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| Sujet: River Curtis : ❝ Too young to hold on and too old to just break free and run. ❞ Sam 20 Aoû - 22:16 | |
| River CURTIS « fiche technique »▪ Date de naissance : 05/07/1988 ▪ Ville natale : Montréal, Canada ▪ Surnom : Curtis ▪ Emploi : Musicien ▪ Statut : Célibataire ▪ Groupe : La javanaise ▪ Avatar : Jeffrey Buckley
▪ Pseudo : everydayfeelsliketoday ▪ Note du forum : 20/20 ▪ Validation : partie pour le staff
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« il était une fois... Moi »
COMMENCEMENTS D'UNE VIOLENTE DOUCEUR J’étais né, sans préoccupation. J’ai existé, je pouvais le dire. Sans pouvoir, sans vouloir le tout, le rien, je n’avais décidé de rien, même pas de cet instant, ce seul instant où j’ai appris à vivre, respirer, crier. Cet instant où tout se mélangeait, futilement, où j’étais le plus abandonné à moi-même. Je respirais l’air sec, aux parfums des plus aseptisés. Je respirais la vie, à l’état pur, sans esprit de conscience. Je semblais la détester, cette vie qui m’était donnée, collant de fluides des plus abjects, teinte rougeâtre, ma voix se dispersant dans la pièce emplis de ses géants sans cœurs qui m'agrippaient, m’emprisonnaient. Je n’étais rien que ce garçon immaculé, né de la plus bête façon, entouré du blanc d’un paysage industrialisé, dénué de saveurs.
Né d’une mère anonyme, d’un père qu’il l’était encore plus, j’ai vécu sans modèles. Dans mon miroir, aucun autre que moi. Fils d’inconnus pauvres, je représentais l’archétype de l’enfant né anonymement. Reculé, imparfait, j’étais inconnu à moi-même, vagabondant dans une enfance mitigé, dans une adolescence sans saveur. C’est que je ne comprenais pas cette ferveur et cette colère qui animaient les gens: je vivais dans une douce incompréhension, perdu à moi-même, loin des autres. Lunatique, je me présentais de manière incongrue dans un monde où tout le monde savait, où tout le monde s’indignait. J’étais une poussière, qui rendait les gens inconfortable de ma douceur avec laquelle je me posais, sans opinion, sans passé, sans futur. Je ne comprenais pas cette fureur de vivre: je vivais dans un présent qui ne m’enchantait pas plus que les autres. Je vivais chaque jour ni comme une délivrance, ni comme une souffrance: j’existais à peine, souffle brisé, tentant d’humer ce parfum de vie que j’avais tenté d’imaginer. Il n’en restait pas moins que, sans rester inhumain, mon cœur palpitait et mon sourire s’illuminait, de temps en temps, non insensible aux quotidiens effilochés, au peu de gens qui compatissaient avec mon caractère nonchalant, qui venait et s’en allait, libre de sentiments banals.
De mon regard nerveux, inquiet, rêveur, je cherchais, dans le jour. Je cherchais qui j’étais, où j’appartenais. Je touchais à tout, je me blessais, imprudent de ferveur, brûlant d’une malsaine curiosité de mes origines qu’on m’avait toujours caché. Né d’inconnus qui m’avaient abandonné à mon sort, sans but, sans indices, je gardais cette odeur âcre d’inconnu, dans ma bouche sèche, sur mon visage qui se faisait d’une sourde tristesse, d’un sourire doux.
QUELQUE CHOSE COMME LE COEUR J’étais jeune. J’étais un enfant. À Montréal. Je parlais anglais, français. Je n’avais pas un accent caractéristique. Je n’avais rien d’exotique, d’anormal... Les regards étaient indifférents, autour de moi, et, en quelque sorte, ça m’arrangeait. Ma vie, réglée autour d’orphelinats et de maisons de plus en plus étrangères et anonymes, tout ça, c’était secondaire. Je pouvais la voir, elle.
Je ne lui parlais pas beaucoup. Mais je me souviens d’elle. De Kaylee. De cette petite fille, de mon amie, un peu plus jeune, à une fragilité complémentaire à la mienne. Une enfant peut-être moins choyée, moins indifférente. Le visage maquillé de blessures mal-guéries, de symptômes familiaux répugnants. L’étincelle triste, dans ses yeux. J’avais cru, un jour, l’apprécier, profondément.
Un soir, je l’avais invité à mon premier concert. À ma guitare, à ma voix, en fond. J’allais avoir 18 ans. Elle, elle avait 16 ans. Mais elle n’était pas venu. Et c’est ce soir-là, que tout a changé, pour elle, et un peu pour moi. Je m’étais persuadé que c’était mon erreur, après. De l’avoir laissée seule.
Il était arrivé quelque chose, je le sentais. Mes doigts tremblaient. Ma voix trébuchait. Mes chansons déchiraient les coeurs, doucement. Mais le concert, maintenant, ma guitare, ma passion, la musique, tout ça, c’était devenu secondaire.
Elle était différente, après. Je n’avais osé vraiment lui reparler. J’avais revu sa mère. Sa mère qui pleurait. J’avais deviné son père, dans un coin, toujours pathétique, qui me répugnait un peu, toujours. Et, sans me le dire, sa mère, ses larmes, et Kaylee Donavan... J’avais deviné quelque chsoe d’affreux. Je m’en étais voulu, de ne pas avoir été là, à marcher avec elle, comme d’autres soirs, à l’accompagner doucement, comme un étranger, comme un ami, comme un amoureux.
Je m’en étais tellement voulu... Après, j’ai du m’en aller des foyers pour jeunes. J’ai du me trouver un emploi misérable. Et finalement, j’ai quitté Montréal pour d’autres métropoles, aux États-Unis. Je n’appartenais à personne, fianlement. J’étais libre d’être misérable, peu importe où j’allais.
FUITES PERPÉTUELLES À Seattle. À Chicago. À Brooklyn. C’était toujours la même histoire qui se répettait. Moi, qui me perdait, avec une barbe de quelques jours, un peu plus pathétique, renfrogné. J’habitais chez des connaissances, je dormais sur les sols de bois pourris, dans des soirées qui duraient longtemps, dans l’écho de la musique, dans le tambour des coeurs palpitants, des voix trépidantes. Je surprenais les gens avec l’infinie douceur écorchée de quelqu’un qui n’avait pas assez vécu, qui ne connaissait que trop peu.
J’ai passé quatre ans, comme ça. En perpétuelle fuite, ma silhouette cadavédrique, mon sourire fou, brisé, triste, mes doigts effilochés contre des guitares de bois médiocres. Moi, sans rien d’autre que des feuilles de papiers, un stylo, une guitare, une sincère envie de vivre tout, en même temps, de retrouver l’essence de quelque chose, d’un but pour vivre, d’une raison pour continuer.
Je m’exilais, de plus en plus loin, pour mieux me perdre, me retrouver. L’alcool me donnait mal au coeur. Je m’égorgeais, quand je fumais. Des soirées à jouer l’alcoolique, après avoir joué une dizaine de mélodies, dans des bars inconnus, des endroits miteux.
J’étais encore cet enfant, un peu trop innocent, un peu trop doux.
MANIÈRE DE VIVRE Je n’ai pas beaucoup changé. Mes cheveux sont un peu gras. Je sens la cigarette de la veille, l’odeur nostalgique, un monde arrêté, une poésie désenchantée. Je regarde le sol. On dirait que mes yeux pleurent. Et ma voix, elle s fend en deux, de la plus délicate des façon.
Je chante. Ma silhouette se courbe contre elle-même, contre ma guitare, sur la scène.
Je viens d’arriver ici. C’est grand, c’est inconnu. Ce n’est pas tant romantique qu’on le dit. Moi je suis simplement venu, avec mon unique valise, avec mon seul veston usé.
Ce sera, des mois, encore, d’une nouvelle ville, des chants qui se perdent dans ma gorge. Je ne connais encore rien, j’ai l’impression. J’aurais voulu rester là-bas, à Montréal. J’aurais voulu rester avec elle, ce soir-là. Pas m’en aller, avec ma guitare.
Mes sourcils se froncent doucement, je chante, sans me délivrer. Je suis toujours prisonnié. Et mélancoliquement, doucement, un sourire masque mon visage.
Rien n’est plus parfait que l’ignorance complète, l’inconnu. Ici, j’étais bien. Personne ne me reconnaissait. Je pouvais être, rester cet enfant, qui vivait un peu mal, mais qui souriait, qui ne connaissait pas grand chose, et qui ressentait toujours un peu trop. Je pouvais continuer, mes doigts sur ma guitare, ma voix dans l’écho du microphone, à me consoler, à émouvoir un public qui ignorait tout de la plus grande histoire pathétique, de la plus insignifiante des existences.
Dernière édition par River Curtis le Dim 21 Aoû - 21:19, édité 8 fois |
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