La journée avait plutôt bien commencé. Pas de petite galère, pas d'égarement de clefs, pas d'accident de peinture sur des planches presque finies, pas de contrôle dans le bus -je n'aimais pas payer un ticket, en plus le mot "ticket" est ridicule-, pas de vieux qui traînent à la caisse des supermarchés, pas de gamin hystérique dans le parc, bref, aucun de ces petits riens qui des fois, rendent la vie vraiment, vraiment insupportable. Pas d'exaspération, pas de cris, pas de nerfs en pelote, rien ! La météo n'avait même pas été défavorable, et j'aurais presque pu croire en l'existence de dieu en un telle journée, si celle-ci s'était approximativement achevée vers vingt heure trente. Mais bien avant cela, j'étais loin de me douter de mon infortune. Je commençais à peine à croire à mon bonheur. Pas d'emmerdes ! Ce jour méritait d'être marqué d'une pierre blanche. Ce n'était pas non plus la journée parfaite, néanmoins, on s'y approchait fortement, et dieu sait à quel point il est difficile pour qui que ce soit de n'avoir AUCUN ennui en une journée. Oui, elle avait tout pour continuer sur la même voie, je commençais à me sentir réellement bien dans mes baskets (je me sentais toujours bien dans mes baskets, à vrai dire, mais pour être plus exact, je devrais dire que je sentais pousser des petites ailes à mes pompes, comble de l'exaltation), je songeais qu'il n'était pas difficile de faire en sorte que tout baigne, et que, finalement, peut-être était-ce juste dans le mental que ça se passait. Le mental, le mental, si ça se trouve j'étais juste persuadé que tout allait bien et je ne prêtais aucune attention à des trucs qui habituellement m'agaçaient. Psychologique ou réel ? A la réflexion, je n'en ai aucune idée, mais j'avais, disons, une circonstance atténuante pour voir la vie en rose.
J'avais un rencard !
Oh, il m'arrivait régulièrement d'aller à ce genre de petite sauterie, je n'étais pas désespéré à ce point, néanmoins, j'aimais passer du bon temps en compagnie féminine, et je dois bien dire que la fille que je devais voir était réellement bien foutue. J'avais en quelque sorte tiré le gros lot, et vu la semaine passablement désagréable que j'avais passée, cette fille était en quelque sorte la cerise sur le gâteau, le nutella sur la crêpe, le comble du comble pour un célibataire endurci tel que moi. Bref, j'étais aux anges. Pour cause ! J'avais tout prévu. J'avais rangé mon appartement jusque dans les moindres recoins, j'avais prévu quelques piécettes dans le vide-poches de l'appart pour -au cas où- aller acheter des croissants le lendemain, j'avais pris une bonne douche, j'avais arrangé mes cheveux dans la mesure du possible, et je n'avais même pas oublié ma carte bleue, ce qui, soit dit en passant, faisait quand même très, très, trèèèès mauvaise impression lorsque qu'un type propose à une fille de l'inviter et que cette saloperie de carte disparaît mystérieusement lors d'un premier rendez-vous (et je sais de quoi je parle, diable, que de souvenirs embarrassants). Oh, oui, peut-être que j'aurais dû me douter de la supercherie dès le début, peut-être n'aurais-je pas dû être si naïf, peut-être que j'aurais dû faire face à la réalité dès le début, mais j'étais d'un naturel optimiste, et cela me jouait quelques fois des tours.
J'avais rencontré "l'heureuse" élue totalement par hasard alors que j'étais dans l'atelier dans lequel je bossais avec quelques collègues, un petit truc assez sympa et convivial à mon sens, sans prise de tête et avec quelques jolies toiles au mur. La bougresse s'avérait en fait être une éditrice de je-ne-sais-quoi qui venait en reconnaissance en vue d'une commande éventuelle pour un album de gamins, enfin un truc à la con, mais j'avoue qu'elle m'avait tapé dans l’œil, et j'étais sûr qu'il en était de même pour elle. On avait un peu papoté, le courant était passé, et j'avais fini par choper son numéro. On avait convenu de se retrouver à l'atelier des artistes parce que ça semblait être un lieu qui nous correspondait tous les deux. Et me voilà, un samedi soir, devant une table que j'avais réservée pour deux. Seul bémol, il était déjà vingt-et-une heure trente. Or, cela faisait déjà une heure que je l'attendais. Oh, bien sûr, la première demi-heure, j'avais mis ça sur le compte du retard -vous savez comment sont les femmes...-, mais là, je dois bien dire que je commençais à me poser des questions. Est-ce que par harsard...? Non, ce n'était pas possible, j'avais trop de charme pour ça, et puis, elle semblait déjà acquise ! A peine plus jeune que moi, avec le teint rose et de jolies bouclettes. Oui, j'aurais pu l'appeler, après tout, j'avais son numéro. Mais de un, ça faisait gros relou, et de deux, je ne connaissais pas son prénom ; certes, elle avait dû me le dire à un moment où à un autre, mais je l'avais zappé -je m'étais concentré sur autre chose-, car je n'enregistrais jamais une proie potentielle par son prénom dans mon répertoire, sinon je finissais toujours par oublier qui était cette donzelle dont je n'avais pas connaissance, et je finissais me poser la question de l'identité de la personne. En fait, il aurait été indélicat d'appeler au téléphone celle connue sous le nom de "RENCARD 4". Le pire, c’est que je lui avais envoyé un message la vieille, autant dire que mon niveau de frustration commençait à grimper de façon significative, et que ma bonne humeur de la journée partait peu à peu en éclats.
Alors, il me restait la solution de secours, le plan b. En fait, il s’agissait de partager mon désarroi avec les consommations qu’on proposait au bar et qui défilaient devant la place vide de rencard 4. Et je me noyais entre deux verres de chardonnay et ma haine pour les filles qui agissaient comme ça, pour dire les choses gentiment. J’étais gentil. Gentil, et vers les coups de vingt-deux heures, un peu ivre –enfin j’avais la tête qui tournait, et je m’étais fait au constat que réserver une table au resto pour picoler allait me revenir bien plus cher que d’acheter une bouteille de picole dans un super marché, ce qui augmentait sensiblement ma frustration et me poussait à boire encore plus-. Au bout d’un moment, j’avais hésité, je jure que j’avais hésité à consommer autre chose que les rafraîchissements dont je me faisais allègrement profiter depuis toute à l’heure, mais au dernier moment, j’avais changé d’avis, parce que merde, l’addition allait être suffisamment salée pour pas que je ne rajoute un plat du jour sur le billet. Alors, j’avais hélé la serveuse –pas moche, c’était au moins une consolation- qui s’occupait de moi depuis le début et qui devait en avoir un peu marre à la longue, et j’avais commandé la même chose. « La même chose s’il vous plaît… Enfin non, un truc plus fort, en fait. Bah, c’est parti pour une vodka. » J’en avais profité pour la reluquer, je l’avoue à ma grande honte, et l’alcool n’aidant en rien et me montant doucement à la tête, j’étais parti pour passer probablement la meilleure soirée de ma vie, entre deux consos et un mal de tête prévu pour le lendemain –car oui, il était dans mes plans de poursuivre cette sympathique soirée une fois seul chez moi-.
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Sujet: Re: rencard 4 - ina Jeu 20 Juin - 22:15
Avec le départ précipité de ma colocataire, j’avais bien du mal à combler le vide. C’était que mine de rien, je m’y étais habituée. C’était bizarre de passer de deux personnes et un chat à une personne et un chat. C’était bizarre et un peu déprimant, même si je n’avais plus de bazar dans tout l’appartement à cause d’une bordélique. Mais fallait faire avec quand bien même la façon dont ça s’était passé me restait bien au travers de la gorge. Je réfléchissais à prendre un autre colocataire mais je me dis qu’au final, ce n’était pas plus mal que je reste seule. En attendant de me décider de manière définitive, je fuyais un peu l’endroit manière de ne pas trop perdre l’habitude de côtoyer des gens – et, accessoirement, afin d’éviter de finir Hermite pour le restant de mes jours. Le gros problème est que les cours étaient définitivement terminés, mes examens aussi donc je m’étais retrouvée très rapidement à devoir me rouler les pouces entre quatre murs. La première semaine ne s’était pas trop mal passée entre le gros ménage de printemps, l’achat d’une console de jeu et d’un tapis de course. La deuxième était moins bien passée, l’ennui commençant déjà à ronger mon cerveau. Je n’eus pas la force de terminer la troisième que je suppliais mon patron de me caser dès qu’il le pouvait, au service du midi ou du soir, du lundi au dimanche si ça pouvait lui faire plaisir. Heureusement ou malheureusement pour moi, ma demande n’est pas du tout, mais alors pas du tout tombée dans l’oreille d’un sourd. Bien au contraire ! Il me casait dès qu’il le pouvait, c’est-à-dire tous les jours puisqu’il y avait toujours quelqu’un pour ne pas venir au boulot à cause d’un vulgaire mal de tête. Donc j’allai passer mon été à être le bouche trou. Le pire dans tout ça, c’est que ça ne me dérangeait pas outre mesure. Ca donnait une bonne idée de l’état de ma vie sociale.
Voilà comment je m’étais retrouvée à courir partout dans le restaurant de l’Atelier des Artistes, dit l’Atelier pour les habitués, un samedi soir. Le métier de serveuse avait tout un tas d’inconvénients : il fallait être capable de tenir debout des heures durant, à slalomer entre les différentes tables tout en faisant preuve d’équilibre et de grâce si possible, d’arriver à gérer de nombreuses tables sans se noyer dans les commandes et/ou dans la panique. Et le pire dans tout ça, c’est qu’il fallait toujours garder le sourire, en toutes circonstances… Pourtant, il m’arrivait de très nombreuses fois où j’avais l’envie folle d’envoyer chier un client. Mais le bosse me connaissant un peu trop était plutôt du genre à me surveiller de très près (rabat-joie). Cela dit, je le faisais quand même… Certes, je me faisais réprimander comme une enfant mais la vie reprenez son cours comme si de rien n’était. C’était mon petit côté tête à claques rebelle insupportable. Heureusement que je n’étais pas un laideron sinon je n’aurais pas fait long feu. D’ailleurs, le boss savait pertinemment que mon joli minois était un atout. C’est pour cela qu’il ne me virait pas.
J’avais rapidement sentie que le service de ce soir allait être très difficile, voire catastrophique. Dès le début du coup d’envoi, il a eu des couacs à la pelle. Je ne savais pas si c’était à cause de la météo qui avait été clémente toute la journée mais le restaurant a été littéralement pris d’assaut. En trois ans de bons et loyaux services, j’avais rarement vu autant de monde arriver dès 19h. La masse de personne impliquait forcément une masse de commande. Certains serveurs étaient complètement à côté de la plaque, du coup ils envoyaient mal les commandes, ce qui embrouillait le chef qui n’envoyait pas les bons plats. Le patron a commencé mettre la pression sur le cuistot, qui s’est défoulé sur un serveur et ce dernier n’a pas apprécié être pris comme bouc-émissaire donc ça a commencé à chauffer en cuisine. Le patron est venu les séparer mais le mal était fait et le retard s’accumulait un peu plus dans l’envoi des plats. Les clients déjà installés s’impatientaient, les clients qui avaient réservés une table attendaient plus qu’ils ne le devaient. C’était un gros bazar désorganisé tout ça. Et moi là-dedans, je gérai mes tables au mieux, m’excusant une bonne centaine de fois pour l’attente… Je n’avais même pas le temps de respirer d’autant plus que le flot ne se régulait absolument pas. J’avais cette horrible sensation de boucle interminable. Les clients s’enchainaient les uns après les autres et je n’arrivais même plus à savoir qui j’avais servi ou pas. Néanmoins, il y a bien un client qui m’avait interpelé dans le lot. Il était le genre de client que je détestais. Il n’avait absolument rien consommé de solide depuis une bonne heure et, même si j’avais joué l’aveugle depuis tout ce temps, mon patron me fit gentiment remarqué qu’il était plus que temps de le rediriger vers le bar. Cela ne m’aurait pas dérangé outre mesure si ce monsieur n’avait pas commandé tant de verres d’alcool. Je continuai mon service tout en réfléchissant à une façon intelligente de faire changer de place à ce monsieur qui devait être un peu pompette… Vint le moment « fatidique » ou ce même client m’interpella pour passer commande. D’un pas souple, je me dirigeai vers sa table, évitant au passage un autre client qui m’avait très aimablement coupé la route. Arrivée à la fameuse table, mon constat fut sans appel : ce monsieur avait bel atteint ce que j’appelais le stade 1 de l’ivresse, c’est-à-dire yeux luisants et petites difficultés à articuler. Sans surprise, il commanda un autre verre d’alcool, un peu plus corsé cette fois-ci. Dans d’autres circonstances j’aurais très certainement tapé la causette à cet homme – parce qu’il ressemblait tout de même à un homme qui venait de se faire poser un vilain lapin – mais là, à cet instant précis, je n’en avais absolument le temps. A vrai dire, la chose que j’espérais était qu’il ne me fasse pas un esclandre lorsque je lui demanderai de changer de place. Je pris une grande inspiration comme pour me donner de patience dont j’allai avoir très certainement besoin parce que l’homme était en train de me mater avec grande insistance. Décidément, je venais de tirer le gros lot...
« Ce sera avec plaisir Monsieur. Par contre, vous m’en voyez désolée mais je suis dans l’obligation de vous renvoyer vers le bar. Cela fait presque une heure que vous monopolisez une table sans commander de plat. Or comme vous pouvez le constater, du monde attend que des tables se libèrent. »
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Sujet: Re: rencard 4 - ina Dim 23 Juin - 0:59
RENCARD 4 ft. ina
D'abord, j'avais commencé par regarder la salle dans laquelle je me trouvais sous tous les angles parce que j'avais du temps à perdre, ensuite, j'avais commencé à regarder mes doigts, puis les autres clients, puis tout ce qui, d'habitude, était d'une banalité sans pareille à quel point qu'on y prêtait pas la moindre attention devenait subitement une source profonde de réflexion et de débats philosophiques intra-ma tête. En fin de compte, je crois que la solitude commençait fortement à me peser. En un sens, c'est pour cette raison que j'avais commencé à taper dans l'alcool, parce que je me m'ennuyais ferme, et à défaut d'avoir autre chose à faire, j'avais bu, tout semblait normal. Oui, je me voyais mal avoir commandé une choucroute, et là, bam, le miracle, rencard 4 qui débarque et qui me voit avec un bout de saucisse de francfort qui dépasse au coin de la bouche. Non, non, en cas de miracle, si elle se pointait, j'aurais eu l'air du mec qui n'en avait rien à foutre, si j'avais commencé à manger quelque chose de consistant, alors que si elle me voyait avec un verre sur la table, cela trahissait une certaine impatience à la limite du renoncement et du désespoir, mais cela disait aussi de moi que j'avais eu la décence, et surtout la patience, de l'attendre pour attaquer le gros du repas. Bon, en l'occurrence, je ne me faisais plus aucune illusion, je savais qu'elle n'arriverait pas, sinon, j'ose espérer qu'elle avait une très très bonne excuse, parce que si elle se pointait comme une fleur (tsss, une fleur, plutôt une ortie en ce qui la concernait), à défaut de l'acclamer et de lui dérouler un tapis rouge, j'aurais plutôt eu tendance à vouloir l'assommer avec ma chaise, et quand je m'énervais, j'étais bel est bien capable de tout casser, comme des fémurs, des tibias, ou encore des boîtes crâniennes. Bon, en dehors de ça, j'étais quelqu'un d'adorable, je le savais bien. Adorable, mais hélas un peu contrarié par la remarque de la serveuse que j'avais appelée -et à qui, par ailleurs, j'hésitais fortement à demander le prénom, et pourquoi un numéro de téléphone-. « Ce sera avec plaisir Monsieur. Par contre, vous m’en voyez désolée mais je suis dans l’obligation de vous renvoyer vers le bar. Cela fait presque une heure que vous monopolisez une table sans commander de plat. Or comme vous pouvez le constater, du monde attend que des tables se libèrent. »
Sur le coup, j'avais hésité à la contredire. Non, ça ne faisait pas presque une heure, ça faisait plus d'une heure. Mais à la réflexion -je n'avais pas perdu toute ma tête non plus, j'en étais encore loin-, ça n'aurait été que m'enfoncer de dire de telles sottises, et je crois que je n'en avais, à l'heure actuelle, pas vraiment besoin. Mais s'il fallait bien dire quelque chose sur moi, c'était que j'adorais avoir raison. Et le mieux ? C'était que j'avais très souvent raison. Simplement, lorsque quelqu'un avait tord, il fallait lui expliquer pourquoi. Et, grâce à mes raisonnements -des fois un peu à la mord-moi-le-noeud, c'est un fait-, j'arrivais à m'en sortir. Oh, bien sûr, les gens avaient des fois la folle envie, mais légitime, de me foutre des claques, simplement, ils devaient s'en abstenir, forcés de constater que j'étais meilleur orateur qu'eux, que je me faisais passer pour une victime et que, même en ayant tord, je me faisais passer pour une personne de raison. Alors, bien sûr, j'étais loin de laisser faire une telle infamie. Me virer ? Mais pour quelle raison, enfin ? J'étais le client exemplaire. Je ne faisais pas de bruit, j'étais dans mon coin, et je n'étais pas installé à une table pour le simple plaisir d'être installé, non, j'avais réservé, et, de plus, j'allais payer comme tout le monde une addition à la fin de mon "repas". C'étais hors de question de me faire entuber ! « Vous n'êtes pas dans l'obligation, enfin, votre seule limite, c'est vous-même. Vous pouvez choisir de me laisser en paix, simplement, vous optez pour la solution de facilité. Le monde est lâche ! », avais-je fini par m'exclamer. Mais, comme je sentais que j'étais comme sur le point de digresser, il fallait que je ressaisisse. Aller à l'essentiel. En plus, elle devait penser que j'avais vraiment un coup dans le nez, ce qui était partiellement faux.
« Enfin écoutez-moi. Je ne vois pas pourquoi je devrais changer de place. Voyez-vous, je suis un citoyen honnête, je paye mes impôts comme tout le monde, je vais payer l'addition comme tout le monde, et pourquoi me fait-on un foin ? Parce que je ne consomme rien de chaud ? Alors, dites-moi, faut-il que je commande des spaghettis pour être tranquille ? Si ce n'est que cela, permettez-moi de vous dire que la mentalité de ce restaurant laisse à désirer. » J'avais employé un ton que j'estimais légèrement hautain comme il fallait pour bien lui montrer que ma mentalité à moi était bien meilleure, seulement, je n'étais pas sûr à cent pour cent d'avoir été tout à fait convaincant. Mon talent d'acteur avait tendance à s'altérer sous les effets de l'alcool. Mais je ne devais pas en rester là. Je devais aller en profondeur, lui montrer à quel point j'avais raison et elle tord. Parce que c'était une femme, elle allait tout faire pour me contredire et avoir le dernier mot -certes, c'était ce que je faisais, mais j'étais le client et j'étais dans mon bon droit-. Et puis, elle aussi, je le sentais bien, allait me sortir quelques arguments probablement non-valables qu'elle ferait pourtant passer comme valables. J'avais devant moi un adversaire redoutable pour les joutes orales qui m'opposaient à elle, d'abord parce que c'était une femme, et ensuite parce que j'avais picolé à jeun. « Mais n'est-ce pas interdit de dégager un client pourtant irréprochable ? N'est-ce pas réprimé par la politique de la maison, ou du moins par une loi ? D'ailleurs, une loi autorise les clients à entrer dans un magasin sans obligation d'achat. Si on l'applique aux restaurants, je pourrais très bien réserver cette table et ne rien consommer. Mais comme je suis quelqu'un d'honorable, je consomme. » Marty ferme laaaa, c'est ce que m'aurait dit un ami, ou tout du moins ma maman. En soi, je n'avais pas forcément tord sur tous les points, mais tout de même, je m'enfonçais. Et le pire, c'est que je n'en restais pas là. Mais c'était plus fort que moi, je parlais plus que ce que la raison exigeait.
« Et à votre avis, pourquoi ai-je réservé une table ? Et si elle arrive, hein, que vais-je lui dire ? » Aïe. Tout le monde savait qu'elle ne viendrait pas. Même moi, je le savais, mais je ne voulais pas vraiment admettre qu'on m'avait posé un gros lapin. J'avais encore un peu de fierté, oui, même pompette. « Je vais lui dire que les réservations de table ont une limite dans le temps ? De toute façon, ça ne change rien pour, comme vous dites, le monde qui attend. Si j'avais choisi de rester jusqu'à deux heures du matin avec rencard 4, personne ne m'aurait dérangé. Alors imaginez que je ne sois pas seul, et imaginez de la fumée qui sort d'une assiette. Voilà tout. » Comme je sentais venir la fin de mon monologue -pauvre serveuse, maintenant que j'y pense-, je trouvais cela judicieux de terminer par une jolie phrase, qui me vint immédiatement à l'esprit embrumé. « Alors si on me force vraiment à changer de place, j'exige que l'on me fasse sauter la moitié de l'addition. Pour le principe. » Et hop, comme je ne roulais pas sur l'or, payer une addition à cinquante pour cent me semblait être une bonne idée. Bon, je doutais du résultat, mais qui ne tente rien n'a rien. Le pire dans cette histoire ? C'est que j'étais fier de moi.
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Sujet: Re: rencard 4 - ina Lun 15 Juil - 0:29
S’il y avait bien une chose à ne pas faire à un serveur en pleine période de rush, c’était de lui faire perdre son temps, de quelque manière que ce soit. Et là, manque de chance pour moi, je venais de tomber sur LE client de la soirée ; comprendre : le client qui allait me faire chier jusqu’au bout. Pourtant, de prime abord, ce monsieur paraissait bien sympathique. Dommage que l’alcool le rende si con – en espérant que ce soit réellement la faute de l’alcool. Ce n’était pas vraiment, mais alors pas du tout intelligent de sa part de venir m’affronter. Se rendait-il compte que je pouvais uriner dans une de ses verres en faisant passer ça pour un vulgaire cocktail ? OK, c’est vrai que je n’étais pas assez fourbe pour faire une telle chose, mais l’idée eu au moins le mérite de me faire sourire. J’étais sur les nerfs à cause du chaos ambiant, alors ce mec avec un coup de trop dans le nez qui venait la ramener juste pour faire le spectacle, en me prenant de haut qui plus est, allait prendre tout mon agacement en pleine tête – et j’en avais accumulé une bonne quantité depuis le début du service. Tant pis pour le devoir professionnel de diplomatie. Tant pis je me faisais virer. Je ne comptais pas me la fermer.
Je suis restée impassible tout le long de son discours aussi ridicule que sa pauvre situation. D’ailleurs, je me surpris moi-même. J’arrivai à maitriser mon envie folle de lui foutre mon plateau en plein tronche. Je savais pertinemment que la violence n’était pas la solution. Il valait mieux pour moi de jouer avec des armes plus… honorables. Je me devais de tenir une discours condescendant qui remettra l’autre en place une bonne fois pour toutes je l’espère. Cela dit, je dois bien avouer que cela risquait d’être difficile. Plus les minutes passaient et plus mon agacement grandissait de telle sorte à ce que mon estomac finisse par se crisper de rage – ou de frustration – et mon cœur battait à une allure beaucoup trop rapide pour être normale. Mais je ne dis rien. Je ne fis rien. Je laissai ce pauvre type se la péter. S’il avait besoin de ça pour se sentir exister, soit. Je lui laissai son quart d’heure de gloire. Cela dit, heureusement pour lui que le ridicule ne tue pas.
Une fois le monologue terminé, je pris le temps de laisser à ce cher client de sentir les regards qui avaient finis par se braquer sur sa petite personne. Personnellement, je le fusillai du regard tout en essayant de préparer ce que j’allai lui dire. Quoi que…
« Vous voulez réellement que je perde mon temps à démonter le moindre de vos arguments aussi fiables que rencard 4 ? Commençai-je non sans ironie. »
Oui, comme je le pensais, ce cher monsieur venait de se faire poser un joli lapin par une demoiselle pas si charmante qu’il devait le penser. J’aurais avoir une once de compassion pour lui mais ce ne fut pas le cas. C’était la faute à son air hautain si désagréable.
« Veuillez m’excuser messieurs dames mais, ce galant homme veut à tout prix que je lui explique pourquoi j’ose lui demander de lever son postérieur de cette chaise pour aller au bar. De ce fait, vous serez servis plus tard que prévu. La maison s’en excuse d’avance mais si vous avez des reproches à formuler, faites-le auprès de ce charmant jeune homme assis juste ici. Je leur montrai du doigt l’horrible client en question. »
Pourquoi je faisais ça ? Mais c’était très clair. Tant que cet énergumène m’empêchait de faire mon travail correctement, je ne travaillais plus. Plus sérieusement, tout cela avait pour but de faire monter les tensions entre les clients comme ça, si le conflit s’éternisait beaucoup trop, la foule aura des arguments plus efficaces que les miens. Du moins, c’est ce que j’espérais dans mon fort intérieur.
« A nous deux à présent ! Poursuivais-je après m’être assise à la table de l’insupportable client. »
Je laissai un court temps de flottement durant lequel je le regardai d’une manière toute aussi hautaine que la manière dont il m’avait parlé quelques secondes auparavant.
« En toute franchise, ce n’était absolument pas le bon moment pour vous de me lancer sur le terrain d’un tel jeu. Je ne suis pas de très bonne humeur, voyez-vous ? Mais puisque vous êtes si malin et que j’ai l’intime conviction qu’épater la galerie est dans votre nature, je vais me faire un plaisir de vous montrer par A + B que vous êtes en tort. »
Je m’enfonçai un peu plus dans ma chaise, ne le lâchant toujours pas du regard.
« Le client est roi, mais sous certaines conditions. Et ces dernières, vous les accepter à l’instant où vous consommez votre commande. Vous avez commandez à boire, n’est-ce pas ? Et je vous ai servi et, ce verre vide peut témoigner que vous avez consommé. Je pris le fameux verre et le levais, manière que tout le monde le voit. Donc, à partir de ce moment, vous avez acceptez le fait que, lorsqu’un client ne consomme que des boissons, il doit s’assoir au bar, même s’il a réservé une table. Ne dites pas que vous n’avez pas vu l’affichette à l’entrée. La police d’écriture est suffisamment grande pour pouvoir être lu par des malvoyants. Vous voyez monsieur, malgré la mentalité de l’établissement qui « laisse à désirer » comme dites, il y a une forte affluence. Et dans le but de faciliter le travail des serveurs, il a été décidé que la salle soit dédiée au service de repas – avec les boissons qui peuvent l’accompagner évidemment – et que le bar soit dédié aux clients qui ont envie de boire des coups. Donc partant de ce principe, en m’empêchant de faire mon travail correctement dans le but d’épater la galerie, vous êtes tout sauf un client exemplaire. »
Je paressai incroyablement calme alors qu’en réalité, j’étais agacée et fatiguée de tout ça. Je voulais qu’il lève son cul et qu’il aille au bar sans l’ouvrir. Mais je savais très bien que ce ne serait pas le cas.
« Ensuite, je vais très rapidement conclure tout ça. Ne soyez pas de mauvaise foi. Votre rendez-vous ne se pointera pas. D’ailleurs, je crois qu’elle a bien fait de ne pas supporter un homme incapable de l’appeler par son prénom. Rencard 4… On a trouvé mieux comme surnom affectueux ! »
Je me levai dans un mouvement brusque.
« Vous savez, vous auriez été plus agréable, j’aurais pu vous offrir quelque chose. Avec une telle attitude, une ristourne n’est même pas envisageable ! Arrêtez-donc de vous ridiculiser comme vous faites et soyez sympa, allez au bar pour laisser profiter ces deux jeunes mariés d’un petit repas agréable. Si jamais rencard 4 pointe son nez, vous aurez une table, c’est promis. »
Comme si elle allait se pointer...
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Sujet: Re: rencard 4 - ina Mar 16 Juil - 21:48
RENCARD 4 ft. ina
Deux choix s’offraient à moi. Soit j’écoutais tranquillement ce qu’elle disait -elle avait sûrement raison, mais je n’étais pas dans un état qui me permettait de m’en rendre compte-, et, en homme intelligent que j’étais - uniquement quand j’étais sobre, bien malheureusement-, je filais discrètement et je m’éclipsais vers le bar, et l’affaire en restait là. Ou alors, je continuais de m’enfoncer. Or, elle avait un avantage considérable sur moi, c’est que moi, j’avais une grande gueule. Je vous laisse donc deviner pour quelle option j’avais opté, même si ça n’aurait pas surprit quiconque, y compris cette pauvre serveuse qui avait dû cerner mon personnage dès l’instant où j’avais passé la porte du restaurant et commencé à picoler. C’est que j’étais quelqu’un de tenace, je dirais même acharné et têtu, ce, même quand j’avais tord. Et j’avais tellement eu tord dans ma vie, j’avais tellement menti qu’une fois une idée implantée dans ma tête, je m’enfonçais dedans à des profondeurs vertigineuses, et je ne démordais jamais. C’est que, quand on s’invente une vie, il faut bien s’accrocher à ses idées avec ardeur. Disons que c’était une question d’habitude.
Bon, c’était à ce moment que la pauvre rentrait en scène. Je m’étais -enfin- tus, j’avais enfin réussi à la fermer. C’était maintenant au camp adverse, la riposte de l’ennemi, la balle était dans son camp. Bon sang, quelle balle, quelle précision dans les mots. « Vous voulez réellement que je perde mon temps à démonter le moindre de vos arguments aussi fiables que rencard 4 ? » Qu’elle prononce le nom de rencard 4 m’avait fait un choc. Comment savait-elle... ? Et puis, je me souvins que j’avais laissé échapper son nom. Et merde. De quoi me discréditer encore plus. Mais sur le coup, j’avais eu envie de lui répondre un grand OUI, qu’elle essaye de démonter mon discours en béton armé, convaincu que de toute façon, j’avais raison, et qu’elle pourrait tenter n’importe quoi, elle ne pourrait pas m’arriver à la cheville parce que mes arguments étaient supérieurs à tout. Ce oui, ça l’aurait mise au challenge. Me connaissant, je l’aurais même dit avec un grand sourire et un air satisfait sur le visage, persuadé d’être intouchable. Bon, finalement, dans un éclair de lucidité bienvenu, je m’étais abstenu de tout commentaire, merci pour mon salut. Néanmoins, elle ne s’arrêta pas là, oulà non. Il aurait été préférable qu’elle s’arrête, mais je n’oubliais pas que nous étions en plein combat verbal, où la moindre parcelle de ce qu’on pouvait grappiller à l’adversaire était signe d’une supériorité certaine. Quel combat, beau, acharné. Et même si elle avait l’avantage, je n’étais tout de même pas décidé à lâcher mon bout de lard.
Puis, elle m’avait affiché en bonne et due forme devant les autres clients. Sans même les regarder -j’avais les yeux rivés sur la serveuse-, je sentais pourtant leurs regards se braquer sur ma personne. Je sentais la lourdeur de ces regards, je savais même qu’une paire m’auraient fusillé sur place s’ils en avaient eu la possibilité. Sauf que tout ce flot de méchanceté me passait bien au dessus de la tête. En effet, sous les coups de l’alcool, bien peu de choses atteignent un homme, c’est pourquoi ce n’était sûrement pas sa tentative de me mettre mal à l’aise vis-à-vis des autres clients qui allait m’atteindre, plus encore parce que j’étais persuadé d’avoir raison. Après tout, ce n’était pas la première fois que j’étais un emmerdeur public, et, je présume, pas la dernière non plus. J’étais un habitué aux regards méprisants, même quand je ne le faisais pas exprès. Au contraire, toute ma vie j’avais toujours cherché à attirer l’attention d’autrui, alors dans un sens, j’avais exactement ce que je voulais, et même si les circonstances de cet attrait auraient répugné la plupart des gens sur terre, moi, je m’en moquais royalement. Et, pour bien lui montrer qu’elle ne m’intimidait pas le moins du monde, mon visage se fendit d’un sourire, l’air de lui dire que j’attendais patiemment qu’elle finisse sa tirade afin de pouvoir riposter à mon tour, et ainsi de suite. Oui, ne pas perdre de vue le combat, c’était chacun son tour jusqu’à l’épuisement de l’adversaire !
Puis, elle s’était installée devant moi. Je ne retranscrirai pas ici l’intégralité de son discours pour plusieurs raisons ; tout d’abord, elle avait parlé un petit bout de temps, et la plupart m’était passé au dessus de la tête, et puis parce que son monologue faisait preuve de bien trop de mauvaise foi pour qu’il mérite d’avoir sa place ici -venant de moi, c’est l’hôpital qui se fout de la charité, mais ce n’est qu’un détail, j’étais déjà éméché, j’avais donc une excuse-. Plusieurs fois, même, j’avais ouvert la bouche pour la couper dans son discours, mais elle n’avait l’air de n’y prêter aucune attention -je ne pouvais pas lui en vouloir pour ça, j’aurais fait la même chose-, et elle avait fini par conclure magistralement, avant de se lever. « … je crois qu’elle a bien fait de ne pas supporter un homme incapable de l’appeler par son prénom. Rencard 4… On a trouvé mieux comme surnom affectueux ! » Elle m’attaquait sur le plan personnel, et ça, c’était fourbe. Fourbe, mesquin, parce qu’en plus elle me faisait passer pour le méchant dans l’histoire, alors que je n’étais qu’une victime. Oui, j’étais la victime de rencard 4, et j’étais la victime de son caractère de cochon, j’étais juste son bouc-émissaire parce qu’elle avait eu une rude journée. Et le pire, dans l’histoire, c’est que moi, je ne pouvais pas l’attaquer sur le plan personnel. Elle était jeune, et manifestement assez intelligente pour tenir tête à un emmerdeur, c’est pourquoi elle était probablement étudiante et faisait un petit job en parallèle, donc, promise à un avenir pas médiocre. Si petit job il avait, émancipation des parents il y avait, alors même là-dessus, je ne pouvais pas la railler. Et puis, impossible de nier et de faire passer rencard 4 pour ma sœur ou une simple collègue, son titre étant relativement explicite.
Mais n’oubliez pas, j’avais une grande gueule et j’étais déjà un peu entamé. Soit, je m’enfonçais toujours plus dans les limbes de l’alcool. « Ecoutez, mademoiselle. Vous serez un jour en âge de comprendre comment les relations amoureuses fonctionnent, en attendant, vous êtes de corvée de vaisselle. Alors veuillez s’il vous plaît laisser de côté ma vie personnelle, et, d’ailleurs, figurez-vous que je connais son prénom, il s’agit simplement d’un choix stratégique afin d’éviter à toute présence féminine de m’approcher en me faisant passer pour ce que je ne suis pas, à savoir un connard. Parce que rencard 4 sous-entend que les rencards 1, 2 et 3 sont toujours en activité, or, je ne suis pas de ces hommes là. Bon sang, ai-je vraiment l’air de quelqu’un d’aussi volage ? » J’avais pris exprès un air un peu outré et offensé. Oooh, Marty. Des claques, je méritais des claques. Et mon astuce pour être crédible était de raconter ma vie en niant le tout en bloc. Oui, en fait, je savais précisément agir en connard -bon, j’étais un gentil connard, mais tout de même-, et oui, les rencards précédents étaient toujours en activité. Mon mensonge pouvait encore tenir la route, encore me faisait-il passer pour quelqu’un de tordu. Dans un cas comme dans l’autre, ce n’était pas bien brillant.
« Vous savez, vous auriez été plus agréable, j’aurais pu vous offrir quelque chose. Avec une telle attitude, une ristourne n’est même pas envisageable ! Arrêtez-donc de vous ridiculiser comme vous faites et soyez sympa, allez au bar pour laisser profiter ces deux jeunes mariés d’un petit repas agréable. Si jamais rencard 4 pointe son nez, vous aurez une table, c’est promis. » Hum, bon, j’avais tenté. Ca n’avait pas fonctionné, tant pis. Petit échec -je veux dire, en plus des autres-. Et, même si je ne relevai pas sa pique sur mon ridicule -parce que dans le fond, elle avait raison-, ce n’était pas parce que ma vie amoureuse était un désastre, preuve en est, que je me devais pour autant de ruiner celle des autres. Non, je n’étais pas comme ça, tout de même. « Des jeunes mariés ? Il fallait le dire avant. Apportez-leur du champagne en compensation, c’est moi qui paye. » Sûr de mon coup, je balançai un billet de cinquante sur la table, puisque, comme rencard 4 ne s’était pas pointée, je pouvais me permettre quelques extras. Levant ma coupe vide en direction desdits jeunes mariés, j’avais lancé dans le restaurant. « Santé ! » Et puis, il fallait dire que je tenais comme un chien à son bout de viande à rester là où j’étais, sans particulièrement de raison, je me permettais même des folies. « Bon, s’il vous plaît madame, je sais qu’on est partis du mauvais pied. Mais, vous seriez quand même bien aimable de m’apporter un steak. Je pense pas qu’on m’apportera ça au bar. » Oh oui, j’étais le chieur de service. Mais avec le sourire, attention.
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Sujet: Re: rencard 4 - ina Ven 26 Juil - 1:35
J'étais remontée à bloc, et pas vraiment dans le bon sens du terme. J'étais à deux doigts de rendre mon tablier. En fait non, j'allai le rendre ce tablier, après cet ultime service. Je méritais bien mieux que des clients désobligeant qui aimaient rabaisser les pauvres petits serveurs sous peine qu'ils sont clients. Ca me tapait sur le système nerveux. Je ne voulais plus de ça. Au bout de trois ans, c'était beaucoup trop. A courir partout, à faire du rendement pour finir par se faire cracher à la figure verbalement – pour avoir des ristournes en général – et être payé une misère. D'autant plus que les clients étaient, pour la plupart, d'une radinerie sans nom. Ils venaient avec des vêtements aux logos connus de tous pour prôner leur pseudo statut social à la noix, pour en mettre plein les mirettes, parlaient de manière savante pour se distinguer de la pauvre populace mais tiraient une gueule de trois mètre de long dès qu'il fallait mettre la main à la poche pour payer la note, et « oubliaient malencontreusement » de laisser un petit quelque chose au serveur. Pires étaient ceux qui nous prenaient pour des vides poches en nous laissant les fameuses pièces couleur rouillent qui se battaient dans un duel bien minable sur la coupelle. Les clients n'avaient honte de rien et c'était désolant. Parce que ça se voyait qu'ils ne savaient pas ce que c'était de se farcir une bande de sans gêne le temps d'un court repas pour eux, le temps d'un long et interminable service pour nous. Ils ne savaient pas donc ils méprisaient.
Ce client, à défaut d'avoir marqué mon esprit positivement, venait de me faire prendre conscience que je venais d'arriver au terme de ma ligne de patience. Ce travail n'était plus du tout pour moi. Il me fallait des responsabilités, quelque chose de rythmé où l'évolution est possible, pas d'un boulot de larbin où je rentrais chez moi avec les pieds en feu, les jambes lourdes et la tête en vrac. Ce n'était définitivement plus pour moi. Mais avant de démissionner, je me devais de terminer ce service par respect envers mon patron qui m'a recruté alors que j'étais qu'une sauvageonne prête à taper la moindre personne qui la ramènerait trop. Mon patron avait été comme un père d'adoption pour moi. Il m'avait pris sous son aile et je faisais en sorte de ne pas trop le décevoir. Ça avait marché pendant trois ans mais là, je me devais de tirer ma révérence. Passer sa vie à servir les autres, ce n'était pas franchement une vie. Pas la mienne en tout cas.
C'est certainement pour cette raison-là que j'ai grandement pris sur moi quand le client a, encore une fois, pris un malin plaisir à me rabaisser me reléguant à une petite ménagère de quatre ans d'âge. A l'entendre parler, on pourrait croire que cet homme était âgé d'une soixantaine d'années alors qu'à vue d’œil, il devait être dans la quarantaine. Quarante-cinq ans peut-être. Il fallait mieux laisser couler plutôt que d'encastrer mon plateau dans sa tête à claques. C'était mon dernier service après tout. Il fallait que je parte proprement. Alors je ne pris même pas la peine de répondre à cette énième insulte et je continuai mon discours, espérant que cet incident serait définitivement clos et que la soirée pourrait suivre son cours tranquillement. Mais alors que je mentionnais la présence de jeunes mariés désirant dîner, le client infernal en profita pour faire un énième coup d'éclat – comme s'il ne s'était pas suffisamment ridiculisé. Pauvre homme. Il devait grandement s'ennuyer dans sa vie. Bref, là n'est pas la question. Il s'est mis à parler encore plus fort et, dans un excès de zèle, a balancé un billet de cinquante euros sur la table pour ensuite commander du champagne. Puis il a commencé à porter un toast – il a cru que c'était le restaurant à son père ou quoi ? Enfin moi qui m'attendais au pire, je fus sur le cul lorsqu'il osa me demander de lui service un steak. Je pourrais presque cru qu'il se foutait royalement de ma gueule celui-là.
J'ai senti la colère gronder en moi mais je pris une grande inspiration pour faire redescendre la pression. Je ne savais pas si c'était l’enchaînement des événements ou cette faculté qu'il avait à me rabaisser avec ce ton abominablement condescendant qui m'énervait le plus.
« Ne vous donnez pas cette peine. Je crois que ce que tout le monde espère, c'est que vous vous taisiez et que vous vous comportiez comme une personne sainte d'esprit, pour changer. »
Au moment où je prononçai cette phrase, une dame derrière moi acquiesça avec un grand « oui » qui avait le mérite de sortir du cœur.
« Conservez ce précieux billet pour la jeune et jolie serveuse qui s'est refreinée plus d'une fois pour ne pas vous envoyer son plateau en pleine figure. Continuai-je avec le sourire, manière de bien faire passer mes propos. »
Je rangeai alors le billet dans la poche de sa chemise avant de poser une de mes mains sur son épaule et de le pousser vers le bas afin de l'inciter à s’asseoir sagement.
« Je vous amène votre commande le plus rapidement possible, Monsieur. »
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Sujet: Re: rencard 4 - ina
rencard 4 - ina
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