Grace

Noel et les fêtes viennent de passer et ça fait foutrement du bien. J’en avais plus que ras-le-cul d’avoir du monde chez moi et de voir tous les jours la tronche de mon frère et de sa petite famille me jugeant d’un simple regard du genre « fais gaffe Jim, t’es entrain de foirer ta vie ». A baffer ces gens-là. Qu’ils retournent vivre en Pologne et qu’ils me foutent la paix. D’ailleurs, je comprends même pas pourquoi il est venu c’lui-là. Il nous a fais assez de mal comme ça avec maman. Parti. Comme s’il était mort. Du jour au lendemain. Jamais compris. Et maintenant, il essaye de revenir dans nos vies avec sa femme qui parle pas un mot de français et leur gosses. Franchement, j’suis soulagé. J’étais au plus mal pendant les fêtes. Même pas le courage d’appeler un pote et de squatter chez lui. J’ai tout simplement fais en sorte de bosser le plus possible au bar pour ne pas être présent. Du coup, j’ai même travaillé le 31 au soir et donc j’ai pas pu faire la fête avec ceux qui me sont chers. Fuck ! J’ai eu vite fait des échos via Kyhan ou Louve mais rien de plus. J’men branle un peu après tout. Il est samedi soir, pas de soirée de prévu, j’travaille pas et j’me fais chier comme un ras mort. Je bidouille sur mon Iphone et relis ma conversation avec Grace. J’tombe direct sur des insultes. J’lui ai posé un lapin la dernière fois qu’on devait se voir. En même temps, c’est au moment où je m’apprêtais à partir chez elle que mon frère s’est pointé chez moi. Impossible donc de bouger. Malheureusement. J’ai tout juste envoyé un SMS à la blonde pour lui prévenir que j'viendrai pas. Pas d’explication. Elle m’a incendié. J’peux comprendre. J’aurai sans doute fais la même chose à sa place. Depuis, pas de nouvelles d'elle. Ça me fait clairement chier. J’la déteste et en même temps elle me manque. J’aime niquer avec elle, ouai. Et.. si j’me bougeais les fesses et que j’allais la voir ? C’est sûr cette idée spontanée et improbable que je me retrouve dans le dix huitième arrondissement de Paris quelques minutes plus tard. De là, j’rentre dans l’appart’ de M’dame D’haeyer et me débrouille pour arriver directement devant sa porte. Un passant m’a ouvert et m’a évité de sonner à l’interphone. Heureusement d’ailleurs car je doute que la jeune femme m’aurait donné l'accès à son immeuble en vue de notre dernière conversation. Planté devant sa porte d’entrée, j’regarde l’heure sur mon téléphone qui m’indique qu’il est 23h48. Deux solutions s’offrent à moi : soi Grace est sortie et n’est pas revenue, soit elle est chez elle. J’sais pas trop mais je n’ai rien à perdre. Surtout maintenant que je me suis déplacé. J’sonne donc et j’attends. Par chance, c’est Grace qui m’ouvre la porte. J’sais pas si elle est seule ou non mais un sourire gagne mes lèvres. « Grace. » J’crois qu’elle hésite à me claquer la porte au nez. Pour ne pas que ça se produise, je décide de bloquer la porte avec mon pied. « Attends. Laisses moi rentrer s’il te plait. » A tous les coups, elle va me crier dessus et essayer de me faire déguerpir. Mais j’suis du genre insistant et j’obtiens généralement ce que je veux donc je ne me fais pas plus de souci que ça. « J’suis désolé. » Première fois que je m’excuse auprès d’elle. Bon, c’est pas tellement sincère mais j’me dis que si je le fais pas, je risque de ne plus jamais la revoir et ça me ferait bien chier. « J'en ai pas pour longtemps. Laisses moi juste deux minutes pour m'expliquer chez toi. » Pour l'instant, elle me fais barrage et m'empêche donc de rentrer mais à présent, j'ai l'espoir qu'elle me donne une chance. J'suis du genre convaincant quand il faut l'être et j'sais aisément faire les yeux doux. Après, ça reste toujours plus dure avec Grace puisqu'officiellement on se déteste. « T'es seule ? » J'croise les doigts pour que ce soit le cas. J'ai toujours dans l'esprit d'arranger les choses puis de m'envoyer en l'air avec la jeune femme. Ça fait tellement longtemps..

La nuit est tombée sur Paris depuis déjà un petit moment. Il est samedi soir et pour la première fois depuis longtemps, tu n'as pas envie d'être à l'extérieur. Tu es donc en ce moment même, dans ton lit. Plongée dans le noir, enfermée dans le silence le plus complet. Cigarette aux lèvres, le regard perdu sur le seul petit point de lumière que tes yeux ont pu capter. La lueur de la lune essayant de pénétrer dans ta chambre par le biais des stores fermés. Tu frisonnes. C'est qu'il fait froid dans cette pièce, pour ne pas changer. Et que t'es pas non plus habillée chaudement. Non, t'es en sous vêtements. Seulement couverte par le drap blanc qui te sert de recouvre lit. Tu écrases ta cigarette dans le cendrier le plus proche et en prends une nouvelle. Cela fait maintenant bien une heure que tu les enchaîne sans ne rien faire d'autre. A part penser. Et même ça, t'aimerai que ça cesse. Sauf que ta tête est pleine de pensées plus noires les unes que les autres. Foutue période. Heureusement que ce week end là l'achevait. La sonnerie de ton duplex se fait entendre et tu sursautes dans ton lit. Tu tâtonnes du main pour retrouver ton téléphone et voir l'heure qu'il est. 23h48. Qui pouvait venir te voir à une heure pareille? Tu souffles légèrement et allumes ta lampe de chevet. Histoire d'y voir un peu plus clair. Tu te lèves et attrape une robe de chambre en soie noire. Que t'enfiles, histoire de ne pas aller ouvrir à moitié à poil. Tu disciplines tes cheveux d'une main, tires une latte de ta cigarette et sors de ta piaule pour te diriger vers la porte d'entrée. Tu prends même pas la peine de vérifier par le judas qui se trouve de l'autre côté, avant d'ouvrir. « Grace. » Oh non, tu ne connais que trop bien cette voix et tu n'as absolument pas envie de voir son propriétaire ce soir. Tu t'apprêtes à lui claquer la porte au nez mais Jim va bien plus vite que toi et l'a bloque avec son pied. Putain, il fait chier. « Attends. Laisses moi rentrer s’il te plait. » S'il te plaît ? T'en as pas envie mais il te laisse pas vraiment le choix avec son putain de pied. « Qu'est ce que tu veux Jim ? Rentres chez toi. » Sauf que tu sais qu'il ne lâchera pas le morceau tant que tu l'aura pas laissé entrer. Chieur jusqu'au bout. « J’suis désolé. » Haha, comme si t'allais y croire. T'es peut être blonde mais t'es loin d'être conne. « J'en ai pas pour longtemps. Laisses moi juste deux minutes pour m'expliquer chez toi. » S'expliquer ? Ah ouais.. de t'avoir poser un lapin alors qu'il avait tant envie de te baiser ? Tu l'avais mauvaise celle là. Même si dans un sens, c'était pas plus mal qu'il ne soit pas venu ce soir là. C'était pas le bon soir, foutue période. « T'es seule ? » Tu pouvais aussi mentir à cette question et il se barrerait. Mais tu savais qu'il reviendrait plus tard, pour recommencer. Alors autant ne pas mentir et en finir tout de suite. « Oui. » T'ouvres la porte et te décales pour le laisser passer, finissant par capituler. Tu lui adresses un vague regard avant de lui dire : « Rentres, t'as deux minutes pour t'expliquer. Pas plus. » Tu le laisses fermer derrière et rejoint la cuisine histoire de vider ta cendre dans l'évier. Il suit tes pas et tu viens t'asseoir sur le plan de travail, refermant ta robe de chambre sur ta taille. Tu le regardes quelques secondes avant de lui adresser quelques mots. « J't'écoute. » Et parce que tu vous connais trop bien, tu sais que cet instant ne durera jamais deux minutes. Foutu Jim.

Grace, c’est un peu moi en version meuf. On se ressemble pas mal niveau caractère et attitude et au final, c’est ce qui fait qu’on se déteste je crois. Pourtant, avec d’autres gens de ce gabarit, ça passe très bien. Genre Louve ou Kyhan tiens. Peut-être pas aussi désinvoltes que Grace remarque. J’sais pas. C’est comme ça. A chaque fois que Miss d’Haeyer ouvre la bouche, j’ai envie de la faire taire et limite de la frapper. J’saurais pas dire pourquoi. En même temps, à part l’insulter, j’serai incapable de lui faire du mal. Si j’ai une tête à avoir fait de la prison, j’suis pas quelqu’un de violent. Et puis, Grace n’est pas ma pire ennemie non plus. Il arrive, quelques fois, que j’apprécie sa compagnie. Quoi que j’apprécie sa présence pour tout autre chose en fait. Elle est, le meilleur coup que je me sois tapé jusqu’à présent. Entre elle et moi, niveau sexe, c’est indescriptible. Il y a une réelle alchimie entre nous. J’en suis presque accro. J’crois qu’elle aussi. J’en sais rien. Après tout, j’connais pas plus que ça la jeune femme. Son anatomie, oui, mais ce qu’elle a dans la tête, non. Et il faut dire que je n’ai jamais cherché à la découvrir. Notre relation actuelle me convient : une partie de baise torride de temps à autre. J’pense qu’il en est de même pour elle. Sinon, on s’verrai plus en dehors des soirées. D’ailleurs, pour le moment, c’est bien parti pour que ça se passe comme ça. Le lapin d’la dernière fois, elle l’a pas trop appréciée. J’l’ai fait passer pour la dinde de noël et forcément, elle m’en veut. Heureusement, j’ai genre de l’expérience avec les nanas et donc j’suis prévoyant. Et hop, que j’laisse glisser mon pied en bas de sa porte d’entrée pour éviter de me prendre un vent. Comme prévu, la jeune femme n’a pas envie de me voir et me remballe. Dommage pour elle, je suis un mec insistant. Je prête alors vaguement attention à sa robe de chambre foncé et j’imagine sa tenue en dessous : des sous-vêtements sexy voir rien du tout. Hum.. je fantasme quelques secondes le temps de redescendre sur terre et de me retrouver face à une Grace plus que glaciale. J’comprends aussitôt que si je ne m’excuse pas, je n’arriverai à rien. Alors je m’exécute. Je parais presque convaincant avec mon petit air tristounet. Mais faut que j’en rajoute et que je lui fasse comprendre que je ne lâcherai rien avant de m’être expliqué et d’être rentré chez elle. Car ouai, si je m’explique dans le couloir, il y a de fortes chances que j’y reste et c’est pas vraiment le but. Elle me manque, c’est indéniable. J’ai donc envie d’elle et j’lâcherai pas le morceau. Pour autant, c’est pas gagné. Si ça se trouve, elle n’est pas seule chez elle. Autant le savoir immédiatement. Et c’est mon jour de chance puisqu’il se trouve qu’elle est toute seule. Je jubile aussitôt intérieurement, surtout quand elle me donne le feu vert pour rentrer, ce que je n’hésite pas une seconde à faire. Me voilà donc dans l’appartement de la belle, la suivant jusqu’en cuisine et prenant rapidement mes aises en m’appuyant non loin d’elle contre une chaise. « J’voulais vraiment venir la dernière fois. T’étais pas censé être le dindon de la farce. » Putain, j’suis vraiment naze pour des excuses. J’ai pas vraiment l’habitude d’en faire aussi et encore moins, quand celles-ci sont sincères. « Ce que j’veux dire c’est que.. mon frère a débarqué chez moi à la dernière minute. Il revenait de Pologne et.. j’pouvais juste pas me barrer. » J’ai l’air à cet instant précis d’inventer un gros mytho et pourtant c’est la stricte vérité. « ‘fin voilà. J’voulais vraiment venir. Tu me manquais et.. » Je m’approche aussitôt d’elle et donc du plan de travail, puis laisse glisser une de mes mains délicatement sur la cuisse de la demoiselle. « tu me manques toujours. » Et là, je dépose mes lèvres sur la peau fraiche du genou de la madame tout en m’emparant d’une de ses mains et en levant mes yeux vers les siens avec la même bouille que le Chat Potté. « Terriblement. » Si elle craque pas maintenant, c’est que j’ai mal fait mon boulot. Je m’en voudrais.

A croire que tu ne peux pas passer une soirée toute seule dans ton lit, à croire que le monde entier est contre toi, ne voulant pas te laisser en paix. Si t'es pas sortie ce soir là, c'est pour de bonnes raisons. Tu veux être seule, toute seule. Tu veux ruminer en paix, entretenir ton cancer sans que personne ne te fasse chier et essayer d'arrêter de penser. Tout en arrêtant pas de penser. Tu veux rester dans cette pièce froide qu'est ta chambre, à demi nue. Tu veux être seule, c'est pas compliqué non ? Tu l'étais, jusqu'à ce que ça sonne à la porte et que tu y découvres Jim derrière. Jim, qu'est ce qu'il te veut ? Sûrement encore et toujours la même chose : te baiser. C'est pas vraiment le bon moment, c'est jamais le bon moment en ces temps ci. Foutue période, comme tu dis. T'as pas envie de lui ouvrir, t'as pas envie de lui pardonner de n'être pas venu la dernière fois. Mais tu sais très bien comment il est. Parce que justement, il est comme toi. Il ne laisse jamais tomber et tu le sais très bien. Tu sais très bien que ça sert à rien de mentir, parce qu'il reviendra à la charge à un moment donné. Alors tu te dis que vaut mieux mettre tout au clair tout de suite, lui ouvrir, le laisser s'expliquer pour ensuite le dégager. Oui, ça c'est le plan initial. Mais tu sais aussi, qu'avec lui, rien ne se passe comme tu le prévois. Tu souffles, concédant à lui ouvrir. Lui expliquant qu'il a deux minutes pour se justifier. Ni plus, ni rien. Tu pars t'installer à la cuisine, t'asseoir sur le plan de travail. Couvrant le peu de chair que tu peux. Et t'attends, t'attends que les explications fusent. Et elles ont intérêt à être bonnes. Tu le regardes, alors qu'il commence tout juste à s'expliquer. « J’voulais vraiment venir la dernière fois. T’étais pas censé être le dindon de la farce. » Tu lèves un sourcil. Ouais, dindon de la farce c'est vraiment la comparaison parfaite pour cette période de l'année. Mais tu ne dis rien, le laissant continuer de déballer ses minables excuses. « Ce que j’veux dire c’est que.. mon frère a débarqué chez moi à la dernière minute. Il revenait de Pologne et.. j’pouvais juste pas me barrer. » Est ce qu'il ment ? T'en sais strictement rien. Parce qu'à part toute son anatomie, tu ne sais rien de lui. Et c'est peut être mieux ainsi. Tu l'observes, cherchant le moindre petit signe qui pourrait te dire qu'il ment. Mais rien, tu ne le connais pas assez bien pour savoir quand il ment ou non. « ‘fin voilà. J’voulais vraiment venir. Tu me manquais et.. » Oh, tu lui manquais, vraiment ? Foutaises. Il se rapproche de toi, venant déposer une de ses mains sur ta cuisse. Oh non, pas de rapprochement de ce genre où t'es pas sûre de tenir à ton plan. « Tu me manques toujours. » Mh, mh ? Tu sens ses lèvres sur ton genou et ton corps ne peut s'empêcher de réagir à ça. Tu frisonnes donc. Tu frisonnes quand tu voudrai paraître froide et inatteignable à tout ce que peut te dire ou faire Jim. « Terriblement. » C'est qu'il insiste, en plus. Tu souffles, le regardant. « Tu sais que t'es chiant ? » Oh oui, bien sûr qu'il le sait. C'est peut être ça le pire, d'ailleurs. « Si tu crois que j'suis du genre à laisser passer aussi facilement, tu te trompes Jim. » C'est ce que t'aimerait qu'il croit, plutôt. Quand tout ton corps te demande juste de céder. « J'me fous totalement que j'te manque, tu me manques pas à moi. J'étais bien toute seule, dans mon lit. T'es chiant. » Tu l'as déjà dis ça, Grace. Tu souffles, une nouvelle fois. Tentant de faire abstraction à cette envie profonde de te jeter sur lui, littéralement. Non, non et non. Tu l'as déjà fait, trop de fois. Tu peux pas le laisser croire qu'il peut te baiser vraiment quand il en a envie. Sauf que c'est le cas, ça l'a toujours été. Et t'as beau résister là, dans les cinq premières minutes, t'es pas sûre que ça va durer bien longtemps.