Tout avait commencé un soir de déprime. Je ne sais pour quelle raison, j’étais venu parler à Alee sur Facebook. Pourtant, je ne le connaissais ni d’Adam ni d’Eve, mais j’avais envie de changer d’air et de parler à quelqu’un d’inconnu, certainement. Il ne le savait pas non plus, mais il était venu à se confier à moi le soir-même alors qu’il n’avait pas l’habitude de le faire. Bizarre comme situation. Les prises de tête du jour m’agaçaient sérieusement et je me voyais très mal rester chez moi ou aller l’université en trouvant la force d’ignorer ces évènements. Alors je préférais fuir, loin de Paris, loin de chez moi et de ceux qui étaient censés être mes proches. J’avais bouclé ma valise à la fin d’une conversation trop agaçante à mes yeux et avais roulé jusqu’à l’aéroport Paris Orly, les nerfs particulièrement à vif. J’avais balancé un statut froid sur le réseau social histoire d’informer que je partais. Maintenant il ne me restait plus qu’une destination à choisir. Je discutais en même temps avec Alee, toujours par portable, quand celui-ci me proposa de le rejoindre à Londres. Londres, c’était une ville sublime, et Alee était réellement sympathique, ce type avait un bon fond. Et en plus de ça il était particulièrement mignon. J’acceptais rapidement sa proposition et le rejoignais à Londres où je passai la semaine entière avec lui. Semaine peu chargée, mais semaine mouvementée. Des baisers s’étaient échangés et mon caractère, étant du genre à m’attacher trop vite, avait fait son travail. Des baisers mais aussi des disputes, des disputes toutes aussi crétines les unes que les autres.

Malgré ces disputes je m’étais attaché à ce mec, à ce petit anglais qui voulait passer pour un dur à cuire et qui possède un caractère de cochon parfois mais qui malgré tout n’en reste pas moins doté d’un cœur en or sous une légère carapace qu’il suffit de soulever. En une simple semaine, il avait déjà fait beaucoup, et je pensais lui avoir apporté quelque chose aussi. Le sentiment de servir à quelque chose dans ce bas monde, et profiter loin des soucis. C’était comme se retrouver dans une nouvelle sphère, être dans une bulle le temps d’une semaine et oublier tout ce qui avait pu précéder. C’est pourquoi, en revenant en France je cru ressentir un certain manque. Je me retrouvais seul dans mon appartement parisien, je retrouvais certes mes anciennes marques mais en perdais de nouvelles. J’étais trop habitué à la compagnie d’Alee désormais. Mais il fallait que je reprenne mes habitudes. Cependant, Alee m’avait tellement bien accueilli la semaine passée, ainsi que sa famille, que je me sentais redevable. Je lui proposais de passer chez moi et de manger le soir à la maison. Je me sentais redevable, mais j’avais aussi énormément envie de revoir sa petite bouille. Il acceptait d’ailleurs ma proposition assez rapidement, à mon plus grand plaisir. J’allais devoir me mettre aux fourneaux et faire le ménage, mais c’était pour la bonne cause. Douche, cuisine, ménage, cuisine, et encore cuisine, déco, et puis finalement cuisine, fut mon programme de la journée en résumé. J’attendais impatiemment qu’Alee arrive, et je rigolais aux quelques messages que nous échangions par portable. Je n’étais pas angoissé, mais j’avais terriblement hâte qu’il arrive pour que nous passions un bout de soirée ensemble. Que le temps m'avait paru long depuis mon retour, depuis que j'étais parti du paradis londonien.

j'ai quelque chose à te dire

Assis bien au fond de mon canapé, je regardais Shaggy. Elle roupillait sur le tapis, comme à sa grande habitude. Je souris, mon portable vibre. C’est encore lui, Aaron, il arrivait bientôt. Mon sourire s’élargie encore plus. Je remercie encore Facebook et je me demande si ce n’est pas un pseudo-site de rencontre. C’est sur ce social network, comme on dit chez nous, que je suis tombé sur Aaron. Il déprimait et moi, avec ma joie de vivre qui commençait tout de même à disparaitre, j’essayais de le réconforter. Tout est allé très vite, même peut-être trop vite. Le soir même, je lui proposais de me rejoindre ici, à Londres. Je ne l’avais jamais vu auparavant, et lui non vite. On a rapidement accroché. J’étais rentré au pays parce que j’étais pommé. Ouais, totalement pommé puis j’avais besoin de me ressourcer, auprès des miens. Certes, j’avais laissé Elyon en France mais j’allais revenir, je lui ai promis. Mes problèmes avec Niels ne faisaient que se détériorer mais j’arrivais peu à peu à l’oublier dans les bras d’Elyon. La semaine fut parfaite, mouvementée même. J’étais attiré par Aaron, je ne le cache pas. On avait même échangés quelques baisers, sincères qui plus est. Non, je n’ai rien dit à Elyon et je ne compte pas le faire.

De retour à Paris, je ne fais que penser à lui, je me sens coupable envers Elyon. J’ai l’impression d’être tiraillé entre elle et Aaron, comme si j’étais amoureux de deux personnes en même temps. Il y a quelques temps je vous aurai dit qu’il est impossible d’être fortement attiré par deux personnes à la fois, maintenant que je vis ça, je n’arriverai plus à le dire. En fait il faut vivre les choses avant de s’en servir comme conseil. Il était tant que je le réalise quand même. Je marche dans Paris, ça fait plusieurs jours qu’on s’envoie des textos, et ça fait aussi plusieurs jours que j’hésite à en parler à Elyon. Je me doute qu’elle va mal réagir, je ferai pareil à sa place mais je pense qu’elle comprendra, enfin j’espère … Les mains au fond des poches, je rentre chez moi. Un bol d’air, ça ne fait jamais de mal. Aaron m’a invité à manger chez lui ce soir, j’ai hâte bizarrement.

La journée tombe vite, je commence déjà à me préparer. Tout frais sorti de la douche, je construis mon éternelle banane. Au début, je mettais au moins dix minutes avant que ça ressemble à quelque chose, maintenant en quelques minutes c’est bouclé. Mes cheveux prennent la forme comme il faut, zéro problème. Serviette autour de la taille, je m’enfouis dans mon immense dressing. Je passe une chemine blanche que je ferme jusqu’au dernier trou, un jean un peu slim et une paire de mes éternelles vans. Un coup d’œil vite fait dans la glace, je me dis que ça suffit. Je passe vite fait faire un bisou à Shaggy qui roupille encore sur le tapis et je prends mes clés de voiture. Descente rapide des escaliers, je roule un peu trop vite jusqu’à l’avenue Foch dans le XVIe. Je tourne pendant un bon moment avant de trouver enfin une place de parking, payante pardi. C’est Paname ici, faut pas trop lui en demander non plus ! Je pousse la porte de son immeuble, le cœur emballé. Je prends mon temps pour monter les escaliers, histoire de pas arriver essoufflé en haut. J’aurai l’air idiot. Hophophop, je me retrouve devant sa porte. Je toque parce que tout le monde pose ses doigts sur les sonnettes.

J’étais assis sur mon canapé, ailleurs. Les souvenirs du voyage à Londres remontaient à mon esprit, et rien qu’à y penser je ne pouvais que sourire. Sourire comme un niais était ma spécialité ces temps-ci. On m’avait tellement bien accueilli à Londres, autant Alee que je ne connaissais pas encore à l’époque, que Cudy et Derek : ses parents adoptifs. Cudy semblait être attentionnée auprès de tout le monde, beaucoup plus que ne l’était ma mère finalement, bien que je l’adore. C’était complètement dingue. En bref, un climat chaleureux qui m’avait manqué pendant longtemps. Le genre de climat auquel j’avais aspiré pendant de longues années. Le vibreur de mon portable résonna à nouveau dans le silence de mon appartement, ce qui me ramena à la réalité. Jolie réalité. J’allais revoir Alee ce soir, et j’en étais bien plus qu’heureux. Ce genre de sentiment qu’on ne devrait pas ressentir pour un simple ami m’envahissait. Etait-ce mal ? J’avais le sentiment que ça l’était, comme c’était irraisonnable d’embrasser Alee pendant le voyage. Qu’est-ce qui m’avait pris ? Aucune idée, mais c’était le même sentiment qui m’avait envahi ce soir. Une terrible soif de le voir que je voulais apaiser, presque un besoin au final. J’avais tendance à trop vite m’attacher aux gens qui m’entouraient dès lors qu’ils étaient sympathiques. Une fois le lien créé, difficile de m’en détacher. Ce soir, je ne faillissais pas à la règle et réalisais à quel point je m’étais déjà attaché à ce garçon. Un soupir de désolation traversa mon abdomen en un éclair, mais mon sourire repris vite le contrôle. Un énième message d’Alee apparu sur mon portable, comme un tour de magie. J’aimais la magie, la magie de la vie, la magie de l’amour. Ce fut à ce moment que je me suis demandé si j’étais en train de littéralement succomber aux charmes d’Alee. Je me sentais particulièrement fautif, sachant pertinemment qu’Alee a des sentiments pour Elyon et que justement ceux-ci risquent d’être réciproques. Il m’avait également parlé de Jade, et la seule impression que j’avais était un sentiment de malaise. J’avais le sentiment de m’incruster et finalement de rendre la situation encore plus compliquée qu’elle ne l’était déjà pour Alee. Mais je revoyais encore les petits regards qu’il m’adressait dans sa chambre londonienne, le genre de regards qui vous ferait succomber en un quart de seconde, le genre de regard auquel je ne pouvais pas résister, pas de sa part. Mon sentiment de malaise semblait s’envoler, s’évaporer. Rien qu’à y penser, je rougissais à nouveau.

Je répondais à son message, un petit sourire malicieux pendu sur mes lèvres et regardais l’horloge accrochée dans mon salon. Le temps passait si lentement loin de lui, j’avais plus que hâte qu’il débarque désormais. Mes doigts tapotaient légèrement sur le canapé tandis que mes jambes se levaient. Je me dirigeai vers la cuisine pour vérifier la cuisson de mes petits plats. Je remplis la gamelle de Vodka, mon tendre Husky, et remodelais son coussin pour qu’il soit le plus à l’aise possible. Il ne fallait pas qu’il ne nous dérange en aboyant ou grognant. Je me rendais par la suite dans ma salle de bain, pour vérifier une énième fois mon apparence. Tout devait être parfait, pas un faux pas ne devait être fait. Le bruit d’une paume de main résonna contre ma porte, mon cœur s’emballa à vitesse grand V. C’était sûrement Alee. J’accourrai à la porte d’entrée et manquais de glisser. Une fois arrivé devant celle-ci, je vérifiais silencieusement dans l’œil qu’il s’agissait bien de mon invité, prenait une grande respiration et me recoiffais une dernière fois, et ouvrais la porte, ne sachant pas trop quelle expression faciale adopter. Finalement elle s’installa d’elle-même. Je souriais à Alee, toujours avec mon air de niais, et l’invitais à rentrer. « Tu vas bien ? Merci d’être venu. » J’avançais dans mon appartement parisien, dont j’étais plutôt fier d’ailleurs, l’invitant à s’installer comme s’il était chez lui. « Installe toi, fais comme tu veux, les plats sont presque prêts » Je lui souriais et m’affalais sur le canapé, calmement et l’air serein, attendant que le repas soit cuit et m’apprêtant à passer une soirée exquise.