Il avait été tellement facile pour Blackbird de partir que s’en était presque risible. Tellement facile de quitter définitivement le pays en laissant derrière elle tout ce qu’elle avait toujours connu: Son foyer, les quelques amis paumés qu’elle avait réussi a avoir lorsqu’elle était à l’école, son quartier, son boulot, la ville en général. Un billet d’avion et une unique valise en main qui réunissait toutes les affaires auxquelles elle tenait, Blackbird est partie, a déserté, juste pour une seule et unique personne. Il n’y avait pas beaucoup de gens qui peuvent vraiment se vanter d’avoir été aimé par la jeune femme…Parce que oui, il faut dire qu’elle n’aime pas grand monde! Disons qu’il faut vraiment lui taper dans l’œil, lui faire un effet incroyable pour que Blackbird se souvienne ou même s’intéresse. C’est exactement ce qui s’était passé, plus d’un an avant, avec Skeleton - ou Jack, qu'importe -. Leur rencontre avait été plus que mémorable et bon dieu, Blackbird avait tout de suite sût qu’il la ferait souffrir à un point inimaginable. Est-ce que ça l’a empêchée de tomber amoureuse? Absolument pas. C’est bien à cause de ses foutus sentiments qu’elle se retrouve aujourd’hui à Paris. Pour lui. Pour le retrouver. Pourtant, en son fort intérieur, la jeune femme sait qu’il ne veut peut-être pas être retrouvé…Avant de partir sans se retourner douze mois plus tôt, il lui avait bien demander de l’oublier.

Mais comment l’oublier?! C’est vraiment plus facile à dire qu’à faire! Et même si Blackbird a essayé au début, parce qu’elle était vraiment en colère contre lui de la laisser là et seule, eh bien elle n’avait pas réussi a le haïr plus de deux jours. L’amour dont elle est prisonnière l’étouffe parfois mais c’est également ce qui lui fixe un but bien précis. C'est ce qui l’as aidée à se lever chaque matin, ce qui lui a donné le courage d’aller bosser malgré sa maladie et d’économiser pour se payer son voyage. A ouais. Sa maladie. Cette saloperie est encore bel et bien là, dans tout son être et la bouffe jour après jour. Pourtant, Blackbird refuse d’y penser. Faire l’autruche et prétendre que tout va bien est une meilleure idée selon elle. Les drogues aident également à éloigner la souffrance qu‘elle endure parfois. C’est Skeleton qui l’y avait initiée, au début de leur relation et ça la soulageait déjà avant, puis encore plus lorsqu’il fut parti. Lui n’est pas au courant qu’elle est malade. Il trouverait sûrement ça débile, d’être mourante à son âge. Vingt quatre ans, c’est beaucoup trop jeune pour être à ce point fragile. Alors, par peur de moquerie ou de rejet, Blackbird n’a jamais rien dit ni sous entendu le fait qu’elle soit diminuée. Pour tous les autres, c’est une jeune femme normale -ou aussi normale qu’une fille ayant eu une enfance plutôt pourrie, qui se drogue et traîne avec des gens carrément bizarres! - qui est forte à sa manière. La danger, le fait d’être seule dans une grande ville comme Paris ne lui fait pas peur. Blackbird n’a pas peur de grand-chose, juste de ne pas retrouver Skeleton. Ça oui, c’est sa hantise. Elle a vécu sans lui pendant un an. Ça peut paraître court pour une personne normale…pas pour une personne amoureuse. Le temps s’écoulait tellement lentement que parfois, elle pensais devenir folle. Et, au moment même où elle a eu l’occasion de partir, de s’envoler pour cette destination rêvée, Blackbird n’a pas hésité.

Et la voilà aujourd’hui, dans la capitale française, alors qu’elle ne sait pas vraiment parler la langue, ni même comment vivre ici. Un petit papier coincé entre deux de ses doigts, petite fille perdue cherche son chemin jusqu’à l’adresse indiquée en noir, bien a l’abri au creux de sa main pâle. Arriver a avoir cette adresse relevait presque du miracle. Retrouver Skeleton avait pris du temps et énormément d’énergie, mais Blackbird y était arrivée. Le souffle court après avoir autant marché, la jeune femme s’arrête devant une porte. Sa porte. Nerveuse malgré tout, elle passe une main dans ses longs cheveux plus noirs que la nuit qui ont d’ailleurs inspiré l’idée de son nouveau prénom et inspire profondément. Frapper à une simple porte peut paraître anodin, mais pas pour quelqu’un qui a tout plaqué et risque d’être repoussé la seconde d’après. Même si elle connaît à peu près l’homme qu’elle aime, on est jamais sûrs de rien et Blackbird préfère de loin imaginer le pire pour ne pas être plus déçue et blessée qu’elle ne le sera si jamais elle se retrouve effectivement seule. Puis, prenant son courage à deux mains, elle serre le poing qui contient encore l’adresse et frappe trois grands coups. Son cœur bat tellement fort et vite que Blackbird à l’impression qu’il va transpercer sa cage thoracique pour aller se répandre sur le sol. Pourtant il ne fait que battre, c’est tout. Et alors qu’elle ne pensait pas qu’il pourrait s’emballer encore, plus ce fut le cas quand la fameuse porte s’ouvrit. Voir un homme tatoué de façon a ressembler a un squelette serait sûrement effrayant, mais pas pour Blackbird. Revoir ces tatouages lui donne envie de sourire, mais elle se contente de reculer d'un pas pour mieux le regarder.
"Salut. Ça faisait longtemps."