Il n’était rien de plus que cette noirceur qui tapissait les murs de la demeure. Rien de plus que cette odeur amère qui embaumait le grenier. Il n’était pas plus présent que le vase de porcelaine qui habillait le coin de la cheminée. Ni plus remarquable que la rose rouge qui sommeillait sur sa commode. Il n’était que cette sinistre silhouette qui habitait les lieux. Que cette ombre vivace qui fuyait le jour. Il n’était que le fils de. Il n’était que l’enfant qui. Il n’était qu’un nom. Qu’une entité abstraite. Qu’un visage parmi tant d'autre. Qu’un corps sans vie. Il n’était que cette mélodie qui serpentait le long des couloirs. Que ce souffle qui chatouillait le papier paint. Que ces vieux mégots de cigarette qui croupissaient au fond de la cave. Il n’était que ce jeune adolescent appuyé contre la fenêtre de sa chambre. Il n’était que ce regard perdu dans le vide. Il n’était que cette pensée noire qui s’égarait dans son esprit. Il n’était que le reflet de lui-même. Le reflet de quelqu’un qui ne savait plus comment voir le monde. Ni comment le découvrir. Ni comment l’apprécier. Il ne faisait qu’être là. Statique. Inerte. Comme l’immense Peuplier qui profilait au milieu du parc. Comme les galets blancs qui ornaient l’aquarium du séjour. Et il ne faisait que rêver. Rêver d’un ailleurs. Rêver d’un quelconque univers. D’une quelconque planète. Là où peut-être il pourrait s’échapper. Ne serait-ce que quelques secondes. Que quelques minutes. Jusqu’à ce que la réalité reprenne le dessus. Jusqu’à ce qu’elle le noie dans ses illusions. Jusqu’à ce qu’elle l’emporte dans son tourbillon. Jusqu’à ce qu’elle l’étouffe avec ses mensonges. Jusqu’à ce qu’elle lui redonne cet étrange goût de doute. D'incertitude.

▷ J'ai cru, enfant, qu'en regardant le ciel pendant des heures, mes yeux deviendraient bleus.
Armand Lubin Delorme naît le 09 Octobre 1988 à Valréas, dans le Vaucluse (84), sur le sol Français. Il est le fils d'Audrey Delorme et d'un pédophile anonyme, ainsi que le frère aîné de _. Il passe son enfance à Visan, dans une petite ferme aux portes du Village, mais emménage à Paris peu de temps avant son entrée au lycée.

« Il y avait ma grand-mère, ma grand-mère et son sourire, ma grand-mère et ses longs cheveux grisonnant, ma grand-mère et son éternel regard inquiet. Il y avait mon oncle, mon oncle et ses idéaux révolutionnaires, son verre de vin blanc à la main, et son fauteuil en cuir. Il y avait la vieille fermette, avec sa grande cheminée, son papier pain dégarni, sa petite baignoire, son étang, ses meubles imposants, son poulailler en ruine. Il y avait mon cousin, Baptiste, et son rire débile, ses sautes d’humeur constantes, et son incroyable talent pour s'attirer des ennuis. Il y avait Visan, à sept kilomètres à peine de chez ma mère, et dont la beauté semblait se voiler toujours plus au fil des années. Il y avait le tabac de Mr. Marceau, au bout de la rue principale qui longeait le centre. Il y avait l'école primaire, un peu plus haut. Il y avait les ruines de la Tour, le parc, le bar. Les innombrables pigeons de la grande place. Les innombrables minutes qui défilaient sur le cadrant centrale de la pharmacie. Les innombrables bisous des vieilles dames. Les innombrables sourires des habitants. (Un temps). Il y avait les frasques avec mes amis, les quelques paires de claque de mon grand-père, l’indifférence de ma mère. Il y avait les anniversaires, les nouvels ans, les dîners de famille, les fêtes de Noël, les cadeaux. Il y avait les Dimanches après-midi à jouer dans le petit bois, les étés au bord de la rivière, les hivers à somnoler près de la Cheminée, les automnes à sauter dans les tas de feuilles mortes, les printemps à cueillir des fleurs. Il y avait la découverte de Paris. L'entrée au lycée. Les premières clopes, les premiers joints. Les bulletins de notes, les punitions, les heures de colle, les nerfs qui lâchent, les éclats de rire. Les premiers amours, les premières déceptions. Les découvertes. Les remises en question. La joie. La haine. La tristesse. L’excitation. La souffrance. L’impatience. (Un temps) J'en ai des milliers, des souvenirs comme ça. (Un temps) Des souvenirs qu’au final, je n’ai fait que détester depuis le début. »

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Grayson, Yannie, Ella, Lumen & Cheshire.