la page sur ces moments de bonheur. En échange, laisse moi parler de nous au présent. Parce que le moindre de tes gestes est encore ancré dans ma mémoire. Présent, étouffant. Tes paroles me crèvent toujours autant le cœur, aussi. L'amour, c'est dur à laisser tomber tu sais.