C’est marrant, mais dès que j’ai vu Jared passer le pas de ma porte, j’étais certain qu’il allait être un bon avocat, comme son frère. Outre le fait que leur ressemblance physique est indéniable, il me fallut que quelques petites minutes pour comprendre que le petit gars en avait dans le ventre.
Je savais qui il était, son frère m’avait fait un bref topo de son frère chéri avant l’entretien, mais je ne voulais pas qu’il pense que par le fait qu’il porte le nom de l’entreprise dont il ne fait pas encore parti sa place lui était dû. En plus, j’avais eu l’accord de Zac pour torturer – dans la limite du raisonnable – son petit frère adoré. Et j’avoue m’en être donné à cœur joie. Seulement le premier mois. Je l’ai fait un peu trimer comme mon propre mentor l’avait fait avec moi. Photocopie, mission café et autres tâches ingrates, je lui ai tout fait faire. Et je voyais bien qu’il m’en voulait. Il m’en voulait de gâcher ses capacités. Et il n’avait pas tort sur ce point. Alors j’ai commencé à lui poser des questions juridiques – je me prenais un peu pour Julien Lepers – et je voyais qu’il répondait bien, qu’il avait ce petit truc qui pourrait faire de lui un bon avocat. Trouver la faille dans un dossier est notre gagne-pain, et Jared l’avait déjà bien compris.
Avec le temps, mon masque de père fouettard - je n’étais pas commode dans le cadre du travail, je l’avoue – tombait avec Jared. Disons qu’il était tout le temps dans mes pattes – ce qui ne me dérangeait le moins du monde – alors forcément, je ne pouvais pas garder cet air rigide tout le temps. Et, je ne sais pas pourquoi, j’ai la vague impression qu’un truc se passe entre nous. Je sais que ça peut paraitre complètement fou, mais il y avait un truc qui m’était impossible de définir très exactement. J’espérais juste que ce ne soit pas de l’ordre des sentiments – ou autres envies peu catholiques.



J’avais un trac pas possible ce jour-là. C’était stupide parce que je me trouvais quand même chez Lewis&Johnson, j’étais presque comme chez moi… en théorie. J’avais gentiment demandé à mon cher frère de me réserver une place d’assistant dans un de ses cabinets, celui basé en France plus particulièrement parce que plus intéressant pour mon projet professionnel. Et j’avais trouvé assez étrange que mon frère, lui si dur avec moi d’habitude, se soit contenté d’une simple réponse affirmative à ma demande. C’était sans compter sur son meilleur ami (voire son modèle) et associé Jaeden. Je m’étais senti agressé par son simple regard. Ses prunelles sombres paraissaient me transpercer de part en part. J’étais déstabilisé mais je tentais de garder la face devant ce mec empli de charisme et d’un je-ne-sais-quoi de complètement déroutant.
Je ne pensais pas vraiment avoir la place que je convoitais, d’autant plus que je fus cantonner à la place de bonne à tout faire pendant les premières semaines. Mais comme un miracle, presque du jour au lendemain, ce fut comme un changement de statut pour moi. Je passais de coursier à élève en fac de droit. Et puis plus le temps passait, plus je prenais réellement part aux dossiers. Je commençais à me sentir chez moi dans ces bureaux, et il ne me tardait qu’une chose : décrocher mon diplôme d’avocat.
Mais pour le moment, j’étais là, à observer et surtout, à apprendre. En plus, j’avais la chance de bien m’entendre avec Jaeden, ce qui rendait le travail plus agréable. Sa compagnie me devint peut-être un peu trop agréable. C’était franchement bizarre. Il suffisait qu’il passe le pas de la porte pour qu’un nœud se forme au creux de mon estomac. Je voulais me surpasser juste pour l’impressionner, même un tout petit peu. Et puis… je me suis surpris plus d’une fois à le regarder, à tenter de deviner les courbes de son corps à travers ses vêtements. Et à chaque fois, mon cœur s’emballait, le sang me montait à la tête et je me sentais rougir. J’avais peur qu’il ne me voit. J’avais peur qu’il m’attrape sur le fait car s’il me demandait ce que j’étais en train de faire, je ne pourrais lui donner d’explications car je ne comprenais pas moi-même ce que je faisais.