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 paradise circus. (théora)

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Louise Toscan du Plantier
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Louise Toscan du Plantier
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MessageSujet: paradise circus. (théora)   paradise circus. (théora) EmptyLun 28 Oct - 19:20

Elle va bien. Elle ne vous en dira pas plus.
Elle est chamboulée, en réalité.
Après le calme vient la tempête serait la métaphore la plus adaptée pour parler de ses derniers jours. Les derniers mois avaient été plus que calmes. Tout comme son été où elle a quitté son travail pour un autre, moins prestigieux, moins stressant aussi, mais plus intéressant. Mais, Sephora ne s’en est jamais plaint, parce que ce fameux calme ne lui ferait pas de mal. Elle ne va pas se plaindre non plus du retour de certaines personnes dans sa vie.

Les matins parisiens sont toujours aussi beaux. Du moins, en haut de cet immeuble du seizième et aux yeux de la jeune femme. Vous savez, les goûts et les couleurs… La rue est calme et il n’y pas (encore) de trace de pollution. La rouquine les aime, même s’il n’y a pas ces couleurs magnifiques aujourd’hui. Paris est triste aujourd’hui. Il paraît qu’une petite tempête est passée juste au-dessus de leur tête cette nuit. C’est gris et bleu, humide, un peu frais, venteux. C’est beau et poétique quelque part. Sur son balcon, la jeune femme s’étire de tout son long, puis attrape son café encore chaud afin de profiter de ce fameux calme.

Les minutes passent. Le café s’épuise. Il serait temps que la demoiselle s’active à la place de se perdre dans ses pensées, dans sa contemplation.

Finalement, ce sera la sonnette à l’entrée qui l’arrachera de sa rêverie.
C’est bien tôt pour de la visite. Sephora est déjà persuadée qu’il s’agit d’un voisin en manque de café ou de beurre.
Elle enfile un sweat shirt qui lui donne un air de pouilleuse, de cette fille qui compte rester enfermée dans cet appartement tout le weekend – il ne manquerait plus qu’une petite quinte de toux pour parfaire ce tableau. Puis, elle se traine jusqu’à la porte, les lèvres toujours closes.

Surprise.
Sephora hésite pendant plusieurs secondes. Option numéro une : lui sauter dans les bras. Option numéro deux : pleurer d’émotion. Option numéro trois : rester amorphe sur le pas de cette foutue porte. Option numéro quatre : un mélange de tout ce qui a été dit précédemment.
Évidemment, la jeune femme ne peut pas s’empêcher d’avoir ces fameuses larmes au bord des yeux. C’est Théotime tout de même.
Inconsciemment, ce sera la dernière option.
Involontairement, il n’y a pas de bras grands ouverts. Bien qu’elle aurait préféré qu’il en soit autrement.
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Victor Trompette
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Victor Trompette
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MessageSujet: Re: paradise circus. (théora)   paradise circus. (théora) EmptyMer 30 Oct - 15:03


C'était relativement facile.
C'était dans un magasin que j'aime bien pour toutes les conneries qu'on y vend. Des confettis, des balais, des feutres. Évidemment moi c'est un magasin plus sérieux qu'il me faudrait, un truc qui vend des coeurs de rechange, un magasin qui donne de l'argent ou lieu de vous le prendre.
C'était caché, au milieu de pleins d'autres choses, et je l'ai pris, c'est tout. Je l'ai pris, je l'ai caché sous mon t-shirt et c'est tout. J'avais déjà prévu ma réplique si on me chopait.
« Pardon, je voulais juste voir les étoiles. »
Mais je me suis pas fait prendre.
Dans la rue, je les regarde, mes étoiles miniatures. C'est un peu du mensonge, ces étoiles. Évidemment que les étoiles n'ont pas cinq branches qui leur donne des airs d'être humain. Ils se sont un peu mieux réussis sur la lune : elle est ressemblante, comme ça, en croissant.
C'est pas très proportionnel, c'est tout.
Les étoiles dans une main, je trottine. J'y vais au nez, un peu. Elle m'a dit un arrondissement, un immeuble aussi, il me reste des bribes de ses mots. Sa petite voix rousse me répétant son adresse.
J'aurais dû écouter un peu mieux mais à l'époque, j'avais certainement pas l'intention d'aller me cacher chez elle.
J'avais Félix. Et une Ondine bouffée de joie.
Un grand immeuble blanc avec des poignées de portes dorées. Ça doit être ça. Oui y a son nom à côté de la porte, entre autres patronymes.
Sephora d'Abzac, appartement 4b.
Ça sonne de beauté tout ça.
Un habitant s'extraie de l'immeuble, l'air déjà fatigué, j'en profite pour entrer à sa suite. Surprise, surprise. Ça me va mal mais j'essaie quand même.
Trois coups de sonnette. Et la Sephora qui se présente à moi. Ça me file la banane ça tout d'un coup.
Si Félix c'est mon vieux frère, Sephora c'est ma vieille sœur. Quoique ça sonne laid. Je le mettrais pas dans une chanson en tous cas.
Sephora, elle se fait un peu plus distante que la dernière fois. Je sais qu'elle ose pas, qu'elle comprend peu. Faut dire que la pauvre, je jongle avec son cœur, apparition, disparition, réapparition, c'est moche de jouer à cache-cache avec sa plus vieille amie.
Parfois, faut sortir de la cachette.
Sourire, encore, pour moi, c'est si bon.
- Tu ressembles à moi avec un pull comme ça.
Blague à part, je la réveille et c'est un peu malpoli, maladroit, mal mal mal.
- Tiens, j't'ai apporté des étoiles. Pas des vraies, hein ... Des étoiles fluorescentes. J'me suis dit qu'tu serais contente de les voir en t'endormant, collées à ton plafond. Félix disait toujours que l'plus chiant avec le métro c'est que t'y vois pas les astres le soir. Mais les parisiens qui s'enferment dans leurs grands appartements, la nuit, comme toi, vous les voyez pas non plus ...
Parler, parler, pour cacher ce que je voudrais dire vraiment.
Que je finis par dire.
- J'peux entrer ?
Si la proposition du mois de mai tient toujours.
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Louise Toscan du Plantier
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MessageSujet: Re: paradise circus. (théora)   paradise circus. (théora) EmptyJeu 31 Oct - 21:03

Encore et toujours stoïque face à son plus vieil ami. Oui, c’est également ainsi qu’elle voit le petit Puech.
- Tu ressembles à moi avec un pull comme ça.
Sa remarque la fait sourire, mais pas longtemps, parce que ça ne doit pas être joli joli comme tableau.
- Tiens, j’t’ai apporté des étoiles. Pas des vraies, hein … Des étoiles fluorescentes. J’me suis dit qu’tu serais contente de les voir en t’endormant, collées à ton plafond. Félix disait toujours que l’plus chiant avec le métro c’est que t’y vois pas les astres le soir. Mais les parisiens qui s’enferment dans leurs grands appartements, la nuit, comme toi, vous les voyez pas non plus …
Elle ne peut pas cacher son étonnement face à ce présent. C’était déjà inattendu de le voir sur le pas de sa porte, mais les mains pleines, waouh. Elle essaye de les imaginer, Théo, Félix et Ondine, en train de contempler des étoiles fluorescentes dans cet endroit qui est le leur sous le métro. Sephora frissonne : souvenir de sa visite là bas. L’obscurité, l’humidité, le métro quoi…
- J’peux entrer ?
Son visage s’illumine. Théotime qui est sur le point de pénétrer dans sa bulle à elle ? Lui qui semblait ne pas trop quitter son métro. Lui qui avait honte face à elle la première fois qu’ils se sont revus depuis qu’il avait quitté Azur tel un voleur.
- Oui bien sur ! Tu sais que tu peux faire comme chez toi.
Et non, elle n’a pas oublié sa proposition et il faut croire que lui non plus.
Sephora ne peut pas s’empêcher de l’étreindre, poser rapidement sa tête sur son épaule, avant de lui laisser un passage pour qu’il se glisse dans l’appartement.
- De toute façon, je ne serai pas capable de coller les étoiles toute seule à mon plafond.
La jeune femme referme la porte derrière eux.
- Et puis, on a cette petite chance de connaître les balcons. C’était une belle innovation de l’époque pour ces parisiens qui s’enfermaient dans leurs grands appartements en rentrant du travail… Quoique je doute que ceux-là travaillaient. Si tu as l’occasion de rester ou de passer un soir, tu verras. C’est plutôt magique comme vue.
De ce fameux balcon, on voit les étoiles du ciel, mais aussi les étoiles de la Tour Eiffel, vous savez quand elle s’illumine lors de certaines occasions et surtout en hiver. Et oui, elle n’est pas trop mal lotie la petite.
- Ça fait du bien de te revoir Théo.
Comme avec Tay, la rouquine se retient de lui exposer son interrogatoire : comment tu vas, t’étais où, etc. Elle pourrait l’effrayer, sans rire. C’est fou à quel point elle s’attache et s’inquiète pour les autres. Une mère poule, une mère Theresa, une fille unique qui rêvait d’être une grande sœur.
- Tu veux du café ou quelque chose d’autre à boire ?
Parce qu’elle compte bien en reprendre un autre pour émerger définitivement.
Octobre ou la meilleure période de l’année pour que tous les « hommes de sa vie » décident de refaire surface dans sa vie.
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Victor Trompette
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Victor Trompette
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MessageSujet: Re: paradise circus. (théora)   paradise circus. (théora) EmptyDim 3 Nov - 16:52

Son visage devient étoile, il me réchauffe de l'intérieur, illumine le chemin obscur de ma vie. Ça réchauffe aussi les pierres froides du mur que j'aperçois.
Bref tout le monde y gagne.
- Oui bien sur ! Tu sais que tu peux faire comme chez toi.
Mais je ne sais plus comment faire dans les maisons moi madame, c'est grave ? Dans les appartements, les hôtels, même dans les chambres de bonne. Ça doit bien faire mille ans que je n'ai pas posé le pied dans un vrai chez soi. Parce que j'ai fui ma grange d'Azur, ma minuscule chambre à moquette bleu ciel, et parce que depuis ça plus personne ne me veut à sa table.
Sauf Sephora.
Plus tard je la prendrai dans mes bras pour la remercier, pour lui dire bonjour, pour m'excuser, pour tout, pour rien, juste histoire de.
Mais pas tout de suite.
Tout de suite, j'entre dans l'appartement. M'étonnerait que tous les appartements soient comme ça, on dirait un château miniature. Et le cap du seuil d'entrée passé, je reste en plein milieu, intrus dans ce joli tableau. J'ai peur de salir le carrelage avec mes semelles dégueulasses, de me cogner aux meubles, de me réhabituer à l'environnement du "chez-soi" et de recommencer la dépression en rentrant au métro. De me jeter sur le frigo si elle m'y emmène, de courir tout habillé dans la douche.
J'ai peur d'avoir l'air d'un animal, ce que j'ai dû devenir, puisque y a que les animaux qui sont pas enfermés dans des maisons.
Un fauve.
Elle parle, Sephora. De choses et d'autres mais je suis ailleurs, parti. Plafond, balcon, travailler, magique, j'entends, avec des verbes et des conjonctions autour évidemment.
Et puis j'entends très distinctement :
- Ça fait du bien de te revoir Théo.
Ça pour le coup ça me file la banane, la banane du temps de Félix, voire de temps encore plus anciens. Ça me tord la peau et me crève la mâchoire, mais ça fait du bien, un sourire, de temps en temps.
Par contre je la serrerai pas contre moi cette fois-là, pourtant le moment aurait été accordé, mais non, plus tard, quand j'aurai l'air moins emprunté pour mériter de serrer dans mes bras l'heureuse propriétaire de ce palace.
- Tu veux du café ou quelque chose d’autre à boire ?
J'ouvre grand les yeux, ça c'est le genre de proposition à me scier en trois.
- Euh ..., un verre d'eau, si tu veux.
Et elle doit penser que c'est bien pauvre tout ça, mais non, c'est riche, l'eau, elle va la prendre en bouteille et ce sera magnifique, d'offrir à mon palais autre chose que l'eau rugueuse des toilettes publiques.
A partir de ce moment-là Sephora commence à s'agiter et moi je dois la suivre, je préfère la suivre plutôt que de rester tout seul ici, je serais perdu.
La cuisine est impeccable bon dieu. Impeccablement impeccable, je m'empresse de ne pas la toucher. Et elle de prendre un verre dans un placard. Chez moi, l'eau on la boit dans les mains, que c'est laid. L'eau coule dans le verre, je la vois dans sa transparence, et je suis tout ému de savoir que c'est pour, mais je ne dis rien.
Moi pendant ce temps j'admire la peau fripée sur les phalanges de mes doigts.
Et j'essaie de ne pas rougir de honte en demandant :
- Tu, tu crois que j'pourrais prendre une douche ? D-deux minutes, just- ... Et après on discutera de toi, et - et j'm'en irais, je, j'm'en irais promis, t'es pas non plus bénévole hein.
Sourire pauvre, pauvre sourire, celui d'un garçon qui vit sous les métros et qui ne se souvient pas de la dernière fois où il s'est douché.
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MessageSujet: Re: paradise circus. (théora)   paradise circus. (théora) EmptyDim 17 Nov - 16:18

Plus détendue, Sephora a ce doux sourire alors que Théotime semble s’extasier au fur et à mesure qu’il découvre son « chez elle ». On dirait un enfant, adorable, touchant. Un enfant qui s’extasie et que l’on tient à prendre dans ses bras. Mais voilà, il semble un peu sauvage, c’est vrai. Et elle ne voudrait pas le voir fuir, franchir la porte d’entrée dans le sens contraire.
- Tu, tu crois que j’pourrais prendre une douche ? D-deux minutes, just- … Et après on discutera de toi, et – j’m’en irais, je… j’m’en irais promis, t’es pas non plus bénévole hein.
La rouquine lève la tête dans sa direction et déglutit. Elle n’est pas vexée, ni blessée par sa réaction. Disons qu’elle est plus étonnée qu’il souhaite déjà s’en aller. Pendant quelques secondes, elle l’implore du regard : non ne pars pas. Pas maintenant déjà. Pas encore alors que les mots restent bloqués dans sa gorge. D’un autre côté, elle s’imagine mal l’enfermer dans cet appartement.
Il lui faut un peu de temps pour finalement acquiescer. Oui, tu peux prendre une douche, après tout, tu peux faire comme chez toi, tu sais. Ça faisait parti de l’invitation permanente du « passe quand tu veux ».
- Prends tout le temps qu’il te faut même.
Sourire de complaisance.
La douche, il ne doit pas la voir souvent, alors les économies d’eau dans l’immédiat, elles ne sont pas à l’ordre du jour. Sephora serait même capable de lui proposer un petit déjeuner on ne peut plus correct ainsi que de lui laver ses vêtements histoire de profiter de sa compagnie pendant un peu plus de temps. Pire encore, elle est prête à faire l’effort d’être le sujet de la conversation aujourd’hui. À charge de revanche.
La jeune femme porte une nouvelle tasse de café à ses lèvres. Pas moyen de lui faire boire de l’eau à une heure aussi matinale que maintenant.
- Je vais te chercher des affaires.
Du moins, un certain minimum. Rappelez vous… Sauvage cet enfant, Sephora ne veut pas le mettre davantage mal à l’aise qu’il ne l’est à cet instant.
Cette fois, elle ne lui laisse pas le choix et l’entraîne de l’autre côté de l’appartement par la main. Une fois dans la salle de bain, de nouveau muette, elle pose une serviette sur bras.
- Tu veux quelque chose de particulier en plus ? Je dois bien avoir un tee shirt…
Assez grand et absolument pas féminin, en prime. Le genre de vêtement qu’elle s’autorise à porter le weekend ou lorsqu’elle broie du noir au fond de son lit.
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MessageSujet: Re: paradise circus. (théora)   paradise circus. (théora) EmptySam 23 Nov - 21:28

Elle dit oui, tu veux qu'elle dise quoi ? Sephora c'est un ange roux, c'est la maman universelle, elle applique au pied de la lettre ce truc à la con : aime ton prochain.
Puis moi faut dire qu'elle m'aime plus que les autres.
Elle propose un t-shirt, Sephora, elle m'offre une énorme serviette, alors qu'elle sait très bien qu'elle pourrait me foutre à la porte, me jeter sur le palier, trempé après la douche, avec rien d'autre que mon cœur pour se serrer, elle le sait très bien, mais elle en saisira pas l'occasion. Et ça change tout.
Moi, je dis non merci pour « quelque chose de particulier en plus » et je m'enferme dans la salle de bain.
La salle de bain, elle fait la taille de notre trou à rats - c'est pas étonnant, on est des rats.
La salle de bain, on dirait qu'elle appartient à une princesse - c'est pas étonnant, Sephora c'est une princesse.
Au milieu des parfums et des shampoings, des brosses à cheveux et des vernis, j'hésite, j'ose à peine respirer l'air de cette pièce-là, pourtant je me sens comme chez moi.
Le pull que je porte, il est à Ondine, je le passe au-dessus de ma tête, il échoue à mes pieds et je me sens mieux, déjà, sans le poids du pull d'Ondine sur moi. Le poids d'Ondine tout court. Le jean, il est à Félix et moi, il est Théolix, lui aussi je l'enlève. Puis le caleçon, les chaussettes rongées.
Dans la douche, je glisse, je manque de me ramasser le crâne sur la pomme de douche. Destin ça s'appelle. Moi je commence à en avoir marre de me casser la gueule tout le temps, métaphoriquement ou pour de vrai, ça me fait des bleus aux bras et aux sentiments.
Mais les bleus, sous l'eau chaude ils disparaissent, ils s'effacent, comme les maux, les mots, y a tout qui s'en va par la vapeur. Je me sens tellement vide tout d'un coup, tellement calme, je me dis que je vais m'effondrer. J'ai plus rien en moi, je m'imagine comme un ballon qu'on dégonfle.
Mais je reste droit sur mes pieds, comme à chaque fois. J'ai arrêté de tomber, moi, je me cogne, je trébuche, c'est tout.
L'eau fait la cascade sur les rochers de mes épaules, s'enfonce dans les creux de mes deux genoux, se glisse entre mes doigts, mes orteils, joue au toboggan sur mon torse, embue mes yeux et mouille mes cils, j'assiste émerveillé au spectacle de l'eau claire sur ma peau. J'en oublie l'eau qui a continué de chauffer et qui me brûle, maintenant. Mes mains sont rouges, c'est tout mon corps qui s'empourpre de joie.
J'envoie une prière une seigneur : bénir Sephora d'Abzac pour toute sa vie. Qu'Il soit toujours là, au-dessus d'elle, pour faire attention à elle.
(Le seigneur = Bob Dylan.)
Je prends un quart d'heure à me laver, que d'eau au final, il est trop tôt encore pour du gel douche. Du Petit Marseillais, ce serait une Révolution, qui sait si je m'en remettrais. Hein.
Alors je quitte à regret la chaleur de la cabine, j'éteins l'eau doucement, je la regarde terminer son voyage sur moi et puis s'en aller. Je lui envoie un baiser mental, à cette eau de douche. Je sais pas si je la reverrais un jour et j'en chialerais presque.
Sephora, elle m'attend, et moi, grand con, je vais à elle, enroulé dans ma serviette comme un petit garçon, comme quand j'étais petit garçon.
- Merci, je lui dis.
Mais c'est pas dit qu'elle comprenne.
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