les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban)
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Sujet: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 21:22
Esteban Camus
nom complet ▲ Esteban Camus. Il s'estime heureux de ne pas avoir de deuxième prénom ridicule, et son nom de famille ? Il attise parfois la curiosité. Et pourtant, il n'est pas lié au célèbre Albert Camus, à vrai dire, Esteban déteste sa plume et s'est tiré les cheveux en lisant la peste. lieu de naissance ▲ Rennes en Bretagne. âge ▲ 38 ans, bientôt la crise de la quarantaine. nationalité ▲ Français. diplômes, études ▲ brevet des collèges, bac +5, il aurait pu avoir un petit quelque chose en plus avec les beaux arts mais il n'a pas su répondre totalement aux critères et en plus d'être arrivé deux mois après la rentrée initiale, il s'est tiré en plein milieu d'année. métier ▲ professeur d'arts plastiques au collège Jacques Prévert, artiste foireux durant ses temps perdus et kleptomane par extension - mais sinon, juste professeur ça ira. statut matrimonial ▲ actuellement célibataire, il a vécu une belle idylle qui a duré plus ou moins cinq ans avant que l'adultère touche sa compagne. Il en garde encore aujourd'hui un goût amer. orientation sexuelle ▲ pansexuel. Les différences ? C'est pour les autres. Comme il aime à le répéter, si ça lui tombe sur la gueule, qu'importe la personne il ne sera jamais dégoûté. situation financière ▲ on ne va pas se leurrer, ce n'est pas en tant que professeur qu'il va pouvoir se rouler sur des billets verts. Il n'est pas pauvre, pas riche non plus, il peut vivre assez bien pour se nourrir lui et ses trois chats, il peut parfois se faire des plaisirs mais jamais rien de mirobolant. idole(s) de vie ▲ en tant que professeur d'arts plastiques, il pourrait vous répondre un artiste quelconque, en tant que fils lui aussi il pourrait baragouiner le prénom de son père, en tant qu'élève un genre de maître yoda et pourtant, pourtant... Il n'en est rien. Esteban n'a pas construit de temple pour Dali, ne sera pas sous les ordres de son père pour le remercier et a déjà oublié le prénom de celui qui lui a donné envie de se plonger dans ce monde. Comme toute personne, il a ses préférences, plus tel acteur que telle actrice, l'enviant parfois comme pouvant le ou la respecter le plus possible, mais de là à dire un modèle de vie ? Il apprécie la sienne telle qu'elle est, pas besoin de rêvasser sur une qu'il n'aura pas forcément. nombre d'amis facebook ▲ n'est même pas inscrit dessus, qu'est-ce que vous voulez qu'il en fasse ? Esteban le trouve certes pratique pour ceux qui veulent retrouver de vieilles têtes mais, inutile pour lui, étaler sa vie sur internet quelle joie. moyen de déplacement ▲ la voiture, ce qu'il a pu douiller pour avoir son permis ! Esteban s'y est quand même repris à deux reprises avant de le gagner haut la main. Maintenant ? Il en profite bien que les bouchons arrivent parfois à lui faire tirer de sales grimaces. Outre mesure il utilise aussi bien la marche mais très rarement les transports en commun. groupe ▲ la javanaise. avatar ▲ Sagamore Stévenin. crédits ▲ titre de victor hugo, les gifs de Sagamore viennent de ma pomme et les autres de tumblr.
dix points sur ton personnage
quel vilain voleur ▲ le mot est tombé comme une bombe sur son visage. Kleptomane. Pas besoin de rendez-vous chez le psychologue du coin avec pas mal de diplômes pour se rendre compte qu'Esteban a un problème, celui de glisser ses doigts dans des poches, des tiroirs, des trousses. Il ne le contrôle pas, il ne se contrôle pas. Pour tout dire, le vol au départ était une petite chose pour attirer l'attention de son père à son égard, qui est devenu par la suite une sorte d'addiction. Il ne peut pas s'en empêcher, et d'ailleurs, il n'est pas rare qu'il se mette à voler ses proches. Bien évidemment, jamais rien de bien conséquent, par habitude ce sont des choses - disons-le franchement - inutiles et c'est plus le fait de chiper qui l'intéresse que de collectionner - bien que techniquement il garde ces dits objets dans une pièce de son appartement, et en plus de trente ans à laisser ses mains vagabonder, ça fait beaucoup. Et puis quitte à être névrosé, parfois, il culpabilise de ses petits larcins. le coeur en vrac ▲ Esteban parle de malchance, de coup du sort, d'une poisse maladive. Des antécédents cardiaques dans la famille et il a fallut qu'à 30 ans on lui trouve un dysfonctionnement au niveau du coeur - ce qui ne va clairement pas avec ses habitudes d'Arsène Lupin. Cardiomyopathie qui entraîne des douleurs au niveau du torse, parfois des essoufflements mais surtout des malaises. Combien de fois s'est-il réveillé dans un lit d'hôpital alors que juste avant, son coeur venait de trop s'emballer ? Il ne faut pas pousser Esteban à bout, éviter les situations qu'il trouve trop stressante au possible - bien qu'elles soient rares, on ne sait jamais. Par chance, il n'a pas encore besoin d'un stimulateur cardiaque mais depuis dix ans il suit un traitement qui parfois lui arrache un peu de frayeur. Un jour il voit ça tout blanc, un autre tout noir, son coeur le rend complètement cinglé. tout est plus beau avec des lunettes sur le nez ▲ heureusement pour lui ce n'est pas tout le temps. Porter des lunettes donne un certain air, plus sérieux ou moins selon la personne, et pourtant chez Esteban c'est un accessoire de la panoplie professeur exemplaire qu'il apprécie. Oh, bien évidemment, ils ont des verres, ce ne sont pas des lunettes postiches mais que généralement il porte seulement pour ses cours, pour se perdre dans un bouquin ou quand sa tête lui joue des tours. la cigarette tue ▲ que c'est mal de fumer, c'est ce que tout le monde lui dit. Il n'a pas vraiment commencé jeune, à tout juste 22 ans il tenait sa première cigarette et s'étouffait à moitié avec. Une taffe en entrainant une autre, il est devenu un fervent admirateur du bâton de cancer. La cigarette tue, la cigarette mord, et il le sait mais bon, ce n'est pas demain la veille qu'il arrêtera. Il su tenir plus de dix ans sans que ses poumons passent l'arme à gauche, autant continuer - tout une philosophie de vie, quand y'en a presque plus et bien y'en a encore ! victor hugo, ce héros▲ la lecture n'est pas une chose innée chez Esteban. A vrai dire, dans sa vie il a dû seulement lire les bouquins imposés durant ses études, peut-être un peu plus friand de ce cher Molière, certes. Pourtant, Victor Hugo a su faire naître chez lui un intérêt plus que palpable et ses livres de chevet se résument à lui. L'homme qui rit l'a d'ailleurs marqué autant par ses phrases que son histoire, on ne peut pas dire qu'il le voit comme un modèle de vie non plus mais, a un grand respect pour ce qu'il a fait et sur l'impact qu'il peut encore avoir. bordélique synonyme d'imaginatif ▲ le foutoir, mais loin d'être une décharge, son appartement se résume à un bordel rangé. Quelques pinceaux perdus, un peu de peinture sur les murs, des feuilles volantes, rien n'est en ordre, et le pire ? C'est qu'il arrive à bien s'y retrouver, même mieux que tout est bien. Il n'est pas non plus sale au point d'en oublie de décrasser le sol, une fois par mois il s'oblige un grand nettoyage de printemps - mais le lendemain la tornade Esteban est repassée par dessus. quand y'a pas l'anglais, y'a l'espagnol ▲ oh l'anglais, cette bête noire perdue dans l'ombre. Cette langue pour lui, c'est du chinois, oh certes, il sait se présenter, dire bonjour et au revoir, le minimum administratif, mais lui demander de se la jouer traducteur ? Alors là, c'est une autre histoire. Il n'a jamais vraiment compris cette langue - trop compliqué selon lui - et n'a jamais eu envie d'en savoir plus. Ce n'est pas pour autant qu'il est un crétin en langues, l'espagnol a été une véritable révélation et même au niveau rythmique de la langue il sait y faire. Que demander de plus ? Ce n'est pas la langue du futur, mais, c'est déjà ça de gagné. Puis, on va pas se le cacher, le roulage des r c'est tout aussi beau que les bonnes manières so british. musicien dans la peau - mais pas trop ▲ étant enfant, Esteban était une véritable boule de nerfs sur pattes. Toujours à courir partout, à vouloir essayer ceci ou cela, on peut dire qu'il est passé par à peu près tout les sports et la seule chose qu'il a su tenir assez longtemps a été la guitare. Loin d'être quelque chose qui calme l'énervement, il a trouvé en cet instrument quelque chose de beau, de poétique mais ça, c'était sur l'instant, il a arrêté du jour au lendemain sans aucune raison. Aujourd'hui ? Il a encore ses bases et se débrouille plutôt bien lorsqu'il daigne bien vouloir se concentrer. jamais deux sans trois ▲ ah la solitude, elle fait faire des folies et en peu de temps, Esteban a accueilli trois chats chez lui. Les prénoms ? Saluez l’originalité du maître des pinceaux, avec le tout premier du trio Am, le second Stram et le tout dernier Gram. Des boules de poils qui lui tiennent à coeur, il déteste les chiens et trouve les chats bien plus classes. Seul petit bémol qu'il reproche à ces bestioles c'est leurs griffes qui parfois se plantent dans des toiles - bon, pour ne rien cacher ce n'est pas comme s'il était le nouveau Picasso -, mais tout de même ! Généralement, il devient véritablement gâteux devant eux et ne cache pas franchement sa niaiserie devant leurs oreilles velues. il aurait pu être le meilleur dresseur ▲ il y a toujours ce petit rêve de gosse qui reste au fond de nous, et au fond de l'âme d'Esteban réside celui de devenir dresseur de rapaces. Peut-être stupide, et d'ailleurs il est trop tard pour changer de métier, mais les oiseaux fascinent l'homme qu'il est aujourd'hui et pour tout dire, il désirerait plus que tout au monde avoir une chouette effraie dans son appartement - chose saugrenue mais qui sait, un jour peut-être que. C'est une chose qu'il garde pour sa pomme, c'est son jardin secret et rares sont les personnes à savoir son désir profond de murmurer à l'oreille des faucons.
l'heureux propriétaire
prénom ▲ Laura. pseudo ▲ écrire ici. âge ▲ 17 ans au compteur. pays ▲ France dans le beau coin qu'est l'Alsace. j'ai connu ollp grâce à .. ▲ qui ne connait pas ollp j'ai envie de dire ! Mais concrètement je dirais que c'est le Marty international qui a fait pencher la balance. suis-je un ex-membre, un dc, ou un petit nouveau? ▲ un véritable petit newbie ! l'type de lien que je préfère ▲ ceux qui font avancer mon personnage généralement, j'aime les situations pas vraiment simplistes comme se faire un café entre meilleur pote, plus y'a de loose, mieux j'me porte. ma chanson du moment ▲ j'dirais heaven de depeche mode. ma fréquence de connexion ▲ tout les jours par habitude, la fréquence de RP reste régulière mais après, tout dépend évidemment. et mon super mot d'la fin .. ▲ j'en ai marre des moustiques. recenser son avatar ▲
Dernière édition par Esteban Camus le Ven 23 Aoû - 15:00, édité 16 fois
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 21:22
L'HISTOIRE DE MA VIE
► esteban, 12 ans. Je l'ai eu, je l'ai entre mes mains cette broche ! Elle me faisait de l'oeil depuis que maman l'a fièrement posé sur son bureau, impossible à avoir que j'me disais, la belle affaire ! Entre mes mains, elle brillerait presque de mille feux. Les choses se perdent beaucoup dans la maison, mes parents se sont même mis à croire que la femme de ménage en était la cause. Ils sont pourtant loin de se douter que je suis le voleur aux doigts habiles pour son âge. Cette lubie m'est venue il y a deux ans, je voulais impressionner cette figure paternelle qui maintenant n'existe plus complètement là. Grand, les cheveux foncés, les yeux bleus, celui qui me faisait office de modèle étant petit, en plus de tout ceci très bon chirurgien, mais trop préoccupé par ses patients que par sa propre famille. Dans tout les cas, j'ai appris à ranger ses vieilles rides dans une boite bien placée dans mon crâne, que j'ouvrirais seulement si je me sens d'humeur difficile. La chambre de mes parents est grande, si grande, combien de fois est-ce que je me suis imaginé dans ce lit gigantesque ? Trop, à un point tel que je tire une grimace dépitée en revenant dans ce qui peut me servir d'endroit repos. La petite broche est dorénavant dans ma poche, première phase est assez facile, à vrai dire, c'est la plus simple, il reste encore de passer la chambre et courir jusqu'à la mienne. Là, par contre, tout vient à se compliquer. Maman me connait bien, trop même je dirais et sait que lorsque je me rue dans une pièce, c'est pour y cacher quelque chose. Une fois, je me suis fait avoir alors que je lui piquais un stylo, bien évidemment, à cette période, je pouvais prétexter que tout était pour faire un tour de magie époustouflant - résultat des courses, j'ai dû lui montrer et le fiasco fut total. Mes sourcils se froncent en y repensant et, la porte ouverte, je zieute de gauche à droite, de droite à gauche. Bien. Personne en vue, maintenant, c'est le moment nerveux, celui qui me donne l'impression de voler, d’irréalité. Mes jambes bougent, à vive allure, j'y suis presque, j'y suis presque ! Mon sourire s'agrandit, mais, comme toujours, je pense trop rapidement. Je me heurte à une personne de taille. Alice, la femme de ménage, grande, les yeux vairons et une chevelure dorée. Ayant foncé sur son corps, je me rattrape un tant soit peu par terre, mais, maintenant, je suis pris au piège - et maman a dû lui parler de mes habitudes qu'elle dit douteuses. « Où vas-tu comme ça jeune homme ? » Maman ne trouve pas le temps de faire la poussière dans la maison, du moins, c'est ce qu'elle répète - mais, moi ça ne me dérange pas, Alice est gentille, elle m'écoute et même si parfois ses mots sont durs, elle a toujours raison. Passant une main timide sur ma nuque pour la gratter, je me sens encore plus petit, c'est dingue ce que la terre peut être basse. « Je vais, je vais... Et bien, je vais dans ma chambre ! » Mon coeur menace d'exploser, mon sang ne fait qu'un tour. Elle n'est pas stupide, et si je pourrais avoir un certain dégoût à me faire attraper, je préfère en rire. Ses prunelles me scrutent, de haut en bas, de bas en haut, à en juger par son petit rictus, elle a remarqué quelque chose. Je ne me suis toujours pas levé, je n'ose pas bouger d'un pouce. Alice s'accroupit face à moi et prend cet air si particulier qu'elle peut avoir, je n'arrive pas à mettre de mot sur ce sentiment. Blasée. Oui, ce doit être ça, ou amusée ! « Pour courir comme un sportif professionnel, tu dois avoir quelque chose d'urgent à faire, ou... à cacher, je me trompe ? » Et zut. Si nous étions dans un cartoon, mes yeux sortiraient de leur orbite. Je ne comprends pas. Suis-je donc si prévisible ? Si facile à attraper ? Tout en continuant de gratter la fine couche de peau sur ma nuque, un soupir me traverse les lèvres et j'ajoute en couinant. « Mais, comment tu fais ?! » Alice doit avoir un secret, je ne sais pas lequel, celui de pouvoir lire dans la tête des gens ou quelque chose de ce type. La vieillesse doit y être pour quelque chose, c'est vrai, dans les livres, le plus clair du temps les sorcières sont celles qui ont un bon vécu. Je ne sais pas, je n'y comprends rien, mais, si jamais elle me le demande, je vais être obligé de devoir lui rendre la broche. Déglutissant difficilement, elle plisse ses yeux et arbore un sourire. « Je te connais bien, assez bien pour savoir que tu as quelque chose dans la poche de ton pantalon. » D'un coup je me redresse et passe mes mains dans mes poches. Trop tard, c'est terminé pour moi, je vais me faire jeter en prison et pas des moindres. Du moins, on ne dirait pas, elle n'est pas énervée, même pas remontée contre moi, elle parait même admirative ? C'est impossible, c'est tellement simple de passer dans une pièce pour prendre un objet. A son tour, elle se lève et passe ma main dans ma tignasse, l'ébouriffant. « Mais, comme toujours, je n'ai rien dit, rien vu, rien entendu ! » Alors que ma main est prête à lui rendre la broche, je penche ma tête sur le côté, à quoi est-ce qu'elle joue ? « Mais j'ai - » « Rien dit, rien vu, rien entendu ! » Et comme si la scène ne venait pas de se dérouler, elle continue son chemin dans le couloir sans me lancer un seul regard. Je ne comprendrais jamais ce qu'il peut se passer dans la tête d'une adulte, surtout celle d'Alice, c'est compliqué, mais, je peux m'estimer heureux qu'elle me porte un peu dans son coeur. C'est mal de voler, je sais, mais, au moins, grâce à ça, je peux dire que j'existe.
► esteban, ans Clément Lacarte. Un carte d'identité tout ce qu'il y a de plus standard, une photo de jeunesse, la date de naissance, le lieu, et le prénom qui se glisse sous mes yeux comme un affront, comme un mensonge. Clément-Olivier Lacarte. Ne devrait-il pas y avoir Marty-Olivier Thomas ? Marty, Clément, Clément, Marty. Qui est qui, qui est quoi ? En analysant un peu plus cette petite photo, je peux le reconnaitre même si les années ont su le changer. C'est lui. Lui sans être lui. Une personne que je ne connais pas, que je ne sais pas. Ma pauvre horloge fait tourner ses aiguilles, je sentirais presque ma peau se faire transpercer par l'une d'elle. Je ne comprends plus rien, je ne sais rien. Déglutissant, je fronce mes sourcils, je n'ai pourtant pas une quelconque hallucination, je ne suis pas fou. La main dans son porte-feuille, j'en oublie même de prendre l'argent que je voulais au départ avec son accord. A la place, j'enlève cette carte et la fixe pendant plusieurs secondes. Le silence des morts parait plus agréable, l'est même d'ailleurs, plus que celui qui présage une avalanche de sentiments contradictoires. « Tu t'fous d'moi ? » Est la seule phrase que j'arrive à baragouiner derrière mes traits d'un seul coup durcis par la panique. Marty se retourne, fixe le morceau que je tiens entre les mains, et d'un seul coup, son teint au départ rosé vire à un blanc livide. Devenu cadavre en l'espace de quelques secondes, ses yeux s'écarquillent et c'est avec la plus grande nervosité au monde qu'il glisse sa main dans ses cheveux courts. Sa bouche s'ouvre, se ferme, de manière répétitive. Une attente aussi longue qu'un verdict à l'hôpital. Toute ces choses qu'il a pu me dire, ces souvenirs un peu trompeurs, ces fourberies, du faux ? Seulement de la moquerie ? Clément. Clément Lacarte. Je ne vois que cela, que ces quelques lettres, ce prénom, ce nom, ce qu'il n'est pas, ce qu'il n'a jamais été et pourtant, aux yeux de l'autorité il est un autre. « C'est... c'est pas ce que tu crois, j'peux t'expliquer. » Des explications ? J'ai cette sensation dégoutante dans l'estomac, une impression de déjà vue mais dans les couples qui se brisent. Nous n'en sommes pas un, et au fond, ce doit être pire que de se dire qu'un meilleur ami n'est rien d'autre qu'une page blanche, le beau faussaire, le vrai, pas celui qui préfère les tableaux, non, je parle du comédien, celui qui vient à se créer toute une vie, toute une identité. Une boule se forme dans mon estomac, frappe contre ma peau, me fait grimacer alors que mon bras ballant préfère se crisper. Je tiens toujours cette carte, je tiens sa vie, un peu de son destin, cette épée de Damoclès qui pendait au dessus de sa tête, et qui maintenant vient de lui couper la tête. « C'est quoi c'bordel Marty ? Ou .. j'devrais dire, Clément Lacarte ? J'sais pas moi. T'es qui au juste ? » La question véridique, celle que maintenant je vais me poser ces prochains jours, mois, années, je ne saurais vraiment le dire. Comment lui imaginer une autre vie que celle qu'il a pu me dire ? Me répéter ? Ses expériences ? Ses morales que je considérais comme stupides ? Je me rapproche, un pas, puis deux pour le mettre face à quoi d'ailleurs ? Son passé ? Qui pourrait vraiment le dire, pas moi, mais lui, oui. Mes dents grincent, l'impatience me prend directement aux tripes. Réponds. Réponds. Réponds. Réponds. « Je... Clément, c'est Clément au début. Mais... Je peux t'expliquer, te formalise pas, c'est pas contre toi.. » Je ne lui laisse pas le temps de terminer sa phrase, ou même d'en commencer une autre. L'adrénaline me monte au visage, ma peau vire rouge, mes yeux changent, mon visage tout autant. L'énervement que je ne veux montrer, celui que je préfère à cacher, et pourtant, aussi cette hésitation qui me tape dans les oreilles, encore et encore. C'est trop tard, je ne murmure plus, je ne parle plus, j'en viens à gueuler tout en balançant sa carte sur le bureau. « Merde Marty. MERDE. Combien de temps qu'on s'connait ? Des mois qu'on s'supporte, pourquoi tu m'as rien dit ? Pourquoi tu .. putain si ça s'trouve tu m'as mentis sur vraiment toute la ligne. » La machine infernale du docteur Camus en quelques mots. Commencez par avoir une sale nouvelle, une révélation qui peut faire écarquiller vos yeux, continuez en laissant votre coeur battre comme si sa vie en dépendait, par la suite votre estomac finira par vous jouer de sales tours, et pour finir ? Il ne vous reste plus qu'à hurler, avec ce doute qui gratte les parcelles de votre peau. « Écoute je... Il est possible que tout ce que je t'ai dit ne soit pas exactement vrai, mais... Mais tu voulais quoi, à la fin, qu'un beau jour je me pointe et que je te dise que... Que je te dise tout ? Je pensais pas qu'on se... Qu'on se serait apprécié autant. Si... Si je pouvais recommencer... Mais, comprend, TOUTE la fac pense des choses... Fausses sur moi, et ça a été trop dur de tout t'avouer, j'ai jamais réussi. S'il te plait. Ca ne change rien, t'es toujours... Mon meilleur ami. Et je ne t'ai jamais menti en ce qui concerne... Mes sentiments. » Possible. Possible. Ce mot transperce mes tympans comme un gros rien. Possible signifie qu'effectivement tou n'as été qu'une belle injustice, qu'une belle connerie lancée à mon égard, et il ose encore me parler de sentiments ? Même lui, même moi, nous en avons comme ceux qui se battent chaque jour pour se lever le matin, se trouver une raison de respirer. Mensonge, mensonge, partout. On coupe la langue aux menteurs pour qu'ils arrêtent de crier au loup alors qu'il n'y a rien. Pourtant, un jour ils se font avoir par leurs démons. Je peux voir le sien, au dessus sa tête, une ombre fadasse au ricanement digne d'une hyène. Un sourire, carnassier, animal. Il ne fera qu'une bouchée de son âme. Marty, Clément, qu'importe, il perd seulement pieds, comme si le monde s'effondrait sous ses jambes et qu'il ne peut pas se raccrocher au bord. « Meilleur .. meilleur quoi ? Là je, comprends pas là, je franchement ça .. on dirait un vieux grésillement, un truc qui sonne faux. J't'ai jamais mentis Marty .. Clément, j'sais même pas comment t'appeler. J't'ai tout dit sur ma vie, absolument tout et toi tu m'sers sur un plateau des bobards ? Tu veux que j'le prenne comment ? Avec le sourire ? SOURIONS ALORS. Ouais, je rigole, mais tellement j'en perds mon haleine. Tu veux que je comprenne quoi au juste ? Que le type en qui j'ai le plus confiance, pour qui j'me couperais une main n'est pas celui que j'crois ? » J'en viens à vraiment en rire. De manière sèche en coin alors que mes yeux se lèvent vers le plafond. Je n'y crois pas. Pourtant, j'y crois. Mais, je ne peux pas y croire. Je n'y arrive pas. Un tel condensé de comédie, est-ce seulement humainement possible ? Clément Lacarte doit en être le parfait exemple et démontrer qu'impossible ne doit être dans le dictionnaire. Je passe mes mains sur mon visage, je crois qu'elles tremblent par dépit. Et je fais les cent pas sur cette petite surface, dans son appartement, comme un crétin cherchant un plan B, mais cette fois-ci, il n'y en a plus. Je suis seul. L'un, l'autre, tout ça, ça n'existe plus. « Je peux tout te dire. La vérité. Je peux tout te raconter, absolument tout. Je suis juste devenu quelqu'un d'autre parce que... J'aimais pas ce que j'étais. Et... Laisse-moi une chance de t'expliquer, rien qu'une seule. Moi aussi, je ferme les yeux depuis un bout de temps, tu ne m'as pas dit toute la vérité, arrête, arrête de jouer la victime. Voleur. J'ai des tords, et je te demande vraiment de... Excuse-moi... » Voleur. Ce mot parait futile, mais, il vient de mettre un doigt sur quelque chose qui me touche depuis maintes années. Combien d'objets inutiles lui appartenant j'ai dans cette petite boite cachée dans le fin fond de ma chambre ? Je ne saurais même pas le dire. Pourtant, même si mes doigts bougent, même si c'est l'excitation du moment, la pulsion du crevard qui me guide, il y a seulement ce détail qui n'a pas été nommé. Par honte je suppose, par choix. Et ceci, il n'avait pas besoin de savoir, mais, il le sait. Alors, c'est ça le but du jeu ? Mettre les cartes sur table ? Déballer tout ce qu'il y a à claquer sur le sol ? Brisons la vaisselle, contre les murs, contre le sol, même le plafond, après tout, je n'ai plus rien à perdre, puisque sans le savoir, je l'ai déjà perdu, depuis longtemps. « Voleur .. voleur, ouais, mais pas menteur. Je connais rien de toi, je connais plus rien, que dalle, comme si tout avait été effacé d'un claquement de doigts. Ton caractère c'est p'tête même pas toi, j'sais pas devant qui j'suis .. un étranger. » Le mot véridique éclate enfin au grand jour, il ne manque plus que le superbe journal et le gros titre en rouge. L'inconnu vient d'être démasqué, ses belles paroles étaient factices, il devra passer devant le juge monsieur vérité d'ici un petit lapse de temps. Mon corps commence à perdre de sa force, une claque mise dans la figure, même un poing, je suppose que je ne verrais le bleu que demain - ou dans deux jours avec de la chance. Les prunelles de Marty virent à deux petits lacs, je vois de l'eau perler dans le coin de sa peau, à la limite de s'effondrer alors qu'il cesse de cacher ce qu'il ressent. L'effroi qui en ce moment, porte mon prénom. « J'ai les mains baladeuses ouais, j'le contrôle pas, j'dois être malade ou simplement taré, j'sais pas. Mais, j'joue pas avec les gens, j'm'invente pas une vie pour me donner bonne conscience. » J'ai planté le couteau, la graine de douleur pour faire son arbre et laisser ses fruits pourrir tout doucement. Ma salive passe mal le long de ma gorge et pour tout dire, j'ai cessé de marcher, j'ai essayé de ne plus penser, de relativiser. C'est trop tard, trop tard pour tout, trop tard pour se racheter par ses phrases maladroites. Parler, parler, toujours parler, pourquoi ne pas agir ? Tout ceci, il aurait bien pu me le dire dans le blanc des yeux il y a de cela plusieurs mois, histoire de ne pas tout foutre en l'air. C'est le bouquin de ma vie que j'écris, je compte arracher cette page, ces pages qui auront fait un chapitre complet. Dans toute oeuvre, et c'est bien connu, les fins sont des retournements de situation, des drames. Je n'en suis pas au bord du gouffre, simplement au bord de l'inconscience. Mes yeux s'écarquillent face à la scène qui se déroule sous mes yeux, ses jambes ont lâchés prise, les genoux à terre, elles roulent sur ses joues ses belles larmes, roulent, roulent, et à ne pas en douter, il ne doit plus voir grand chose. Ses mains se plantent sur le sol, il s'y raccroche, s'y rattacche. « Je pensais pas... J'ai jamais su, je voulais pas faire de mal à qui que ce soit. Je... Je parle pratiquement plus à mes parents à cause de ça, et... T'es la seule personne en qui... C'est pas parce que j'ai pas habité là ou là et que j'ai pas fait si ou ça que tu me connais pas... C'est... Des détails... MAIS VOLE-MOI TOUT CE QUE TU VEUX J'EN AI TELLEMENT RIEN A FOUTRE. Je... Je te donne mon appart, si ça te fait plaisir, mais... S'il faut que je m'excuse un million de fois, je le ferai, t'es pas un étranger. » La douleur vient de se retourner contre moi et me fait éviter son regard, son visage qui implore, son corps qui se met à supplier de ne pas le laisser tomber. Qui peut s'estimer proche de lui ? Personne. Je devais être la seule personne à bien vouloir lui parler, ou du moins, à le supporter tout ce temps. Mais, peut-être que son caractère n'est qu'un mensonge, que tout ceci n'est qu'une mise en scène. Le méchant, le gentil, qui est le héros dans tout ça ? Je n'ai pas les épaules pour, lui non plus. Ce doit être une pièce révélant une morale, oui, tout bonnement. « Des détails.. Des détails, tout ces trucs de confidences, tout ce que tu m'as balancé sur ton passé, les conseils que j't'ai filé, c'tait que du vent, QUE DU VENT. J'ai l'impression d'avoir été pris pour le con d'service, tout c'quon a fait ensemble, toute ces conneries, ces fous-rires à deux balles tu ... Merde. » Mes pas me rapprochent de la porte, j'hésite, pour en fin de compte ne plus me poser de question. Ouverture, cassure. Ce mais qui n'attend qu'à venir, le moment clef de l'histoire. « Qui que tu sois .. j'ai plus rien à t'dire. » Dernière réplique. Silence. Rideaux.
Une journée longue, une nuit qui le sera tout autant. J'ai mal, mal à l'estomac, mal au coeur, mal partout. Ma démission, mes paroles ont été annoncées devant ceux qui n'attendaient que cela. Au fond, Marty a du être cet élément déclencheur qui a su me faire comprendre au ma place n'était pas ici. Les beaux arts, au départ un simple amusement et un étonnement lorsque ma candidature a été retenue. Pourtant, plus les mois se sont écoulés et moins je me suis sentis en phase avec ce qu'ils pouvaient m'apprendre. Trop décalé, trop à côté de mes pompes, ou totalement hors sujet. Bon nombre de fois les professeur m'ont répétés de partir, une profession en arts plastiques qui sait ? Professeur pourrait me convenir, et si au départ j'en riais, je peux dire maintenant que j'ai envie d'en vomir. Je regrette, bien des choses. Des rencontres, des souvenirs qui seront la case des bons - ou à jeter - et des débuts plus que douteux. Il a fallu que je tombe sur un autre, que mon colocataire ne soit pas si ordinaire que ce que j'aurais pu penser. Bizarre, étrange, bon nombre de ragots ont circulé à son sujet. Mais, moi je sais. Pas eux. Prévenu à l'avance que rien ne serait simple, c'est n'est pas de sa faute, il est né comme ça, ne sait pas pourquoi mais reste présent. Un syndrome dont le nom m'échappe, une sorte d'autisme qui en contrepartie l'empêche de mentir. Les vérités qu'il a pu murmurer m'ont fait rire comme étonné. Et dans ce monde de faux semblant ou tout le monde s'insulte, tout le monde se déteste et se ment, il ne doit pas être à sa place. A cette heure précisément, je peux me dire qu'il a été le seul à ne pas me vouloir de mal, à ne pas me mentir sur sa vie qu'il m'a expliqué plus qu'en détails, dans les moindres coins et recoins même. En y repensant, j'ai même ce sourire un peu idiot collé sur le visage. Amusant, Timothy peut aussi faire naître de la peine, des sentiments qu'il a du mal à interpréter, il ne lit pas sur le visage, alors il préfère demander. L'appartement s'ouvre à moi, bien vite la lumière est allumée et me ruant dans ma chambre, je passe mes mains dans mon armoire pour y récupérer le peu de vêtements que j'ai. Partir sans prévenir n'est pas une bonne chose, mais, je crains de le voir défaillir entre mes doigts, se dégager comme du sable - et son amitié ne m'est que trop précieuse. La tête ailleurs, je cherche ma valise dans un coin et par la même occasion, la cogne contre le bureau. Coincée, un peu, pas beaucoup, mais juste assez pour me faire grogner et certainement réveiller - ou attiser la curiosité - le diseur de vérités. « Tu fais tes bagages. Mais je ne comprends pas pourquoi. » Bien évidemment. Tout en continuant de pester contre ma propre personne, je me fige d'un seul coup tout en essayant de réfléchir à comment aborder le sujet sans le brusquer. Les habitudes d'une personne atteinte de ce syndrome sont essentielles à sa vie, il suffit d'une petite étincelle pour que la bombe éclate, et quand elle explose, ce n'est jamais bien beau à voir. Une fois, une seule fois j'ai eu la malchance de le voir dans un état de panique, d'énervement complet. Je ne me souviens plus du sujet, du pourquoi du comment, mais j'ai préféré m'en remettre à une personne sachant gérer la situation. Je connais les rudiments pour l'empêcher de se laisser aller à nouveau, mais seulement depuis quelques semaines. Pinçant ma lèvre inférieure d'un coup sec, je me met à plier quelques vêtements pour ensuite les mettre dans la valise grande ouverte. Un coup d'oeil lancé vers lui me scelle indirectement à son âme, lui raconter des histoires équivaudrait à casser cette confiance que j'ai eu bien trop de mal à avoir. Haussant les sourcils, j'aborde un léger sourire. « J'pars Timmy. Je ... ouais, j'ai pas ma place ici. Des mois qu'on m'répète que j'suis pas fait pour les beaux arts, trop décalé, pas assez talentueux, je sais pas du tout mais... mais .. » Ma main libre se glisse sur ma nuque, la gratte, petit geste nerveux incontrôlable et l'espace de quelques secondes, j'ai évité son regard qui je le sais, me scinde l'esprit. « Et hm, j'crois qu'il faut que j'les écoute pour une fois. » Et il y a aussi ce petit type, cet homme qui était derrière moi comme devant moi, celui qui a joué, qui a été la goutte qui a fait déborder le vase. Marty, il le connait autant que moi, et je ne peux pas lui infliger cette chose, pas à lui. Un jour peut-être, mais pas maintenant alors que je peux voir à travers son torse son pauvre coeur s'emballer. L'expression perdue, comme un gamin qui vient de lâcher la main de sa mère dans un grand supermarché, il secoue légèrement la tête, fronce les sourcils. « Mais... mais tu ne peux pas partir. » Son attention valdingue entre la valise et moi, entre moi et la valise, puis vice-versa. Faire le lien, comprendre qu'un jour les habitudes humaines se finissent, même si l'envie n'y est pas, même si la petite voix proteste durement. « Ils ne peuvent pas faire ça, ils n'ont pas le droit. Et toi non plus, tu ne peux pas partir, pas maintenant, c'est ta chambre ici, maintenant. C'est ta chambre, pas celle de quelqu'un d'autre... » Le début de la fin. Se prendre une telle nouvelle dans la figure ne doit pas faire plaisir, inconsciemment, je me suis mis à espérer qu'il ne dirait rien, qu'il hausserait les épaules et me dirait une bonne continuation, espérant le meilleur pour moi. Je ne devais pas en attendre autant de sa part, c'est déjà trop demander de lui dire de passer outre et de retourner à ses occupations. Il ne pourra pas. Timothy perd de sa confiance - et à vrai dire, je me demande s'il en a une par moment - et me fixe. Impuissance, incompréhension. Chiot avalé par une pluie battante cherchant du réconfort. Je ne peux pas lui en donner, un autre prendra la relève, mais ma main ne sera plus aussi proche de la sienne qu'au départ, elle s'éloignera au fur et à mesure. Je ne pense pas avoir marqué sa vie à un point où il ne pourra plus en dormir, je n'en crois rien, et si ceci est vrai alors je mettrais ce voile sombre sur mes paupières pour avoir une obscurité complète. Je souhaite partir sur une autre image, sur un autre enchainement de notes. Mais, dans la musique comme dans la vie, parfois il y a de petits cafouillages. « C'est .. c'est mon choix, j'crois qu'ils approuvent même ma démission, j'dois pas être une perle ou quelque chose du genre. » Mon visage lui arrive à se détendre, alors qu'à l'intérieur tout panique, tout se met à brûler. Je vais finir en un petit tas de cendres face à lui. Il faut savoir choisir ses mots, y aller de manière à ce qu'il comprenne bien la situation, sans pour autant oublier sa particularité qui fait de lui le jeune homme qu'il est. Laissant mon bordel là où il est, je me rapproche un peu de lui pour l'obliger à me concentrer sur mon visage, pas autre chose, pas imaginer des films, pas le pire, pas se voir dans un futur morne. « C'est pas contre toi, ce sera jamais contre toi j'te le promet. C'est juste que je sers à rien ici, je veux pas faire seulement office de présence, ce serait ... gaspiller de l'énergie pour une récompense que j'aurais pas. Cette chambre pourra être celle de quelqu'un d'autre, quelqu'un même de plus supportable, de ... mieux ? » Lui certifier que la faute n'est clairement pas la sienne peut aider, mais jamais totalement. Il y a une chance sur deux pour qu'il ne se sente pas fautif et je redoute l'usine en place dans sa tête, elle doit surchauffer, chercher à comprendre les informations mais mal les assimiler. Et le pire dans tout ça, c'est qu'il ne peut rien faire de plus que s'exprimer. « Je.... je ne veux pas quelqu'un d'autre, je ne veux pas que quelqu'un d'autre habite ici, je ne veux pas... » Timothy rigole sèchement, tremble, recule d'un pas qui m'impose une évidence que je voulais renier. « Pas contre moi ? Pourtant ce départ précipité, ce n'est pas contre quelqu'un d'autre. Tu n'aurais jamais du venir dans cette chambre, et maintenant que tu y vis, tu veux partir ?! Et ce n'est pas contre moi ?! Je ne comprends pas. Je ne comprends pas pourquoi tu t'en vas aussi subitement, presqu'en pleine nuit ! » Jetant d'un coup le petit objet qu'il avait entre les doigts, je ne vois plus des mains, mais des poings formés qui se posent au niveau de ses tempes. Ce n'est pas bon, pas bon du tout même. La première phase de la crise de panique à la manière Duceau, éprouvante, difficile à gérer, mais il faut savoir dès le début prendre le dessus, rassurer, le plus possible. Comme seule manière de pouvoir le contrôler un tant soit peu et l'empêcher de se faire du mal, je glisse mes mains sur ses avant-bras les serrant tout juste pour qu'il se concentre sur moi, seulement moi, pas ce qui nous entoure. Faire un vide, et surtout ne pas laisser sa nervosité prendre le dessus. « Tim ... Tim reste calme d'accord ? C'est pas contre toi, t'es même le seul vrai ami que j'ai ici. Mais, j'ai pas le choix, je peux pas rester. J'peux parler à l'administration pour que .. ça redevienne comme avant pour pas qu'un autre type prenne ma place et que tu puisses respirer. Calme-toi s'il te plait. » Garder un contrôle complet, ne pas se laisser prendre au jeu qu'il lance sans le remarquer, ne pas céder. Ce n'est pas un caprice pourtant, c'est une souffrance qui je suppose doit être bien réelle chez lui. C'est son train-train quotidien et à ma venue, je pense avoir chamboulé bien des choses dans son existence comme les heures bien précises où il devait faire ceci ou cela, comme en me permettant de peindre des murs qui de base étaient blancs. J'aurais pu en rire hier, aujourd'hui rien n'est moins sûr. « Je peux te promettre sur tout ce que j'ai que ce n'est pas contre toi, d'accord ? Crois-moi .. Tim inspire, expire, s'il te plait.. S'il te plait... » Une promesse enfantine, qui j'ose à l'espérer fera son effet. Une grimace se glisse sur mon visage, c'est de l'inquiétude avec un mélange de, de futur regret je suppose. Sa respiration tape contre ma peau, sifflante, il dérape. Ses dents se serrent, ses jointures deviennent de plus en plus blanches. Je crains le hurlement, je crains de voir l'appartement sans dessus dessous, dans un état à peine croyable en connaissant sa minutie. Sa bouche entre-ouverte ne laisse passer aucun son, pour ne pas mentir, je ne souhaite pas lui infliger tout ceci. Mais, ais-je seulement le droit de me poser ce questionnement ? Ce qui est fait, est fait, retourner en arrière s'avère impossible. A quoi bon rester ici ? Pour son bonheur, pour son bien. Mais, ce n'est pas bon, ce n'est pas sain de dépendre seulement d'une seule personne. La bonne solution que je me répète, oui, c'est la solution. « Pourquoi ? Pourquoi être obligé de partir ? Pourquoi être obligé de tout quitter aussi vite ?! Tu promets, tu dis toutes ces choses, mais les choses sont ce qu'elles sont - tu pars, et rien ne sera jamais comme avant. » D'un coup, les tremblements cessent, faut-il croire qu'il a su prendre conscience des choses et que s'énerver ne mènerait à rien ? Il n'est pas stupide, loin de l'être d'ailleurs, il n'est pas rare que je me sente même idiot à ses côtés. Inspirant longuement, rassuré sur ce point, je sais qu'il n'a pas encore terminé, qu'il a trop à dire et que de toute façon, je ne peux m'en prendre qu'à ma propre personne. Et si je n'étais pas arrivé dans cet appartement il y a des mois, et si je ne m'étais pas inscrit aux beaux arts, et si. Juste "et si" et je pourrais tout ré-écrire à ma manière, tout revoir, tout remodeler. « Parce que j'en ai besoin Tim, je suis plus à ma place ici, j'suis pas... J'te donnerais des nouvelles, j'te téléphonerais et on causera pendant des heures si tu veux, ce sera comme si j'étais là... Ma présence physique sera juste plus dans l'appartement, c'est... c'est... » Je ne trouve plus d'argument bon à lui dire, je lui ai tout murmuré, tout raconté. Sauf le sujet encore difficile qu'est Marty, je refuse de le laisser derrière moi totalement détruit. J'ai lu quelque part qu'avoir la confiance d'une personne atteinte de ce syndrome est une chose, bien plus que précieuse, mais, parfois, un rien peut la briser en mille morceaux. Faire attention, comme de la porcelaine, ne pas y aller de manière trop hâtive. « Tu ne peux pas dire ça, tu ne peux pas faire ça... Ce ne sera plus pareil, pas sans toi, ce n'est pas pareil, c'est... J'ai besoin de toi, tu ne peux pas partir. » Prendre par les sentiments est la meilleuer chose à faire. Je relâche la pression autour de ses bras, évite son regard, évite son tout, mais ses paroles, elles m'attaquent directement. Un besoin, un besoin, je suis un besoin. Bien vite il se rendra compte que je n'ai été qu'un passage futile dans sa vie, un passage qu'il oubliera bien vite - ou qui au contraire le pourrira de l'intérieur. Non tu n'as pas besoin de moi, tu n'as jamais eu besoin de moi. « J'ai besoin de toi ici, Esteban... » Pinçant un peu plus ma lèvre, c'est à contre coeur que je dois continuer sur ce chemin. Elle finira par passer, la douleur, je finirais surement par ne même plus la connaitre. Timothy n'y est pour rien, n'a jamais rien fait de mal et intérieurement, je me doutais que les choses seraient bien plus compliquées. J'ose à peine sourire, il a arrêté son train infernal qui le poussait à se frapper le crâne. Les adieux sont toujours difficiles, mais, qu'est-ce qu'il en sera demain ? Quand je ne serais plus là ? Il devra s'y faire, accepter la situation ou tout faire pour qu'elle soit déjà plus vivable. Chance ou malédiction, je dois laisser derrière moi une trainée de cendres, d'un miasme dégoutant par égoïsme, par fuite. « Arrête .. arrête ça mène à rien de faire ça, tu vas t'faire du mal pour rien, écoute ce que je t'ai dis, tu... fais l'vide, détend tes mains. Y'a pas que moi en ce bas-monde, y'a plein d'autres gens... Marty, Marty pourra t'aider, j'le sais, il t'aime bien lui aussi, il me remplacera pas mais pourra faire comme si. Je sais qu'ça ira sans moi, j'te fais confiance, t'as toute ma confiance et tu tiendras debout même si j'suis plus là. » Et dans tout ça, j'arrive à me dire qu'entrer dans son monde a été une chose ardue, et il faut croire qu'en sortir n'a été que plus rude.
► esteban, 37 ans. Il n'y a plus rien à dire, plus rien à faire. Parait-il qu'il ne faut rien dire si le silence s'avère plus beau que les paroles. Cet homme devait avoir raison l'instant précis où il a écrit ces quelques mots. Je ne regarde pas, je ne vois plus, j'arrive à décerner des formes et mes mains qui sont dans les airs. Rassembler des vêtements, tout ce qui jadis avait sa place dans cet appartement. Ni trop grand, ni trop petit, juste assez bien pour deux personnes qui pouvaient croire en un avenir radieux. Je ne veux pas l'entendre, je ne peux plus l'écouter. Sa voix transperce ma mécanique, cette usine que forme mon corps, je menace d'exploser, une bombe humaine qui ne tardera pas à se laisser aller. La douleur, juste elle. Des petites aiguilles qui filent sous ma peau et me font grimacer, je n'arrive même pas à en pleurer. Durant un instant, j'ai cessé d'y croire, j'ai arrêté de respirer pour tout oublier. Pourtant, les scènes les plus difficiles sont celles qui hantent les nuits, se posent comme une évidence devant nos rêves et je crois que malgré mon envie, malgré mon désir le plus profond de laisser son prénom aux ordures, elle apparaitra comme un point noir sur mon tableau coloré. C'est l'histoire basique d'un couple, d'un amour raconté au cinéma, d'une tromperie et ces choses me font penser que ce qui peut se dérouler sur un écran, n'est pas forcément faux. Le désarroi, le dégoût, la confiance maintenant inexistante et juste de la matière grise pour penser - si j'y arrive encore. « Esteban... » Je suis de dos, je ne suis pas censé la voir, pourtant, je peux deviner comment elle se porte, les traits de son visage. Adossée contre l'encadrement de la porte, ses bras croisés sur sa poitrine, Gabrielle me dévisage, du moins ce qu'elle arrive à voir. Le dos courbé, passant mes mains sur la valise qui petit à petit menace d'éclater, ce sont des années, des jours, des mois qui défilent sous mes prunelles. Un coup, un seul. Je ne réponds rien, je ne préfère rien dire. Hurler serait perdre le contrôle et, je ne veux pas lui offrir ce cadeau, pas avant que je me retrouve complètement seul. Un pas, puis un autre, elle n'est qu'à quelques mètres de mon corps. « Laisse-moi ... laisse-moi t'expliquer, une dernière fois. Daigne au moins m'offrir une dernière chance, que j'puisse sauver ce qui reste, ce que... S'il te plaît. » Qu'as-tu fait de ce nous qui il y a quelques jours avait encore un peu d'importance ? Il ne reste plus rien. Plus que toi dans la pénombre à chercher ma main que je ne tendrais plus. M'expliquer viendrait à me faire revoir ce schéma habituel de la tromperie. Un couple, une femme qui avec ses raisons est allée voir ailleurs, a préféré cacher plutôt que d'avoir, se faire prendre plutôt que de tout réparer. Je ne connaissais pas ce type, et encore maintenant, je ne désire pas savoir son prénom. Déglutissant à peine, je continue machinalement de ranger mes affaires, avec une certaine hâte, sans pour autant paraitre totalement bancale. Pauvre robot déjà rouillé, juste bon à être balancé à la casse. Sa main frêle se pose sur mon épaule, et d'un coup simple elle revole dans les airs. Je peux entendre son coeur battre, la panique faire son effet dans son sang et même sentir des larmes perler dans le coin de ses yeux verts. « Écoute-moi, Esteban nom de dieu ! » Elle parle à quelque chose de vide, un petit objet posé sur le meuble pour faire joli. Faire office de plante verte, passer inaperçu devant tout le monde, puis un jour, se rendre compte qu'elle est là. On ne sait trop pourquoi. Mais, elle existe. Je peux vivre autant qu'elle et sans savoir pourquoi, je me retourne. J'avais raison, j'ai raison. Je connais ses habitudes, ses nervosités, j'ai passé des années à la détailler du regard, à sentir ce pétillement malin m'emparer tout doucement. La peau blafarde, des cheveux roux, sur ses deux jambes elle tremble malgré tout. « J'suis désolée, j'suis... J'suis tellement désolée, mais c'était... C'était pas d'ma... Esteban tu peux pas partir comme ça, pas maintenant, pas après tout ce qu'on a pu vivre. » Pas de ma faute, sa faute à lui, toujours le même baratin qui tourne et retourne comme un manège infernal. Tout ce que nous avons vécu ? Je tire pourtant une croix, je prends mon stylo et fait ce trait indélébile sur le chiffre cinq, et je souffle, je suis apaisé de ne pas avoir pu sortir la bague au moment propice. Faire une erreur, puis une autre, devoir la rendre, la vendre, qu'importe, plus elle sera loin de mon horizon, mieux je pourrais respirer. Gabrielle commence à perdre patience, dévore sa lèvre inférieure à sang comme si sa vie en dépendait. Pitié, énervement, rage, désolation. « MERDE. MERDE. MERDE. HURLE, GUEULE, J'EN SAIS RIEN MAIS RÉAGIS BON SANG ! PARLE-MOI ! » Et pour faire quoi ? Pour retomber au point de non retour ? Ce petit truc pitoyable qui me fera plonger pour son doux visage ? La valise se ferme alors que mes sourcils se froncent un peu plus. Expression à peine perceptible, je ne sais que choisir entre... Entre quoi d'ailleurs ? Rien et rien, très certainement. Des larmes roulent sur son teint porcelaine, ses yeux rougissent à cause d'elles et contre toute attente, ni le regret ne vient à se pointer à ma porte, encore moins la nostalgie. Suffit-il vraiment de peu pour laisser place à une rancoeur sans précédent ? J'aime à croire que oui pour ce coup, et à vrai dire, pardonner se veut vraiment divin. Pardonner son erreur, pardonner et pourquoi pas remettre en question des sourires ? Des rires ? Des attentions ? Faire moi-même office du problème auquel je n'arrive pas à répondre, pourtant, la réponse est simple, trop pour moi. Je n'ai pas la place, pas eu le temps de tout prendre, juste assez pour m'installer ailleurs et réfléchir à un renouveau qui à me sera certainement salvateur. Mon coeur tangue douloureusement contre mon torse, frappe à une vitesse inconsidérée alors que mes pas me mènent vers le couloir, que la porte se dessine comme une évidence et que les remords arrachent des sanglots à celle qui aurait pu devenir ma promise. Gabrielle. Gabrielle. Gabrielle. Si doux, si dur à l'oreille. Elle murmure à nouveau mon prénom, j'ai cette impression désagréable d'être le bourreau qui bientôt va lui donner le coup de grâce. Main posée sur la poignée de la porte, inspirant pour me donner un peu de courage, le grincement résonne contre les murs. Tout me parait si étrange, presque irréel, comme si je revivais cette sensation, le jour où nous avons emménagés dans ce lieu. Ensemble. Que signifie vraiment ce mot ? Pinçant ma lèvre inférieure, le regard posé sur le plafond, c'est un seul souffle qui brise ce miroir de silence, qui claque ses sanglots contre un mur, qui clôt ma fatigue. « Va te faire foutre. » La haine appelle à la haine disait l'un. Le bois claque comme des tambours d'une guerre loin d'être terminée. Les battements de mon horloge cabossée, mon sang pulsant contre mes tempes. Silence. Et maintenant ? Maintenant j'évite de m'effondrer.
► esteban, 38 ans Paris. Paris. Ah Paris, la ville lumière. Ah Paris, foutue capitale de ce pays que je voulais quitter. Des cartons ici, des cartons là à perte de vue, c'est un paysage urbain qui s'offre à moi, pas de tour Eiffel pour m'arracher un quelconque sourire. Cette vieille odeur d'appartement ayant déjà bien vécu son temps. Les murs sont craquelés, le plafond très légèrement mais pas assez pour s'effondrer sur mon visage. Un haussement de sourcils de ma part alors que adossé contre la rambarde du balcon, un chat vient se glisser sur ma jambe, il ronronne, se frotte à peine. Je ne sais lequel des trois il est, beaucoup trop noir pour pouvoir déceler son pelage, et pourtant, il me pousse à montrer mes dents alors que je tire à nouveau sur la cigarette. Me brûle la gorge, me brûle les poumons. J'ai arrêté pour ses beaux yeux, je me suis battus pour ne plus retomber dans le commerce du tabac. J'y ai replongé, la tête la première, les yeux fermés. Ce n'est pas bien, mal même pour mon corps, surtout mon coeur. Je peux voir de loin mes médicaments qui trônent sur la table que j'ai eu le temps de déballer, ils sont là, m'attendent, m'appellent. Huit ans de calvaire qui ne sont pas près de se terminer. Vivre dans le doute, d'une quelconque attaque qui me vaudra un aller simple vers la mort, ou un malaise qui s'éternisera un peu trop, jusqu'à ce que les voisins remarquent le courrier devant ma porte qui s'accumule. Un rire sec m'échappe du coin des lèvres. Le changement, ah qu'il est beau, qu'il est fier et malgré moi une once de mélancolie vient parfois à s'emparer de mes pensées. Le temps lointain où tout était bien, les pertes qui se sont fait sentir du bout des doigts pour revenir à cet endroit où tout se déroulera dorénavant. Professeur dans un collège, hurler sur des gamins turbulents, étaler ma science, me perdre dans ces rues que je ne connais pas. Le miaulement du matou qui réclame des caresses, ou même sa gamelle pour ne pas changer. Baissant mes prunelles sur ses yeux brillants, j'hausse mes deux sourcils et ajoute tout en soufflant la fumée qui réduit mes années. « Ouais, ouais... Tout à fait, j'aurais pas pu dire mieux. » Il s'y remet de plus belle, se plaint de je-ne-sais-quoi, à mon plus grand malheur, je ne parle pas le langage des chats. Peut-être que d'ici un an ou deux, la solitude aura eu raison de moi et que par une envie plus que stupide, mon appartement se résumera à des chats partout, ils dévoreront mon cadavre qui j'en suis sûr sera au fin fond du canapé, touché par la vieillesse. Ce doit être ça, la solitude, la vraie, celle qui pousse vers l'inconnu, ce dont on ne connait rien. Contre toute attente, je me surprends à avoir cette boule dans l'estomac, c'est cette petite peur qui s'empare, qui est unique à tout à chacun. Le mégot valdingue dans les airs, mes jambes me ramènent dans la pièce centrale, le salon qui ce soir ressemble à un grand dépotoir. Les deux autres félins se rapprochent, s'amusent à me perturber dans mes cent pas, dans ma longue marche qui finira par trouer le plancher. Que penser ? A trop de choses. A voir comment je vais arriver à gérer de nouveaux élèves, à savoir quand je vais devoir prendre rendez-vous à l'hôpital, où je vais pouvoir poser mes objets plus ou moins empruntés, vers qui je vais pouvoir me tourner en cas de problèmes, si un connaisseur peut m'expliquer les rudiments de Paris, les chemins à prendre, ou qui sait ? Soupirant un long instant, accroupis pour passer mes mains sur les poils des chats qui n'arrêtent pas de faire du bruit, je ne fais que sourire un peu plus. Am, Stram, Gram. Quel fou appellerait ses chats d'une telle manière, sans prendre compte de la lettre qui correspond à l'année ? Moi, je suppose. Et pour le moment, je ne me vois plus avec une belle bicoque, un gamin dans les bras et une compagne pour me faire voir le monde d'une belle manière. Pas aujourd'hui, pas demain. Comme toujours, je raie de ma liste des secrets inavoués cette petite chose qui est remplacée par le mot " trop tard " en italique, en gras, qu'importe. Le temps m'a rattrapé, le temps m'a touché. Complètement paumé ou pas, la luminosité commence à se fondre dans des abysses que je redoutais étant enfant. Le monstre du placard, le monsieur sous le lit, les cauchemars. Adieu rêves et espérances, bonjour réalité mordante.
esteban, 38 ans. La rue et ses pavés, la rue qui s'allonge, la rue et ses odeurs parfois dégoûtantes. Pollution ici, désolation là, la voiture a choisi le bon moment pour tomber en panne et les chemins à pieds ne font que se succéder. Lunettes sur le nez, sacoche accrochée à mon épaule, c'est un soupir qui vient engager une conversation avec le silence. Encore une journée déplorable, journée difficile. Se faire accepter par des enfants n'est pas chose aisée et je défis quiconque de se mettre à ma place. Peu de temps que je suis dans ce collège, que je fais office du professeur d'arts plastiques mais juste assez pour en mettre dans des cases. A force d'enseigner, il y a des choses qui se mettent face à moi comme une logique. A l'école primaire, au collège, au lycée, il y a ce petit emplacement mis devant vous dès le début de l'année. Si vous avez de la chance, vous êtes dans le grand pourcentage des appréciés, sinon, vous êtes dans les rejetés. Pas assez maigre, pas assez jolie, trop intelligent. Les remontrances ont fusé, les morales se sont enchainées et je peux presque encore le rire sournois du gamin trop fier de mon insulte. Parfois, les gifles veulent voler, s'écraser sur leurs joues, mais, elles ne doivent rester qu'une simple image, qu'une rêvasserie, qu'une imagination à me garder pour laisser mes nerfs dégonfler d'un coup. La cruauté des adultes dépasse tout entendement, mais, celle des enfants ? Elle doit être la plus destructrice. Combien de larmes ont coulés à cause d'insultes ? Combien de maladies ont été inventées ? De trop à ce jour, il y a des choses qui changent, d'autres pas. Le jugement ultime face au tribunal des gamins bourrés d'hormones. Vous êtes jugé coupable parce que vos lunettes sont hideuses, parce que vos vêtements sont trop sombres, parce que vous vous empiffrez trop. En y pensant, je dois avoir le métier le plus cruel au monde. Je ne peux que regarder, parfois - même souvent -, sanctionner, mais que faire pour qu'ils arrêtent ? Rien. Je ne suis pas tout puissant, pas tout grand, alors je gueule, j'ouvre ma bouche, laisse les mots parcourir la pièce pour calmer les moeurs et essaie tant bien que mal de conseiller ceux qui se sentent déjà au bord du gouffre. Au fond, je ne suis qu'un être humain qui fait office d'un petit guide, juste un petit passage dans la vie de certains. Je suis détesté, parfois apprécié, de toute manière, je suis pas fait pour être aimé de la foule. Pour faire comprendre, offrir la part des choses. Le bien, le mal. Gepetto et son adorable Pinocchio. Longue quête que voilà, et encore maintenant, je me demande si j'arrive à faire les bons choix. J'ai le droit, je n'ai pas le droit, il faut savoir prendre la main, l'arrêter avant qu'elle frappe le visage déjà bien amoché du gamin mordu par les mots. Mes mains se glissent plus profondément dans mes poches. Je ne peux rien y faire, je n'ai pas la parole divine, pas le pouvoir de changer les mentalités, c'est ainsi qu'est l'évolution. Sublime. Grimaçant un peu, je revois cette époque où encore, je pouvais me vanter d'un peu de popularité, de ne pas pouvoir compter mes amis sur mes deux mains et tout ce qui a pu en suivre. Mais, qu'est-ce qu'il en a été des autres ? Le grand immeuble est face à moi, la porte ouverte, il ne me reste plus qu'à monter les escaliers sans rechigner. Fronçant les sourcils, je m'arrête devant une porte, une seule. Elle est banale, standard, d'une couleur peu particulière, mais ce qu'elle contient, ne l'est pas. Et lui, qu'est-ce qu'il en a été de lui ? Dans quelle situation est-ce qu'il a pu vivre jusque là ? La souffrance je suppose. En entendant les ragots des voisins, il est simplement cinglé, il a un problème, quelque chose qui cloché. Savoir c'est pouvoir, savoir c'est se taire pour de bon. Ils ne savent rien de lui, moi, par contre, je sais. Pas tout, juste assez pour le considérer comme une personne plus qu'appréciable, comme une personne trop précieuse pour ce monde qui ne supporte pas la différence. C'est la peur, la peur qui les mène à jeter ces personnes au bucher, c'est la peur. Alors, il faut se cacher, derrière quelque chose, derrière la normalité morbide. Se renier, jusqu'au plus profond de soi-même. Oublier la personne, en devenir une autre. Timothy Duceau, ce colocataire que j'ai connu il y a un peu plus de dix ans de cela. Timothy Duceau, ce gamin affublé de tout les noms d'oiseaux. Mon coeur se pince à cette idée, l'incompréhension se fraie un chemin dans mes pensées, et je ne pourrais jamais répondre à cette question. Ce pourquoi, ce comment, ce de quelle façon. Il ne le mérite pas, ne l'a jamais mérité, et ne méritera jamais les immondices qu'il peut entendre à ce sujet. La maladie doit l'aider à sa façon, d'une certaine manière, du moins, c'est ce que je préfère me dire. Que ce n'est pas la bête des autres appartements qui s'occupe de son cas, qu'il se concentre sur autre chose, à un point tel qu'il ne porte plus attention aux murmures de vipères. Oui, cette porte est standard, n'attire pas l'attention plus que ça. Pourtant, quand on daigne poser ses doigts sur le bois, on arrive à se rendre compte qu'il a quelque chose de plus que les autres n'ont pas. Ce petit truc qui arrive à faire sourire, rire parfois, qui redonne un peu d'espoir là où il n'y en avait plus vraiment. « Monsieur Camus ? Un problème ? » La gardienne de l'immeuble, avec son sourire digne d'une publicité pour une marque de dentifrice. Derrière les plus belles dents se cachent les plus beaux hypocrites, c'est ce que me répétait ma mère et je me rends bien compte qu'elle a raison. « Aucun. » Abordant à mon tour un sourire aussi minimaliste que le sien, ses sourcils velus se froncent, montrant clairement ses rides qui ne feront que s’agrandir au fil des jours. « Mais, pourtant vous restez plant- » « Tout va bien, j'vous assure madame Lambert, vous pouvez retourner à vos occupations. » J'ai cru apercevoir une pointe de manque. Manque de ragots, de potins croustillants en tout genre. Elle disparait dans les escaliers, sans aucun bruit. Il n'y a pas de problème, il n'y en a jamais eu, et tant que cette porte restera entière, tout ira toujours bien.
Dernière édition par Esteban Camus le Sam 31 Aoû - 0:05, édité 35 fois
Ella Maresquo membre
✧ ÂGE : vingt et quatre. ✧ JOB : assistante sociale dans une association ✧ COEUR : célibataire. ✧ MESSAGES : 11185 ✧ HERE SINCE : 07/05/2011
Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 21:45
bienvenue par ici.
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 21:57
Merci beaucoup !
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 22:24
bienvenue le perso' a l'air bien sympa !
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 22:27
Le prénom de ton personnage est super chouette ! Merci bien, j'espère qu'il plaira !
Rosanne Perlin membre
✧ ÂGE : eighteen. ✧ JOB : serveuse le we. ✧ COEUR : déjà passée par là. ✧ MESSAGES : 1092 ✧ HERE SINCE : 11/06/2013
Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 22:56
oh mon dieu *hyperventile* sagamore, excellent choiiiiix je connais quelqu'un qui est ami avec lui, il parait qu'il est trop sympa, anyway bienvenue
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 23:03
ASH. J'peux que te renvoyer le compliment ! Ah ouais ?! Ça m'étonne même pas, il a une tête d'ours peluche. Et merci beaucoup trèèèès. :*-*:
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 23:09
Je ne sais même pas si je peux poster ici mais bienvenuuuuuuuuuue il nous faudra un lien sur ce, je retourne à ma fiche !
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mar 20 Aoû - 23:48
Row merci beaucoup ! Ce sera avec plaisir pour le lien.
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 9:45
sweet lord, sagamore est un EXCELLENT choix. et puis ce nom :leche. bienv'nue à paname monsieur.
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 9:57
OH TOI. J'ai hâaaaate de te lire, si tu savais !
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 10:21
béatrice, rooh merci beaucoup ! marty, OH MOI. OH TOI. OH NOUS. J'espère ne pas te décevoir alors ma biche !
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 16:46
Bienvenue parmis nous et bon courage pour ta fiche! Ton personnage m'intrigue beaucoup, ce n'est que la présentation, et j'en ai presque des étoiles dans les yeux J'ai hâte de voir ce que ton beau brun nous réserve!
Louise Toscan du Plantier membre
✧ ÂGE : vingt quatre ans. ✧ JOB : éleveuse de chats. ✧ COEUR : perdu au dessus du pacifique. ✧ MESSAGES : 3600 ✧ HERE SINCE : 27/10/2012
Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 17:09
bienvenue parmi nous. j'sais pas d'où il vient le monsieur, mais il est fort agréable à regarder.
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 18:42
connor, oh merci ça fait super plaisir, j'espère que la suite plaira dans ce cas ! :*-*: sephora, ta rouquine est pas mal non plus. Merci bien !
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 22:45
Bienvenue et bonne chance pour ta fiche
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Mer 21 Aoû - 22:56
HAN GAUTIER. J'aime trop ce prénooom. Merci beaucoup ! :*-*:
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban) Sam 24 Aoû - 0:46
bienvenue ici, et bon courage pour ta fiche
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Sujet: Re: les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban)
les grands sont ce qu'ils veulent, les petits sont ce qu'ils peuvent. (esteban)