L'enfant courait dans les champs de blé, le soleil tapant sur sa tête, lui donnant la migraine. Mais elle n'était pas du genre à se laisser aller aussi facilement à la fatigue et à la douleur, elle venait de trouver un jouet qu'elle risquait de perdre, et elle voulait le sauver. Alors, courant comme une folle, la main jetée en avant, elle essayait de le rattraper. Elle avait huit ans, les cheveux blonds avec de doux reflets roux, et elle ne faisait pas cas du hurlement de sa mère qui essayait de la faire revenir vers elle. Elle était en colère, mais Lily-Rose ne semblait pas s'en soucier. Pas tout de suite en tout cas. Elle était bien plus inquiète à l'idée de laisser s'envoler cette plume qui était venue se poser tantôt sur sa jambe. Elle ne savait pas quel animal avait bien pu la perdre, mais elle l'avait trouvé à son gout, et la désirait. Elle était belle cette plume, avec ses milliers de couleurs et sa finesse. Mais cela la rendait aussi vulnérable et légère, et elle s'envolait bien trop facilement au gout de la jeune enfant qui venait de le découvrir. Dans un ultime élan, elle sauta et attrapa la plume dans sa main potelée.

LA MERE — Lily-Rose ! Allez viens, on rentre à la maison !
LA FILLE — Oui Maman. J'arrive.

La Plume à la main, elle se jeta dans les bras de sa mère, et ensemble, elles retournèrent à l'hôtel pour récupérer leurs valises et rentrer à Paris. Elles venaient dans le Sud tous les étés, car c'est là que les grands-parents de la fillette avaient décidé de passer une retraite paisible. Sous les oliviers, bercés par le champs des criquets et des sauterelles, ils aimaient plus que tout l'arrière pays, et ils s'y plaisaient comme si ce fut le paradis. Lily-Rose et sa mère descendaient de la Capitale tous les étés pour leur rendre visite. Le père de la jeune enfant ne les accompagnait pas, car son travail l'obligeait à rester sur Paris sans arrêt. Il était le gérant d'une des brasseries les plus appréciées de la Capitale. Quant au grand frère de Lily-Rose, il était parti aux Etats-Unis cette année-là pour une année sabbatique après l'obtention de son BAC. De fait, seule sa mère fut témoin de ce qui sera dans l'esprit de l'enfant, un évènement majeur de son existence.

Elle sortie du tatoueur qui se trouvait dans le 18ième arrondissement. C'était une amie de Lily-Rose qui tenait le magasin en question. Une jeune demoiselle qu'elle avait rencontré aux Beaux-Arts de Lyon et avec qui elle était rentrée sur Paris après avoir reçu son DMA (Diplôme des Métiers d'Arts) afin de suivre une spécialisation. Mais la belle Morgan ne resta pas bien longtemps dans les études, et très vite elle décida de suivre un cursus différent afin de devenir tatoueuse. Cela lui réussissait bien car son commerce fonctionnait grandement. Lily-Rose était venue pour se faire tatouer une plume sur la cheville. La plume était devenue son obsession. Il lui semblait en voir partout, tout le temps. Elle la travaillait, la dessinait, la recherchait. Elle ne vivait que pour et par la plume. Elle rentra à l'hôtel qui se trouvait face au Moulin Rouge, où elle vivait à l'année, louant une chambre avec son salaire qui était conséquent. Il faut dire que les plumassières se font de plus en plus rare dans ce monde. Elle travaillait pour le Moulin, le Lido et la majorité des cabarets de la Capitale. Ce soir-là, elle devait se rendre au Lido pour terminer quelques tenus en plume. Elle y fut accueilli par son patron.

LE PATRON — Mademoiselle Clarck ! C'est une catastrophe ! Une de nos danseuses vient d'arriver et sa tenue est entièrement vierge ! Vous devez faire quelque chose et vite.
LA FEMME — Ne vous inquiétez pas, je m'occupe de tout. Retourner derrière votre bureau.

Elle était souvent d'une simplicité déconcertante, et la majorité des gens la voyait comme quelqu'un de passionnée. Mais c'était aussi une femme survoltée qu'il ne fallait pas avoir contre soit au risque de perdre tout. Elle était colérique et elle n'aimait pas être prise pour une bille. C'est un trait de caractère essentielle pour réussir dans le milieu du spectacle parisien. Elle l'avait appris. Plus tard, alors qu'elle terminait cette tenue au dernier moment, un des pianistes vient la rejoindre dans sa loge et l'embrassa tendrement. C'était son jouet du moment, un homme simple et gentil. Un homme ... Elle en changeait parfois, et derrière la porte la danseuse qui avait été sa maitresse durant trois ans serra les dents et partie en pleurant.

Elle rentra chez elle en claquant la porte. Se délestant de ses talons, elle se servit un verre de vin et se déshabilla. Le service d'étage vint lui apporter son dîner alors qu'elle se trouvait dans son bain et elle ne bougea pas même un orteil, habituée à tant d'allers et devenus dans sa chambre. C'était cela quand on vivait dans un hôtel. Heureusement, vivant ici depuis bientôt cinq ans, elle avait pris ses habitudes, et elle vivait en compagnie d'un chat appelait Melchior et d'un perroquet, qui était comme la prunelle de ses yeux. Si le chat vaquait le plus souvent à ses occupations, le perroquet ne la quittait quasiment jamais. Il n'aimait pas la solitude, et il était tolérer par les patrons et les clients de la jeune plumassière. Elle l'adorait. Il était un cadeau de son père pour fêter son premier emploi en tant qu'artisan indépendant, et il était aussi son bien le plus précieux. Nue, elle se promenait dans sa chambre en mangeant les petits toasts qu'on lui avait apporté. Plus tard, quelqu'un vint toquer à sa porte, et elle ouvrit à celle qui fut son amante jadis. La fille de tantôt.

L'AMANTE —  Tu me manquais ...
L'AMANTE — Entre...

Elle ne disait jamais non a un peu de plaisir. A une belle compagnie. Que ce soit celle des femmes ou des hommes. Elle vivait comme une adolescente, sans se préoccuper des impôts, des enfants, ou du mariage. Elle était à des années lumières de toutes ces considérations, et cela ne lui manquait pas. Elle n'avait jamais été sérieuse en amour. Elle n'était sérieuse que dans son emploi. Pour le reste, elle se laissait vivre, sans vraiment se posait de question. Contrairement à la majorité des hommes elle avait compris que le véritable bonheur n'était pas sur terre, mais dans les cieux.

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