Au fond, on a tous la même vie. On jubile, puis on rêve. On fulmine, puis on saigne. On fatigue, puis on crève. Tout le monde finira par mourir. Chaque personne est condamnée à déployer ses ailes vers l’au-delà un jour où l’autre. Quand ce jour sinistre fait son ultime apparition, vous n’êtes pas seul à souffrir. Avez-vous déjà imaginé votre mort? La douleur que l’on peut ressentir, le mal que cela peut causer auprès de nos proches, la vide que l’on peut laisser auprès de nous? Je n’ai jamais ressenti cela. Sinon, je ne serais pas là à vous parler à cette heure actuelle. Cela ne m’est jamais tombé dessus, mais je l’imagine très souvent. Je sais dors-et-déjà que le jour de ma mort sera futile pour les autres. Je n’ai plus de proche. Mon père a levé les voiles à jamais dans un accident de voiture, et ma mère refuse catégoriquement de m’adresser ne serait-ce qu’un centième de syllabe. Je suis seule. Je n’ai personne pour me rassurer. Souvent, je me questionne. Je me demande ce que j’ai pu faire au monde pour mériter une telle solitude, un tel manque. Je ne veux pas mourir vieille et seule. Je veux fonder une famille, je veux laisser mon empreinte sur ce monde, aussi terrible qu’il soit. Je veux être épanouie.
Je m’appelle Eileen Maddie Lüger. Vous devez vous en doutez, je suis allemande. Je suis née à Berlin un 9 septembre, il y a vingt-deux années de cela. A la mort de mon père, je suis revenue en France, à Perpignan. Je ne parle que légèrement le Français, mais j’apprends. Mon accent est très prononcé. Il peut faire rire comme il peut faire craquer. Je suis douce, agréable, mais aussi impulsive et rancunière. Quand j’ai annoncé à ma mère que j’allais quitter le nid familial du sud de la France, elle coupa définitivement les ponts avec moi. Je ne savais pas qu’une mère serait assez gonflée pour agir de la sorte, mais elle l’a fait. Paris, c’est pour moi un nouveau départ, une opportunité en or à saisir. Là-bas, je pourrai trouver un travail dans un café et qui sait, peut être réaliser mon rêve de gosse en ouvrant le mien!