Durant de nombreuses années, j'ai vu la vie comme une malédiction, une punition de Dieu pour une erreur que j'aurais pu commettre un jour mais laquelle ? Quand un bébé vient de naître, ce n'est pas la personne la plus innocente de ce monde ? C'est ce que je pense, ce que j'ai pensé alors que durant des années, je me baladais de famille d'accueil en famille d'accueil. Des familles qui n'ont jamais été la mienne, trop occupé à boire ou à fumer.

Ma mère biologique est morte en me donnant naissance, quant à mon père je ne sais rien de lui. J'ignore tout jusqu'à la couleur de ses cheveux, jusqu'à son prénom ou encore s'il aimait ma mère ou non. Tout ce que je sais, c'est qu'au moment de ma naissance, j'étais seule ... Pour la première fois de ma vie, j'étais malgré mes quelques heures sans parents. Les parents de ma mère se sont occupés de moi durant quelques années, les cinq premières et la seule chose dont je me souvienne d'eux, c'était qu'ils m'aimaient même s'ils avaient demandé à ma mère d'avorter. Avec le recul, je trouve vraiment ignoble de dire cela à une enfant mais à l'époque j'ignorais encore la signification de ce mot.

Ma vie a été bouleversée alors que j'avais à peine 5 ans, quand à la sortie de l'école, une inconnue m'attendait. Bien entendu, je pleurais pour ne pas aller avec elle, alors elle parlait à ma maîtresse et est ensuite venue m'annoncer mon départ pour l'orphelinat. Au départ, je ne compris pas grand-chose et je posais des milliards de questions mais, jamais personne ne me répondait vraiment alors, je deviens silencieuse. L'orphelinat était devenue ma maison, mais je n'avais pas le sentiment d'avoir une famille comme il essayait de le montrer aux "futurs" parents. Je n'avais pas d'amis, non plus enfin si, j'en avais un. On s'est rencontré quand je suis arrivée et il est le seul qui m'est compris et qui soit venu me voir. Nous avons passé de nombreuses années ensemble, jusqu'à mon adoption 6 ans plus tard.



C'est à ce moment que ma vie a commencé sa course, de mes 11 à mes 18 ans, j'ai vécu dans une quinzaine de famille, aucune de m'aimait. J'étais libre, je faisais ce que je voulais, ce qui me passait par la tête. Les mauvaises notes, les garçons douteux, mes nuits passées en dehors de l'appartement, rien ne les faisait réagir. Ils fichaient tout bonnement de moi, de ce que je pouvais faire. J'étais simplement leur bonne action, ils avaient adopté, c'était des gens bien, point final. Et le pire, c'est que c'est ainsi que le voyaient les gens. C'était moi la méchante rebelle qui leur faisait vivent un enfer à toutes ses familles mais, pas eux qui me battaient ou m'insultaient.

Puis un jour, j'ai eu 18 ans et c'est à ce moment que je me suis sentie libre. J'ai pris mon sac, rapidement mis à l'intérieur mes affaires -qui n'étaient pas nombreuses- et j'ai claqué la porte. Je suis montée dans un train et j'ai choisi une ville au hasard, je dois bien l'avouer. Quoique qui n'a jamais rêvé de Paris ? La tour Eiffel ? L'avenue des Champs Elysées ?

Cela fait maintenant 4 ans que je vis à Paris, au départ la vie n'était pas facile mais j'ai rapidement trouvé un emploi de barman. J'avais déjà eu plusieurs jobs étudiants avant mais, jamais rien de très réaliste, c'était mes économies, je n'y touchais pas et en quelques mois ici tout avait disparu. J'aime mon travail, bien entendu j'aurais aimé faire de grandes études pour devenir avocate ou médecin mais au lieu de cela, je suis la psychologue de plusieurs habitués qui au final souffre simplement. Puis de monde ici connait mon histoire, je n'aime pas la raconter, j'ai le sentiment que les gens sont différents après, qu'ils ont pitié de moi et je n'aime pas cela. Je veux être aimé pour celle que je suis et non pour celle que j'étais. Aujourd'hui, je ne suis plus la pauvre petite fille qui souffre en silence, je profite de la vie simplement. Je fais ce que je veux, quand je le veux ... C'est ça la liberté !